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Montaigu-en-Vendée
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la "Chronique de la Bernardière" par H. Boution (1895)

rappel : avant toute utilisation d'extraits ou d'illustrations de ces pages, vous devez en demander l'autorisation à leur auteur.

 

C O N T E N U   à   V E N I R

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C'est une petite paroisse de 1100 habitants, limitée au nord par la paroisse de Cugand, au midi par celle de Treize-Septiers, à l'est par celle de la Bruffière, et à l'ouest par celles de Saint-Hi!aîre-de-Loulay et de Saint-Hilaire-du-Bois.

Sa superficie est de l'est à l'ouest de 5 kilomètres de largeur et du nord au midi de 6 kilomètres de longueur.
Son sol est sur granit, bien cultivé et assez fertile en froment, seigle, sarrasin, millet, pommes de terre, etc.
Les vignes y sont peu nombreuses et ne fournissent, dit un chroniqueur, "qu'un petit vin breton peu fort, mais agréable au goût".
Les prairies peu étendues sont assez nombreuses et donnent un fourrage succulent. Elles sont traversées par quelques petits ruisseaux qui serpentent ça et là pour les fertiliser et récréer le voyageur. Le principal est le Mingot qui sert de limite à la paroisse entre Cugand, passe auprès du bourg de la Bernardière et va se jeter dans la Sèvre-Nantaise.
Jadis l'on disait la Bernardière-en-Forêts, mais depuis longtemps les bois ont disparu, et le terrain est divisé en champs nombreux, tous entourés de haies du sein desquelles s'élèvent une multitude de chênes que l'on ébranche tous les cinq ans pour faire du bois de chauffage.
Une route stratégique de Montaigu à Clisson traverse la commune au sud-est. Cette route, tracée, dit-on, pour favoriser le commerce des usines de Cugand, eut pour but principal de surveiller les hauts villages de la Bernardière, dont l'opinion royaliste fut, dans toutes nos révolutions, bien prononcée.
Depuis quelques années la Bernardière ne se trouve éloignée du chemin de fer de Clisson à Cholet que de deux petits kilomètres.
L'origine de la Bernardière est très obscure. On cimetière gallo-romain et les vestiges d'une voie romaine trouvés près la maison noble de la Pénissïère-de-la-Cour, feraient remonter cette localité avant Nôtre-Seigneur. César, allant de la Roche-sur-Yon à Nantes par Saint-Georges-de-Montaigu, aurait passé par cette antique voie[1].
Il est assez vraisemblable que le nom de Bernardiére vient de celui de Bernard, soit que dans le principe ce lieu fut la demeure d'un seigneur ainsi nommé, soit que des enfants de saint Bernard aient habité la solitude de ces anciennes forêts maintenant abattues. Une vieille chapelle monacale, avec deux arcades en ogive ouvertes sur le côté sud-est de l'église, annoncerait que des moines ont, en effet, sanctifié ces lieux. L'ogive des deux arcades désignées ne peut cependant remonter, d'après les principes d'architecture, qu'aux XIe ou XIIe siècles, et l'établissement du bourg doit être de beaucoup antérieur.
En 1864, lors de la reconstitution de la cure, on découvrit une vieille arcade souterraine du style du commencement du XIIIe siècle. Située à 60 mètres environ de l'ancienne église, elle introduisait à une enceinte souterraine creusée dans le roc. Cette enceinte pouvait avoir 20 mètres de superficie et se terminait en rond-point. Tout autour de ce lieu et à 60 mètres du cimetière paroissial, on trouva beaucoup d'ossements humains. Peut-être ce souterrain était-il le cimetière des religieux, leur caveau mortuaire. Ce qui porterait à le croire, c'est que ce caveau se trouvait du côté de la chapelle monacle, y laissant un facile accès.

Le bourg de la Bernardiêre, assez irrégulier, est placé à peu près au centre de la paroisse sur un petit plateau d'où la vue s'étend sur Cugand et les pays environnants. Il n'est distant de la petite ville de Clisson que de 4 kilomètres. Sa population est de 300 habitants, tous catholiques, Bretons par la fermeté et Vendéens par la vaillance. Avant le Concordat de 1801, la paroisse faisait partie du diocèse de Nantes. Sous le règne féodal, la Bernardiêre n'avait point de seigneur particulier et relevait du château de Clisson ; elle appartenait à la province de Bretagne et en suivait les lois et coutumes.
Saint Biaise, martyr, évêque de Sébaste, en Arménie, est le patron de l'église de la Bernardière, Les reliques de ce saint ayant été apportées en Occident durant les croisades, dit Godescard, au 2 février, son culte y devint célèbre. L'église et la chapelle monacale pourraient bien remonter à cette époque. Cette vieille chapelle est sous l'invocation de la Bienheureuse Vierge Marie. Avant son agrandissement, en 1858, l'église formait une croix de 33 mètres de longueur sur 9 mètres de largeur. La fabrique possède un reliquaire précieux, avec authentique, renfermant des reliques de sainte Ursule, de saint Augustin, de saint Prosper, de saint François de Sales, de sainte Modeste, de saint Natalis et de saint Victorien.
Le presbytère, au nord-ouest de l'église et y joignant par une petite cour, est une vieille maison de maître, sans grande apparence, mais avec toutes les aisances et servitudes désirables.[2]
La Bernardiêre n'offre qu'un pays couvert et où l'œil du voyageur ne peut s'étendre au loin ; l'on n'y trouve que de petits propriétaires cultivateurs vivant tranquillement du produit de leurs terres ; des métayers et quelques ouvriers tisserands, fabricants de toiles en coton. Grâce à l'amour du travail, les pauvres y sont rares et les moins aisés reçoivent un faible secours du produit d'une somme de 500 francs donnée à la commune par une personne charitable.

Pendant la Révolution, les habitants de la Bernardière se rangèrent sous la bannière des lys, sans exception bien connue. Ils combattirent sous les différents chefs, Charette, Stofflet, Sapinaud, les uns en Vendée, les autres en Bretagne. Beaucoup perdirent la vie pour la défense de la légitimité sur les différents champs de bataille, pendant que des forcenés et des traîtres voisins égorgeaient dans leurs foyers leurs femmes et leurs enfants, brûlaient et saccageaient leurs demeures.
Ce fut surtout pendant les années 1793 et 1794 que les habitants eurent beaucoup à souffrir. Des émissaires de la République, ayant leur résidence à Clisson ou à Montaigu, s'efforcèrent par tous les moyens de se rendre odieux. Ils commencèrent, dès 1791, par affermer une partie des biens de la cure et en vendirent une autre partie à un étranger qui finit par se ruiner en de folles entreprises. Ces biens ont été rachetés en partie.
Après avoir attaqué la religion dans ses ressources, ils s'en prirent à la maison du bon Dieu. L'église de la Bernardiére, avant la Révolution, d'après le récit des vieillards, était fort belle. Elle était magnifiquement ornée de sculptures et de peintures exécutées avec art. Le clocher, dont la masse pouvait avoir 15 mètres de hauteur, était surmonté d'une flèche très élancée couverte en ardoises et renfermait trois cloches aux sons harmonieux. Les ornements sacerdotaux étaient des plus riches et rappelaient la générosité de la noble famille Hallouin de la Pénissière. On conserve encore une croix de procession en argent, un encensoir et une navette en argent, dons de cette famille.
Dans les premiers mois de 1794, les révolutionnaires tombèrent sur le bourg, entassèrent de nombreux fagots de fournille et mirent le feu à la flèche de l'église. Consumée par le feu, la flèche tomba sur l'église et y porta les flammes. La charpente, tout le mobilier du sanctuaire et de la sacristie devinrent la proie de l'incendie. Il ne resta du beau monument que des murs calcinés, des colonnes, des pierres tombant en poussière ou brisant comme le verre. Les trois cloches se fondirent dans le brasier et c'est à peine si de leurs débris on a pu faire une de celles qui existent actuellement.
Quelque temps après ce triste événement, une nouvelle bande de partisans du désordre s'abattit sur le bourg. Epouvantés, les malheureux habitants abandonnèrent leurs demeures pour se retirer dans les broussailles et les genêts de la métairie de la Brangerais (commune de Cugand), sur le penchant et la cime du coteau, qui domine le bourg , de l'autre côté du ruisseau du Mingot.
Les révolutionnaires mirent le feu, ce jour-là, au presbytère ainsi qu'à plusieurs maisons du bourg, puis se retirèrent. Voyant le départ de leurs ennemi.-, les habitants sortirent de leur cachette et vinrent éteindre le feu. En démolissant le vieux presbytère, en 1864, on voyait encore les traces de cet incendie.
Tous les habitants néanmoins n'échappèrent pas aux mains des républicains. On lit en effet dans les registres paroissiaux de cette époque :

"Le 27 février 1794, les ennemis de la religion, de l'Etat et du roi, emmenèrent et fusillèrent à Clisson les personnes suivantes :
          Pierre Fonteneau, tisserand, âgé de 42 ans, époux en deuxième noce de Marie Bouchereau.
          Louis Mauvillain, âgé de 35 ans, époux de Marie Richard.
          René Mocquard, âgé de 40 ans, époux de Françoise Cléon.
          Joseph Douillard, tisserand, âgé de 34 ans, époux de Marie Loiret,
          Jean Coutaud, tisserand, âgé de 30 ans, époux de Françoise Baron,
          Jean Noult, âgé de 30 ans, époux de Perrine Mauvillain,
          Louis Mace, tisserand, âgé de 40 ans, époux de Marie Clénet.
          Pierre Défontaine, sabotier, âgé de 60 ans, veuf de Perrine Mouillé,
tous habitant le bourg, lia ont été inhumes au cimetière de l'hôpital de Clisson par Jean Bouchet, tisserand, et René Paquereau, journalier à Clisson. Ils connaissaient les personnes ci-dessus désignées et savaient leurs noms. Ils en ont enterré aussi quatre autres dont ils ignoraient les noms, mais ils savaient qu'ils étaient de cette paroisse. Le même jour ils emmenèrent et tirèrent dans le chemin qui conduit à Clisson, Jeanne Maigreau, âgée de 37 ans, femme de Jacques Boitchereau, et la massacrèrent. Elle fut enterrée à Cugand.
Ces faits sont notoires, dît M. Simon, recteur de la Bernardière, et ont été attestés par gens dignes de foi.
Le 19 mai 1794, 6 personnes, 7 le 23 mai, 4 le 25 mai, 2 le 28 mai, furent encore massacrées et enterrées dans le cimetière. Parmi ces victimes se trouvaient Marie Villain, Jeanne Villain et Jeanne Poiron, âgée de 37 ans, femme de Pierre Duret, laboureur, de Saint-Hilaire-de-Loulay, morte des suites de blessures reçues des ennemis."

A la pacification de 1794, après la chute de Robespierre, les habitants, hommes, femmes et enfants, s'empressèrent de réparer un peu leur église et le presbytère.

"Il était beau et touchant, dit le chroniqueur, de voir ce peuple, son pasteur en tête, apporter les uns des pierres, les autres des poutres, des chevrons pour en faire don au bon Dieu, et travaillant chacun selon sa capacité et ses forces avec un zèle et une entente dignes de tout éloge. La joie universelle était entrecoupée de soupirs et de sanglots, à la vue et à la pensée des désastres et des profanations sacrilèges, ainsi qu'au souvenir douloureux d'un père, d'une mère, d'un frère, d'une sœur, d'un enfant martyrisés pour leur foi. Mais une prière récitée avec ferveur sur leur tombe récemment fermée, ou au pied de la croix du cimetière renversée par des mains sacrilèges et récemment relevée, puisait pour eux dans le cœur de Jésus de l'espérance et de la vraie consolation."

En 1795, le registre paroissial est coté et paraphé par Jacques Forestier, commissaire général pour le Roi dans l'armée du Centre, 1er janvier 1795, l'an 3 du règne de Louis XVII.

"Du mois de septembre 1797 à 1800, à la deuxième pacification, les fidèles eurent la douleur d'être de nouveau privés de leurs cérémonies publiques, et de voir leurs prêtres obligés encore de se cacher. Mais pendant ce temps on n'eut à déplorer aucun désastre important."

En 1800, les prêtres de la Bernardière purent enfin reprendre l'exercice de leur saint ministère à la grande joie des paroissiens.

