1793-1794 : incendies et massacres dans les villages de St-Etienne
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Dans les années 1883-1884-1885, Paul Boutin (1847-1913), nouveau curé de Saint-Etienne-du-Bois, fut amené à visiter les villages de sa paroisse, et eut l’occasion de recueillir auprès des "anciens", les souvenirs qu’on leur avait transmis des événements tragiques ayant eu lieu localement durant l’époque révolutionnaire. Consignés et conservés au presbytère, ils furent quelque 70 ans plus tard repris et publiés, au moins partiellement, dans le Bulletin paroissial.
Ainsi entre novembre 1955 et janvier 1957, ce furent les récits se rapportant aux incendies et massacres qui avaient eu lieu en 1793-1794 dans les villages de Saint-Etienne-du-Bois. Ils rappellent ces événements particulièrement traumatisants de l’histoire locale, qui ne sauraient être oubliés et encore moins niés. Au-delà de cet aspect des choses, ils constituent un exemple de transmission du passé par la mémoire populaire et ils sont souvent recoupés et confirmés par de nombreux autres témoignages et documents.
Les lignes ci-dessous les synthétisent (avec quelques redites) village après village, à partir de ces Bulletins paroissiaux ; elles sont suivies par un rappel des noms connus des habitants de Saint-Etienne-du-Bois qui furent tués durant cette période.
La CHAMBAUDIÈRE
La Chambaudière et le Chiron, parce que, situés sur des hauteurs, furent choisis par les révolutionnaires pour établir des camps chargés de surveiller la grande route et les alentours. A la Chambaudière, le camp était établi dans un champ derrière la maison située au sommet de la côte. Les habitants effrayés de ce voisinage s’enfuirent chercher abris et cachettes ailleurs. Toutes les maisons furent saccagées et incendiées. Cela, au dire de Vincent Loizeau qui habitait là, comme ses descendants actuels.
La GLOSSETIÈRE
La Glossetière, qui touche, ne fut pas mieux traitée. Tout y fut brûlé et du haut de la Chambaudière les bleus tiraient sur les habitants qu’ils voyaient y revenir. On trouva dans la suite un nombre considérable de balles dans le village et les alentours. Un jour, les Bleus alignèrent le long d’un mur les personnes qu’ils purent saisir : vieillards, femmes, enfants, et les égorgèrent sans pitié et sans pudeur. Ils suspendirent même aux branches des pommiers du village des cadavres de femmes pour épouvanter les Vendéens.
La CHÊNELIÈRE et l’AUBIER
Presque toutes les maisons de la Chênelière, de même que celles de l’Aubier, furent brûlées, celle des Mandin entre autres. Des massacres y furent commis et plusieurs personnes furent jetées dans le puits situé dans un pré en bas du village. Une grand-mère Mandin surprise près de sa maison fut massacrée sans pitié. Tous les habitants de la Chênelière et de l’Aubier avaient coutume de se cacher dans la forêt de Grand-Landes. Ils y avaient emporté tous les ustensiles nécessaires pour cuisiner. Ils y moulaient même du blé au moyen de petits moulins à bras. Mais les bleus les y découvrirent et mirent le feu à ce côté de la forêt qui a gardé le nom de "Brûlé".
Tous les hommes de la Chênelière et de l’Aubier prirent part à l'insurrection et s’enrôlèrent dans l’armée de Charette. Quand les Bleus occupaient leur camp de la Chambaudière, ils avaient des sentinelles dans toutes les directions, afin de n’être pas surpris par l’armée de Charette ; et le soir, on entendait les sentinelles se passer ce mot : "Sentinelles, garde à vous ! Charette marche sur vous !" Mais un soir qu’il y avait liesse au camp républicain à la suite d’une bonne affaire contre les Vendéens, on entendit cette variante ironique : "Sentinelles, garde à vous ! Charette n'a plus qu'une roue !"
Tous ces renseignements sur la Chênelière et l’Aubier ont été fournis par une femme Mandin et le nommé Pierre Musseau, âgé de 69 ans et très instruit de toutes ces choses. D’après lui, M. Barbedette, curé du Grand Luc, surnommé "le curé Grand-Bot", aurait séjourné quelque temps à la Chênelière. Il était très populaire dans les alentours et avait une renommée légendaire à cause de son habileté à déjouer les recherches des révolutionnaires.
Le CHIRON
Comme la Chambaudière, le Chiron fut occupé militairement et sans doute tour à tour selon qu'ils étaient les maîtres de la contrée, par les Bleus et par les Vendéens. Le Chiron en effet est un point stratégique plus encore que la Chambaudière, car de là on peut surveiller les alentours et plusieurs routes ou chemins suivis par les troupes adverses. Le centre du cantonnement était la maison située sur le point le plus élevé, avec des dépendances importantes. A cause de cette destination on lui donna le nom de "Quartier", qu’elle conserva depuis. Le champ qui est derrière servait de champ de manœuvre et de tir et il reçut à cause de cela le nom de "Parc", et le champ suivant servait à enterrer les morts des environs et il prit le nom de "Cimetière".
La ROTHELIÈRE
Le voisinage des Bleus devait être quelque peu inquiétant pour le village de la Rotheliere. Ils y firent de fréquentes apparitions et brûlèrent absolument tout. Il y avait alors au sommet du tertre élevé, sur les flancs duquel le village est bâti, un joli moulin. Ce moulin fut si bien incendié par les Bleus que l’on n’a pu songer à le relever (la Croix de la Mission de 1945, a été élevée sur l’emplacement de ce moulin). Il faut en dire autant de quelques maisons qui se trouvaient entre la Rotheliere et le pont de la Naulière, et qui formaient un village à part sous le nom de "Petite Naulière". Ces maisons n'ont pas été relevées et, par suite, le village a disparu.
