la "Chronique paroissiale de Belleville" par Hippolyte Boutin
rappel : avant toute utilisation d'extraits ou d'illustrations de ces pages, vous devez en demander l'autorisation à leur auteur.
La "Chronique paroissiale de Belleville" fait partie d'un ensemble initié par Eugène Aillery (1806-1869) qui, devenu "prêtre habitué" (c’est-à-dire "prêtre retraité et résidant…") à Fontenay-le-Comte, se consacra à des recherches sur l’histoire religieuse du diocèse de Luçon. En 1860 il publia le Pouillé de l’évêché de Luçon (200 p.), et à sa mort il laissa un ensemble de manuscrits traitant de l’histoire des différentes paroisses du diocèse. Vingt ans plus tard, en 1889, l’évêché de Luçon décida de les actualiser de les faire paraître sous forme de cahiers mensuels d’une vingtaine de pages distribués à des abonnés, sous le titre de "Chroniques paroissiales". Jusqu’en 1895, les premiers cantons (ou "doyennés" dans la terminologie religieuse de l’époque) dont les "chroniques" furent publiées furent ceux de la Roche-sur-Yon, Chantonnay, les Essarts, Saint-Fulgent, les Herbiers et Mareuil, chacune de leurs paroisses y étant traitée en quelques pages. A partir de cette date, la prise en main de la publication par Hippolyte Boutin (1851-1901) leur donna plus d’ampleur, la part des textes dus à Eugène Aillery y devenant marginale, et leur contenu prenant un intérêt certain. Les "chroniques" des paroisses des cantons de Montaigu, de Mortagne et le début de celles du canton du Poiré (le Poiré, Aizenay, Beaufou), furent alors publiées. Puis, sous la direction de Julien Huet (1857-1925) et jusqu’en 1918, ce seront la fin de celles du canton du Poiré (Belleville, Saint-Denis, la Genétouze, les Lucs, Saligny), puis celles des cantons de Maillezais, de Rocheservière (celles de ce dernier rédigées essentiellement par Alain de Goué, 1879-1918) et de Fontenay-le-Comte. Après une interruption, la publication fut reprise, dans les années 1930, par Adolphe Poirier (1878-1957) pour le canton de Beauvoir, et elle se termina dans les années 1950 avec celles du canton de Pouzauges par Auguste Billaud. Soit 14 cantons sur les 30 que comptait la Vendée à cette époque, en plus des autres ébauches de "Chroniques" réalisées en son temps par Eugène Aillery pour la plupart des autres paroisses du diocèse de Luçon.
La "Chronique paroissiale de Belleville" a bénéficié des apports d'Hippolyte Boutin. Mise à part l'identification des changements des limites de la paroisse et de la commune au milieu du XIXe siècle qui y est plus qu'approximative, elle est le résultat d’un important travail d’enquêtes, partant des faits, recourant systématiquement aux documents originaux, vérifiant et recoupant les sources… autant de garanties d'un sérieux que n'avaient pas eu jusqu'alors les "érudits locaux" de l'époque, tels le montacutain Dugast-Matifeux ou le fontenaisien Benjamin Fillon, qui y sont pourtant évoqués. Comme pour les autres "chroniques paroissiales", on y trouve un "État nominatif des curés (et vicaires) de la paroisse" dont la succession et les activités constituent a priori l’objet principal de chacune d’elles, ainsi que ce qui concerne la réalisation de la nouvelle église de Belleville qui y est très développée.
--------------------
La "Chronique paroissiale de Belleville" suit le plan suivant :
Histoire de Belleville...
- précis historique de Belleville
- l'ancienne église
- la seigneurie de Belleville
- le protestantisme à Belleville
- la période révolutionnaire à Belleville
L'église paroissiale de Belleville
- le presbytère
- le Couvent
- visites épiscopales
- missions
- croix
État nominatif des curés et vicaires Belleville, et...
- les prêtres originaires de Belleville
- extraits des registres du greffe de la Roche-sur-Yon
Annexes
- notes supplémentaires sur la seigneurie de Belleville,
- notes des Archives historiques du Poitou.
- extraits de l'Histoire généalogique de dom Anselme
- extraits des titres originaux de l'abbaye de Fontevrault...
- extrait des Archives historiques de la Saintonge et de l'Aunis
- faits divers recueillis passim depuis le XVIe siècle jusqu'à la Révolution
- notes supplémentaires sur Charette à Belleville
--------------------
HISTOIRE DE BELLEVILLE
Belleville, ancienne seigneurie du doyenné de Mareuil, était autrefois une cure régulière dépendant de l'abbaye de Nieul. L'abbé devait y nommer un de ses religieux dans les six mois qui suivaient une vacance. Plus tard, cette cure releva de l'abbé d'Angles auquel elle devait un revenu de 300 livres.
