la Grande Roulière
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Le village de "la Grande Roulière"...
"La Grande Roulière" est un important village du Poiré, à 4 km à vol d’oiseau du centre-bourg. Elle est appelée habituellement "la Roulière" par ses habitants et par ceux des villages voisins1 …ainsi qu’en 1768 sur la carte de Cassini. L’adjectif "Grande" lui a été ajouté pour la distinguer du village de "la Petite Roulière" qui, lui, se situe à mi-chemin entre le bourg du Poiré et celui de Belleville.
Pendant longtemps, elle fut avec "l’Aumère", un des deux plus grands villages de la commune, comptant 92 habitants en 1836, 122 en 1851 et encore 124 en 1911… mais plus que 64 en 19682 (et 45 en 2020, résidences secondaires exclues).
"La Grande Roulière" : sur le plan cadastral de 1836
avec, en rose, les maisons d’habitation à cette date ;
et sur une vue aérienne le 7 juillet 2019 (environ : 160 x 200 mètres).
En 1984 dans Le bâti ancien en Vendée3, ouvrage devenu une référence, l’architecte Gabriel-François David a retenu "la Grande Roulière" comme représentative des villages du Bas-Bocage vendéen, la décrivant ainsi :
"Reconstruction (de 1830 à 1870) après la destruction totale des guerres de Vendée, le long de la voie communale, en récupérant des éléments (pierres de granit taillées…) du logis construit au XVIe siècle sur ce promontoire rocheux.
L’organisation des espaces publics est essentiellement fonction de l’ensoleillement (sud-ouest, sud, sud-est), et de placettes triangulaires permettant des groupes d’habitations en bandes, sans vis-à-vis.
La morphologie du bâti est dépendante de la destination sociale : une maison de propriétaire terrien avec croupe à l’entrée du village ; des cellules d’habitation pour les journaliers avec un module porte-fenêtre et fenêtre de grenier ; exploitation et maison regroupées des trois agriculteurs en périphérie du village.
La morphologie dépend aussi de l’évolution de l’usage des bâtiments depuis le XIXe siècle : apparition d’escaliers extérieurs pour accéder au grenier aménagé en chambre ; nouveaux percements d’ouvertures en façade arrière voire avant, pour plus de lumière et de confort ; et du recours à des bâtiments d’exploitation plus importants du fait du développement économique (hangars, stabulations…).
Le bâti traditionnel se distingue par l’usage du granit en moellons appareillés, équarris ou en tout venant, avec chaînages d’angles et jambages en pierres de taille. Les toitures sont en tuile ‘tige de botte’ souvent pigeonnées en bas de pente. A noter les recours fréquents à la corniche de type génoise."
Cette description est accompagnée de la représentation en vue cavalière ci-dessous, par quelques photos de maisons et de détails architecturaux, et d’une courte allusion à son histoire dont on a une connaissance limitée.
"La Grande Roulière" vue et dessinée en 1984 par Marie-Eugène Héraud
dans "le Bâti ancien en Vendée", de Gabriel David et Jean-Luc Emauré, 1984, p. 43.
Le centre du village est construit sur affleurement rocheux. En 1997 sur sa bordure nord, deux effondrements successifs ont rappelé la présence d’un souterrain dont l’existence était connue depuis toujours. Bien qu’il ne soit pas datable4, c’est sans doute là l’élément le plus ancien du village.
Sur sa bordure sud-ouest se trouve une maison ayant une allure de petit "logis" qui lui est donnée par quelques petites ouvertures en plein cintre ou d’autres à meneaux, et par un linteau de porte intérieure avec un écusson portant la date de 16195. Sur le cadastre de 1836, on la voit dotée d’une possible tour, mais dont rien ne reste dans la mémoire locale en 2020.
Le "logis" de "la Grande Roulière" sur le cadastre de 1836
et sur une vue aérienne le 20 avril 2017, (environ 105 x 57 m).
Ce même "logis" en juin 2020, après sa restauration,
et, avec ses corbeaux sculptés, une de ses anciennes cheminées
(largeur : 2,35 m), qui en a disparu vers 1970.
Ce "logis" dominait de quelques mètres, un filet d’eau bordant à l’ouest le village, et qui a été remblayé autour de 1980. On ignore tout de ceux qui furent à son origine, et il semble qu’au XVIIIe siècle, sinon bien avant il n’avait plus les fonctions que son architecture suggère. On ne sait si on doit mettre un lien entre ce "logis" et René Dorion, "avocat à la Cour", puis Julien-François Danyau, notaire, que l’on voit se parer tous deux du titre de "sieur de la Roulière", en 1739, 1740, 1741, 17626, et habitant au bourg du Poiré. Dans les années 1950, il était inoccupé et on y dansait parfois grâce à l’accordéon de Robert Boutin qui était ouvrier agricole dans le village1. Longtemps, enfin, on y a vu un large escalier intérieur à vis de 17 marches en granit, qui fut vendu vers 1970 à Aizenay, ainsi que deux grandes cheminées, parties l’une aux Sables, et l’autre au village du "Chiron". Cette dernière, qui était située à l’étage, avait des montants formés d’une colonne surmontée d’un corbeau sculpté, portant l’un et l’autre un petit masque (ou visage) de diablotin.
Durant la Révolution, les habitants de "la Grande Roulière" rejoignirent et soutinrent matériellement ceux qui s’opposèrent aux privilégiés du nouveau régime politique7, et virent passer les troupes chargées des opérations de "pacification" qui ravagèrent la contrée. Les décennies suivantes furent pour le village une période de relèvement des ruines, incendies et destructions qui, sur l’ensemble de la commune du Poiré, avaient touché 83 % des constructions8.
Parmi ses maisons les plus anciennes est celle de René Douaud9 qui avant 1800 y était farinier (meunier) et y possédait environ 6 ha ; son intérieur présentait encore en 2020 bien des caractéristiques des modestes maisons de cette époque : sa pièce unique, sa cheminée avec son chaudron et des objets de piété posés sur son manteau, son sol en terre battue, ses poutres noircies… avec, contigu, un "toit" n’abritant que quelques bêtes, et au-dessus son grenier à accès extérieur. En 1965, c’était Armande Douaud, une de ses descendantes, qui y vivait avec une unique vache1.
En 1980 et en 2020 : l’ancienne maison du meunier René Douaud (1768-1844),
et son arrière-arrière-petite-fille Armande Douaud (1900-v.1970) qui y habita sa vie durant.
En deux siècles peu de choses y avaient changé dans son aspect général intérieur,
même si elle avait connu quelques modifications extérieures,
telles que sa toiture refaite et dotée d’une génoise
et ses encadrements dans sa façade nord-est…
En 1836, les 92 habitants de "la Grande Roulière" formaient environ 18 foyers parmi lesquels deux de tisserands, deux de meuniers, quatre de journaliers, et les autres d’agriculteurs. Ils cultivaient environ 220 ha ; un tiers appartenant à deux propriétaires de la Roche-sur-Yon (nommée à l’époque "Bourbon"), un quart à cinq autres non résidant, et le reste à des habitants du village.
Dans les années 1950, un maréchal-ferrant et un forgeron y venaient certains jours de la semaine pour y exercer leurs métiers, et on y comptait 14 exploitations agricoles, le plus souvent très petites (cf. leurs localisations, à partir du souvenir de leurs anciennes aires de battages, sur le plan ci-après10).