Les EMBARDIÈRES et le FONTENIT
Le grand village des Embardières attira particulièrement l’attention des incendiaires et des massacreurs, qui y firent de nombreuses visites à la recherche de cachettes dans cet entassement de bâtiments de toutes sortes, surtout après qu’il fut devenu un amas de ruines. De fait en découvrirent-ils et tuèrent-ils beaucoup de monde, surtout les 8, 11 et 12 février 1794. Une des plus fructueuses fut peut-être celle du 26 mars, où ils tuèrent 6 femmes cachées dans la maison habitée maintenant par la famille Erceau. Une d’elle avait dans ses bras une toute petite fille que les Bleus se contentèrent de jeter à terre, où elle fut ramassée peu après et sauvée. Elle devint une femme Charrier, de la Lande.
Les traces des incendies ont été reconnues lorsque l’on voulut reconstruire ou restaurer les maisons du village. Dans presque tous les murs on trouvait des morceaux de poutres brûlées, indice certain des incendies allumés par les Bleus.
Les Embardières possédaient alors un grand calvaire dans le genre de celui du Coteau, avec une Piéta également. Les soldats bleus se préparaient à le démolir après avoir incendié le moulin, lorsqu'un de leurs officiers arriva et le leur défendit. Ce calvaire, situé un peu plus haut que le petit calvaire d’aujourd’hui, a été démoli en 1845 pour faire la route.
Un jour, pendant que brûlait le moulin du village, quelques soldats républicains voulurent démolir ce magnifique calvaire qui s’élevait non loin de celui qu'on y voit actuellement et qui, comme le grand calvaire du bourg, avait, sur le devant, une grotte renfermant une statue de la Sainte Vierge. Mais on ne sait pour quel motif le chef des Bleus s’opposa à la démolition de ce monument qui subsista et ne disparut que lorsqu’on fit la route de Saint-Etienne au Poiré. Aussi les habitants du village regardèrent-ils la conservation de ce calvaire comme miraculeuse et, à partir de ce moment, la statue de la Vierge, qui ornait la grotte placée à la base de ce monument ne fut plus appelée que "Notre-Dame de la Victoire".
Un autre jour, les soldats républicains fouillaient le village et découvrirent six femmes cachées dans une maison. L’une d’elle tenait dans ses bras une petite fille. Les Bleus tuèrent cette dame avec les cinq autres, après lui avoir enlevé son enfant, et l’avoir jetée par terre. Une autre femme recueillit quelque temps après cette petite qui heureusement n’avait pas de mal et qui survécut.
Dans le même temps, une douzaine de femmes furent massacrées semblablement à l’Auspierre de Beaufou, village située non loin des Embardières.
Les hommes des Embardières se signalèrent par un courage vraiment héroïque. L’un d’eux, qui participa à un grand nombre de batailles, eut une jambe blessée par une baïonnette au combat des Gâts, dans le Luc ; il reçut de plus sept coups divers à la tête; et bien que toutes ces blessures fussent assez sérieuses, les soins qui lui furent donnés à Dompierre lui sauvèrent la vie.
Voici la liste des personnes tuées aux Embardières par "les ennemis de la Religion", dont les noms ont été conservés dans les archives :
- Louis Bignon, 32 ans, tué le 18 octobre 1793.
- Jean Orceau, meunier, 49 ans, tué le 18 octobre 1793.
- Marie Charrier, 48 ans, tuée le 29 janvier 1794.
- Marie Charrier, sa fille, 20 ans, tuée le 29 janvier 1794.
- Pierre Lachaise, 55 ans, tué le 8 février 1794.
- Jacques Lachaise, son frère, 48 ans, tué le 8 février 1794.
- Gilles Barreteau, 72 ans, tué le 8 février 1794.
- Renée Perrocheau, femme de Pierre Orceau, tuée le 8 février 1794.
- Marie Perrocheau, Vve Barreteau, 48 ans, tuée le 11 février 1794.
- Marie-Anne Baudouin, femme Barreteau, 70 ans, tuée le 11 février 1794.
- Jeanne Grelier, épouse de Jacques Charrier, 20 ans, tuée le 12 février 1794.
- Louise Guillet, épouse de Mathurin Poingt, 70 ans, tuée le 18 février 1794.
- Charles Pérocheau, veuf de Marie Dugast, tué le 21 février 1794.
- Pierre Orceau, 70 ans, tué le 22 février 1794.
- Etienne Barré, tué le 27 février 1794.
- Jean Barré, son fils, 27 ans, tué le 27 février 1794.
- André Potier, époux de Marie Nau, 69 ans, tué le 16 mars 1794.
- Pierre Yvernogeau, tué le 17 mars 1794.- Pierre Goéchon, tué le 12 décembre 1795.
Dans le même temps, le Fontenit eut :
- Jean Crété, 85 ans, tué le 13 février 1794.
- Jeanne Simonneau, tuée le 15 février 1794.
- Clément Bignon, 70 ans, tué le 18 février 1794.
- Pierre Péraudeau, 66 ans, tué le 22 février 1794.
- Charles Charrier, 23 ans, tué le 26 février 1794.
- Marie Charrier, sa sœur, 20 ans, tuée le 26 février 1794.
Les Embardières eurent cependant l’avantage de posséder dans leurs murs pendant un temps relativement long, un prêtre, M. Thouret, natif du diocèse d’Angers. Il dut y venir après ces massacres et y resta jusqu’à 1797. Il habitait tantôt aux Embardières, tantôt au Fontenit. Il descendait aussi au bourg où il aurait fait au moins un baptême dans la famille du sacristain Heurlin, à la Poissonnière, dans la maison possédée depuis par Erceau. Les archives de la mairie conservent quelques notes de lui concernant le massacre de plusieurs hommes des Embardières en 1794 et 1795.
On rapporte aussi que le feu fut mis au village du Fontenit et que toutes les maisons de l’époque brûlèrent.
