Guy Trajan (1922-2009)
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Guy Trajan est né le 21 octobre 1922 à Soissons1, fils de René et d’Alice Trajan.
La jeunesse vendéenne de Guy Trajan
Son père travaillant dans les chemins de fer en Afrique, Guy Trajan a passé une partie de son enfance chez sa tante Berthe Martineau, épicière et cafetière dans le bourg du Poiré. C’est chez elle qu’il passait ses vacances scolaires quand il fit ses études à Saint-Gabriel de Saint-Laurent-sur-Sèvre2. Il restera sa vie durant très proche de ses cousins du Poiré et de leurs enfants qui partageaient ses engagements et qui contribuent toujours à perpétuer sa mémoire.
Guy Trajan en 1938 au Poiré, au mariage de sa cousine Marcelle Martineau avec Armand Mignet
( en bas au centre : sa tante Berthe Martineau ).
Et fin 1945 toujours au Poiré, le visage bouffi d’œdèmes hérités de son séjour dans les camps,
et ayant revêtu la tenue qu’il avait portée à Dachau et qu’il conserva toute sa vie.
( collections particulières )
Résistance de la 1re heure et camp de concentration de Dachau
En 1940 Guy Trajan qui était rentré chez ses parents en Afrique, revint en France pour continuer ses études : Dakar, Casablanca, Algér, Marseille puis Lyon. C’est là qu’il entra dans la Résistance dès 1941, distribuant tracts et journaux clandestins… Sa situation y étant devenue peu sûre, il partit quelques mois plus tard pour Paris, où le collège Saint-Gabriel de Bagneux l’accueillit comme enseignant, et où il intégra un groupe de Francs-Tireurs et Partisans3. En 1943, il fut envoyé à sa demande en Vendée où, au Poiré, il avait un point de chute familial, où les Frères de Saint-Gabriel lui procurèrent un poste d’enseignant à l’école Saint-Joseph de "la Jamonière", et où le climat local était porteur. Les réseaux de la Résistance en Vendée venaient d’être en partie démantelés. Guy Trajan travailla à y créer des groupes de sabotages afin de perturber les déplacements des troupes d'occupation, et à recruter des combattants pour la libération à venir4.
Mais il ne vit pas cette libération, car le jeudi 8 juin, 1944, traversant la place Napoléon à la Roche-sur-Yon, il fut arrêté par le milicien yonnais Albert Sigogneau (1921-2002). Transféré à la prison de la Pierre levée à Poitiers puis à Compiègne, il fut de là envoyé le 2 juillet en Allemagne par le dernier train de déportés dans lequel un quart de ceux-ci périrent durant les trois jours de voyage. Interné à Dachau (matricule 77 475) il se retrouva dans les Kommandos de travail détachés du camp. Le 1er avril 1945 il fut libéré par les troupes américaines et c’est très amaigri, affaibli et bouffi par des œdèmes, qu’on le revit au Poiré à la fin de ce mois d'avril 19451.
Un porteur de mémoire
En 1948, Guy Trajan se maria avec Colette Dervieux (1925-2016), fille d’un des dirigeants de la Résistance dans la région luçonnaise (réseau de l'Organisation Civile et Militaire), elle-même résistante, et qui s’était engagée dans la 1re armée française. Il s’installa alors à la Roche-sur-Yon, exerçant la profession de représentant de commerce pour diverses entreprises vendéennes, entre autres les meubles Griffon de Chambretaud. Dans ses dernières années, il s’investit dans le témoignage auprès des plus jeunes "afin que la mémoire ne s’efface". Répondant aux demandes familiales et amicales, il finit par rédiger en 2003 un résumé de cette période de sa vie, le commençant par :
"Je ne veux pas dans ces quelques pages parler des sévices et des exactions, ni de la peur, ni de notre terrible angoisse, d'autres camarades l'ont fait mieux que moi, mais seulement refaire le parcours d'une triste période de ma jeunesse. J'avais vingt ans, un âge où j'étais déjà patriote, avide de liberté et surtout ignorant des conséquences de ma juvénile ardeur.
Tout a débuté par mon entrée dans la Résistance […]"5.
Rencontre avec Guy et Colette Trajan au lycée Jeanne-d’Arc de Montaigu
le jeudi 2 octobre 2003 ( photo de Katia Préaud ).
C’est le 19 mars 2009 que Guy Trajan est mort à la Roche-sur-Yon où sa cérémonie de sépulture eut lieu quelques jours plus tard, en l’église Sainte-Thérèse. Il avait été en Vendée un des derniers survivants et témoins des camps de concentration.
Maurice MIGNET, le 30 nov. 2024
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Notes, sources et références
1 Entretiens amicaux ou familiaux au cours de multiples rencontres avec Guy et Colette Trajan, entre 1963 et 2009.
2 Autre élève ayant fréquenté les mêmes classes dans les mêmes années à Saint-Gabriel de Saint-Laurent-sur-Sèvre : Jean Grolleau (1920-1941) de Bournezeau, qui sera l’un des "50 Otages nantais" fusillés en octobre 1941 (dont 12 membres du Parti communiste qui venait depuis seulement trois mois d’abandonner son attitude de bienveillance avec l’occupant nazi).
3 Guy Trajan s’est toujours dit "gaulliste", et avoir fait partie des FTP n’a jamais correspondu à un engagement communiste de sa part. Ceci d’autant plus, disait-il, que le parti communiste a fait dans la collaboration avec les nazis d’août 1939 (pacte germano-soviétique) à la fin juin 1941, quand ceux-ci envahirent l’URSS. Il avait aussi la dent dure contre les François Mitterrand et autres "…qui ont attendu la toute fin 1943 pour s’engager enfin en faveur de la Résistance".
4 Témoigneront plus tard de ces différentes actions son ancien camarade de classe à Saint Gabriel, Étienne Boudaud (1922-2018), négociant en grains à Sigournais, ou encore Martial Moreau (1924-2012) du "Beignon-Jauffrit", qui rapportait que c’est grâce à Guy Trajan qu’en août 1944 il rejoignit le "maquis du Bois des Gâts", sur Saligny et Dompierre.
5 Ce résumé, intitulé "J’avais vingt ans", est repris dans un livre en préparation (en 2024) sur la Résistance en Vendée et évoquant Guy Trajan, par la fille de celui-ci, Guylène Bertrand-Trajan, historienne. On s’adressera à elle pour s’autoriser des citations de ces témoignages.
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