Au recensement général de l’agriculture de 1970, elles n’étaient plus que 12. Dans les années qui suivirent, l’évolution de l’agriculture aboutit à l’effondrement de leur nombre11. "La Grande Roulière" se vidait de ses habitants et ses constructions s’en allaient l’une après l’autre vers la ruine. Et en 2017, le village vit son dernier agriculteur cesser son activité.
"La Grande Roulière" entre la fin des années 1940 et celle des années 1960,
avec les aires de battage et leurs paillers de ses nombreuses fermes d’alors, ainsi que quelques autres lieux
(localisés sur un plan de 1996 d’Olivier Dugast3)
Les agriculteurs de "la Grande Roulière" lors du Recensement Général de l’Agriculture (R.G.A.) de 1970,
avec l’âge de chacun d’eux, ainsi que la surface et le mode de faire-valoir dominant de leur exploitation.
Cependant dès 1978, la venue de nouveaux habitants et la transformation de maisons en résidences secondaires, ralentit le déclin démographique et sauvegarda en bonne partie son patrimoine architectural12. De plus, l’intégration nouveaux / anciens habitants s’est plutôt mieux faite qu’ailleurs13, cela se traduisant ici par l’absence d’apparition de hauts murs entre voisins, la conservation de ses espaces ouverts d’autrefois. Certains des jardins-potagers y ont subsisté ou y ont repris vie, et si les treilles traditionnelles ont disparu, les aussi traditionnels et très colorés hortensias s’y sont multipliés au point de devenir une des spécificités du village.
En 2019, le maintien de quelques jardins potagers de "la Grande Roulière" d’autrefois :
à gauche, celui de la doyenne du village (qui y est née le 30 avril 1932),
à droite, celui d’un nouvellement arrivé… le 1er janvier 1978.
Les rythmes de vie du village ont cependant beaucoup changé, ainsi le temps est passé où on allait avec sa brouette faire sa lessive ou laver la laine de la tonte des moutons dans le "gardour" du "grand douet"14. Désormais, à l’exception des retraités et de quelques travailleurs indépendants, chaque matin, chacun va gagner sa vie en dehors du village.
Ce qui subsistait en 2021 du "gardour" du "grand douet", près du filet d’eau coulant à 350 mètres à l’est du village,,
et sur une vue aérienne de septembre 2019 (environ : 750 x 400 m).
Les pierres sur lesquelles les laveuses appuyaient leurs garde-genoux et la fontaine voisine ont depuis longtemps disparu.
Non loin du chemin allant au "grand douet" se trouve l’un des deux tramails subsistant au Poiré. Edmond Buton maréchal-ferrant dans le bourg, qui l’avait fait faire et installer par le charpentier Maxime Moinardeau, y venait tous les mardis ferrer les bœufs de "la Grande Roulière" et de ses alentours. Ce tramail a été restauré en 2020 par Daniel Marionneau chez qui il est installé1.
Le tramail de "la Grande Roulière" en 2020,
l'un des deux subsistant au Poiré avec celui de "la Bouchère".
Au début du XXIe siècle, deux croix en pierre existent dans le village. L’une d’elles se trouve devant une maison à sa sortie, le long du chemin menant à "la Métairie" ; elle porte gravé "1868" en bas de son fut, et "Buton / et son ép / Orceau" sur son socle (Mathurin et Marie, nés tous deux en 1810). L’autre est à 200 m du village, le long de la route menant au bourg, avec gravé de même : "1871" et "J. Gillaizeau / et son épse / J Mollé"15. Quand en 1870 la France déclara la guerre à la Prusse, Jean Gillaizeau, meunier à "la Grande Roulière", vit plusieurs de ses six fils (Jean, Joseph, Benjamin, Pierre, Louis, Honoré, âgés de 34, 33, 29, 26, 25 et 18 ans) mobilisés. Ceux-ci en étant tous revenus sains et saufs, il fit ériger cette croix en remerciement. Brisée lors de la tempête du 13 février 1972, elle a été restaurée par Alphonse Gillaizeau, un des petits-fils de Jean. En 1900, la Chronique paroissiale du Poiré évoquait une autre "croix en bois, au sortir de la Grande Roulière" (vers Beaufou), mais qui à cette date n’était qu’un souvenir16.
Sur le fut de chacune de ces croix, et sur la façade de la maison du chemin de "la Métairie", une niche abrite une statue de la Vierge, mais seule celle de cette maison est d’origine. Sur une autre façade du village se trouve une statue traditionnelle de sainte Anne, rapportée d’un pèlérinage à Sainte-Anne-d’Auray en 20061.
Une niche et deux croix de "la Grande Roulière" en 2020 :
- à droite, la croix "Buton-Orceau" de 1868 (h : 4,5 m)17 ;
- à gauche : la croix "Gillaizeau-Mollé" de 1871 (h : 4 m).
Au mois de mai dans les années 1950 le "mois de Marie"18 se déroulait dans une maison alors inoccupée et qui, en 1939, avait été réquisitionnée pour accueillir des déplacés du nord de la France ; son sol étant en terre battue, comme celui de toutes celles du village, la municipalité le fit cimenter avant d'y recevoir les arrivants1.
La maison ayant abrité en 1939-1940 des déplacés du nord de la France.
A l’exception d’une maison des années 1980 cachée à l’écart, "la Grande Roulière" a un patrimoine architectural remontant, pour le plus récent, à l’entre-deux-guerres et qui, après avoir été en danger, a été restauré ou est en passe de l’être.
Dans le village, les bâtiments datant de la première moitié du XIXe siècle présentent les caractéristiques de reconstructions de ruines, tels que les réemplois d’éléments architecturaux provenant de celles causées par les passages des troupes révolutionnaires. Ces habitations, quel que soit le niveau de vie de ses occupants d’alors, se limitait à une ou deux pièces avec un grenier les surmontant et quelques annexes voisines. Cent ans plus tard et généralement en plusieurs étapes, quelques granges-étables ont remplacé partiellement les bâtiments agricoles traditionnels. Puis dans les années suivantes deux maisons, les seules du village, furent construites avec un étage habitable, ce qui leur donne un caractère un peu ostentatoire ; c’était aussi là le résultat d’efforts de plusieurs générations successives.
Quelques détails architecturaux, témoins des reconstructions et ruines successives de "la Grande Roulière" :
porte à l’abandon, datations, génoise, fenêtres de greniers aux encadrements faits de réemplois,
et, servant d’oculus, une pierre (53 x 53 cm) provenant d’une meule tournante d’un ancien moulin à vent19.
Promenades dans "la Grande Roulière" à quarante ans de distance :
- en noir et blanc autour de 1980 (photos J. Dannenhoffer), - et en couleurs autour de 2020.