La LARDIÈRE
Les renseignements sur la Lardière viennent d’un habitant de ce village, Jean Loizeau, âgé de 77 ans qui a affirmé que toutes les maisons de la Lardière furent brûlées, à l’exception d’une seule, qui sert actuellement [en 1885] de boulangerie à sa famille et dans laquelle se voit un vieux pétrin d’un seul morceau, creusé dans un tronc d’arbre. Un certain nombre de femmes et d’enfants y furent massacrés. Les Bleus passaient souvent à la Lardière comme ils avaient un camp non loin de là, à la Chambaudière.
Un jour une femme revenait de la fontaine. Des Bleus qui la rencontrèrent se saisirent de sa cruche et l’en frappèrent si rudement à la tête qu’elle tomba sans mouvement sur le terrain. Elle n’était heureusement qu’étourdie par le coup.
Un autre jour ils réquisitionnèrent plusieurs femmes, parmi lesquelles se trouvait la future mère dudit Loizeau, pour aller conduire un chargement de vin à Legé. Quand elles y furent arrivées, on voulut tuer leurs bœufs pour les manger. "Mais, citoyens, dit l’une d’elles avec beaucoup de sang-froid et d’à-propos : si vous mangez nos bœufs, nous ne pourrons plus vous amener de vin !" Cette réplique fut trouvée de bon goût, car les citoyens épargnèrent les bœufs et poussèrent même l’amabilité jusqu’à offrir à boire à ces paysannes dans une belle coupe en argent. De retour chez elles ces femmes étaient tellement effrayées qu’elles ne voulurent plus rester dans leurs maisons dans la crainte de recevoir de nouveau la visite des Bleus. Elles abandonnèrent tout pour aller se cacher dans les champs. Pour ceux-ci ne trouvant plus personne dans le village lorsqu’ils y passèrent de nouveau, ils mirent le feu aux maisons.
Jean Loizeau tenait ces détails de son père François Loizeau, qui avait suivi Charette, Savin et Lecouvreur, et avait participé à 52 combats sans recevoir de blessure. Les Bleus passaient souvent à la Lardière comme ils avaient un camp non loin de là, à la Chambaudière.
Le MARCHÉ NOUVEAU et le RIVAULT
Dans ces deux villages voisins du bourg, l’incendie allumé par les Bleus n’épargna qu’une seule maison (du Rivault). Le curé "Grand-Bot", c’est-à-dire l’abbé Barbedette, curé du Grand-Luc et aumônier de l’armée vendéenne, aurait, selon les dires de deux hommes du Marché-Nouveau (témoignages recueillis vers 1885), célébré plusieurs fois la messe sous un chêne, dans un champ appelé les "Grandes-Landes", qui se trouve dans la région de la Renardière, et du Marché-Gautreau.
On lui prêtait même des pouvoirs mystérieux dont voici un exemple rapporté par Augustin Boilève, du Marché-Nouveau (il tient plus de la légende que de l’histoire) : Un jour qu’il traversait les Landes de la Loubisse, ceux qui l’accompagnaient lui signalèrent une bande de républicains qui marchaient sur lui à pas précipités. Nullement déconcerté à cette vue, il planta son bâton au milieu de la route et continua son chemin. Les Bleus arrivés à l’endroit où se trouvait le bâton furent pris soudain comme d’un accès de folie et se mirent à danser autour. Pendant ce temps le curé Grand-Bot, évidemment, disparaissait dans le bocage.
Les ÉMÉRILIÈRES et le RORTHAIS
Un jour six femmes, surprises par les Bleus près de ces deux villages, furent interrogées sur le lieu où se trouvaient leurs maris, et comme elles refusaient de répondre et que les menaces suivies de mauvais traitements n’aboutissaient à rien, les Bleus, furieux, les garrottèrent et les conduisirent près du vieux moulin de Rochequairie, où ils les massacrèrent sans miséricorde Leurs corps restèrent plusieurs jours étendus au pied du moulin sans qu’on osât en approcher, tant était grande la terreur des habitants.
Cependant, un métayer des Emérilières, plus brave que les autres, se décida, un soir, à lier ses bœufs et à venir ramasser les six cadavres qui répandaient déjà une odeur insupportable. Une fosse avait été préparée secrètement dans le bas-jardin de la cure, pour les recevoir; mais quand on fut sur le point de les déposer dans cette fosse, on s’aperçut qu’il manquait le corps d’une femme; au lieu de six il ne s’en trouvait que cinq. Les cahots du chemin avaient fait glisser l’autre de la charrette; il fut retrouvé non loin du Rorthais...
La CHIFFAUDIÈRE et la SAVARIÈRE
Dans ces villages, les Bleus se signalèrent par toutes sortes de cruautés. Le terrain qui s’étend entre la Chiffaudière et la Savarière fut le théâtre d’une horrible boucherie. Quinze femmes y furent fusillées. Une personne de la Tulévrière échappa à ce massacre, en se cachant dans un chêne creux. Le sacristain Heurlin les amena en charrette, enterrer près de la Bagatelle.
Un nommé Thomas Paudeau faillit faire partie des victimes de cette tuerie. Il avait dans ce coin de campagne creusé une grande excavation en terre et l’avait recouverte d’un tas de fagots de bois. Il y cachait ses enfants et leur portait à manger. C’est le fils d’un de ces enfants qui a rapporté le fait. Comme quoi les pauvres habitants usaient de toutes sortes de moyens pour échapper et faire échapper les leurs à la mort dont ils étaient toujours menacés.
Les FOUGÈRES
Les Fougeres, au rapport de la veuve Morandeau, eut moins à souffrir que les autres villages. A quoi dut-il sa tranquillité relative ? On ne sait. Il aurait été un des refuges du curé Grand-Bot du Grand-Luc.