En 1815 et en 1832, on vit encore les habitants de la Bernardière manifester hautement leurs opinions légitimistes et au premier signal du soulèvement saisir leurs vieux fusils. Nous ne pouvons ici passer sous silence un fait d'armes qui a retenti dans toute l'Europe et qui illustrera à jamais cette paroisse vendéenne-bretonne. Au petit château de la Pénissière, caché dans les bois et éloigné de tous les grands chemins, le 6 juin 1832, au moment où les royalistes faisaient sur plusieurs points des tentatives plus hardies qu'heureuses, quarante-cinq chouans, presque tous jeunes gens de familles, se réunirent dans le but de se porter sur Cugand et la Bruffière pour désarmer la garde nationale : ils combattirent la journée tout entière et, sous la conduite de trois frères, dont deux anciens officiers de la garde royale, au son d'une petite musique militaire, contre plus de mille soldats Leurs décharges continuelles d'espingoles jonchèrent plus d'une fois de cadavres la cour et les prairies du château. Quarante-cinq voltigeurs du 29e et deux gendarmes arrivèrent d'abord, sous la conduite d'un adjudant-major; celui-ci, voyant que son détachement n'était pas assez fort pour cerner l'habitation défendue par un mur de clôture, dépêcha un gendarme qui revînt avec un détachement de 90 hommes, suivi d'un autre de 40 soldats : on commença l'attaque, mais le mur extérieur fut bientôt abandonné et les chouans se retirèrent dans l'habitation, dont ils barricadèrent les portes. Alors, ils se distribuèrent au rez-de-chaussée et au premier étage, placèrent à chacun de ces étages un clairon qui ne cessa de jouer pendant tout le combat, et commencèrent par les fenêtres un feu très vif et très habilement dirigé. Deux fois, les soldats arrivèrent jusqu'à vingt pas du château, deux fois ils furent repoussés. Laissons un ennemi lui-même (le général Dermoncour), mais franc et loyal, faire le récit de ce brillant fait d'armes. Ses paroles ne peuvent être soupçonnées d'exagération, puisqu'il était dans le camp opposé aux royalistes :

"Sur le soir, les soldats, voyant que les Vendéens ne tiraient que sur trois faces de la maison, s'aperçoivent qu'elle n'est point percée du côté sud-ouest ; à l'instant, quatre hommes, aidés d'un maçon, se saisissent d'une échelle, arrivent inaperçus jusqu'au toit et y mettent le feu ; bientôt, l'incendie se propage et force est aux intrépides assiégés de céder à la fumée qui les suffoque, aux flammes qui vont les envelopper. Les soldats, à cette vue, poussent de grands cris et se précipitent vers la petite citadelle qui semblait avoir arboré un étendard de feu. Les chefs des chouans ordonnent à ceux qui se trouvaient au rez-de-chaussée de monter au premier : le plancher est aussitôt mis à jour et décarrelé, de sorte qu'au moment où les soldats se précipitent dans l'intérieur, ils furent accueillis par une fusillade à bout portant dirigée par eux, à travers les entre-deux des poutres : force leur fut de se retirer et les chouans accompagnèrent leur retraite d'un redoublement de musique et des cris de 'Vive Henri V'. Le chef de bataillon ordonna de faire pour le rez-de-chaussée ce que l'on avait fait pour le grenier : en conséquence, les soldats s'avancèrent armés de torches enflammées et de bois sec, et, dans un instant, les chouans se trouvèrent avec le feu sous les pieds et sur la tête. Leur position était affreuse ! Ils prirent un parti désespéré ; ils résolurent de faire une sortie : huit s'offrirent à rester pour protéger la retraite de leurs frères et occuper les soldats. Des deux anciens officiers, l'un commandait la garnison restante, l'autre la sortie. Leur retraite fut saluée d'une salve générale de mousqueterie qui leur tua deux hommes : un troisième, blessé à mort, alla expirer auprès de la haie. Le clairon, qui marchait en tête, reçut trois balles et continua cependant de jouer. Il est fâcheux qu'on n'ose, dit le généra! Dermoncour, faire connaître le nom de pareils hommes. Cependant, dans le château, tout était en feu : les huit hommes qui s'y trouvaient se retirent dans un enfoncement au moment où le plancher tomba avec un bruit affreux ! Un calme succéda et les soldats crurent que la garnison était écrasée dans les décombres... Cette erreur la sauva... La nuit survint et, se glissant comme des ombres, les huit chouans rejoignirent sains et saufs leurs camarades, à la faveur des dernières lueurs de l'incendie."

Si les noms de ces braves sont presque tous inconnus, l'histoire enregistrera au moins le nom des deux anciens officiers de la garde royale qui commandaient cette vaillante garnison : MM. de Girardin. L'un d'eux succomba, et c'est pour ce brave et ses compagnons d'armes que se célèbre tous les ans, le 6 juin, dans l'église de la Bernardière, un service solennel auquel assistent les amis des victimes.
Les curieux qui, depuis quinze ans, sont venus en foule, de tous les coins clé l'Europe, visiter ce lieu célèbre, ont été d'autant plus étonnés de la longue résistance des chouans, que la Pénissière, loin d'être un château fortifié et environné de douves, n'est qu'une petite gentilhommerie dominée de toutes parts, appelée aujourd'hui la Pénissière-Brûlée.

 

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ETAT NOMINATIF

DES 

CURÉS, VICAIRES ET AUTRES PRÊTRES

DE LA BERNARD1ÈRE

avec notes extraites des registres paroissiaux


1623. — René BABOIN, recteur.

1626. — Jacques GABORIT, recteur. — Vicaires : 1626, Adraud; 1627, J. Genêt; 1637, Blouin ; autre prêtre : 1635-1678, Richard.

1639. — 1663. — René GABORIT, recteur. — Vicaire : Hervoit.

1662. — Georges Arnaud, docteur en théologie, vicaire général de Monseigneur l'Illustrissime et Révérendissime Gabriel de Beauveau, par la grâce de Dieu et du Saint-Siège apostolique, évêque de Nantes ; à MM. les doyens, chapitres, recteurs, prieurs et autres ecclésiastiques de ce diocèse, salut. Nos seigneurs les prélats de France ayant à l'instance de Sa Majesté et de la Reine son épouse, ordonné par la déclaration de l'assemblée générale, à Paris, du sixième jour de mars i66r, que la feste du bienheureux Joseph serait solennisée et gardée à l'avenir dans l'étendue de ce royaume , Nous conformant aux lettres patentes de Sa Majesté données à Paris, le douzième du même mois de mars, et aux ordres exprès de Monseigneur, nous enjoignons à chacun de vous d'indiquer à l'avenir au peuple qui vous est confié, à l'endroit du prône des grandes messes, la dicte feste de saint Joseph pour être célébrée dans ce diocèse par !a cessation du travail et l'assistance à la sainte Messe.

1643 — 1671. — Olivier FOUCAULT, recteur.

1671 — 1673- — NAYRIDO, recteur.

1673 — 1692, — René MONGIN, recteur.

Après avoir administré la paroisse de la Bernardière pendant vingt ans, il y mourut le 1er novembre 1692 et y fut ensépulturé.
Vicaires: 1683, Bouchereau ; 1684-1694, Brunelïère. Ce dernier, originaire de la Bernardière, devînt curé de Notre-Dame-de-Mont, en 1694, et de Saint-Hilaire-de-Loulay, en 1697.
1683. — Visite de messire Antoine Binet, archidiacre, abbé de la Melleraye. A cette époque, l'église de la Bernardière était consacrée. La fête anniversaire de sa dédicace avait lieu le jour de la Saint Barnabé. Elle comprenait trois autels : de saint Biaise, de saint Jean et du Rosaire, et jouissait d'un revenu de 1500 livres. Une chapelle, dite de la Pénissière, et à la nomination du seigneur dudit lieu , avait un revenu de 100 livres. La confrérie du Rosaire était établie dans la paroisse et avait un revenu de 7 livres 5 sous, avec les offrandes et les oblations.

1693 — 1728. — Guillaume LE CERF, recteur. —

On raconte de ce bon curé qu'un jour il aila au-devant de son évêque avec ses paroissiens qui, sur son ordre, s'étaient tous munis d'un brin d'herbe qu'ils portaient à la bouche, Arrivé auprès de Sa Grandeur, il l'aborda en ces termes : "Monseigneur, voyez quel peuple vous m'avez confié, ils mangent tous de l'herbe." Le prélat, ajoute la tradition, ne trouva pas la plaisanterie de bon aloi et punit sévèrement l'original recteur. Peut-être le châtiment consista-t-il dans un exil de quelques années. Ce qui porterait à le croire, c'est que M. Le Cerf disparut de sa paroisse en 1700 et n'y reparut qu'en 1709. Il mourut à la Bernardière, en 1728, à l'âge de 78 ans. Ses vicaires furent : 1695, Pavageau ; 1700-1714, J. Clénet ; 1703-1709, R. Roger ; 1714-1715, J. Nerrière ; 1725-1729, J. Brillaud.
D'après un pouillé manuscrit du commencement du XVIIIe siècle, le pape et l'évêque, chacun dans leurs mois de vacances, alternis mensibus, nommaient alors à la cure de la Bernardière, dont le revenu était de 1200 livres.

1729 — 1731. — Antoine-Toussaint LACERON, recteur. —

Vicaire : 1730-1731, F. Fretaud. Messire Laceron quitta la cure de la Bernardière pour celle de Chanteloup, en 1731, ou plutôt il permuta avec le curé dudit lieu ainsi que le constate l'acte suivant :

Ad futuram rei memoriam
"Sachent tous présents et à venir que le jour d'aujourd'hui, 10 du mois de juin 1731, vénérable et discret Nerrière cy-devant recteur de la paroisse de Chanteloup, diocèse de Rennes et distante de ladite ville de ..... lieues, après avoir possédé ladite cure
de Chanteloup depuis le 4 avril 1718, avec la permission de Rome et le consentement de messire Antoine-Toussaint Laceron, ancien recteur de cette paroisse, âgé de 41 ans 4 mois, né le 4 mars 1690, a pris possession de cette paroisse. Par le moyen de cette permutation les deux recteurs qui se trouvaient un peu loin de leur païs s'en sont rapprochés, Nerrière étant natif de la Bernardière (ou de Cugand) et ledit Laceron de la ville de Rennes où demeurent actuellement son père et sa mère."

1731. — Jaunet, religieux cordelier, fait plusieurs actes.

1731 — 1737. — Jean NERRIÈRE, recteur. Il mourut à la Bernardière, à l'âge de 46 ans, et fut inhumé dans l'église le 14 février 1737.

Vicaires : 1731-1736. Guillaume Dulong, prêtre hibernoïs; Gaultier, prêtre intérimaire ; 1736-1737, Givette ; 1737, P. Launay, vice-gérant.

"Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, je, soussigné, Jacquette Clénet, fille âgée d'environ soixante et sept ans, demeurant au bourg de la Bernardière, considérant qu'il n'y a rien de plus certain que la mort, et rien de plus incertain que l'heure oùt elle doit arriver, pour n'être pas surprise sans avoir disposé pour la gloire de Dieu et le salut de mon âme des biens qu'il a plu à la divine Bonté me donner, je fais présentement et en pleine santé mon testament cl ordonnance de dernière volonté, en la manière qui suit :
Premièrement je recommande mon âme à Dieu mon Créateur, le priant de me faire miséricorde par les mérites de la mort et Passion de mon Sauveur Jésus-Christ, par l'intercession de la sainte Vierge, de mon bon ange gardien, de saint Jacques, mon patron et de tous les saints et saintes du Paradis.
Je fonde et lègue à perpétuité !a somme de huit livres de rente à fabrique de la Bernardière pour être employée et suppléer, avec la somme de quinze livres douze sols qui a déjà été léguée ci-devant par des particuliers pour entretenir la lampe toujours ardente devant le Saint Sacrement dans l'église de la Bernardière, pour le payement de laquelle somme de huit livres de rente annuelle, j'affecte et hypothèque deux pièces de terre contenant chacune six boisselées on environ, appelées la Guiberde, situées proche du bourg de la Bernardière, joignant les deux d'un bout au grand chemin qui conduit du bourg à Clisson et il y a un petit chemin entre les deux, et il y en a une qui joint d'un bout au pré appelé le Prè-Seigneur, et l'autre aboutit à la pièce où conduit le petit chemin qui appartient à Jean Dronneau.
De plus je fonde a perpétuité une école pour les garçons dans la paroisse de la Bernardiere, dans laquelle on recevra pour rien tous les pauvres de ladite pa-« roisse, jugés par M. le recteur et les fa* « briqneurs, dans laquelle école on fera « apprendre à écrire et à lire en français et en latin et dans l'écriture de main et aussi on enseignera le latin à ceux qui le voudront apprendre, et sera le chapelain pourvu de ladite fondation obligé de faire toutes les semaines une fois le catéchisme à ses écoliers et leur apprendre leurs prières, et sera obligé de faire l'école deux fois le jour avant et après midi.
Pour la rétribution de ladite fondation j'assigne et ordonne la maison où je demeure présentement avec le jardin derrière y joignant, enclos de murailles et les logis aussi qui servent à mettre les bestiaux et le foin et la paille et autres commodités, avec la cour au devant, que j'apprécie à la somme de quarante livres annuelles.
J'entends donner la maison où je demeure, comme elle est, c'est-à-dire les hautes et basses chambres, sellier et cave, à la réserve de la buanderie on il y a une petite cour au derrière, dit logis où est le four et de la chambre au-dessus.
De plus encore je veux et ordonne pour la rétribution de ladite école, comme dit est ci-dessus, dix livres de rente annuelle sur un pré appelé le Pont-Paris, joignant d'un bout le chemin qui conduit au Pont et qui va à Cugand et d'un côté le ruisseau, d'autre côté le chemin qui va de la Bernardière à Clisson, et l'autre bout aux terres qui dépendent de la métairie de la Palaire.
La fondation sera en faveur du vicaire, s'il veut se charger du soin de faire les petites écoles, et en cas qu'il ne le voulut pas faire il sera pourvu et nommé à ladite fondation par celui qui sera chargé par Monseigneur de Nantes du soin des petites écoles du diocèse. Comme il se pourrait faire qu'il n'y eut point de vicaire à la Bernardière ou que M. le vicaire ne voulut point se donner la peine de faire les petites écoles et que MM. les supérieurs ne trouvassent point de maîtres d'école pour la Bernardière, toutes les choses que j'ai léguées et fondées pour les petites écoles, tourneront au profit de MM. de la communauté ecclésiastique de Saint-Clément de Nantes, et en jouiront, pourvu qu'à perpétuité, tous les dix ans, ils feront une mission qui durera un mois à la Bernardîère. Je prie les exécuteurs de mon testament de leur en donner une copie.
Signé ce jour, vingtième janvier mil sept cent vingt-huit.
Jacquette Clénet."

"Le dimanche, 15 janvier 1736, à la porte de l'église, après publication faite à la messe paroissiale, en présence des parents de la défunte qui consentent à ce que le testament ait son exécution et renoncent à jamais y contrevenir, le recteur et les fabriqueurs acceptent ce legs, messire Guillaume Dulang, prêtre hibernois et vicaire de la Bernardière, accepte pour lui et ses successeurs ladite fondation aux charges et conditions exprimées dans le testament.
Suivent de nombreuses signatures de paroissiens témoins de l'acceptation."

1737 — T759. — SlMON, recteur.

Il mourut en 1758, regretté de tous ses confrères qui assistèrent en grand nombre à sa sépulture.
Vicaires : 1737-1741, Boüet ; 1741-1742, J. Alliot ; 1742-1755, P. Hulin ; 1751-1759, Gilles-Victorin Simon.

1750, 2 octobre. — "Mgr l'évêque de Nantes, Pierre Mauclerc, a fait sa visite en notre église où se sont trouvées par son ordre les paroisses de Cugand et de Gètîgné, conduits par les vice-gérants en l'absence des recteurs exilés de leurs paroisses, en l'an 1741, par ordre du roy, à cause de leur révolte contre les décisions de l'Eglise. Le recteur en étole, le clergé et les vice-gérants des dites paroisses convoquées sans étole ayant été prendre ledit seigneur évêque au presbytère et l'ayant conduit sous le dais à l'entrée de l'église. Là revêtu de l'étole, lui a présente la croix à baiser, l'encens à bénir le goupillon, de l'eau bénite dont il s'est lui-même aspergé, et lui ayant donné trois coups d'encens, il fait un court compliment, l'a conduit au grand autel où le recteur ayant repris son étole qu'il avait quittée en présentant celle du seigneur évêque à l'entrée de l'église, a dit les versets et oraisons du pontificat récités en pareil cas. Le recteur ayant ensuite ouvert le tabernacle, atteint le saint ciboire, ôté le pavillon et l'évêque ayant donné la bénédiction du Saint-Sacrement, après les prières, oraisons et encensements accoutumés, a examiné le tabernacle et les vases sacrés qu'il a trouvés en bon état ; la messe avait été célébrée auparavant. On est ensuite allé professionnellement aux fonts-baptismaux et au cimetière et on n'a rien trouvé à redire. Au retour on a lu les brevets des trois paroisses, on a fait prêter le serinent aux témoins synodaux, on a donné la confirmation et après la cérémonie, les recteurs en étole ont conduit, avec le clergé le seigneur évêque au presbytère où il a interrogé lui seul lex dix témoins synodaux et après le dîner on est parti pour Vallet.
                    SIMON, recteur."

1751. — Hoc anno frons Ecclesiœ œdificata est.
1752. — Hoc anno, chorus, laquear, ohelïscus œdificata sunt et marmorettin aquœ sacræ vas, sacerque baptismi fons collocatum.
1750 (38 mars.) — Vénérable et discret messire Jean Vinet, prêtre, ancien recteur du Palais, décédé à l'Emérière, paroisse de la Bernardière, à l'âge de 68 ans, est enterré dans le cimetière.
Signent : Clemenceau, prêtre, Droriallière, prêtre, Simon, sous-diacre.

1759 — 1806. — Gilles-Victorin SlMON, recteur. Était neveu du précédent.

Vicaires : 1759-1763, Aubron ; 1673-1774, Gaborieau ; 1774-1780, Bataille ; 1780-1783, Barthélémy ; 1783-1791, J.-B. Dominger de de Mayracq.
1776(27 juin). —Mgr Jean-Augustin Frétât de Sarra, évèque de Nantes, vient visiter la paroisse de la Beniardière et appose sa signature sur les registres paroissiaux.
1787 (24 avril}. — Noble maître Jean-Baptiste Bureau, avocat et procureur fiscal de Clisson, se marie avec demoiselle Julienne Lorette, fille d'un greffier en chef de Chateaubriand et de Marie Simon.
1792 — Le registre de cette année fut rompu et jeté au vent, deux feuilles seulement échappèrent.
1793 (16 septembre). — "Ce jour-là des ennemis de la Religion, de l'Etat et du Roi, s'étant emparés de la ville de Montaigu, et le jour suivant, dix-sept, de celle de Clisson, il fallut prendre la fuite." Simon, recteur de la Bernardière.

1807 — 1819. — REGAIN, curé.

1824. — BÉRIEAU, curé.
            Jacques VÉNÉRI, curé.

"M. Véneri eut beaucoup de tracas au sujet d'une école de charité existant à !a Bernardière depuis un siècle. Le conseil municipal s'était emparé des bâtiments légués par testament d'une demoiselle Jacquette Clénet, comme nous l'avons vu. Le zélé pasteur essaya, mais en vain, de faire valoir ses droits. Il dut avoir recours au Préfet, le 25 janvier 1835, mais il quitta la paroisse avant d'avoir gagné sa cause.
Ce fut vers 1833 que M. Véneri confia l'école des garçons à un frère de Saint-Gabriel, de Saint-Laurent-sur-Sèvre.
Voici la liste des Frères qui, jusqu'à ce jour, ont instruit les habitants de la Bernardîère :

1833 — 1835. — Frère Jean-Baptiste.
1835 — 1839. — Frère Éléonore.
1839 — 1841. — Frère René.
1841 — 1847. — Frère Philippe.
1847 — 1851. — Frère Antoine.
1851 — 1853. — Frère Exupére.
1853 — 1856. — Frère Paphnuce.
1856 — 1858. — Frère Bernardin.
1850 — 1868. — Frère Garembert. — Pieux et instruit, ce cher Frère a fait beaucoup de bien à la Bernardière. Il a emporté les regrets de la paroisse à son départ.
1868 — 1879. — Frère Martinien. — "Je suis heureux de constater avec vérité, dit son curé, qu'il mérite notre reconnaissance et notre estime à tous égards. Son zèle ne connaît pas de bornes, pour l'instruction et la surveillance des enfants, comme pour la formation de leur esjirit et de leur cœur aux vertus chrétiennes. Sa régularité, ses vertus religieuses, son esprit de pénitence, sa piété, méritent la plus grande admiration. Il sait unir à la fermeté l'affection la plus paternelle pour ses enfants qui, en retour, l'aiment sincèrement."
1870 — Frère François de Sales. Depuis, cette école a été laïcisée, au grand mécontentement des paroissiens.

1835 — 1837. — DENÉCHAUD, curé. —

Il eut a continuer la lutte de son prédécesseur contre le Conseil municipal et le Préfet, au sujet de l'école des garçons.

Le 9 septembre 1835, Il écrivit à Mgr de Luçon qui lui fit répondre que le vicariat étant supprimé, l'école revenait à la fabrique, et que c'était au curé à nommer l'instituteur. Le prélat l'engageait aussi à en appeler du Préfet au Conseil d'État. M. Denéchaud écrivit de nouveau à son évêque pour le prier de recourir lui-même au Conseil d'État, mais Mgr Soyer lui répondit que la seule marche à suivre c'était de faire une pétition au dit Conseil, signée par le curé de la paroisse et les fabriqueurs.
On consulta aussi, le 3 mars 1836, le journal des Conseils de fabriques, qui répondit qu'aux termes de l'arrêté du 28 frimaire an XII et de l'instruction ministérielle du 22 juillet 1807, la propriété léguée pour l'école devait être considérée comme propriété de la fabrique. D'ailleurs, il y avait plus de trente ans que la fabrique jouissait des revenus de cette propriété, par conséquent il y avait prescription. Sur une nouvelle consultation, le même journal répondit de s'adresser au Ministre des Cultes et à celui de l'Instruction publique.[3]
Le 6 mars 1836, M. Denéchaud avait écrit au Préfet qui lui fit répondre par son secrétaire , H. de Sainte- Hermine , que l'école avait été donnée à la commune et que c'était au Conseil municipal à l'administrer. Sur ce, il l'invite à verser dans la caisse du receveur municipal la somme provenant du loyer du local, et il regretterait qu'il se mît dans le cas d'y être contraint, Dans une lettre adressée à Lefort, instituteur privé de la Bernardière, qui s'était plaint de ne pas recevoir de traitement pour treize pauvres que la commune lui avait imposés, le même peu courtois secrétaire répondit que ce traitement n'était dû qu'à l'instituteur communal.
Le 27 juillet, M. Denéchaud, ne perdant pas courage, écrivit de nouveau au Préfet, qui lui répondit lui-même, avec politesse, que l'école appartenait à la commune, puisqu'il n'y avait pas de vicaire et que le vicaire ne pouvait pas être instituteur. Il terminait sa lettre en disant qu'il savait le curé animé de sentiments propres à prévenir dans sa paroisse toute difficulté ou discussion.