Une des habitantes de "la Grande Roulière", arrivée en 1976, est une artiste dont la notoriété a dépassé les frontières nationales. Bernadette Chéné est une plasticienne "régulièrement invitée depuis les années 1980 par des musées et centres d’art pour concevoir des œuvres, souvent de grande taille, spécifiquement imaginées pour les lieux qui les accueillent […]"20. En 2014-2015, son exposition "Son Lieu", à l’Abbaye Sainte-Croix aux Sables-d’Olonne fut un événement. Sa "sculpture-installation" "Son Heure", s'inscrivant dans la charpente en forme de carène renversée du musée, s'animait et produisait un son symbolisant le temps qui s'égrène... Les œuvres de Bernadette Chéné peuvent être vues (et revues) sur son site, où sont aussi évoquées les nombreuses expositions qui l’ont conduite de Łódź en Pologne à New-York aux Etats-Unis, de Paris en France à Oslo en Norvège, et en d’autres lieux et pays…
Toujours à "la Grande Roulière", vit Jean-Damien Chéné, un poète dont les œuvres "confrontent le monde et l'individu, mettent en marche une sorte de contemplation immobile, font surgir tout à coup la vie là où on ne l'attend pas..."21.
"Dans la perspective" : une des œuvres de Bernadette Chéné,
dans son jardin à "la Grande Roulière".
Au milieu des années 1980, les propriétaires de plus de quarante hectares de terres cernant de près le village, décidèrent de les retirer de l’activité agricole et, ici, de laisser pousser des arbres d’essences variées et, là, de planter des sapins. Cela a rendu le paysage de plus en plus arboré, et a compensé au moins en partie les arrachages de haies du remembrement qui se faisait alors. Cela fit aussi venir et se multiplier certaines espèces sauvages, tels que des chevreuils qui désormais viennent parfois se glisser dans les prés parmi les animaux d’élevage.
En 2021, une parcelle boisée, 35 ans après qu’elle eut été retirée de son activité agricole passée
( avec Robespierre, le bouc en charge de son débroussaillage ).
L’évolution du paysage parcellaire autour du village de "la Grande Roulière"
- en 1836, les parcelles sur le 1er cadastre du Poiré (section A, 1re feuille),
- en 1950 sur une aérienne de l’IGN (avec un dessin parcellaire ayant peu changé),
- en 1975, sur une carte du début du remembrement (montrant le commencement de la destruction des haies),
- et en 2020 sur une aérienne
( en superposition sur chacune, les surfaces qui étaient boisées en 2020 ).
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...et les terres de "la Grande Roulière".
Quelque 220 hectares autour de "la Grande Roulière" sont considérés comme en constituant ses terres. On y rencontre différents lieux présentant un certain intérêt en raison de vestiges y subsistant, ou de souvenirs leurs étant attachés. Ceci à commencer par deux moulins à vent dont les meuniers habitaient le village. Celui "des Masures", situé à proximité de "Londry", est déjà présent en 1768 sur la carte de Cassini, y apparaissant sous le nom de "moulin de la Grande Roulière" ; ses derniers restes furent démolis après 1940. Et celui de "la Pierre blanche", à 1,5 km dans l’ouest du village qui fut quant à lui démoli en 1909 ; il est resté dans les mémoires1 en raison de la catastrophe qui s’y produisit le lundi 29 juillet 1901 : ce jour-là sur les midis, il fut touché par la foudre qui y tua trois personnes, dont des descendants vivaient encore à "la Grande Roulière" en 2020. Chacun de ces moulins était accompagné d’un petit "toit" ayant aussi disparu.
Le parcellaire autour de "la Grande Roulière" sur une vue aérienne vers 1950 (environ 2250 x 2025 m),
sur laquelle la petite taille des parcelles des fermes de "la Grande Roulière" s’oppose
à celle sensiblement plus grande des parcelles des métairies de "la Métairie" et de "la Brossière",
apparaissant à l’est et teintées en vert.
En bas à droite, ce même espace sur la carte "d’état-major" (levée entre 1820 et 1836).
Et en bas à gauche, sur une vue aérienne en 2016, soit trente ans après le remembrement.
En pointillé rouge : haies aux pierres étranges (relevé non exhaustif).
A l’opposé de ces deux moulins, à 600 mètres au nord-est du village, existait jusqu’au début du XIXe siècle un étang artificiel qui disparut plus ou moins à cette époque. Il faisait alors partie de l’amenage du château de "la Métairie" voisin, devenu en 1798 la propriété du général Travot (1767-1836), qui est bien connu pour son rôle dans la répression subie par la région dans les années précédentes. Cet ancien étang, d’une surface d’environ un hectare, était formé par une chaussée d’une centaine de mètres de longueur, d’une hauteur au plus de 3 mètres, et dont il ne restait en 2020 que quelques vestiges. On ne possède aucun indice permettant d’en dater les origines (ni d’en dater la disparition). Cependant, la création d’étangs près de demeures seigneuriales, pour l’élevage de poissons22, était une pratique courante dès le Moyen Age. Au Poiré, il subsiste plusieurs de ces étangs, d’origine ancienne mais indéterminée, près des logis de "la Rételière", de "Pont-de-Vie", de "l’Eraudière", ou à "la Mignardière" près de celui du "Fief", ainsi que des restes ou indices près de ceux de "la Bouchère" et de "la Millière".
L’ancien étang proche de "la Grande Roulière" :
sur une vue aérienne du 7 juillet 2019 et sur le plan cadastral de 1836 ;
et des vues de vestiges de sa chaussée, le 6 juin 2020
(sa hauteur est de près de 3 mètres au niveau de la brèche la coupant en deux).
Cette chaussée, couverte de taillis en 2020, l’était déjà en 1836.
Revenant de cet ancien étang, et à seulement 400 m du village, se trouvent cinq petites parcelles appelées "le cimentère" ("le cimetière" en parler local14), un nom qui pourrait être en rapport avec les inhumations dans des fosses communes qui furent pratiquées après les massacres perpétrés en leur temps par les troupes révolutionnaires. En tant que tel, ce genre d’événements traumatisants a souvent laissé des traces dans les mémoires locales. Si c’est le cas à "l’Aumère", au "Champ d’avant", ce ne l’est pas ici, bien que ce nom pourrait correspondre aux suites du "combat de la Morelière", de la mi-décembre 179323.
Certaines des haies séparant les unes des autres les parcelles du "cimentère", abritent, allongées sur le sol, et parfois en position verticale, de nombreuses grosses pierres pouvant atteindre jusqu’à 1,50 m de long. Leur présence coïncide avec un affleurement de "monzogranite à grain fin à moyen, à biotite"24.
Masquées par le lierre et la végétation : quelques-unes des "pierres étranges"
peuplant certaines des haies de "la Grande Roulière",
et l’affleurement de monzogranite (γ3 sur la carte géologique),
dont des débris sont parfois remontés à la surface par les labours1.
A 500 m au nord-ouest de l’ancien "moulin des Masures", quelques pièces de terres sont connues sous le nom de "Pont-Charette", nom devenu "les ponts charrette" sur les cartes de l’IGN. Leur situation dominant légèrement le paysage environnant, donne une vision dégagée sur les alentours et, depuis 2003-2007, sur les éoliennes de Beaufou, à 2 km de là.
Trois des éoliennes de Beaufou vues des terres au nom de "Pont-Charette", en juin 2020.
On ignore l’origine de ce nom, mais il existe de fortes probabilités pour qu’elle soit en rapport avec le célèbre héros de la Vendée entre 1793 et 179625. En effet, en cet endroit et dans ses environs, Charette et sa petite troupe eurent à soutenir un combat le 28 décembre 1795.
Les parcelles appelées "Pont-Charette" sur les états de sections du cadastre de 1836 du Poiré26,
avec leur localisation en jaune sur une vue aérienne vers 1950 et sur une vue aérienne de 2019
( environ 600 x 600 m ).