La BERSAUBIÈRE
A la Bersaubière, on eut à déplorer, de la part des Bleus, les mêmes excès et les mêmes cruautés que partout ailleurs. Un jour, les Bleus parurent dans les champs qui avoisinent la Bersaubière, sans que personne n’ait été prévenu de leur arrivée. Grand fut l’émoi des quelques habitants qui étaient restés dans le village. Ne sachant où se cacher, ils entrèrent pêle-mêle dans une boulangerie qui se trouvait à proximité et, sans plus de réflexion, voyant la "gueule" du four ouverte, les femmes et les enfants s’y blottirent, et deux hommes en fermèrent L’’entrée. Après quoi ces deux hommes sortirent précipitamment et cherchèrent leur salut dans la fuite. Les Bleus, qui les virent sortir de la boulangerie, y étant entrés et n’apercevant personne, crurent qu’ils étaient seuls et n’eurent pas la pensée d’ouvrir la porte du four. Leur unique préoccupation fut de poursuivre les deux hommes qui fuyaient devant eux. Et c’est ainsi que les femmes et les enfants qui étaient cachés dans le four, furent sauvés. Quant aux deux hommes, l’un d’eux, malheureusement, fut atteint par les Bleus et massacré.
La BOUTIÈRE
Gilles Guillet, vieillard de 93 ans, très bien conservé, qui a toujours habité la Boutière, a dit qu’à l’époque révolutionnaire tout le village avait été brûlé, que les murs seuls restaient. Il a souvent entendu raconter par sa mère que la veille de sa naissance elle monta elle-même sur le faîte d’une maison pour éteindre le feu. Le village étant placé près de la route de Palluau à Legé, dut recevoir souvent la visite des Bleus. Aussi les habitants avaient-ils abandonné leurs maisons. Gilles Guillet racontait que dès le matin son père liait ses bœufs et emmenait toute sa famille dans les champs à l’écart. Le dit Guillet a été baptisé à la Boutière même par M. Guillon, aumônier des armées catholiques. L’acte de ce baptême se trouve à la mairie de Saint-Etienne.
La MARTINIÈRE
Ce village connut le même sort que la Boutière ; toutes les maisons y furent brûlées; il n’en resta qu’une seule qui servit, par la suite, de "gerberie" à un cultivateur nommé Perdriau, au bas du village. Les Bleus se rendant de Palluau à Legé ou de Legé à Palluau, passèrent souvent à la Martinière et y commirent des massacres. Les victimes furent enterrées dans un pré qui touche le village et qui s’appelle "le pré de la Martinière". Anne-Marie Angibaud, veuve Loué, disait que sa grand-mère paternelle avait été du nombre des victimes. Et sa mère lui avait souvent raconté que pour échapper à la mort, elle et ses parents allaient se cacher dans une gîte.
Mais comme on était obligé de se tenir sans cesse sur le qui-vive et que les alertes étaient continuelles, plusieurs préférèrent quitter le village et suivre l’armée de Charette.
La SALLE
Au rapport de Pierre Erceau, charpentier, âgé de 57 ans, le village de la Salle, que son grand-père habitait, fut entièrement incendié, à l’exception d’une maison, propriété d’une famille Gillaizeau. Quand les Bleus approchaient du village les habitants se sauvaient dans les bois de Chantebusain. Les hommes montaient dans les grands arbres pour surveiller les allées et venues des Républicains, qui avaient un camp dans les vignes proches du bourg de Palluau, appelées depuis "Vignes du Camp". Une fois cependant on fut surpris. On venait de mettre le pain au four et au moment où il était cuit les Bleus vinrent et s’emparèrent du pain frais.
La MARCHEZIERE
Située dans ces mêmes parages voisins de Palluau, la Marchezière fut souvent traversée par les soldats républicains qui l’incendièrent et la pillèrent totalement. Un nommé Jean Fisson, de ce village, âgé de 69 ans, racontait que la belle-mère de sa femme parlait souvent de nombreuses apparitions des Bleus dans le village, et que les habitants étaient obligés de se sauver et de se cacher dans un champ d’ajoncs très écarté et très fourré, où ses parents avaient emporté les ustensiles de cuisine et même un lit dans lequel elle avait elle-même couchée. C’était près d’un grand arbre du haut duquel les hommes surveillaient les mouvements des révolutionnaires.
PISSOT, BEL-AIR, la MALADRIE
Situés encore plus près de Palluau, ces trois villages étaient journellement sous les menaces et les méfaits des républicains et n’avaient de tranquillité que lorsque ceux-ci étaient tenus à distance par les armées vendéennes. Un nommé François Laucoin, 70 ans, dont la famille habitait alors à Bel-Air et où il est né lui-même, a raconté ces choses qu’il tenait de sa mère lors du fait suivant : Les habitants de Bel-Air étaient tous partis assister à une messe célébrée aux Embardières par M. Thouret. Seuls restaient au village les vieillards et les enfants au nombre de dix ; encore s’étaient-ils cachés dans une vigne voisine. Ils y furent surpris par une troupe de Bleus qui les massacrèrent tous. Il y avait entre autres victime la grand-mère de Laucoin que l’on enterra avec les autres sans doute à l’endroit du massacre. Tous les ans la mère de Laucoin allait le soir de la Toussaint réciter son chapelet dans cet endroit.
Un jour que les habitants de Pissot avaient pétri du pain et se préparaient à le mettre au four, les Bleus les surprirent. Ils n’eurent que le temps de se sauver, abandonnant la pâte aux républicains. Ceux-ci furieux d’avoir manqué les habitants, et pour qu’ils ne retrouvent pas leur pâte, la répandirent de tous côtés aux alentours. Cependant, tellement la nourriture était rare, lorsque les habitants revinrent, ils prirent la peine de recueillir ce qu’ils purent de cette précieuse pâte et la firent cuire.