L'antique église de la Bernardière étant devenue trop petite pour la population et croulant de vétusté, M. Denéchaud songea à en taire construire une nouvelle. Il soumit son projet à Mgr Soyer qui l'approuva et il s'empressa de remplir toutes les autres formalités.
On commença à démolir au mois de mars 1841. M. Liberge, architecte distingué de la ville de Nantes, mena les travaux avec promptitude. Aussi, dès le 13 juillet 1841 eut lieu la bénédiction de la première pierre. M. l'abbé Lucet, supérieur des maisons religieuses de Chavagnes, délégué par Mgr Soyer, et accompagné du R. P. Baizé, supérieur du petit séminaire de Chavagnes, et de nombreux ecclésiastiques, vînt faire cette bénédiction. Le 14 décembre de la même année, M. Dénéchaud put bénir son église et y célébrer la sainte messe au milieu de ses paroissiens qui inondaient son cœur de joie par leur piété et leur ferveur, après avoir excité son admiration pour le zèle qu'ils avaient mis à dépenser leurs forces et leur argent à la construction de leur église.
Le bon curé est si content qu'il s'écrie : "La Providence ornera plus tard ce saint temple que nous tenons de sa bonté. »
En 1842, le il novembre, il établit un chemin de croix dans son église, fait donner une mission aux hommes et aux femmes par les PP. Coumailleau et Bethuys, missionnaires de Chavagnes. "Ces retraites ont un succès merveilleux", dit le curé.
Le 24 avril 1845, il reçoit la visite de Mgr Baillés ; aussi le 11 mars 1850.
Mission en 1850, prêchée par les PP. Coumailleau, Morin et Collineau. Il n'y a que six rebelles. On plante une croix au village des Portes. Elle est bénie par Pierre Gouraud, vicaire des Brouzils.
En 1851, jubilé semi-séculaire. A cette occasion, retraite de dix jours prêchée par M. Félix Besnard, curé-doyen de Sainte-Hermine, et Edouard Goubant, curé de Saint-André-Treize-Voies.
Mgr Bailles visite la Bernardière, le 15 avril 1853.
Bénédiction de croix au village de la Challoire, en 1852, à l'Oulerie. (M. Louis Albert bénit cette croix), et à la Pénissière. A cette bénédiction assistent M. Athanase Hallouin, Mlle des Dorides, son épouse, et Mlle Hallouin, deux anges de piété, dit le curé.
En 1857, M. Denéchaud, nommé à la cure de Saint-Juire-Chamgillon, permuta avec son successeur. Il avait gouverné la paroisse pendant vingt-deux ans avec un zèle rempli du plus grand dévouement. Outre l'église qu'il fit construire, il fonda une maison de religieuses tenue par les sœurs de Mormaison, en 1838.
Voici les noms des supérieures :
1838 à 1883. — Sœurs saint Ignace, saint Louis de Gonzague, saint Dominique, saint Cléophas, sainte Aurélie, sainte Anne, saint Placide (enterrée à la Bernardière), saint Similien, sainte Hélène de la Croix, saint Prosper."

M. Denéchaud est mort dans sa famille à Sainte-Hermine, le 20 novembre 1866. Le curé de la Bernardière s'empressa de célébrer un service pour le repos de son âme, le 11 décembre, service auquel assistèrent un très grand nombre de prêtres. Il y eut aussi un service anniversaire où les paroissiens, pour témoigner leur reconnaissance envers leur ancien curé, payèrent le luminaire, et communièrent en grand nombre.

1857 — 1888. — Augustin-Marie MOUILLÉ. —

A M. Etienne Denéchaud succéda comme curé de la Bernardière M. Augustin-Marie MOUILLÉ. M. Mouillé naquit à Cugand, le 13 décembre 1825. Ordonné prêtre, le 18 novembre 1849, il Fut successivement vicaire à Mouchamps (1849) et à la Bruffière (1853), puise Lire de Saint-Juire-Champgillon (1853).

"Il se donna corps et âme à cette paroisse pendant trois ans et huit mois.
M. Mouillé fut nommé à la cure de la Bernardière par Mgr François-Augustin Delamarre, le 19 février 1857. Il arriva dans sa nouvelle paroisse le 24 février, en la fête de saint Mathias, apôtre. Il fut reçu par les pieux habitants accourus en foule au bourg avec un respectueux enthousiasme, inspiré par leur foi et leur dévouement pour leurs prêtres qu'ils regardent comme les représentants de Jésus-Christ. Les membres des deux conseils de commune et de fabrique allèrent au-devant de lui jusqu'au bourg de Cugand, ayant à leur tête leur maire J. B. Picot qui pria M. le curé d'allumer un feu de joie. De là on se dirigea vers l'église où le nouveau pasteur adressa quelques mots à la foule nombreuse, commençant par ce texte "Pax vobis."

Les œuvres du nouveau curé dans cette paroisse furent nombreuses.
Le jour de l'Ascension 1857, il bénit une croix de granit élevée par la famille Albert Duplessis, .-UT la grande route de Montaigu, à 6 kilomètres du bourg.
L'an 1858, 2e dimanche de carême, il ouvre le jubilé accordé par Sa Sainteté Pie IX dans son allocution du 25 septembre 1857. M. le curé fait lui-même le prédicateur. Il prêche deux fois le dimanche et deux fois la semaine. Dieu comble de consolation le zélé pasteur, car presque la totalité des hommes , et toutes les femmes, excepté une étrangère, font leur jubilé.
L'an 1858, 13 septembre, il bénit un beau groupe de Notre-Dame de la Salette, œuvre de M. Vinelli, mouleur à Nantes, cadeau de plusieurs fidèles, et la place dans son église.
L'an 1858 enfin, le dimanche 26 décembre, il bénit deux croix, l'une sur le chemin de la Logerie, et l'autre près du village de l'Antrie.
Après avoir fait des démarches auprès des autorités, il réussit à faire ériger un vicariat à la Bernardière.
L'an 1859, le 23 décembre, il reçoit avec joie et bonheur le vicaire que Sa Grandeur lui envoie, M. Henri Baudry, ordonné le samedi des Quatre-Temps précédents. Depuis la Révolution de 1793 il n'y avait pas à la Bernardière de vicaire en titre, mais de temps en temps un prêtre auxiliaire qui avait des pouvoirs pour la paroisse.
L'an 1860 et le dimanche 26 août, il va bénir une croix au village de l'Emerière. Le prédécesseur de M. Mouillé avait laissé l'église inachevée et le clocher élevé de quelques mètres. M. Mouillé, sans aucunes ressources et avec beaucoup de difficultés, prolongea l'église de 2 mètres et bâtit le clocher et la flèche actuelle. 'Le bon Dieu a tout béni', dit le saint prêtre.
Le jeudi 3 février 1859, à la fête de saint Biaise, patron delà paroisse, eut lieu la bénédiction solennelle du clocher et de l'allonge de l'église. M, François Barreau, curé de Treize-Septiers, chanta la grand'messe, et M. Barbotîn, doyen de Montaigu, fit la bénédiction et prêcha.
Le 1er novembre 1860, il bénit une statue de saint Biaise, patron de la paroisse. Cette statue, œuvre de M. Hardy, artiste de Nantes, fut donnée par quelques âmes charitables ; cette statue en plâtre, d'un beau modèle, en rapport avec le style et les ornements de l'époque à laquelle vivait le saint. Il a la mitre sur la tète, à la main gauche un livre où est écrit ; 'Je suis votre modèle et votre protecteur.' La crosse est appuyée sur son bras gauche ; il bénit de la main droite.
Le 11 août 1861, M. le curé bénit une bannière, don des filles de la paroisse. D'un côté elle porte l'image de Marie Immaculée avec cette légende : 'Marie notre Mère' ; de l'autre elle porte l'image de sainte Geneviève, bergère, ayant autour d'elle quelques agneaux et filant sa quenouille, avec cette légende : 'Sainte Geneviève, priez pour nous', 
L'an 1861 et le 12e dimanche après la Pentecôte, il bénit un Christ placé, il y a 43 ans, dans l'ancienne église par le vénérable M. Regain, et qu'il a fait réparer. Après cette bénédiction on alla en procession au village des Portes bénir un arceau renfermant une statue de Notre-Dame de la Salette.
Le 15 août 1861, il bénit une statue de sainte Anne, une de l'Ange Gardien, et son frère l'abbé F. Mouillé bénit celle de saint Jean, et M. Henri Baudry, vicaire, bénit celle de saint Isidore, Ces stages sont sorties de l'atelier de M, Chérubini, mouleur à Nantes, et ont été données par les fidèles à l'occasion du mois de Marie.
En 1864, M. Mouillé s'occupe de la reconstruction de son presbytère.
Le 23 juillet 1865, suivant l'approbation écrite de Mgr Charles-Théodore Colet, évoque de Luçon, M. l'abbé Gabriel Gouraud, supérieur du grand séminaire, érige un chemin de la Croix dans l'église de la Bernardière, selon les formalités et cérémonies requises, en présence d'un nombreux clergé et de toute !a paroisse,
Le 5 février 1865, M. Mouillé avait érigé dans ?a paroisse la confrérie du Saint-Sacrement) selon l'ordonnance de Mgr l'Evê-que de Luçon du 24 janvier de la même année.
Le 3 décembre 1866, fête de saint François-Xavier, il érige la confrérie des Mères chrétiennes, qui doit fortifier, dit il, la congrégation des Enfants de .Marie.
En 1868, il établit l'association de l'Apostolat de la Prière et de la Communion réparatrice.
Le 15 août 1874, il fait la translation d'une relique insigne de saint Pie, martvr, qu'il s'était procurée auprès du T. R. P. Régis, représentant des Trappistes, à Rome, par i'entremise de la comtesse d'Héliam, née de Quatrebarbes.
En 1868, il fait faire le dallage de la nef de son église.
En 1869, des vitraux peints représentant les douze apôtres.
En 1870, au mois de janvier, il fait prêcher trois retraites, une aux hommes, une aux femmes et une aux filles, par les Pères Nerrières et Deslandes, missionnaires du Saint-Esprit.
CERCLE CATHOLIQUE. — Le 18 janvier 1874, il fonde un cercle catholique à la Bernardière avec l'approbation de Mgr Collet. Ce cercle, construit sur le terrain de la Fabrique et aux frais de M. le curé et de quelques amis, fut béni le 23 mars 1874.
Ce cercle est consacré à saint Joseph, patron et modèle des travailleurs.
En 1874, un des vifs désirs de M. Mouillé, nourri depuis longtemps et fécondé par de nombreuses prières, se réalise. Il obtient, par l'entremise de Mgr Baillés, alors à Rome, et de Mgr Gallot, camérîer de Sa Sainteté Pie IX et vendéen, un corps saint de la Sacrée Congrégation des Rites, celui de saint Urcisïn, martyrisé à Rome, à l'âge de 24 ans, dans les premiers siècles de l'Eglise

"La translation solennelle des précieuses reliques, présidée par Monseigneur l'Evêque de Luçon, a laissé dans la paroisse un impérissable souvenir.
L'an de Nôtre-Seigneur 1888 et le mardi 15 mai, à 5 heures du soir, après une vie tout entière consacrée à la gloire de Dieu et au salut des âmes, M. l'abbé Marie-Augustin Mouillé a rendu son âme à Dieu dans la communion de la sainte Eglise notre Mère, à l'âge de 62 ans et 6 mois. Pendant 32 ans il administra avec un zèle tout apostolique la paroisse de la Bemardière. Mortellement frappé au milieu des saints exercices de son ministère, il est tombé victime de son dévouement sacerdotal. 'Bonus pastor animant suam dat pro ovibus suis'. Il avait eu le bonheur avant de mourir d'être fortifié du sacrement d'Extrême-Onction par les mains de M. l'abbé Grélier, curé de Cugand. Sa dépouille mortelle a été inhumée, le vendredi 18 mai, dans le cimetière de la paroisse, au milieu d'un grand concours de prêtres (27 ont signé au registre de sépulture) et de fidèles en larmes."[4]

1888. — Auguste BONIN. —

M. l'abbé Mouillé a eu pour successeur, comme curé de la Bernardière, M. l'abbé Auguste Bonin. M. Bonin est né à Suint - Denis-la-Chevasse, le 20 février 1843. Ordonné prêtre le 7 novembre 1869, il a été vicaire d'Aizenay du 4 décembre 1869 au 11 août 1882. Mgr Catteau l'a nommé ensuite curé de Sainte-Avaugourd-des-Landes , doyenné des Moutiers-les-Mauxfaits. Il est resté dans ce poste jusqu'au 1er juin 1888, époque à laquelle il a été nommé curé de la Bernardière.

 

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VICAIRES DE LA BERNARDIERE
DEPUIS L'ÉRECTION DU VICARIAT


1859 — 1862. — Henri Baudry.
1862 — 1865. — Armand Salles.
1865 — 1870. — Eugène Sorin.
1870 — 1876. — Carteau.
1879— 1880. — Onésime Bouchereau.
1881. - Joseph Challet, mort à la Bernardière, le 12 janvier 1881, à l'âge de 25 ans.
1882 — 1885. — Dominique Nivault.
1888. — Hippolyte Erieau.
1890. — Henri Bretaudeau.


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VILLAGES DE LA BERNARDIÈRE


La Haute-Antrie, 46 habitants ; la Basse-Antrie, 24 habitants ; la Brunelière, 34 habitants ; la Chailloire, 40 habitants ; la Grande-Couperie, 16 habitants ; la Petite-Couperie, 35 habitants ; la Croix-Verte, 8 habitants; la Droulière, 15 habitants ; la Fusellerie, 31 habitants ; la Grande-Haye, 9 habitants ; la Petite-Haye, 19 habitants ; la Logerie, 110 habitants ; l'Emérière, 52 habitants ; la Noue, 16 habitants ; l'Oulerie, 75 habitants ; la Pénissière-de-la-Cour ; la Pénissiére-Vinet ; les Plessis, 33 habitants ; les Portes, 59 habitants ; le Racinet, 7 habitants ; la Rouvraie, 1 habitant ; le Tacret, 11 habitants.