On remarque qu’en 1836, 3 de ces 5 parcelles appartenaient alors à Jean Gillaizeau (1798-1874),
meunier habitant à "la Grande Roulière",
où ses ancêtres exerçaient déjà le même métier à la fin du XVIIe siècle,
et où certains de ses descendants vivaient toujours au début du XXIe siècle.
A 600 m au sud-est de "la Grande Roulière", les deux filets d’eau encadrant le village viennent se réunir pour former un ruisseau qui rejoint "la Jaranne" (ou "la Garanne") 500 m plus loin. Ce petit cours d’eau forme un vallon aux pentes fortes, et profond d’une quinzaine de mètres. Un des prés étroits le longeant était autrefois à la belle saison (et une fois le foin coupé) un lieu de promenade familiale dominicale. C’est aussi à cet endroit que se trouvait l’entrée d’un souterrain, qui était dit "de la Garanne", et dans lequel les enfants du village se risquaient sur quelques mètres.
Autour de 1990, Marie-Eugène Héraud, habitant de "la Grande Roulière", entreprit d’explorer méthodiquement ce souterrain, déblayant plusieurs de ses parties. Les galeries mises au jour se développaient sur une trentaine de mètres, avec une hauteur moyenne de 1,50 m, et une largeur d’environ 0,80 m. Utilisant ses compétences professionnelles d’architecte, il en leva un plan. On y voit au nord-ouest une galerie par laquelle a dû débuter son creusement, et qui servit ensuite pour son drainage (ayant jusqu’à deux mètres de large, elle fut qualifiée de "salle"). Comme dans beaucoup d’autres souterrains du Poiré, au "Fief", à "la Turquoisière", à "la Prévisière", à "la Micherie"… on y trouve des cheminées d’aération, des puits d’accès (ou d’évacuation des matériaux laissés par le creusement), des encoches dans les parois, marques d’anciennes portes, des sortes d’alcôves latérales, des prolongements obstrués. Trente ans plus tard, certaines des parties de ce souterrain qui avaient été alors dégagées sont redevenues impraticables, et son accès a été condamné pour dangerosité.
Dans le matériel qui masquait partiellement son entrée, on a trouvé des débris de poterie, qui jusqu'ici n’ont pas pu être datés, ainsi qu’une cuvette en granit avec un broyeur, le tout semblant être une sorte de meule à main primitive27. Mais aucun de ces objets permet de dater l’époque où il a été creusé4. Par ailleurs, ces trouvailles sont les seules qui aient été faites dans un des nombreux (plus d’une quarantaine) souterrains du Poiré.
Enfin, alors que ceux-ci, dont le rôle était de servir de refuges, sont logiquement présents dans des lieux habités ou dans leur proximité immédiate, ce "souterrain de la Garanne" se trouve situé en pleine nature. Cela laisserait entendre que l’endroit où il se trouve a pu être, en d’autres temps, un lieu d’habitation… sans qu’aucun autre indice vienne le confirmer.
Le plan du "souterrain de la Garanne" (12,5 x 18 m), levé vers 1990 par l’architecte Marie-Eugène Héraud
(le quadrillage est fait de carrés de 1 m sur 1 m) ;
sa localisation en 2020 dans son environnement paysagé
(les peupliers marquent le tracé du petit ruisseau affluent de "la Jaranne") ;
et sa localisation sur une vue aérienne du 7 juillet 2019
( environ 100 x 65 m ).
Vues du "souterrain de la Garanne" le 19 juin 2020 :
la "salle" (2 m sur 6 m), alors inondée, son conduit de drainage étant partiellement obstrué,
et un coude de la galerie y descendant par quelques marches.
Quelques-uns des débris de poteries
qui y furent découverts lors de son exploration autour de 1990,
mais qui n’ont permis aucune datation jusqu’à présent.
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le Combat de "la Grande Roulière", le 28 décembre 1795
A la fin juillet 1795, Charette avait repris les hostilités contre le gouvernement révolutionnaire, ce dernier ne tenant ses promesses de la paix de la Jaunaye, qu’il avait signée à la mi-février de la même année, que lorsque le rapport de force du moment ne lui permettait pas de faire autrement. Les espoirs des rebelles reposaient sur des aides extérieures incertaines et sur d’hypothétiques changements au sein du gouvernement républicain, ce qui ne se produisit pas. Dès novembre, ils devinrent…
"toujours errans, occupant successivement le bourg de Saligné, de la Latterie, Saint-Denis, Montorgueil, la Chicaillère (la Jucaillère), etc. ; pendant ce temps, l'ennemi nous cernait de toute part et le cercle se resserrait tous les jours […]"28.
Leur victoire des Quatre-chemins [de l’Oie], le 4 décembre 1795, fut leur dernière.
Le 28 décembre près de "la Grande Roulière", eut lieu un combat, très secondaire, qui fut pour eux une nouvelle défaite. On le connaît par un rapport de l’adjudant-général Travot envoyé à son supérieur le général Hoche, et daté du 19 janvier 1796 (29 nivôse an IV) du "Fief", où il était cantonné pour quelques jours29. Il y rend compte de sa poursuite incessante de Charette :
"Vous n’ignorez point que la déroute que je lui ai donnée le 7 de ce mois (28 décembre 1795) à la Roulière près le Poiré, que le convoi de pain que je lui ai pris dans cette affaire ont été pour lui de grandes raisons de retarder l’exécution de ses projets, que dès ce jour il n’a payé que des échecs, qu’abandonné de tous ses paysans il s’est vu réduit à 100 hommes de cavalerie et 300 dé-serteurs".
Cet "abandon de tous ses paysans" est relativisé deux jours plus tard, le 21 janvier 1796, par le même Travot dans un nouveau rapport à Hoche, envoyé aussi du "Fief" du Poiré, et qui donne une vision sensiblement différente :
"De Maché, où je ne trouvai aucun habitant qui voulût m’avouer que Charette était dans la paroisse. […] Je n’ai vu dans cette contrée qu’un extrême attachement à Charette, tous lui sont dévoués. Il me parait qu’il y sera moins trahi qu’en ce pays qui commençait à lui devenir défavorable."
Extraits des lettres envoyées du "Fief" par Travot à destination de Hoche,
le 19 et le 21 janvier 1796.
Pierre-François Remaud (1756-1830), compagnon de Charette de 1793 à 1796, a laissé, dans un manuscrit qu’il rédigea entre septembre 1796 et janvier 179730, un récit de ce combat du 28 décembre 1795, au cours duquel Charette fut battu par Travot qui lui prit un convoi de pain destiné à ceux de ses soldats se trouvant sur les Lucs et à "la Bésilière" de Legé :
"Le général Charette qui s’attendait d’un moment à l’autre à être forcé au combat, s’était posté sur les hauteurs d’un village nommé la Grande Roulière, paroisse du Poiré. La position était bonne. Dans cette position il se trouvait à une et deux lieues de distance au plus entre les postes de Palluau, Aizenay, Beaulieu et ceux de Saint-Denis, des Lucs et de la Roche-sur-Yon. C’était de là qu’était partie la colonne qui le poursuivait aux ordres de l’adjudant Travot. Sur les deux heures après midi, Charette vit tout à coup arrêter tous les moulins à vent qui étaient autour de lui, ce qui était le signal que les républicains passaient auprès31. Il se prépara au combat qu’il n’était plus possible d’éviter. Il ne savait quelle direction donner à son convoi de vivre parce qu’on était sûr de rencontrer partout l’ennemi. On le laissa au derrière de l’armée.