La GRANDE-VILLENEUVE, le RONDAIS
Le village de la Grande-Villeneuve reçut souvent la visite des Bleus qui marquèrent leur passage par le pillage et l’incendie. Les maisons devinrent la proie des flammes. Seul un hangar qui sert (en 1885) d’atelier à Beaugé, charpentier, échappa à la destruction générale. Ce hangar présente une forme de construction inconnue dans nos contrées : il ressemble comme genre aux maisons en bois de nos anciennes villes. Voici à quelles circonstances il doit d’avoir échappé à l’incendie : un certain nombre de personnes du village, surprises sans doute par l’arrivée imprévue des Bleus, s’y étaient cachées et avaient fermé la porte sur elles. Pendant ce temps les bleus incendiaient le village, et ces personnes craignant avec juste raison qu’ils ne vinrent mettre le feu au hangar, employèrent la ruse suivante pour détourner leur attention ; elles mirent elles-mêmes le feu à la porte du hangar, de sorte que, quand les Bleus passèrent devant ils se figurèrent que ce feu avait déjà été allumé par un des leurs et portèrent plus loin les fagots qui sans cette ruse auraient probablement servi à incendier le hangar. Puis à peine les Bleus s’étaient-ils éloignés que les personnes enfermées dans ce lieu s’empressèrent d’éteindre le feu qu’elles avaient elles-mêmes allumé. Néanmoins, malgré tous leurs soins, le hangar courut de grands dangers puisque plusieurs pièces de bois qui servent de montants dans les murs ont été léchés et noircis par les flammes. Je tiens ces détails de Pierre Beaugé lui-même.
Au témoignage de Pierre Pérocheau, du même village, la fureur des républicains se porta surtout sur les moulins de la Grande-Villeneuve et sur ceux du Rondais. La Grande-Villeneuve avait alors trois moulins et c’est même sous le nom de "village des trois moulins" qu’on le désignait dans le pays. Ces moulins et ceux du Rondais furent incendiés à plusieurs reprises, mais d’abord sans succès, car les femmes de ces villages, une fois les Bleus partis, accouraient bien vite et éteignaient le feu. Quelques-unes d’entr’elles ayant été surprises un jour dans l’acte d’un tel crime, furent immédiatement arrêtées. On fouilla tous les alentours de la Grande-Villeneuve et du Rondais et les femmes qu’on y trouva furent amenées sous un cerisier dans un champ proche des maisons de la Grande-Villeneuve, puis massacrées sans pitié. On incendia ensuite les moulins, qui brûlèrent entièrement.
Les habitants de ces deux villages allaient se cacher dans un bois près de la Jaubretière. On y avait porté un nombre considérable de lits.
La SEILLERIE
La Seillerie, bien que située dans un épais bocage peu accessible fut comme les autres villages visité, pillé et incendié par les révolutionnaires. Les habitants se sauvaient dans la direction de la forêt de Grand'Landes, mais n’y entraient que si des hommes montés sur de grands arbres signalaient l’approche des Bleus. Si au contraire ces hommes signalaient le départ de l’ennemi, les habitants rentraient vite combattre l’incendie de leurs demeures. Malgré ces précautions plusieurs personnes ne purent échapper au massacre.
La GROLLE
Bien qu’écartée des grands chemins, la Grolle fut plusieurs fois victime de la visite des Bleus. Au dire de Gabriel Fillâtre, 84 ans, dont la famille habitait ce village, les habitants durent fuir bien souvent les meurtriers, et se cacher même la nuit dans les champs.
L’YVERNOGÈRE
Il en fut de même du village et des habitants de l’Yvernogère, où tout passa par les flammes. On rapporte en particulier que la famille Musseau dut enfouir au pied d’un arbre pour les sauver ses papiers de famille.
La RIVIÈRE
Un nommé Jean Trichet, du village de la Rivière, a raconté que l’incendie n’épargna aucune maison de ce village, qui alors en comptait une dizaine. Ses parents n’osaient rester dans leur maison en ruines que la nuit. De jour ils allaient se cacher dans le bois de Rochequairie qui était très fourré.
La VIEILLE ROCHE
Le Pâtis et la Vieille Roche eurent le même sort d’après le dit Trichet. Au rapport de Gilles Guittet, de la Boutière, un prêtre dont on n’a pas retenu le nom, aurait été caché à la Vieille-Roche chez la famille Guillon.
Le PÂTIS
Au Pâtis, une ou deux maisons auraient échappé à l’incendie. Une veuve Rambaud a raconté que sa grand-mère avait été tuée dans la partie du village appelée la Barretière. Surprise par les Bleus elle eut cependant le temps de cacher ses enfants, encore tout petits dans un mauvais toit à cochons. Les Bleus la sachant fortunée lui demandèrent de l’argent ; sur son refus, ils se mirent à piller la maison. Or ils trouvèrent dans un meuble une cocarde blanche. C’en fut assez pour mériter la mort, et aussitôt d’un coup de fusil ils la tuèrent. Puis, quand les meurtriers furent partis, les enfants sortirent de leur cachette et allèrent à la recherche de leur mère qu’ils trouvèrent étendue, sans vie, au milieu de la maison. Parmi eux était, âgée de cinq ans, la future mère de la ci-dessus veuve Rambaud.
La BOULOGNE
D’après Louis Rabaud, de la Boutière, dont les ancêtres habitèrent la Boulogne, ce village fut incendié et pillé comme les autres.
ROCHEQUAIRIE
A Rochequairie, cependant, le vieux manoir des Thévenin et des Robineau échappa, on ne sait pourquoi, à l’incendie et à la destruction du village. Il n’y eut, dans son enceinte qu’une petite construction, insignifiante, qui devint la proie des flammes, d’après Henri Chabot, dont la famille habitait et cultivait la métairie du château dès avant la révolution.
La THIBAUDIÈRE
Le feu allumé par les Républicains laissa des traces profondes à la Thibaudière, un prêtre, qui changeait souvent de résidence pour échapper à la recherche des Républicains aurait célébré plusieurs fois le saint sacrifice dans la chambre haute d’une maison située au bord de la route qui traverse le village. Il s’agirait plutôt de l’abbé Barbedette, curé du Luc, aumônier de l’armée vendéenne, que de l’abbé Ténèbre, qui se cachait à la Tullévrière.