 

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LA PÉNISSIERE


A deux kilomètres du bourg de la Bernardière, sur le bord du petit ruisseau appelé le Mingot et en remontant vers sa source, s'élevait encore, vers 1830, une antique gentilhommière entourée de deux enceintes de murailles avec deux métairies attenantes. Non loin de l'habitation principale on voyait une fuie et une chapelle dédiée à saint Louis, roi de France, où les habitants de la contrée venaient souvent en pèlerinage. Cette propriété appartint pendant plusieurs siècles et appartient encore de nos jours à la noble famille Hallouin de la Pénissière, si connue par sa générosité pour les œuvres, et par ses vertus chrétiennes portées jusqu'à l'héroïsme.
A notre grand regret nous ne pouvons donner la généalogie complète de cette intéressante famille. Puissent du moins les quelques notes que nous avons recueillies porter un amateur de généalogie à faire de plus sérieuses recherches !

1693. — Jean Hallouin, escuyer, seigneur de la Pénis-pièn: et sénéchal de Clisson, est dit époux de Marie Cornu. Ils ont deux enfants : César et Marie.
César Hallouin épousa Françoise Forget De ce mariage naquirent de nombreux enfants.
17!5- — Baptême de François-Armand-Charles Hallouin. Parrain : Armand-François de Bretaigne. Marraine : Charlotte Guerry de la Moulinière. Signent aux registres : Anne-Rosé Gaborit de Fortécuyére, Charlotte Charbonneau de Fortécuyère, De Chevigné, Emmanuel Hallouin, Pierre Hallouin.
1722. — Baptême de Claude-Marie Hallouin. Parrain : Jean-Baptiste Hallouin. Marraine : Claude-Marie Bœxon.
1723. — Baptême de Monique Hallouin.
1724. — Baptême de François Hallouîn.
1726 (12 avril). — Baptême de Françoise Hallouin.
1728. — Sépulture de Paul Hallouin.
1728 (9 juin). — Sépulture de Barbe Hallouin.
!733- — Messîre Jean-Baptiste Hallouin, prêtre de cette paroisse, fils d'écuyer César-Emmanuel, et de dame Françoise Forget, seigneur et dame de la Pénissière, après avoir travaillé avec zèle en qualité de vicaire, dans les paroisses d'Indre et de la Bruffière et édifié chacun par l'odeur d'une sainte vie, mourut, à la Pénissière la nuit d'entre le 2 et le 3 ce mois, âgé de 27 ans, et a été enterré, selon son désir, au pied de la croix de la mission dans notre cimetière ce quatorzième décembre 1733, en présence d'un grand concours de peuple et des prêtres soussignés ; la cérémonie de la sépulture faite par vénérable et discret messire René Joussaume, prêtre curé de la paroisse de Saint-Hilaire-du-Bois. Signent : J.-B. Blanchard, curé de Trestiers, P. Launay, prêtre, Fonteneau, prêtre, Billouard, prêtre de Treptier, P. Robin, prêtre, De Marsalac. curé de la Bruffière, J.-B. David, prêtre, vicaire de la Bruffière, E. Méchinaud, prêtre,. G. Brillaud, prêtre, Aubron, diacre.
1734 (30 mars). — Sépulture de demoiselle Claude Hallouin, âgée de 12 ans, en l'église, sous la grande arche d'icelîe, en présence d'écuyer César Emmanuel, son père, et de Françoise Forget, sa mère, seigneur et dame de la Pénissière-Gestin, et de Charles Hallouin, prêtre, son frère, Armand Hallouin, clerc tonsuré, et Athanase Hallouin, aussi ses frères, et d'un grand nombre d'autres.
1742. — Athanase Hallouin est dit époux de dame Marguerite Mabille et prend le titre d'écuyer et de seigneur de la Pénissière.
1743. — Baptême de Marie-Marguerite Hallouin, fille des précédents. Parrain : Messire Charles Hallouin, prêtre, chanoine de la collégiale de Notre-Dame de Clisson, oncle. Marraine : demoiselle Marie Mabille des Granges, tante. Signent : Françoise Hallouin, Louise Hallouin, Hallouin, recteur de la Haye-Fouassîère.
1757 (17 janvier). -- Mariage de Pierre Moreau, seigneur de la Musselière, fils de feu Pierre Moreau, seigneur de la Musselière et de dame Renée de la Porte, avec demoiselle Françoise Hallouin, fille d'écuyer César Emmanuel, présent et de feue dame Françoise Forget, en présence de : Marguerite Haltouin, Pierre Hallouin, chanoine de Clisson, Louise Hallouin, Athanase Hallouin, A. de Rorthays de la Pouplinière, P. Hallouin, prêtre, Hallouin, recteur de la Haye.
1760 (11 mars). — Sépulture de César Hallouin, seigneur de la Pénissière, âgé de 80 ans.
1764. — Baptême de Athanase Hallouin, fils de Athanase-Etienne et de dame Agathe-Félicité-Marie-Joséphine Geffray.
1786 (26 novembre). — Baptême de Hercule-Prudent Hallouin, fils des mêmes. Parrain: Prudent Geffray, avocat et aïeul. Marraine : demoiselle Marie-Marguerite Hallouin, tante.
1793 (30 octobre). — Pierre Hallouin de la Pénissière meurt dans la prison des Saintes-Claires à Nantes, à l'âge de 66 ans, le 9 brumaire an il. Il était le doyen de la collégiale de Clisson depuis le 9 janvier 1776. Son frère Charles, qui avait occupé avant lui ce poste, avait donné sa démission pour lui céder sa place. Ce vénérable prêtre avait été dispensé pour cause de santé de venir aux appela (5 avril 1792). On le trouve pour la première fois au château de Nantes où il fit sa déclaration ; transféré aux Carmélites et sur le navire La Thérèse, la commune l'autorisa, le 30 juillet 1793, à se faire soigner dans une maison de santé ; arrêté le 1er octobre 1793 par ordre de Goudet, président du comité de surveillance, il fut écroué aux Saintes-Claires et il y mourut.
1794 26 mai . — Sépulture clans la chapelle de la Pénissière de Athanase Hallouin, écuyer, âgé de 80 ans.
1803 (9 mai). — Athanase Hallouin, fils du précédent, est parrain à un baptême.
1813 (14 février). — Sépulture de M. François Hallouin âgé de S8 ans, veuf de défunte Marie-Louise Mourin.
1829 (7 janvier). — Sépulture de dame Agathe-Félicité-Marie-Joséphine Geffray, veuve d'écuyer Athanase-Etienne Hallouin, fille des feus Prudent-Marie Geffray du Plessis-Bel-Air, ancien juge des Regaires de Nantes, et île Anne Mansion, décédée le 5 dans la paroisse de Saint-Pierre de Nantes, en présence de M. Athanase Hallouin de la Pénissière, son fils, et de M. Pierre Retaillaud, curé de Saint-Hilaire-du-Bois.

 

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A P P E N D I C E

LE COMBAT DE LA PENISSIERE

d'après divers historiens

 

"Nous, maire de la commune de la Bernardière, canton do Montaigu, département de la Vendée, certifions à qui de droit qu'il s'est donné un combat entre les Libéraux et les Royalistes à la Pénissière-la-Cour, commune de la Bernardïère, le 6 juin 1832. Le parti libéral a remporté la victoire sur les royalistes après un combat de 6 heures. Les royalistes n'étaient qu'au nombre de 50 à 51, mais bien tous dévoués à leur cause, au lieu que les Libéraux étaient au nombre de 7 à 800 hommes. Les royalistes étaient renfermés dans le château, leur dernière ressource.
Les libéraux ont remporté la victoire sur eux après avoir mis le feu au château et avoir brûlé les deux métairies dépendantes.
Fait par nous, Maire de la Bernardière, le 7 juin 1832, le lendemain de la bataille."
                    (Document inédît.) Caillé, maire de la Bernardière.


"Le château de la Pénissière, qui désormais tiendra sa place dans l'histoire, comme tant de pauvres villages qu'un combat célèbre a tirés de leur obscurité, n'était plus depuis longtemps qu'un vieux manoir tout démantelé, presqu'une ruine. Il était si bien déchu de ses honneurs de castel féodal qu'on l'avait transformé en une paisible ferme. A peine le découvrait on au milieu des haies et des arbres touffus qui couvrent les bords de la Sèvre-nantaise et de la Maine. Se s murailles, lésardées par le temps, s'affaissaient à demi sous le poids de sa couverture".
                    (Théodore Muret)


"Quarante-deux royalistes du corps d'Auguste de la Rochejaquelein venaient le 5 juin chercher un abri contre l'orage dans cette masure à un seul étage, percée de quinze ouvertures de forme irrégulière et entourée par une prairie entrecoupée de haies vives, et que l'abondance des pluies avait transformée en lac.
Parmi eux en comptait cinq officiers de la garde royale ou de la ligne, des paysans, des jeune gens de toute condition, des séminaristes et quelques vieillards. Leurs noms ne doivent pas, ne peuvent pas être oubliées dans l'histoire de la Vendée militaire. Les quatre frères Eugène, Emmanuel, Victor et Egisthe de Girardin, Lévêque, Auclerc, Jamin, les trois frères Fouré, Aubry, Leclerc, Raffegeau, Molreuil, Joulin, père et fils, Mony, Augé, Juret, les deux Aubert, Bondu, Guinefolle, Thomasy, de Chevreuse, Bouleau, Jary, Touche, Monnier, Biandin, Ripoche, Gazeau, Martin, les deux François, et Guichard, composaient cette héroïque phalange. — Deniau (Guerre de la Vendée), ajoute les trois noms suivants : Beauchamp, Lecomte et Rousselot et dit que onze d'entre eux étaient des anciens élèves de Beaupreau.
Le nom des six derniers combattants s'est perdu même dans la mémoire de leurs compagnons de la Pénissière. La gloire passe si vite ! C'étaient des gens du pays, des laboureurs que le hasard avait le matin même conduits à ce manoir, et qui ne faisaient encore partie d'aucun corps d'année."
                    (Crétineau-Joly)


"Ils étaient là cinquante trois, cinquante-trois braves, les uns chefs, les autres soldats ; ou plutôt, non, tous étaient chefs et soldats à la fois, tous étaient frères et camarades. Comme dans la première guerre de la Vendée, où Lescure et La Rochejaquein avaient pour égaux de simples paysans dont ils serraient fraternellement la main, il n'était parmi les défenseurs de la Pénîssière qu'une seule distinction, celle que chacun s'efforcerait de mériter par son courage ; car dans toutes les guerres 
238 ARCHIVES DU DIOCÈSE DE L.UÇON
entreprises pour la cause royale, ce fut parmi les soutiens de cette cause qui, selon les révolutionnaires, étaient la cause de la noblesse et des privilèges, que l'égalité semblait avoir fixé son séjour.
Oh ! c'était un beau spectacle que celui de ces cinquante-trois hommes déterminés à mourir ! Il y avait là de pauvres paysans qu'un attachement héréditaire à leur foi politique et religieuse avait seul arrachés du sein de leurs travaux, lorsqu'il s'était agi de se rallier à la vieille bannière que la Vendée arrosa tant de fois de son sang. Il y avait des officiers et des soldats de la garde royale, de cette élite fidèle qui, au moment du départ de Rambouillet, brisait ses armes de désespoir, car on lui interdisait ce combat demandé avec tant d'ardeur. Près deux, on voyait aussi des jeunes gens qui, dans notre siècle égoïste et froid, avaient renoncé à tous les plaisirs que donne l'opulence, pour courir aux armes et braver la mort : et là, tous confondus, ils n'avaient qu'une seule pensée : combattre jusqu'à leur dernier soupir."
                    (Théodore Muret)