Le trajet du convoi de pain intercepté le 28 décembre 1795 par les soldats de Travot,
sur une vue aérienne vers 1950 (environ 6,7 x 3,7 km) ; et la zone du combat qui eut lieu ce jour-là,
sur la carte de Cassini de 1768, et sur celle d’état-major vers 1825 (environ 3,7 x 4,2 km).
En "1" et en "2" : les lieux d’où ont été pris le panoramique et la vue vers "Pont-Martin" ci-après.
S’il eût été possible au général Charette de garder la position sur les hauteurs de la Roulière il est à présumer que l’avantage eût été pour son armée, mais la manière dont l’ennemi se présenta pour l’attaquer le força à descendre et à passer un petit ruisseau pour empêcher l’ennemi de l’entourer. A peine son avant-garde fût-elle passée le petit ruisseau que le combat s’engagea dans le village de la Favrie, près le château de la Métairie. Le feu fut d’abord très vif, de part et d’autre. Mais l’avant-garde ne se voyant que très lentement secourir par le corps de bataille qui ne pouvait que difficilement passer le ruisseau, se replia alors sur lui.
Le 28 décembre 2022 sur les midi et demi, à partir du lieu-dit "Pont-Charette",
vue de "la Favrie" auprès de laquelle débuta "le combat du 28 décembre 1795".
Et ci-dessous, à partir du même endroit, vue panoramique "1" des lieux de ce combat.
(déplacer l'image à l'aide du curseur en bas)
Au lieu de la soutenir, le corps de bataille et tous ceux qui sur les hauteurs de la Roulière n’avaient éprouvés aucun danger se mirent à fuir les premiers. Alors l’avant-garde fut comme malgré elle entraînée dans cette déroute, qui fut affreuse moins encore par le nombre de morts que les royalistes y perdirent que par le découragement et la frayeur qu’ils y montrèrent. Le convoi de subsistances des royalistes fut pris ou perdu dans la boue. Plusieurs métayers y perdirent leurs bœufs et leurs charrettes, quelques-uns d’entre eux même furent tués. On poursuivit les royalistes pendant plus de deux lieues et, ce qui ne s’était pas vu avant cette bataille, les royalistes restaient derrière la cavalerie républicaine qui poursuivait la leur. Ils étaient si épouvantés qu’ils ne tiraient pas sur l’ennemi. Si les républicains eussent eu une pareille déroute, elle leur aurait coûté une armée entière. La perte de la bataille de la Roulière ne coûta pas aux royalistes quarante morts et fort peu de blessés, mais la dispersion fut horrible. Le drapeau des volontaires de Charette fut pris et il ne se trouva pas le soir avec 300 soldats sur la paroisse de Dompierre où il se retira bien affligé de la conduite de sa cavalerie surtout, qu’il n’avait pas pu décider à couvrir la retraite."
D’autres sources, faisant partie de la mémoire populaire, disent que "C’était dans un village de la paroisse du Poiré, du côté de Belleville, où l’on cuisait le pain de l’armée de Charette qui avait, comme l’on sait, son quartier-général à Belleville même, un peu plus loin"32. Ce qui identifie ce village avec "l’Aubonnière" et permet de préciser le trajet suivi par ce convoi, passant par les lieux-dits "la croix Bouet" et "Pont-Martin", dans le bas de "la Favrie". Après 1814, Pierre Buet, sabotier, Jean-François Gautier, charpentier, et Jacques Fort, laboureur, habitant tous les trois à "l'Aubonnière", reçurent une reconnaissance pour avoir été blessés à ce combat33. Quant aux lieux où on s’est battu : un champ en a conservé le souvenir, des on-dit prétendant que "du sang a été versé en grande quantité, et de nombreux hommes ont été tués en cet endroit".
Début décembre 2022, vue "2" du champ où, selon des rumeurs locales, "du sang a été versé en grande quantité,
et de nombreux hommes ont été tués", avec "Pont-Martin" en arrière-plan ;
et ce même champ, vu en sens inverse le 22 mai 2020, à partir de "Pont-Martin".
(voir leur localisation ci-dessus, sur une vue aérienne prise vers 1950).
Mais pour Charette la fin était proche. Il sera pris le 23 mars suivant à 12 kilomètres de là, près de la Chabotterie à Saint-Sulpice-le-Verdon, pour être tué six jours plus tard à Nantes. Localement, il a laissé un souvenir nettement différent de celui véhiculé depuis le XIXe siècle par Jules Michelet et ses émules, qui créèrent alors l’histoire officielle de la France34.
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Notes, sources et références...
(sauf mentions contraires, illustrations et texte sont dues à M. Mignet)
1 Entretiens entre 2016 et 2022 avec : Jean-Luc Perrin, de "la Métairie" et de "la Prunelle" ; Xavier Gillaizeau, Guy Favroult, Edmond et Marceline Morinière et leur famille, Daniel Marionneau, de "la Grande Roulière"; Pierre Martineau, de "Londry" ; Marie-Eugène Héraud, Pierre-Henri Franck, Bernadette et Jean-Damien Chéné de "la Grande Roulière", et autres…
2 Dénombrements et recensements du Poiré (Arch. dép. de la Vendée : L 288 et 6 M 54).
3 David (Gabriel), Emauré (Jean-Luc), Le bâti ancien en Vendée, 1984, 160 p.
Gabriel David, architecte, est connu pour ses actions pour la sauvegarde du patrimoine rural et pour la préservation des savoir-faire artisanaux. En 2020 il avait entre autres charges et responsabilités, celle de délégué Loire-Atlantique de Patrimoine et Environnement. Sur les questions ayant trait au bâti ancien, voir aussi son intervention dans "Comment réhabiliter ?" au cours du séminaire organisé par la Cité de l’architecture et du patrimoine, en mars 2013 : Valeur patrimoniale du bâti rural ancien : connaître, comprendre, intervenir (voir plus particulièrement à partir de la 57e minute).
En 1996, le cas de "la Grande Roulière" a été repris par Olivier Dugast, architecte, dans son enquête exhaustive sur le Devenir du bâti ancien rural dans le Bocage de Vendée à travers l’exemple du Poiré-sur-Vie, 122 p.
4 Pour leur datation, voir les Souterrains de Vendée, de Triolet (Jérôme) et Triolet (Laurent), 2013, 168 p. (extraits). En 2020, Madame Marceline Morinière (née en 1932) se souvenait que dans les années 1950 au cours d’un battage de leur ferme, une patte d’un de leurs bœufs s’était enfoncée, traversant la voûte de ce souterrain.