Le GUÉ-AU-CHAUD, la CROIX-BLANCHE, la PÉCOULTIÈRE
Le Gué-au-Chaud, la Croix-blanche, la Pécoultière, qui forment, on peut dire, une seule et même agglomération, étaient bien placés sur le bord de la grande route pour recevoir la visite des révolutionnaires et subir leurs méfaits. La proximité du camp des Bleus, dans les vignes de Palluau, comme les allées et venues des troupes entre Legé et Palluau, firent que les incendies et les massacres y furent souvent répétés.
Le Gué-au-Chaud fut même le théâtre d’un des premiers combats entre partisans de la Révolution et défenseurs de la religion. Ce fut le 12 mars 1793. Il y eut des morts. On connaît les noms d’une dizaine, tant de Saint-Etienne que de Palluau et de Legé. Ce combat était la suite de ceux qui avaient eu lieu les jours précédents à Legé et Palluau.
Une femme âgée, Marie Péraudeau, Vve Laucoin, dont la famille habita la Pécoultière, a raconté qu’un certain nombre de personnes furent trouvées par les Bleus enfermées dans une petite maison de la Pécoultière et qu’elles y furent brûlées vives. Sa mère avait vu les ossements calcinés des victimes. Son grand-père paternel, soldat dans l’armée de Charette, portait le drapeau orné de l’image du Sacré-Cœur dans une bataille près de Saint-Laurent-sur-Sèvre et y reçut une blessure mortelle.
La MERCERIE
La Mercerie ci près du bourg de Saint-Etienne, suivit à peu près le sort de celui-ci, c’est-à-dire qu’il subit maintes fois incendies et tueries. Elle fut entièrement brûlée, et une guerre à mort fut déclarée aux habitants, même les plus inoffensifs. Un jour les Bleus surprirent une femme enfermée dans une maison avec ses jeunes enfants. Ils les fusillèrent. Cependant la mère échappa à la mort parce que, dès la première détonation, étant tombée comme morte de frayeur, les soldats la crurent réellement morte et la laissèrent. Après leur départ elle revint à elle et se releva couverte du sang de ses enfants. Un autre jour c’est une vieille femme très sourde qui, malgré les avertissements de ses voisins, suivait un sentier par lequel venaient des Bleus, qui la tuèrent. Une autre fois, les Bleus fusillèrent une femme, laissant deux orphelins : une fille de 7 ans et un petit garçon de 2 ans, qui ne se trouvaient pas avec elle. Mais la fille, voyant les massacreurs venir vers elle, prit son frère, le jeta dans le coin d’une masure découverte, pleine de grandes herbes, où il s’endormit, tandis qu’elle-même alla se cacher ailleurs. Après le passage des malfaiteurs, elle retrouva son frère.
Ces renseignements et d’autres ont été donnés par Virginie Pénisson, femme Péraudeau, dont la famille habitait depuis longtemps la Mercerie. Elle dit aussi que le moulin de la Mercerie et le village des Vergnes furent incendiés.
La TULLÉVRIÈRE
Un village de Saint-Etienne-du-Bois fut cependant épargné : la Tullévrière, village qui comptait alors au moins une vingtaine de maisons habitées. Plusieurs fois pourtant les Bleus y vinrent et tentèrent d'incendier les premières maisons, mais des hommes, cachés à proximité, réussirent à les chasser et même à en tuer avant qu’ils aient pu causer de sérieux dommages. C’est qu’en effet les habitants des villages, surtout au moment des alertes, désertaient leurs maisons pour aller se cacher dans quelques points isolés de la campagne, ce qui ne les faisait pas toujours échapper aux recherches des massacreurs.
La Tullévrière dut peut-être en partie sa protection à ce que le général Savin, qui avait une demeure près du calvaire du Coteau, à Saint-Etienne, en avait une autre à la Tullévrière, où il séjournait de préférence en période d'accalmie de la guerre, parce qu'il s'y trouvait plus en sécurité. On peut penser qu'il y était accompagné de quelques-uns de ses camarades de combat qui le protégeaient en même temps que le village. La maison de Savin est celle qu'habite depuis la famille Braud.
Mais on peut croire aussi que la Tullévrière fut l'objet d’une protection céleste par l’intercession de la Sainte Vierge qui y eut bientôt une chapelle où résidait le Saint-Sacrement. En effet, un prètre, M. l’abbé Ténèbre, précédemment curé de Croix-de-Vie. avait, on ne sait pourquoi, cherché refuge dans ce village. Il y avait été accueilli avec joie, par les habitants et en particulier par la famille Braud. qui demeurait alors dans la maison qui est devenue depuis la forge Martin. C'est là qu'il résidait. Il avait de plus, d’après la tradition du village, une cachette au milieu d'un amas de bâtiments situés sur l'autre côté de la route actuelle. Il disait la messe soit dans la maison, soit au pied d'une croix située en face à quelques mètres. Il avait aussi à administrer les sacrements ; c'est pourquoi bien vite il sentit le besoin, la nécessité d'un local spécial, d’une chapelle. L'idée en fut aussitôt admise par les habitants qui se mirent tout de suite à l'œuvre et très rapidement la chapelle de la Tullévrière s’éleva. C’était en 1794. Cette première construction était toute simple. Elle fut refaite plus tard à deux reprises, et maintenant elle est, peut-on dire, une belle chapelle de village.
Monsieur l'abbé Brumeau de Beauregard, Vicaire général du diocèse de Luçon, qui vivait caché dans la paroisse de Beaufou, vint bénir la nouvelle chapelle sous le titre de Marie Protectrice des martyrs du Bas-Poitou.