"Malgré son nom de château, la Pénissière, située dans la commune de la Bernardière, n'était qu'une simple gentilhommière fort irrégulièrement bâtie, se composant de quelques grandes chambres et de beaucoup de petites, avec deux escaliers, l'un assez large, placé en face de la porte d'entrée et conduisant du premier étage aux greniers.
C'est là que le mardi 5 juin, vers quatre heures du soir, quarante-deux légitimistes sous les armes vinrent chercher un abri contre une pluie torrentielle.. Leur intention était de prendre part au soulèvement et de se porter le lendemain sur Cugand pour y désarmer la garde nationale. Ils passèrent tranquillement la nuit du 5 au 6 juin dans le château, mais leur présence y avait été signalée au 29e de ligne, cantonné dans le voisinage, à Clisson, et ils s'apprêtaient à sortir du manoir, quand le cri : Aux armes ! retentit. C'étaient les rouges qui approchaient avec une supériorité numérique si considérable que les Vendéens durent se former à la défensive ; mais cette dépense est restée légendaire.....
Vers onze heures du matin, le combat ou, pour mieux dire, le siège commence.
Voilà les soldats de Louis-Philippe qui se développent autour des murs et des clôtures, occupent la chapelle, la grange, les maisons de ferme, et de tous ces points engagent une fusillade à laquelle les assiégés répondent vigoureusement. Un effectif de quarante-deux hommes, avec trois clairons de voltigeurs pour musique, une douzaine d'espingoles, des carabines avec leurs baïonnettes, des pistolets, des poignards, quelques sabres ; comme munitions quarante cartouches par homme et deux gargousses contenant dix livres de poudre, voilà les ressources des Vendéens pour lutter pendant neuf heures de suite contre plusieurs centaines de combattants. Ils ont placé à chacun des étages un clairon dont la fanfare retentira pendant tout le combat. Leurs plus habiles tireurs, embusqués derrière les quinze fenêtres, déchargent à chaque seconde sur les assiégeants les espingoles que leurs camarades rechargent avec une extrême promptitude, et que de main en main on se passe, pour ne pas laisser se ralentir le feu. Chaque espingole porte au moins vingt-cinq balles ; les Vendéens en tirent neuf ou dix à la fois ; on dirait une batterie chargée à mitraille. "Rendez-vous, brigands !" s'écrient les soldats de Louis-Philippe. "Vive Henri V !" répondent les assiégés. Deux fois les assiégeants sont arrivés jusqu'à vingt pas du château, deux fois ils ont été repoussés. Les Vendéens ont décarrelé le plancher des chambres hautes, et, le mettant à jour à coups de hache dans différents endroits, ont pratiqué quelques meurtrières et consolidé les barricades avec des meubles et des madriers. Mais voici un nouvel ennemi : l'incendie. Les assiégeants sont parvenus à percer le mur d'une grange faisant face à un pignon du château, pignon qui ne présente aucune ouverture, et que les assiégés avaient négligé de créneler ; ils ont donc pu s'en approcher, en se glissant le long de la ferme qui se trouve dans la cour. Une fois arrivés au mur, ils y ont appliqué une échelle, et, montant jusqu'au toit, ils ont jeté dans l'intérieur du grenier des matières enflammées et se sont retirés ensuite. Une colonne de fumée s'échappe du toit, au travers duquel la flamme se fait jour. Les clairons vendéens ne cessent pas de sonner.
On entend dans le lointain le bruit du tambour. Sont-ce des chouans qui arrivent pour secourir les assiégés ? Non, c'est un renfort considérable que reçoivent les assiégeants ; c'est le commandant Georges, du 29e de ligne, qui leur amène des troupes fraîches.
La fusillade devient de plus en plus nourrie. Les boiseries des fenêtres volent en éclats sous la grêle des balles qui frappent les murs. La fumée tourbillonne dans les chambres. Des craquements sourds annoncent que la toiture va s'effondrer. Il pleut ; les assiégés espéraient que la pluie éteindrait les flammes dans le grenier. Mais après l'incendie d'en haut, voici l'incendie d'en bas. Les assiégeants, prenant des fagots et de la paille au bout de leurs baïonnettes, sont parvenus à les jeter dans le château par une fenêtre du rez-de-chaussée, Cernés de toutes parts, ayant le feu sous leurs pieds et au-dessus de leurs têtes, les Vendéens comprennent que la prolongation de la résistance ne sera pas possible. Mais se rendront-ils ? Non. Pendant que leurs clairons sonnent toujours, ils se décident à faire une trouée. Avant d'exécuter cette résolution héroïque, un d'eux s'écrie : "Amis, après avoir combattu en braves, mourons en Vendéens ! A genoux !" Et tous, agenouillés, ils récitent le Miserere au milieu des flammes. Miserere mei, Deus, secundum magnam misericordiam tuam.
La grêle des balles redouble. L'incendie augmente de seconde en seconde ses ravages. Et secundiun multitudinetn miserationum tuarum dele iniquitatem meam.
Les solives craquent. La fumée, s'engouffrant par les fenêtres, est tellement épaisse qu'on se voit à peine. Ampliùs lava me ab iniquitate meâ, et à peccato meo munda me. Et ainsi de suite jusqu'à la fin du dernier verset.
Les hommes qui viennent de prier se relèvent. "Une trouée !" s'écrient-ils. Chefs en tête, ils descendent l'escalier, se serrant la main les uns les autres en signe d'adieu, car ils croient aller à la mort. Ils traversent une chambre complètement incendiée: puis, enfonçant la porte qui donne sur le jardin, ils s'élancent au pas de course, en bon ordre, clairons en tête. Dans cette sortie, cinq d'entre eux succombent : Mony, Gazeau, Leclerc, Jarry et Emmanuel de Girardin. Les autres traversent la prairie, franchissant, sous le feu des soldats et en ripostant, un torrent où ils ont de l'eau jusqu'à la ceinture, baignés de sueur et sortant d'une fournaise.
Enfin, après un quart d'heure de marche, ils cessent de se trouver sous le feu des soldats, qui négligent de les poursuivre, et, à la nuit, ils arrivent dans une ferme, où des soins leur sont prodigués par des paysans et un curé du voisinage. En pénétrant dans cette ferme, ils prient quelques jeunes villageois de se rendre sans armes au château de la Pénissière, afin de recueillir les blessés qu'ils trouveraient, et ceux des combattants qui se seraient égarés dans la retraite.
Le lendemain matin, les villageois, attendus avec impatience, arrivent vers les huit heures à la ferme. Ils y amènent avec eux les braves qui étaient restés au château et que leurs compagnons avaient crus perdus. Ces hommes, sauvés comme par miracle, sont au nombre de huit. Pendant que les solives en flammes craquaient de toutes parts, ils s'étaient retirés dans une espèce d'enfoncement formé par un retrait de mur, décidés à s'y défendre jusqu'à la dernière extrémité. Au même moment, le plancher était tombé avec un bruit affreux. Puis la fusillade avait cessé, les soldats de Louis-Philippe croyant que les derniers défenseurs du château venaient d'être écrasés dans les décombres.
Cette erreur les sauva. Ils se tinrent immobiles tandis que les assiégeants s'éloignaient avec répugnance d'un foyer qui dévorait à la fois amis et ennemis, vivants et morts. Et alors, à l'aide des ténèbres, les huit Vendéens se sont laissés glisser le long des murs. Ils sont sortis ainsi de la fournaise rouge et fumante où il ne restait plus que quelques cadavres éclairés par les dernières lueurs de l'incendie, et ils sont parvenus à rejoindre leurs camarades. On s'embrasse, mais on pleure, car il faut se séparer et l'on ne sait pas si l'on se reverra jamais, et les commissions militaires, les prisons vont réclamer les défenseurs du château de la Pénissière, les héros du suprême combat de la légitimité. "Adieu, disent-ils, adieu. et à des temps meilleurs !" Et pour la dernière fois ils jettent leur cri de guerre, le vieux cri des Vendéens : "Vive le roi !"
                    (Imbert de Saint-Amand — La Duchesse de Berry en Vendée)