5 Cette date de 1619, peut être mise en rapport avec celles que l’on trouve pour la maison la plus ancienne du haut de la "place du marché", 1613, et pour "la Rételière", 1618, ou encore avec celle de 1607 pour le petit château de "Rochequairie" sur Saint-Etienne-du-Bois… A cette époque, les Guerres de Religion étaient terminées depuis seulement dix à vingt ans, et on était en période de reconstruction après les pillages, meurtres, incendies, destructions… qui avaient été perpétrés dans la contrée par des bandes armées huguenotes. Ainsi en 1564 aux Lucs et à Beaufou ; en mars 1568 à Legé, puis le mois suivant à Rocheservière, à Beaufou, à Saint-Denis-la-Chevasse et à Aizenay... Pour se limiter au cas de la petite ville voisine de Montaigu, ces ravages sont connus par de nombreux documents de l’époque et par des relations laissées par leurs participants, tels, pour ceux de 1569 : une requête déposée fin 1563 devant le Parlement (cour de justice) de Paris par Louis de La Trémoille, l’Histoire de France depuis l'an 1550 jusqu'à ce temps, de Lancelot de La Popelinière ; pour ceux de 1580 et de 1588 : l’Histoire universelle de Théodore Agrippa d’Aubigné… ou encore les Chroniques fontenaisiennes, et les Mémoires de la Ligue… C’est principalement sur les récits des chroniqueurs huguenots que se sont basés ceux qui, par la suite, se sont penchés sur l’histoire du Bas-Poitou à cette époque.
6 Actes de baptêmes et acte de mariage (Arch. dép. de la Vendée : AD 2 E 178). La famille Danyau (notaires de père en fils) fit partie, avec les Tireau (juges de père en fils), des quelques familles de notables du Poiré qui eurent des opinions durablement républicaines, pour le plus grand profit de leur situation financière, et de leur statut social et politique.
7 Cahier des réquisitions de l’armée catholique et royale dans la paroisse du Poiré (Méd. mun. de la Roche-sur-Yon : ms 019), extrait : réquisitions à "la Grande Roulière" ; voir aussi de Lorvoire (Jean-Claude), "les Réquisitions de l’armée catholique et royale dans la paroisse du Poiré-sur-Vie", in Recherches vendéennes, n° 3, 1996, p. 257-299.
Parmi ceux de "la Grande Roulière" qui participèrent à des combats et encore vivants vingt ans plus tard, on relève : "Etienne Gillaizeau, né en 1768, chasseur, blessé à la Gracière d’un coup de feu au bras gauche" (Archives du Service historique de la Défense à Vincennes : SHD-XU 33-1). En l’An V (1796/1797), on trouve parmi les 59 habitants de 12 ans et plus de "la Grande Roulière", les noms des familles Barreau, Buton, Cailleteau, Douaud, Gillaizeau, Grolier, Marais, Martineau, Pérocheau, Raynard ; des noms que l’on y retrouvera jusqu’au XXe siècle, voire jusqu’en 2022. A une époque où on avait le plus souvent plusieurs métiers, 5 se disaient alors "fariniers" (meuniers) et 1 "tisserand" (Dénombrement de la population de l’An V : Arch. dép. de la Vendée, L 288).
8 Les destructions de bâtiments opérées par le troupes républicaines sur la commune du Poiré sont évoquées marginalement dans les registres des Délibérations de l’administration municipale cantonale, allant de la fin 1796 au début de 1800 (Arch. dép. de la Vendée : L 1238). L’importance de ces destructions peut être appréciée grâce aux estimations des biens nationaux de 2e origine (essentiellement nobiliaire), datant de la même époque et montrant que sur 36 métairies mises alors sous séquestre, seules 5 avaient tous ses bâtiments considérés comme étant "en bon état", c’est-à-dire n’étant ni incendiés ou détruits, en partie ou en totalité (Arch. dép. de la Vendée : 1 Q 212), soit seulement 16 % d’entre elles. Les actes notariés de l’époque confirment cette situation (Arch. dép. de la Vendée : 3 E 24). Le tout donne une idée de ce que fut alors l’ampleur des destructions sur l’ensemble de la commune.
9 René Douaud (né en 1768), habitant à "la Grande Roulière", était fils de Jean (né en 1730), "fariniers" l'un et l'autre, et était un des trois meuniers du "moulin des Masures". Le fils de ce dernier, René (né en 1811), lui succéda, puis son petit-fils Pierre (né en 1835), puis son arrière-petit-fils René (né en 1864), tous meuniers. Ce dernier, père d’Armande, abandonna ce métier entre 1901 et 1906.
10 Localisation des exploitations agricoles de "la Grande Roulière" dans les années 1950, faite en 2019 par Daniel Marionneau, qui y est né et y habite.
11 Direction Départementale de l’Agriculture de la Vendée, Recensements de l’agriculture : comparaison entre le nombre et la répartition des exploitations du Poiré par tailles et par modes de faire-valoir en 1955, et leur nombre en 1988 (Arch. dép. de la Vendée : 1945 W 42, et 1839 W 5, n° 178). En 2021, il subsistait une soixantaine d’exploitations agricoles sur la commune du Poiré.
A "la Grande Roulière" comme ailleurs, c’est en vain que, pour lutter contre cette évolution inexorable, furent adoptées de nouvelles techniques ou productions (tabac, élevages hors-sol…). Il en est resté des traces dans le paysage :
En 2020 : un bâtiment ayant servi de séchoir à tabac à André Morinière, réhabilité en habitation ;
et un des anciens tunnels de culture de Guy Favroult, reconverti en petit élevage de gibier (faisans, perdrix).
12 On notera que l’arrivée du service d'eau à "la Grande Roulière" en 1972 avait rendu le village sensiblement plus attrayant pour ceux souhaitant venir s’y installer, et pour ses habitants ; jusqu’alors il fallait, seau après seau, "tirer l’eau du puits" et donc l’économiser pour cuire, boire, laver les légumes, la toilette et la lessive… sans compter que tout le monde n’avait pas de puits, le principal pour l’eau potable étant celui du lieu-dit "le Plis".
13 Alors que "l’intégration" consiste à trouver une place parmi d’autres personnes, "l’assimilation" demande d’aller plus loin. Ce qui pour les habitants "d’origine" d’un lieu, serait que leurs valeurs, mémoire et culture soient reconnues sinon adoptées par les "nouveaux venus". Et pour ces derniers, surtout lorsqu’ils estiment posséder des niveaux de revenus et d’études plus importants, c’est le plus souvent que les "locaux" se rallient aux mentalités et façons de vivre qu’ils apportent... Des démarches différentes et peu faciles à concilier entre elles, et des remises en cause difficiles à concevoir pour certains de ceux concernés.
Pour les endroits où "l’intégration" s’est moins bien faite qu’à "la Grande Roulière", cela s’est traduit dans le paysage par la multiplication de "renfermements individualistes".
14 Pour ceux qui ignoreraient le parler local, se reporter au Dictionnaire français › poitevin-saintongeais, poetevin-séntunjhaes › françaes de Vianney Pivetea (pour "gardour" : cf. p. 559), ou, aussi pour le Poiré, les communes voisines et celles du nord-est de la Vendée, au Glossaire étymologique et historique des patois et des parlers de l'Anjou, d’Anatole-Joseph Verrier et de René Onillon (pour "douet" : cf. t. 1, p. 298, ou p. 206 pour "cimentère"…). On en conclura que parler du "gardour du grand douet" est une formulation toponymique répétitive.
15 A ces croix, on pourrait aussi ajouter le souvenir de la croix en bois de la mission de 1962, qui avait été dressée dans l’angle de la route allant vers le bourg du Poiré, et du chemin conduisant à "la Métairie", et qui, comme le voulait sa nature, a disparu quelques décennies plus tard. Sa base, en béton, à migré de l’autre côté de la route, où elle subsistait encore en 2021.
