la vie mouvementée du Cugandais Gabriel Ouvrard
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C'est le 6 novembre 1770 que Gabriel-Julien Ouvrard naquit à Cugand. Son père, Julien, papetier aux moulins d'Antières, le mit comme ses autres fils au collège de Clisson puis à celui de Beaupreau. L'année de ses 18 ans, il partit travailler dans une maison de commerce de denrées coloniales à Nantes. La nouvelle situation politique que venait de créer la convocation des états généraux lui fit présager la multiplication des publications écrites, aussi dès le début de 1789 acheta-t-il par avance toute la production de papier en Poitou et en Angoumois pour les deux années à venir. C'était le début d'une fortune qui s'accrut avec d'autres opérations du même genre dans le commerce des produits coloniaux (sucre, coton, café). En 1793, pour échapper à la terreur à Nantes, il s'enrôla dans les troupes de la répression qui dans leurs destructions systématiques de la région venaient d'incendier les papeteries familiales. A leurs côtés, il participa à la bataille de Torfou (19 septembre 1793), puis il fut envoyé dans la capitale, par la municipalité de Nantes, avec la périlleuse mission d'y protéger les intérêts de la bourgeoisie de la ville.
Le "Vieux logis" d'Antières, maison natale de Gabriel Ouvrard1,
après sa restauration en 1815,
suite à son pillage et à son incendie par les troupes révolutionnaires en 1793.
Ce séjour à Paris lui permit d'apprécier la situation économique du moment : l'incompétence financière des hommes en place, les opportunités offertes par la vente à faible prix des biens nationaux, l'importance des marchés des fournitures aux armées... Après l'élimination de Robespierre, il exploita ces différentes possibilités. Il s’engagea aussi dans des opérations à l’étranger, en particulier sur l’Espagne et sur son vaste empire colonial américain qui tiendront un rôle important dans ses affaires. Grâce à son savoir-faire, il devint pour les hommes politiques, un personnage à la fois indispensable (quand ceux-ci avaient besoin de financements) et gênant (quand les mêmes devaient honorer leurs dettes).
Il entretint avec Bonaparte des relations plus que difficiles : les séjours en prison (1800, 1809) et les saisies de biens alternèrent avec les opérations financières (pour la 2e campagne d'Italie, le camp de Boulogne, la prise en charge du service du Trésor Public, et pour de nombreuses autres). Constatant que la situation de guerre permanente constituaient un obstacle majeur au redémarrage de l'économie, il participa à des tractations secrètes avec l'Angleterre, ce qui lui valut de se trouver de nouveau en prison de 1810 à 1813.
En 1814, la Restauration lui permit de revenir politiquement en grâce et de reprendre ses affaires. Il fut amené à négocier l'emprunt pour libérer le territoire national occupé après les désastreuses défaites de Napoléon. Sa fille aînée se maria en 1822 avec le duc de Rochechouart. Il fut choisi comme munitionnaire pour l'expédition d'Espagne en 1823... Mais des accusations de corruption lui firent connaître, entre 1824 et 1829, encore une fois la prison, d'où il continua de gérer ses affaires. Disculpé, il fut libéré, poursuivit ses activités et voyagea à travers l'Europe et jusqu'en Colombie. Il mourut à Londres le 21 octobre 1846.
Gabriel Ouvrard en 1825
(selon la lithographie de Jean-François Villain illustrant le tome 3 de ses Mémoires).
Il a publié en 1826-1827 des Mémoires de G.-J. Ouvrard sur sa vie et ses diverses opérations financières. Tout en évoquant dans un style alerte et convaincant son existence de 1770 à 1825, il s'efforce de se disculper des nombreuses attaques que lui valurent ses multiples opérations financières : tome 1, 365 p. tome 2, 368 p. tome 3, 412 p.).
Parmi les nombreuses biographies de Gabriel Ouvrard, on peut retenir :
- Le Financier Ouvrard, 1770-1846 - l'argent et la politique, de Jacques Wolf, Taillandier, 1992, 347 p. ;
- Le Financier G.-J. Ouvrard : 1770-1846, de Maurice Payard, 1958, 426 p. ;
- Tel fut Ouvrard, le financier providentiel de Napoléon, de Jean Savant, Fasquelle, 1954, 298 p. ;
- Un grand profiteur de guerre sous la Révolution, l’Empire et la Restauration, G.-J. Ouvrard, d'Arthur Lévy, Calmann-Lévy, 1929, 286 p.
En 2004, dans les pages 240 à 242, du livre Napoléon Bonaparte et la Vendée, Jérôme Biteau a rédigé sur lui un article-bilan sous le titre... "le Napoléon du crédit".
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1 Dessin d’Auguste Douillard, in " Etude géographique et historique sur la Sèvre nantaise. Les moulins d'Antières – notice biographique sur Gabriel Ouvrard, 1770-1846 (M. Lamprière)", dans la revue Echos du Bocage, 1889, p. 171.
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