"C'était le 5 juin 1832, quarante-cinq royalistes de la division d'Auguste de La Rochejaquelein, dont l'histoire doit buriner les noms, se trouvèrent attardés par un orage dans le manoir du la Pénissière, près Clisson. Leur présence y fut bientôt signalée au commandant Georges. qui occupait Clisson, et qui se disposa sur le champ à les entourer avec deux compagnies de grenadiers et une compagnie du 29e. Les quarante-cinq royalistes, avertis du danger qui les menace, n'en tiennent pas compte ; se fiant sur les secours des communes voisines qui sont prêtes à se soulever, et cédant du reste au besoin de repos qui les presse, ils prennent la résolution de d'attendre de pied ferme l'attaque dont ils sont menacés.
La nuit se passe sans aucune apparition de la troupe ; le 6 au matin, ils se préparaient à se remettre en route pour joindre leur corps d'armée, lorsque tout à coup un cri se fit entendre : "Aux armes !" et en même temps plusieurs coups tirés sur leur sentinelle leur annoncent la présence des soldats de Georges et des gardes nationaux qui arrivent à travers le bocage.
Sans perdre de temps, ils sont à leur poste de combat ; ils barricadent les portes et les croisées du manoir, et font des ouvertures dans ses murs. L'action s'engage. "Mort aux chouans !" crie-t-on d'un côté. "Vive Henri V !" répond-on de l'autre. Les soldats, qu'on a surexcités avec de l'eau-de-vie, se précipitent avec furie contre les blancs en poussant de nouveaux cris et des hurlements, et font une décharge générale de leurs fusils, mais ils sont repoussés avec perte.
"La Pénissière est une antique maison à un seul étage, percée de quinze ouvertures de grandeur inégale et irrégulière ; une chapelle ruinée en est séparée par un petit chemin. Il était difficile d'y forcer des hommes énergiques et courageux qui s'étaient juré de s'y défendre jusqu'à la mort. Les Philippistes, déconcertés par une résistance à laquelle ils ne s'attendaient pas, se retirent, mais excités par des gendarmes qui arrivent pour les soutenir, ils reviennent sur le manoir et s'emparent de la chapelle, des maisons des fermiers et des granges et se postant derrière les murs du jardin et de la cour, au-dessus desquels ils pratiquent des créneaux : la fusillade qui recommence, donne l'éveil aux cantonnements voisins des bleus, bientôt plusieurs compagnies avec des gardes nationaux arrivent au secours des soldats de Georges. Ils se reportent en avant pour forcer les royalistes. Les soldats sont de nouveau repoussés. Ils retournent une troisième fois à l'assaut. Leurs efforts sont encore impuissants ; chaque espingole des royalistes leur lance vingt-cinq belles à la fois, et à chaque seconde une espingole part. Les adroits tireurs sont blottis derrière les fenêtres, pendant que leurs camarades leur passent rapidement les armes chargées. Le gros des soldats ripostent de loin et criblent les fenêtres. La lutte devient acharnée. Les Philippistes arborent le drapeau noir et font entendre des cris de mort, mais les pertes sont de leur côté ; dix-neuf charrettes sont pleines de leurs morts et de leurs blessés, et aucun assiégé n'a encore succombé. Les soldats entrent en fureur. "Ce ne sont pas des hommes que nous avons à combattre, disent-ils, ce sont des diables". Les gardes nationaux, au lieu de soutenir les soldats, se tiennent prudemment à distance, l'arme au pied.
Cependant le commandant Georges veut en finir, il appelle de nouvelles forces à son secours, bientôt neuf cents troupiers enveloppent la Pénissière, des compagnies de voltigeurs sont disséminées dans la campagne pour repousser toute attaque du dehors. Les assiégés ne s'en effraient pas, ils s'excitent à se battre de plus en plus avec courage et crient constamment : "Vive Henri V !" Le clairon Monnier sonne la charge pour engager leurs amis qu'ils supposent en armes dans le voisinage, à venir les dégager.
Irrité d'une résistance à laquelle il ne s'attendait pas, et voulant débusquer les assiégés à tout prix, le commandant Georges ordonne de mettre le feu à plusieurs corps de servitudes, afin que les flammes se communiquent au principal corps du logis ; des sapeurs armés de leurs haches s'avancent en même temps avec une rare intrépidité pour défoncer les portes de ce bâtiment ; des grenadiers, favorisés par un pignon qui n'a pas d'ouvertures, et sous la protection du feu continuel des autres soldats, se glissent jusqu'aux croisées les plus basses, pendant que les tambours battent la charge. Sous leurs efforts combinés, les portes et les croisées du rez-de-chaussée menacent d'être forcées. Le commandant des blancs, Eugène de Girardin, craignant alors une lutte trop inégale si les volontaires sont obligés de lutter corps à corps avec les assaillants, fait monter tous ses hommes au premier étage et barricade fortement la porte qui y donne accès. Malgré leur rage, sapeurs et grenadiers ne peuvent enfoncer la porte principale. Les décharges meurtrières des assiégés les forcent, après des pertes fort sensibles, à se reporter de nouveau en arrière. Cependant, avant de se retirer, ils ont pu mettre le feu à une des fenêtres basses et à la porte qu'ils n'ont pu briser. Les flammes produisant des effets destructeurs et le cordon des assiégeants ne cessant de tirailler sur le manoir, la position des assiégés devient critique. On les somme de se rendre. Ils répondent par des cris encore plus enthousiastes de "Vive Henri V !" et continuent leur fusillade ; elle durait depuis cinq heures ; le feu donnait de plus en plus à la troupe des chances de succès ; voulant profiter de ses ravages, elle tente une nouvelle charge et se précipite du côté du jardin et de celui de la cour d'entrée. Elle est encore reçue à coup d'espingoles et de carabines qui tuent et qui blessent un grand nombre d'hommes. Cependant, malgré les feux continuels des assiégés, une compagnie de grenadiers parvient à enfoncer fa porte d'une salle basse, donnant sur le jardin; en même temps une compagnie du centre entrait dans ce même appartement par la croisée que les sapeurs venaient de briser. Cet appartement communiquait au grand escalier que les soldats se proposaient d'enlever, et cet escalier, une fois en leur possession, ils pouvaient pénétrer jusqu'aux chambres occupées par les royalistes. Déjà ils tentaient d'enfoncer la porte de communication lorsque des décharges, parties des meurtrières pratiquées au plafond, nettoient en un instant l'appartement occupé et le jonchent de morts et de blessés. D'autres décharges faites au dehors achèvent de réduire à un fort petit nombre la colonne envahissante. Les soldats de Georges sont de nouveau forcés de reculer et d'abandonner leurs blessés au milieu des flammes. Mais, enhardis par le progrès effrayant que faisaient ces flammes, ils retournent encore à la charge jusqu'à deux fois, mais toujours sans succès.
Ils avaient perdu déjà cent cinquante hommes, et les royalistes n'avaient que six blessés dont un seul hors de combat. Cependant la position de ces derniers n'était plus tenable, des brasiers ardents les entouraient et la fumée de l'incendie et de la poudre les suffoquait. Leur mort leur paraissait certaine. N'ayant pas pris de nourriture depuis vingt-quatre heures, et n'ayant ni vivre pour réparer leurs forces, ni eau pour étancher leur soif ardente, ils succombaient d'épuisement. C'était un spectacle digne des temps antiques. Il fallait prendre un parti. Eugène de Girardin, quoique blessé à la tête, aurait voulu prolonger la lutte jusqu'à la nuit afin de s'évader avec moins de danger ; mais il n'y avait plus moyen de différer. L'escalier par lequel ils devaient descendre brûlait déjà, il ordonne de se jeter au milieu de l'ennemi du côté du jardin. "Mourons, crie-t-il à ses volontaires, mourons pour Henri V." Les trente-quatre hommes qui l'entourent répètent avec amour ce cri de désespoir, et traversant deux appartements envahis par les flammes, ils se disposent à s'échapper par une porte sur laquelle l'ennemi faisait constamment converger ses feux. En colonne serrée, ils traversent rapidement le jardin, escaladent par une brèche son mur d'enceinte où sont embusqués des soldats qu'ils culbutent et se trouvent dans un pré entourés par deux cents soldats ; marchant toujours en avant et espérant de nouveaux prodiges de valeur, ils voient tomber sous leurs coups un officier et trente soldats[51], les balles semblent les respecter[6], Dans cette sortie, cinq royalistes seulement succombent, Mony, Gazeau, Lederc, Jarry et Emmanuel de Girardin.
Ce dernier est tué à côté de son frère Eugène. Se sentant atteint dans le dos, il se retourne vers celui qui l'a frappé : "Tu m'achèveras au moins," lui dit il en plein visage. Eugène de Girardin put s'échapper avec ses autres camarades ; un ruisseau qu'il traverse met fin à la poursuite des bleus[7].
Mais tout n'était pas fini; huit des assiégés qui se trouvaient à une extrémité du manoir et qui n'avaient pas eu connaissance de la sortie de leurs compagnons d'armes, continuaient toujours à faire feu contre les assiégeants et à les repousser. Cette résistance fait croire au commandant Georges que la sortie des trente-quatre Vendéens n'est qu'une ruse de guerre pour le détourner d'un assaut général, il néglige d'envoyer à leur poursuite, c'est ce qui sauva Eugène de Girardin et ses camarades, et leur permit de se retirer à Treize-Septiers.
Cependant, le manoir étant ouvert, les fantassins de Georges y pénètrent, mais pour y subir de nouvelles pertes.
Les huit royalistes qui y sont restés leur opposent toujours la résistance la plus héroïque. II faut laisser Lévêque, leur chef, en raconter lui-même toutes les péripéties.

"Trois soldats, dit-il, passèrent à côté de nous pour entrer dans la grande chambre sans se douter que nous fussions dans un enfoncement ; mais un quatrième, plus défiant, veut s'assurer s'il n'y a personne de caché dans le petit réduit qui nous abrite. Il tâte avec sa baïonnette et me la passe le long des reins; aussitôt il lâche son coup. Nous fonçons sur les quatre soldats, ils tombent morts. Nous montons aussitôt l'escalier qui conduit aux mansardes : c'est alors qu'en jetant les yeux par une ouverture, nous aperçûmes un officier occupé à faire porter les blessés à l'ambulance établie dans le chemin derrière la fuie aux pigeons, et à faire enlever les morts : un de nous l'ajuste, il tombe. A cette vue, des cris de : 'Mort aux brigands !' se font entendre avec encore plus de rage. Ce bruit retentit dans les escaliers, que les fantassins remplissent. Ils font sur eux une décharge presque à bout portant, et se précipitent ensuite en avant la baïonnette croisée ; mais deux coups d'espingoles chargées jusqu'à la gueule suffisent pour balayer l'escalier.
Après cette décharge, il ne nous restait que douze cartouches pour nous huit. Une seconde fois, les grenadiers se précipitent sur nous. Les malheureux soldats qui gravissent l'escalier périssent encore. Les cris des mourants et des combattants faisaient frémir."

Motreuil, dans ce moment de fureur, montra un sang-froid extraordinaire. Un soldat ayant gravi l'escalier rencontre ce séminariste et s'apprête à le tuer en proférant d'horribles blasphèmes. Motreuil le terrasse, le désarme et lui dit : "Je pourrais et devrais peut-être t'ôter la vie, mais, en le faisant, je t'enverrais en enfer : éloigne-toi et épargne-moi un remords.[8]"

"Le capitaine -qui commandait la troupe, continue Levêque, ne voyant pas revenir ses soldats, défendit de monter dans cet endroit dangereux, L'incendie n'allant pas assez vite à son gré, il ordonne de mettre le feu à vingt endroits différents La dernière partie, un bâtiment où nous nous étions retirés, devient la proie des flammes; elles nous cernent de toutes parts et nous font éprouver les plus cruelles souffrances.
Nous n'avions plus de cartouches, deux espingoles venaient de crever entre nos mains, le feu cessa forcément".

Il était neuf heures du soir : ces intrépides volontaires s'étaient battus depuis onze heures du matin. Le silence qui succède aux détonations, l'incendie qui paraît avoir tout consumé fait croire à Georges que tous les blancs sont ensevelis sous les débris du vieux manoir[9]. Il s'éloigne après avoir perdu près de deux cents hommes. Vers dix heures du soir, au moyen de leurs mouchoirs qu'ils lient ensemble, 1es huit royalistes s'échappent du milieu des ruines ; un cabinet pratiqué dans l'épaisseur d'une muraille les avait providentiellement préservés des flammes.
Ce fait d'armes a toujours été cité comme le plus beau de ces derniers temps ; quarante-cinq jeunes gens, dont la plupart étaient des paysans et des séminaristes, avaient tenu en échec et décimé douze ou quinze cents hommes aguerris et bien disciplinés. C'était comme un souvenir de la guerre des géants faite par leurs pères, et qui montrait de quoi eût été encore capable la Vendée s'il y avait eu plus d'entente parmi les chefs et si ses élans n'avaient pas été comprimés.
Le lendemain, les rouges vinrent inspecter les ruines qui devaient couvrir, pensaient-ils, un grand nombre des ennemis qu'ils avaient eu à combattre. Ils furent stupéfaits de n'y rencontrer aucun cadavre."
                    (DENIAU. — Histoire de la Vendée, T. VI)