16 Jean Gillaizeau (1798-1874) était l’arrière-arrière-petit-fils de Mathurin Gillaizeau (v.1677-1748) déjà meunier à "la Grande Roulière" à la fin du XVIIe siècle. Jean Gillaizeau et son épouse Jeanne Mollé (1808-1880) exploitaient le "moulin de la Grande Roulière", dit aussi "des Mazures", proche du village de "Londry". Ce moulin est présent en 1768 sur la carte de Cassini et ses restes semblent avoir été démolis vers 1940. Selon Donatien Martineau (1930-2013), de "la Grande Roulière", une pierre y aurait porté gravé "1519".
Depuis Mathurin Gillaizeau et jusqu’en 2022, 11 générations de Gillaizeau se sont succédé à "la Grande Roulière", les 6 plus anciennes générations connues exerçaient déjà l’activité de "fariniers", et on ignore combien il y a pu en avoir dans ce même métier auparavant.
17 La maison d’habitation en arrière de cette croix de 1868, fut édifiée avec ses annexes de ferme en 1914, par Benjamin Gillaizeau (1844-1914), fils de Jean et père d’Alphonse (1904-1976) afin de remplacer divers bâtiments dispersés dans le village. Cette exploitation a été en activité jusqu'en 1990 ; le dernier exploitant étant Donatien Martineau (1930-2013). Son fils Gérard Martineau, né en 1957 et qui travaillait dans les chantiers navals Bénéteau, partit développer cette entreprise en Caroline du Sud (Etats-Unis), ayant…
"le courage de s’expatrier avec son épouse et ses deux jeunes enfants [et à qui] nous devons la réussite industrielle de l’usine de Marion" ( 130 years of commitment to the sea / 130 ans d’engagement avec la mer, 2014, p. 32-33).
En 1986, la création de l’usine Bénéteau à Marion en Caroline du Sud
(au centre Annette Bénéteau-Roux, à droite Gérard Martineau) ;
et, vers 2010, une vue partielle de l’usine de Marion.
18 Le mois de mai était une période importante dans la vie spirituelle et dans la vie tout court d’un village. Ce mois étant consacré à la vénération de la Vierge, il était appelé "le mois de Marie", terme qui désignait aussi l’oratoire que l’on créait pour l’occasion dans une maison, qui pouvait changer d’une année à l’autre. On édifiait une estrade qui était recouverte d’une nappe, décorée de différents objets, régulièrement et abondamment fleurie, et en haut de laquelle on posait une statue de la Vierge Marie. Chaque soir, au son d’une corne les habitants du village se réunissaient et un membre de l’une ou l’autre des familles menait les prières durant lesquelles la récitation du chapelet alternait avec des chants et cantiques, et qui se terminaient par les litanies de la Vierge. La cérémonie durait une bonne demi-heure. Un des dimanches du mois, un prêtre de la paroisse, accompagné de fidèles du bourg, venait à pied dans l’après-midi pour bénir le "mois de Marie" du village.
La pratique des "mois de Marie" fut arrêtée à la fin des années 1960, une fin précipitée par les changements dans les modes et les rythmes de vie, et par la montée de préoccupations plus matérialistes.
19 Cette pierre, qui est ici vue de dessous, était l’élément central d’une meule tournante d’un moulin. Le trou rond est "l’œillard", dans lequel on versait le grain. C’était aussi par là que passait l’axe de rotation de la meule tournante. A la base de cet axe était fixé une sorte de croisillon en fer, "l’anille" (ou "fer à moulin"), dont les extrémités s’encastraient dans chacune des quatre encoches que l’on voit sous cette pierre "cœur de meule". Une pierre semblable peut se voir à "l’Aumère", et trois autres au "moulin Bonneau" de Beaufou.
20 D’après l’édition française du 15 mars 2017 du Wall Street International Magazine qui, à l’occasion de son exposition cette année-là à Bruxelles, revint…
"sur plus de 30 ans de création en présentant des œuvres conçues de 1989 à 2016 : des pièces en bois, en osier, en métal ou en papier journal, et la présentation quasi inédite d’une série d’encres sur papier" et aussi sur "le parcours artistique de Bernadette Chéné, marqué en profondeur par la pratique de la tapisserie et du tissage au début des années 1980 […] et porté par l’héritage du Minimalisme et de l’Arte Povera. Elle utilise des matériaux simples, quotidiens, familiers, pour en exploiter les formidables qualités plastiques, laisse résolument l’ornement à distance pour favoriser l’écoute, la perception subtile. […] La simplicité, Bernadette Chéné ne la cultive pas seulement dans les matériaux, mais aussi dans les formes : elle s’appuie sur la géométrie primaire, des cercles, des triangles, des colonnes ou des pyramides pour révéler le fond des choses […]".
Pour une vision d’ensemble de ses trente-cinq années de travail artistique, on se reportera à la monographie consacrée à Bernadette Chéné : A l’œuvre, Art3 Plessis Editions, Nantes, 2023, 250 p., 300 ill.
21 Perrocheau (Alain), Histoire et Anthologie de la Poésie en Vendée, 2020, p. 613-614.
22 Cf. Serres (Olivier de), Le théâtre d'agriculture et mesnage des champs, 1600, 5e lieu, chap. XIII : "l’Estang, le Pescher, le Vivier" (ou le terme "mesnage" y a le sens de "gestion", et est à la base de dérivés tels qu’aménager, aménagement… et, en parler local d’amenage, ou en anglais de management).
23 Au milieu du mois de décembre 1793 et venant de "la Grande Roulière", une troupe de soldats révolutionnaire vint pour incendier et massacrer dans les villages de "la Chamusière" et de "la Morelière" de Beaufou, ce qu’ils firent. Mais "les gars de Beaufou" se mobilisant surprirent les agresseurs qui, pris de panique, se débandèrent laissant des morts et des blessés :
"Les nombreux cadavres des scélérats furent enfouis au fond d'une carrière, par les blessés eux-mêmes que les balles vengeresses des Vendéens précipitèrent ensuite pour combler le vide. Les misérables ne demandèrent pas une grâce impossible en face des maisons incendiées et de tant d'honnêtes personnes si indignement massacrées".
(Hippolyte Boutin, Chronique paroissiale de Beaufou, 1904-1905, p. 481)
...reste à retrouver l’endroit où furent enterrés ces morts.
Quant à la relation existant entre "les événements traumatisants" ayant touché une population, et les traces durables qu’ils laissent souvent, ici et ailleurs, dans "les mémoires locales", voir en ligne les pages sur le combat de la Morelière.
24 Chèvremont (Philippe), Carte géologique de la France, feuille 561, intitulée "du Poiré-sur-Vie", 2008, et la page 66 de sa notice.
25 Dans Histoire de la Vendée, du Bas-Poitou, en France, 1902, chapitre 37, Louis Brochet (1847-1933), évoque la dernière victoire de Charette aux Quatre chemins de l’Oie (ayant eu lieu le 4 décembre 1795), et dit que
"Deux jours après, il fait célébrer une messe solennelle à la Roulière, de la paroisse du Poiré : l'abbé Remaud absout les soldats et bénit leurs armes"...