L'humble chapelle fut un précieux lieu de prières et de culte à cette époque, où les églises paroissiales avaient été incendiées. M. l’abbé Ténèbre y administrait tous les sacrements, depuis les baptêmes jusqu’aux mariages. On ne sait pas au juste jusqu'à quelle date il resta à la Tullévrière. D’après un historien de la Vendée il aurait été arrêté à la Tullévrière un soir de première communion nombreuse en I797 et déporté à Cayenne. A son retour en Vendée, après la pacification, il fut curé de Vairé où il mourut en 1822. On voit encore sa pierre tombale dans l'église de cette paroisse.
Voici la liste de 22 personnes du village de la Tullévrière qui, prétendant fuir les Bleus qui, croyait-on, venaient incendier le village, tombèrent entre leurs mains et furent massacrées à la Croisée des Mathes et enterrées au même lieu :
- Jacques Barré,
- Jeanne Vincent, sa femme,
- Marie et Marie-Anne Barré, leurs filles,
- Jeanne Pénisson, leur bru,
- Pierre Barré
- et Jean Barré, leurs fils,
- deux enfants Barré-Pénisson,
- Marie Orceau, leur servante, âgée de 16 ans,
- Anne Braud, femme de Jean Prineau, 48 ans,
- René Devineau, époux de Jeanne Arnaud, âgé de 50 ans,
- Jeanne-Catherine Prineau, fille de Jean Prineau et Anne Braud, âgée de 7 ans,
- Jeanne Prineau, fille de Pierre Prineau et Jeanne Braud, âgée de 55 ans ?
- Marie-Anne Tulièvre, âgée de 30 ans,
- Marie Boucard, veuve de Pierre Braud, 50 ans,
- Joseph Braud, époux de Anne Prineau, âgé de 45 ans,
- François Ballays,
- Jacques Orceau,
- François Tulièvre,
- Jeanne Gareau,
- Etienne Piberne.
De plus fut tué au mois de juillet Pierre Braud, fils de Pierre Braud et Marie Charrier, âgé de 60 ans.
Saint-Étienne-du-Bois sur la carte de Cassini
( feuille 131 – Nantes, 1783-1786 )
Les cercles rouges correspondent aux villages de Saint-Étienne-du-Bois cités
(tous n’étant pas localisés en tant que tels par la carte de Cassini).
Les lignes en pointillé sont à mettre en rapport avec les limites
des Marches communes du Poitou et de Bretagne,
qui incluaient alors l’intégralité de la paroisse de Saint-Étienne-du-Bois.
Voici une liste longue, bien qu’incomplète, de personnes en majorité de Saint-Etienne, mises à mort, au cours des années de la Révolution française, 1793 et suivantes :
- Louise Fleury, veuve Tardy, 40 ans.
- et Marie Thibault, veuve Lhéritaud, 40 ans. Toutes deux emmenées à Paris pour y être jugées, en même temps qu’un grand nombre de femmes de Palluau, Grand-Landes, Beaufou, Legé. Elles y furent condamnées à mort pour avoir été "les instruments et les complices des prêtres" (25 juin 1794).
- Pierre Traineau, 62 ans, laboureur, condamné à mort à Nantes, 6 janvier 1794, avec 200 autres.
- Louis Martineau, dit "Saint-Louis" sacristain, condamné et exécuté à Nantes le 24 août 1794.
- Jean Rayé, condamné à mort à Châteaubriant, le 1er janvier 1794.
- Guillaume Julien,
- Alexandre Massé, 33 ans,
- Louis Jouheneau, 38 ans, Lachaize, notaire, les deux pères de cinq enfants, tous tués à Palluau les 11 et 12 mars 1793.
- Marie-Madeleine Delaunay, épouse de Jean Bossis, 60 ans, massacrée devant le portail de sa maison (maison Chaignon actuellement) au moment où elle s’échappait.
- Charles Leroy, 50 ans, "mort martyr pour la Religion", le 25 mars 1793, à la Mercerie.
- Louis Bignon et Jean Orceau (32 et 40 ans), des Embardières, "tués le 18 octobre 1793 par les ennemis de la Religion".
- François Mignon, 36 ans, de la Renardière, tué le 23 avril 1793 à la Vivantière.
- Etienne Chabot, 6 septembre 1793.
- Jean Vincent, de la Mercerie, tué le 25 septembre 1795 à St-Cyr-en-Talmondais.
- Pierre Goëchon, tué aux Embardières, le 12 décembre 1795.
- Marie Charrier, mère, âgée de 48 ans, tuée aux Embardières, Marie Charrier, fille, âgée de 20 ans, les deux tuées le 29 janvier 1795.
- Pierre Lachaize, 55 ans, et Pierre Lachaize, 48 ans, frères, tués aux Embardières le 8 février 1794.
- Marie-Anne Baudouin, épouse Barreteau, 70 ans, tuée aux Embardières le même jour.
- Jeanne Grelier, épouse Charrier, 20 ans, tuée aux Embardières le 12 février 1794.
- Jean Crété, 85 ans, tué au Fontenit le 13 février 1794.
- Jeanne Simonneau, tuée le 15 février 1794.
- Clément Bignon, 70 ans, tué au Fontenit le 18 février 1794.
- Louise Guillet, épouse de Mathurin Poingt, 70 ans, tuée aux Embardières le 18 février.
- Charles Pérocheau, tué le 21 février 1794 (veuf de Renée Pérocheau, tuée le 8).
- Pierre Péraudeau, 66 ans, tué le 22 février 1794 au Fontenit.
- Marie Babinot, veuve de Pierre Charrier, 72 ans, tuée au Chiron le 22 février 1794.
- Etienne Barré, charpentier, tué aux Embardières le 27 février 1794.
- Jean Barré, charpentier, tué aux Embardières le 27 février 1794.
- Jean Péraudeau, 50 ans, tué à la Lande, le 3 mars 1794.
- Julien Royer, tué au bourg le 6 mars 1794.