"Le château de la Pénissière n'était qu'une vieille maison bourgeoise, mansardée, couverte en tuiles et percée de quinze ouvertures dispersées sans aucune symétrie. A la maison d'habitation était adossée la chapelle qui faisait face au midi et donnait sur un vaste jardin planté de vieux arbres. Au-dessus des fenêtres du jardin, s'élevaient les fenêtres du rez-de-chaussée, à une hauteur d'une douzaine de pieds. Au nord, un pré, formant vallon, couvert d'eau. A l'ouest, la cour principale, dont les murailles étaient hautes de 4 à 5 mètres ; cette cour était en communication avec la maison du fermier.
Dans le château, se tiennent, dans une attitude martiale, quarante hommes résolus, choisis entre les vaillants d'Israël, auxquels il faut ajouter une quinzaine de pauvres diables qui n'ont pas légué leur nom à la postérité, par la bonne raison qu'ils n'ont pu, faute de temps, ni se reconnaître ni reconnaître leurs compagnons de combat.
Le chef de la bande est un ex-officier de la garde royale, Eugène de Girardin. A ses côtés, se tiennent ses trois frères, Egisthe, Victor et Emmanuel, puis M. de Chevreuse, les trois Fouré, les Joulin, père et fils, les deux Aubert, les deux François, etc., peu de nobles, quelques séminaristes, surtout des paysans jeunes et vieux, qui, unis par les liens d'une étroite parenté, se sentent forts en se serrant les coudes Ils sont fiers de leurs fusils, et surtout caressant de la main de lourdes espingoles de cuivre qu'ils chargent, jusqu'à la gueule, de dix huit à vingt-cinq balles.
Après la première décharge de mousqueterie dont elle avait été saluée, la troupe de l'autorité, se voyant trop peu nombreuse pour opérer avantageusement, était restée au port d'armes, tout en se rafraîchissant. Arrive le renfort demandé, quarante-cinq hommes en un paquet. Désormais on peut prendre l'offensive... Il est environ onze heures quand on enfonce les portes d'une maison de fermier, en communication avec la cour, du côté de l'est, et qu'on commence les hostilités. Un garde national, tailleur de pierres de son métier, pratique une ouverture dans le mur d'un bâtiment servant de pressoir et la fusillade s'engage.
Neuf à dix espingoles, maniées par les plus habiles tireurs de la bande insurgée, crachent leur mitraille, et, le coup parti, sont passées aux camarades placés derrière qui les rechargent avec rapidité. La fusillade ne chôme pas. Au milieu des détonations qui se répondent, le clairon Monnier souffle l'ardeur aux siens et jette aux champs voisins un appel désespéré. Les soldats embusqués ripostent, mais leurs balles vont s'aplatir sur les murs, sans blesser personne. Honteux de cette infériorité, les plus hardis (et de ce nombre est Frise-Poulet) s'élancent et vont se loger dans la chapelle, distante du pressoir de sept mètres environ. Du chœur, par une fenêtre, ils observent les croisées du château qui font face. L'idée vient à Frise-Poulet, autrement dit à Charbonneau, de faire flamber les chouans. Elle est accueillie par des bravos. Le grenadier Pléchaud, d'un coup de crosse, fait voler la croisée du chœur en éclats, et, par là, on jette auprès des abat-vent du rez-de-chaussée, des fagots de fournilles et de genêts, qu'on transporte au bout des baïonnettes. Ensuite, en enflamme une pincée de poudre dans le bassinet d'un fusil, on y allume une poignée de filasse et Pléchand s'élance attacher la mèche incendiaire aux fagots. Sept balles lui transpercent les cuisses. Il tombe. Les camarades exaspérés sortent à leur tour. Les fagots flambent bientôt, aux applaudissements des militaires et des nationaux. L'incendie dévore le bois des fenêtres, de la porte, et la fumée qui entre par les ouvertures force les défenseurs à évacuer le rez-de-chaussée.
Il pouvait être alors entre trois et quatre heures, la face du combat change avec le commandant Georges, qui fait preuve, en cette occurrence, d'une grande célérité. A onze heures du matin, il fouillait Maisdon, s'emparait des munitions cachées dans la cure de ce lieu ; à trois heures et demie, il était de retour à Clisson. Là il apprend qu'on se bat à la Pénissiére, distante d'une lieue et demie. Le temps de faire déposer les sacs, de battre l'appel, et le bataillon s'élance au pas de course dans la direction de la fusillade. A quatre heures, ils avaient rejoint les combattants. Le commandant Georges avait alors sous sa main cinq à six cents hommes. Il prend ses positions de combat : il place, à l'arrière-garde, un peloton de militaires et de nationaux qu'il charge de veiller sur ses derrières, en même temps qu'ils garderont les blessés étendus sur de la paille et des couvertures, dans un hangar attenant à une maison de fermier, sise en dehors des murs d'enceinte. Puis la bataille recommence.
Le tambour bat la charge, les grenadiers s'élancent, poussant des hurrahs formidables : Mort aux brigands. Les partisans ripostent en criant : vive Madame, vive Henri V, vive la ligue, à mort les nationaux ! Le clairon Monnier répond par des sons stridents, d'une étonnante énergie, aux roulements du tambour ; la flamme qui crépite mêle son grondement au bruit général.
Les portes, les croisées sont mises en pièces, à coups de barres de fer, à coups de fusils tirés dans les serrures. La foule hurlante s'engouffre dans le rez-de-chaussée qu'elle trouve désert, quand entre les solives, par les intervalles du plancher décarrelé, les espingoles jettent le désordre dans la troupe des assaillants. Un caporal tombe mortellement frappé, plusieurs grenadiers sont blessés. Des cris de rage répondent aux cris de triomphe sauvages Encore une fois, la petite troupe recule. Mais on vient de découvrir une échelle, on l'applique au mur et un soldat, plus audacieux que ses compagnons, enlève plusieurs tuiles du toit et lance dans la charpente un brandon allumé.
Là encore, l'incendie se propage avec rapidité. Le feu sur la tête, le feu sous les pieds, la troupe de Girardin semble une troupe de diables qui se jouent dans une fournaise. Et le clairon, et le tambour, et l'incendie font rage. Malgré le feu des fenêtres, un peloton, composé de sept hommes, se risque dans le jardin. Aussitôt, quatre espingoles sont braquées sur les imprudents. Desnos, tambour de la garde nationale, a son bonnet de police traversé par une balle ; un officier un bouton de son habit emporté ; mais pas de mort à déplorer.
A la fin, la situation était devenue intolérable pour les assiégés : le feu prenait au plancher. Mieux valait risquer une sortie que d'attendre le moment où il faudrait périr dans le brasier. De Girardin confie à Lévêque le commandement de huit hommes qui resteront dans le château pour couvrir la retraite du reste de la bande. Les uns sautent dans le jardin, les autres dans la prairie du nord. A cet endroit, les fenêtres ont huit mètres de hauteur. Heureusement qu'un grand prunier élève ses branches presque à ce niveau. S'élancer sur une branche du prunier, s'abaisser avec elle, et, grâce à ce jeu de tremplin, dégringoler dans le pré sans se faire de mal, tel est le parti qu'embrasse la majorité. Une fois dans la prairie, on avait de l'eau jusqu'à mi-jambe De là, on gagnait un champ de genêt, où il était facile de disparaître. Déjà, une partie de la troupe s'était échappée en tapinois, sans rodomontade, par conséquent Monnier avait caché son clairon, bien que Crétineau-Joly le lui ai fait emboucher. Georges s'aperçoit de la fuite et donne l'ordre d'ouvrir une brèche dans le mur du jardin, pour surveiller la sortie. Emmanuel de Girardin, en ce moment, sautait du prunier. Plusieurs coups de feu l'étendent mort. Emmi, Mony, Gazeau, Leclerc, Jarry sont, les uns fusillés, les autres percés de baïonnettes au moment où ils essaient de s'enfuir. Un sergent beauceron, qui logeait chez les Gautret, se distingua par ce genre d'exploits.
A six heures et demie, arrive un nouveau renfort de cent hommes qui veulent prendre1 part à la chasse à l'homme, fouillent les taillis, tuent ceux qui font feu et. parmi eux, un nommé Douillard qui passait pour être chef de paysans.
Neuf heures. La nuit vient. Plus de cartouches, deux espingoles hors de service, Lévêque voit que toute résistance est désormais inutile : mais se rendre, jamais ! Au-dessus du château en flammes, l'orage gronde toujours. Partout la mort. Blottis dans l'angle d'une grande chambre, les huit abandonnés, qui se sont sacrifiés pour sauver leurs compagnons, attendent, frémissants d'impatience, l'heure fatale qui approche. Le toit embrasé éclate et s'abîme sur eux. Heureusement un pan de mur détourne l'avalanche de feu. La trouée qui vient de se faire leur donne un peu d'air frais ; il n'était que temps, la fumée commençait à les asphyxier, Le ciel, en même temps, fait ruisseler une pluie d'orage qui apaise la flamme autour d'eux. Bientôt ils ont découvert l'échelle abandonnée le long du mur de façade. Ils descendent. Lévêque veille et ne sort du manoir que le dernier. Ils s'en vont emportant, sur leurs fusils disposés en litière, un de leurs compagnons que la fièvre avait empêché de combattre. Et, au moment où Georges les croit ensevelis sous des monceaux de cendre, ils sont en lieu sûr.
Le lendemain, on fit des perquisitions dans le château abandonné. Sur un mur on put lire une inscription tracée au charbon : "Mort au traître de Z***" en toutes lettres. On découvrit des cachemires, des couverts d'argent, des espingoles, une soutane ; mais on ne mit la main sur un ancien partisan de la duchesse.
La victoire coûta à l'armée philippiste dix blessés et quatre morts. Il y a loin de ce chiffre restreint au chiffre fantaisiste de Crétîneau-Joly. Le nôtre est celui que le commandant Georges donne dans le rapport qu'il expédia au général Dermoncourt, à la date du 15 juin. A cette date c'est-à-dire huit jours après, la Pénissière brûlait encore..... On ne sait ce qu'on doit admirer le plus ou de l'acharnement de la défense, ou du courage déployé dans l'attaque."[10]
                    (Echos du Bocage Vendéen, 3e années, n°81, Dr Z).


"Telle fut cette journée sanglante et glorieuse, bien digne de clore cette grande épopée qui commence en 1793 et se termine en 1832. Ce fut, à proprement parler, la dernière bataille livrée pour la délense de la royauté légitime. La duchesse de Bcrrv pleura, en l'entendant raconter. La Vendée militaire sembla être descend ne dans la tombe avec Emmanuel de Girardin et ses valeureux compagnons.
Ils dorment, les braves, enveloppés dans les plis du drapeau bla.ic fleurdelisé ! ils dorment jusqu'au jour où se lèvera le chantre prédestiné qui doit les faire revivra !
En attendant, le temps accumule sur leurs noms son rayonnement et son prestige. Leur mémoire grandit, et c'est justice. L'histoire a immortalisé les Codés et les Léonidas. Quand on s'interroge, on ne voit pas bien ce que les Chouans de la Pénïssière pourraient envier à ces héros."
                    (Alcide LEROUX, Vendée militaire.)


"Aujourd'hui le vieux château de la Pénïssière subsiste encore ; son squelette noirci par la poudre et l'incendie ; ses murs d'enceinte, dont le crénelage irrégulier retrace parfaitement l'admirable résistance des héros assiégés, semblent des murs de cimetière au milieu duquel se trouve une sépulture de famille abandonnée. Rien de plus merveilleux, et pourtant rien de plus exact que le récit de cet immortel fait d'armes. Dans le champ qui fait partie de l'endos, on voit ça et là quelques tombes, dont la seule marque de distinction est une croix de bois, renouvelée par la piété des habitants. On ne peut se faire une idée de l'impression produite par ces lieux si féconds en souvenirs.
Je ne veux pas oublier de dire qu'en apprenant le combat de la Pénissière, les paysans des environs s'empressèrent de prendre les armes. MM. de N... et de C ., se mirent à leur tête et se portèrent en toute hâte au secours des braves assiégés ; mais au moment où ils allaient arriver près d'eux, on leur annonça que les troupes venaient de se retirer, croyant avoir englouti les Vendéens dans une fournaise ardente."
                    (JOHANET. La Vendée à trois époques.)

L'auteur écrivait en 1840. Le château a été démoli depuis.

 

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Notes et références

[1] M. Dugast a reçu du village de Logerie, où devait se trouver un cimetière, mérovingien, une urne funéraire en verre qui y a été découverte et qu'il a donnée an musée archéologique de Nantes. Elle figure dans le Catalogue dressé par M, Parentëau, qui en rapporte une particularité singulière.

[2] Il a été rebâti en 1864. 

[3] Copie de ta pétition adressée à M. le Ministre de l'Instruction publique et à M. le garde des sceaux, Ministre de la Justice et des Cultes :

"Monsieur le Ministre,
Les soussignés, membres du Conseil de fabrique de la Bernardière, canton de Montaigu, département de la Vendée, ont recours à votre justice contre ce qui leur paraît être un envahissement injuste de la part de l'administration municipale de cette commune. Les pièces qu'ils vous présentent et le compte qu'ils vont vous rendre vous mettront à même de juger la question. Pour eux, ils ne peuvent mieux que de s'en rapporter avec confiance à votre sagesse et à votre impartiale décision.
Comme il conste par le testament olographe de Mlle Jacquette Ciénet, du vingt janvier mil sept cent vingt-huit, et l'acte civil d'acceptation du quinze janvier mil sept cent trente-six, ci-joints, une maison avec ses dépendances fut léguée au vicaire de la paroisse de la Bernardière, diocèse de Nantes alors, et maintenant diocèse de Luçon, à la charge de tenir ou faire tenir l'école des garçons gratuite pour les pauvres. D'après l'acte d'acceptation et le témoignage des anciens, le vicaire, avant la Révolution de 1793, jouissait de cette propriété en remplissant les fonctions d'instituteur par lui-même ou par un remplaçant. Depuis la restauration du culte, le titre vicariat se trouvant supprimé, la fabrique, à qui ce bien ecclésiastique invendu a fait retour, en a constamment joui et disposé, percevant les loyers, supportant les réparations et laissant un des appartements à la disposition des desservants pour y loger un instituteur. Depuis un an environ, le Conseil municipal annonce le projet de s'emparer de cette maison, ou du moins de la gestion, et c'est ce qui nous a porté à demander d'une part l'avis de M. le Préfet du département, qui a répondu en appuyant les prétentions dus conseillers municipaux ; et d'autre part celui de l'Evêque diocésain, qui est en sens contraire.
Nous avons ensuite soumis le débat à l'estimable conseil du journal des Conseils de fabriquas, et sa réponse nous est favorable. Dans le désir de terminer ce démêlé fâcheux, qui n'a eu encore aucun scandaleux eclat, nous en appelons a vous et au Ministre des Cultes à qui nous adressons même supplique. La solution serait d'autant plus urgente que dans ce moment-ci cet édifice réclame des réparations tout à fait indispensables.
Nous avons l'honneur, etc.
Signent : DENÉCHAUD, desservant de la Bernardière, président de la fabrique ; Jean MAUVILLAIN, trésorier ; M. MÈCHINEAU ; Joseph THIBAUD ; P. POIRON." 

[4] Registre de paroisse, à la Bernardière.

[5] Extrait du rapport fait à. la duchesse de Berry par Eugène de Girardin.

[6] Dans le temps on m'a affirmé qu'une balle s'était aplatie sur le scapulaire de l'un de ces braves.

[7] Un des fuyards se vit mettre en joue à dix pas seulement par un voltigeur; il se retourna vers lui et, payant d'audace, il l'ajuste avec son fusil chargé. Le voltigeur, épouvanté, se sauva à toutes jambes.

[8] Souvenirs de l'abbé Boutillier, condisciple de Motreuil.

[9] Les royalistes eurent en tout cinq tués et dix blesses.

[10] Il a paru, en 1834, chez Dentu, un poème intitulé : Les Quarante de la Pénîssière, avec cette épigraphe ;

France, théâtre du malheur,
France, trop lâchement trompée,
Apprends que la vieille Vendée
Est le berceau de la valeur.

 


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