… ce qui pourrait être à l’origine du nom "Pont-Charette". Mais Louis Brochet, à son habitude, ne cite pas les sources d’où viennent ces informations, avance des datations incertaines. et les mémorialistes qui étaient alors jour après jour aux côtés de Charette, tels que Lucas Championnière (1769-1828) ou l’abbé Pierre-François Remaud (1756-1830) auquel il fait allusion n’apportent pas de confirmations. C’est ce qui fait que le milieu des historiens lui accorde une fiabilité réduite… Cependant, on ne voit pas pourquoi Louis Brochet serait allé inventer ce détail de l’histoire de Charette.
26 Sur les plus 8000 hectares du Poiré en 1836, et les plus de 20 000 parcelles qui y étaient cadastrées, seules ces parcelles A 268, 269, 270, 271, 272, ont "Charette" ‘(ou "charrette") dans leur nom (Arch. dép. de la Vendée : 3 P 178, et 3 P 2039 et 2040).
27 Cette cuvette, actuellement disparue, est à comparer avec une semblable mis au jour sur le site de Beg an Dorchenn (pointe de la Torche), en Bretagne, et conservé au Musée de la Préhistoire finistérienne de Pors Carn en Penmarc'h, ainsi qu’avec plusieurs sortes de cuvettes en pierre que l’on rencontre ici et là dans le village même de "la Grande Roulière".
Les unes et les autres sont souvent considérées comme ayant été des outils de broyage ou de mouture, avec des propositions de datations incertaines s’étendant sur plusieurs dizaines de millénaires, du néolithique aux débuts du Moyen Âge.
Cuvettes en pierre (dites parfois "meules dormantes"),
avec ou sans molette de broyage provenant…
- à gauche, du site de "Beg an Dorchenn" (? x ? cm) en Bretagne,
- à droite, du village de "la Grande Roulière" (75 x 60 cm).
Si on n'a trouvé aucun objet dans les autres souterrains connus du Poiré, des restes de poteries ont été découverts aux Lucs, dans ceux de "la Daunière" et de "la Bugelière".
28 Lucas Championnière (P.-S.), Mémoires de la Guerre de Vendée (1793-1796), édition 1994, p. 132. Lucas Championnière (1763-1825) combattit aux côté de Charette d’octobre 1793 à février 1796. Ses relations des événements auxquels il avait participé en ces temps héroïques, ne furent publiées qu’en 1904 par ses petits-fils. En 1864, Jules Verne, un ami de sa famille, s’inspira de l’histoire de sa vie pour son roman Le Comte de Chanteleine.
29 Lettre du 19 janvier 1796 / 29 nivôse an IV et lettre du 21 janvier 1796 / 1er pluviôse an IV (Arch. dép. de la Vendée : SHD B 5/34-39 et SHD B 5/34-44). Les "déserteurs" évoqués sont des soldats de l’armée révolutionnaire qui avaient rallié la cause des insurgés.
Travot avait fait partie de "l’armée de Mayence" envoyée à la fin de l’été 1793 faire de la répression en Vendée. Son principal fait d’armes, fut la capture de Charette le 23 mars 1796, ce qui lui valut d’être promu général de brigade, et lui permit d’asseoir sa fortune. Il devint ainsi propriétaire en mai 1798 sur le Poiré du château de "la Métairie" et de la plupart des terres de la famille Vaz de Mello, dont tous les membres avaient été tués par les révolutionnaires. Par la suite, on lui attribua la bonne réputation d’avoir "fait tuer avec modération", une réputation que les faits ont du mal à confirmer. Napoléon lui attribua le titre de baron avec armoiries, et en 1815, il se rallia à sa vaine tentative pour reprendre le pouvoir. Mentalement fragile, il finit ses jours dans une "maison de santé" de Chaillot, début janvier 1836.
30 Durant les années 1793 à 1796, Pierre-François Remaud (1756-1830) fut le Commissaire général de Charette, c’est-à-dire chargé, en son temps par celui-ci, de sa petite administration locale. Il fut un des rares à avoir pu s’échapper lors de son dernier combat, le 23 mars 1796. Réfugié en Angleterre de mai 1796 à mars 1797, il y rédigea un manuscrit de 240 pages sur ce qu’il avait connu et vécu de la guerre de la Vendée. Ce manuscrit a connut des périgrinations qui ont fait qu’il est resté inédit jusqu’à ce jour (en 2022).
31 On remarque que les moulins qui avaient tous été détruits par les troupes révolutionnaires durant l’hiver de 1793-1794, avaient été relevés. Si à cette époque les haies, étant exploitées, étaient plus nombreuses, elles étaient moins hautes et moins fournies qu’elles le sont deux siècles plus tard, surtout durant l’hiver. Selon la carte de Cassini, les moulins susceptibles d’être aperçus des hauteurs qui ont été appelées depuis "Pont-Charette", en direction de la Roche d’où venait Travot, pouvaient être le "moulin de Pont-de-Vie" et les deux "moulins Guérin". Dans d’autres directions et proche, il n’y avait guère que celui de "la Pierre blanche", dans l’ouest, tandis que les gars de Charette se trouvaient auprès du "moulin de la Grande Roulière" (ou "moulin des Masures").
32 Denieau-Lamarre (Théophile), Notes et Remarques, manuscrit, v. 1840 (Arch. mun. d’Avrillé, en Vendée) ; et mémoire locale recueillie en 2020 auprès de Pierre Martineau, de "Londry".
Face à cet endroit, une petite statue fut fixée un jour de 2017 sur l’une des rambardes de "Pont-Martin", faisant directement face au champ qui, à 45 mètres de là, vit beaucoup d’hommes perdre la vie ce 28 décembre 1795. Elle y resta pendant environ un an et demi, avant de disparaître, probablement du fait de quelque pilleur (ci-contre, la photo de cette statue le vendredi 24 novembre 2017). On ignore qui a pu l’y mettre… Ceci n’ayant pas été fait par des habitants des villages des alentours, on pourrait imaginer la possibilité d’un descendant d’un de ceux ayant été partie prenante de cet événement lointain et en ayant recueilli et conservé la mémoire.
33 Inventaire par E.-M. Vincent, en 2019, des Archives militaires de la guerre de Vendée (Service historique de la Défense à Vincennes : SHD-XU 16-38-39, 29-6, 33-1-2-3-4-5-6-7-8-11-12, 36-1, 39-3-4-5-7-8-9-10), complété par le dénombrement de 1797 (an V) et les registres d’état civil (Arch. dép. de la Vendée : L 288 et AC 178).
34 Jules Michelet, écrivain et historien-hagiographe officiel de la Révolution française, donnera de Charette une présentation étonnante et significative, faite à partir de son masque mortuaire :
"On sent là, une race à part, fort heureusement éteinte, comme plusieurs races sauvages. À regarder par derrière la boîte osseuse, c'est une forte tête de chat. Il y a une bestialité furieuse, qui est de l'espèce féline. Le front est large, bas. Le masque est d'une laideur vigoureuse, scélérate, militaire, à troubler toutes les femmes. L'œil arrondi, enfoncé pour d'autant mieux darder l'éclair de fureur et de paillardise. Le nez est le plus audacieux, le plus aventureux, le plus chimérique qui fut et sera jamais. Le tout effraye, surtout par une légèreté incroyable, et pourtant pleine de ruse, mais jetant la vie au vent, la sienne et celle des autres".
(Histoire de la Révolution française, éd. 1853, t. 6, p. 87-88, note).
Une vision des hommes et des choses, issue de la Révolution, qui aura des conséquences au siècle suivant.
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