- Jeanne Savariau, tuée à la Rotelière le 5 mars 1794.
- Françoise Rousseau, 62 ans, tuée le 9 mars 1794.
- Jacques Montassier, 60 ans, tué au bourg, même jour.
- Même jour, Marie-Anne Montassier, 22 ans, Jean Musseau, 30 ans, tué le 6 mars 1794.
- André Potier, 60 ans, tué aux Embardières le 16 mars 1794.
- Pierre Yvernogeau, tué le 17 mars 1794.
- Marie Charrier, du Fontenit, tuée aux Embardières, le 23 mars 1794 avec 5 autres femmes.
- Charles Charrier, son frère, 23 ans, tué au Fontenit le même jour.
- Six femmes, prises entre les Emérillères et le Rorthais, fusillées au pied du Moulin de Rochequairie.
- Femme Perrocheau, massacrée à la Grande-Villeneuve.
- Femmes Angibaud et Alain massacrées à la Martinière.
- Femme Pénisson, massacrée à la Mercerie.
- Femme Rambaud, massacrée au Pâtis.
- Femme Laucoin, massacrée à Bel-Air.
- Neuf autres femmes de Bel-Air, massacrées un dimanche dans une vigne voisine.
- Pierre Braud, fils de Pierre Braud et de Marie Charrier, 60 ans, tué au mois de juillet.
- Puis deux officiers de l’Armée Vendéenne : Louis-Marc-Antoine Savin du Parc, officier vendéen, fusillé à Noirmoutier avec le général d’Elbée, âgé de 25 ans, et Jean-René-François Savin, général divisionnaire de l’armée de Charette, pris à la Sauzais des Lucs et fusillé à Montaigu.
Ici s'arrêtera ce récit pitoyable de la vie à St-Etienne-du-Bois pendant les années révolutionnaires. Et ce ne sont là que quelques épisodes entre beaucoup d'autres qui ont été oubliés ou n'ont pas été recueillis à temps. Si quelques petits villages n'ont pas été cités, cela ne veut pas dire qu’ils ont échappé au sort des autres. puisque c'est un point certain et historique que le bourg et tous les villages de St-Etienne-du-Bois ont été incendiés maintes fois et ont subi des massacres de leurs habitants, sauf la Tullévrière, qui bénéficia, peut-on croire, d'une protection spéciale, due à sa chapelle dédiée à la Sainte Vierge.
Durant les années 1793 et 1794 et à l’exception de la Tullévrière, les destructions, essentiellement par incendie, perpétrées par les révolutionnaires touchèrent donc, selon la mémoire populaire, tous les villages de Saint Etienne-du-Bois ainsi que son bourg. Celui-ci n’étant alors guère plus peuplé que certains de ces villages : en 1836 le bourg comptait 283 habitants, et les Embardières 171, la Grande Villeneuve 138…
Pour les destructions, quarante ans après ces événements, en 1831-1833, quand les plans du cadastre de Saint-Etienne-du-Bois furent levés, la plupart des ruines avaient été relevées ou avaient disparu (le cadastre, créé dans un souci fiscal, distinguait les constructions imposables de celles qui ne l’étaient pas car étant en ruines... "en masure"). Il en subsistait cependant encore dans les villages du Chiron, de la Mercerie, des Embardières, de la Brocardière et, de façon plus importante, à la Rotellière où sur 31 bâtiments, 9 étaient toujours en ruines et subsistaient toujours. Elles sont nettement plus présentes sur les cadastres d’autres communes, dressés vingt ans plus tôt, ainsi sur celui de Saint Georges-de-Montaigu, la moitié des bâtiments du bourg sont toujours en ruines en 1817-1818. On trouve le rappel de ces destructions dans d'autres documents :
- les actes notariés faits peu après l’époque révolutionnaire ;
- les actes d’estimations ou d’adjudications des biens nationaux (ainsi au Poiré en 1797-1798, pour 44 métairies concernées, plus de 86 % ont leurs bâtiments affectés en partie ou en totalité par des destructions) ;
- la correspondance des nouvelles autorités établies alors localement par le pouvoir en place et qui évoque ces destructions (ainsi à Montaigu, le commissaire politique du Directoire départemental, surveillant la municipalité, signale que sur Treize-Septiers le bourg et tous les villages ont été incendiés, et que "les habitants doivent vivre sous les toits" habituellement destinés à abriter les animaux… ce qui lui pose des problèmes pour faire rentrer les im;pôts)…
Le village de la Rotellière sur le plan cadastral de 1833 de Saint-Etienne-du-Bois :
en rose, les bâtiments imposables ;
en jaune, ceux non imposables car "en masure".
(environ : 270 x 175 m)
Quant au nombre de personnes tuées lors de ces mêmes événements ou morts de leurs suites, aucun relevé systématique ayant été fait à l’époque, il est difficile de l’évaluer. Les éléments d’approche pour le faire seraient les dénombrements et recensements de la population (cf. pour Saint-Etienne-du-Bois aux Arch. dép. de la Vendée : 1 Mi 39, 2 Mi 21/207), et les registres de l’état civil (cf. pour Saint-Etienne-du-Bois aux Arch. dép. de la Vendée : AC 210, AD 2E 210). Ainsi les 3040 habitants de Saint Etienne-du-Bois en 1791 ne sont plus que 1926 (de 12 ans et plus) au dénombrement de 1797, et 2173 à celui de 1806. Le recensement de 1836 y relève 2882 habitants, à une époque où le taux de natalité était en moyenne localement de 35 ‰ et celui de mortalité d’un peu plus de 25 ‰. A titre de comaraiso, en 1788 on avait compté 87 baptêmes, 20 mariages, 80 sépultures (Arch. dép. de la Vendée : AD 2E 210), sur Saint-Etienne-du-Bois qui par la suite n’a jamais atteint ses 3040 habitants de 1791 : en 1990 il en avait 1416, et il en avait 2118 en 2018.
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