Au XVIIIe siècle, la fabrique percevait comme recette une somme de 40 livres et 6 boisseaux de seigle.
L'ancienne église était, comme la nouvelle, sous le patronage de sainte Anne.
La paroisse actuelle de Belleville a une superficie de 1478 hectares. Elle est bornée au nord par les paroisses des Lucs et de Saligny, à l'est par celle de Dompierre, au sud par celles de la Roche-sur-Yon et de Mouilleron, et à l'ouest par celles du Poiré et de Beaufou.
En vertu d'une ordonnance de Mgr Soyer, datée du 13 septembre 1844, et sur la demande des deux curés du Poiré-sur-Vie et de Belleville, un certain nombre de villages furent distraits du Poiré et annexés à la paroisse de Belleville, afin de faciliter à leurs habitants le moyen d'accomplir leurs devoirs religieux.
Voici les noms de ces villages : Lande Blanche, la Grand’Croix, le Moulin de la Lande, les Tuileries, la Grouillère ou Grollière, le Désert, le Défend, la Vignatière ou Vinetière, le Bossé, le moulin de Bossé, les Petits Oiseaux, la Vieille-Verrerie, la portion du village de Maunie ou Maunic, qui appartient au Poiré, le Petit Pas, les Quatre-Chemins, la Motte de l'Airaudière, le Beignon-Basset, la Mélanière, Bel-Air ou la Ribotière, le pavillon de l’Airaudière, la Flotterie, la Poiriere, la Rouchère, le Pont Bossé, le Petit-Bourbon.
Avant la Révolution, les villages de la Sauvagère, de la Brunière et du Vivier dépendaient également du Poiré.
Les principaux villages de la paroisse sont : l’Aubonnière, la Sauvagère, le Petit-Beaulieu, la Rouchère, le Bossé, la Poirière, Lande-Blanche, les Tuileries, la Grollière, l’Ardouinière, le Recrédit, la Mercerie.
Aucun cours d'eau important n'arrose la paroisse. Celui de la Vie est encore peu considérable ; sa source se trouve dans une prairie du Deffend.
Les points culminants sont : la Ribotière (86 mètres au-dessus du niveau de la mer), le Bossé, l’Anguiller.
Le territoire de Belleville est sillonné par plusieurs routes :
1. la route nationale (137 bis) de la Roche à Nantes ;
2. la route départementale de Luçon à Montaigu, qui se détache de la première, en face de la vieille église ;
3. la route départementale (6) de Saint-Gilles à Mortagne, qui passe au milieu du vieux Belleville ;
4. enfin la route de Belleville à Champ-Saint-Père, qui commence auprès de la nouvelle église.
Le sol du pays est loin d'avoir cette fertilité que l'on rencontre dans certaines autres parties de la Vendée ; il est d'une nature lourde et froide. Cependant, à force de labeur et grâce aux fumures abondantes qu'on lui prodigue, on arrive à lui faire produire de très belles récoltes. Aucun terrain ne reste en friche et les champs sont tous ensemencés.
On cultive toutes les céréales et, comme presque partout, celle qu'on sème le plus c'est le froment. Le soin de ces cultures est l'occupation de la plus grande partie des habitants de Belleville ; car la population est essentiellement composée d'agriculteurs. Aux travaux des champs se joint aussi l'élevage du bétail qui est favorisé par les foires qui se tiennent le premier samedi de chaque mois. Ce jour-là, surtout en hiver, marchands et vendeurs se pressent sur la vaste place de Belleville. Les affaires se traitent rapidement, et le bétail acheté est aussitôt expédié pour Paris. A certaines foires, on peut compter jusqu'à quarante wagons qui partent pour la capitale.
Depuis quelques années, la culture de la vigne a pris une assez grande extension, mais le vin qu'on récolte n'a pas une qualité bien renommée.
Comme à Beaufou, les ménagères ont une singulière façon d'élever les volatiles de la basse-cour. Le long des haies, dans la profondeur des terriers, elles construisent préalablement, à l'aide de quelques planches, des abris fort rudimentaires. Puis, lorsque l'éclosion de la couvée a eu lieu, elles transportent poule et poussins dans les champs et les installent sous les petits toits qu'elles leur ont préparés. La poule est alors abandonnée à elle-même et elle élève sa famille comme la perdrix le fait pour ses perdreaux. De temps en temps, on va jeter un peu de mil pour retenir la couvée en cet endroit, mais on ne s'en occupe pas davantage et on la laisse grandir en pleine liberté.
Dans ces conditions peu coûteuses et tout à fait favorables, les poulets croissent très vite. Quand ils se sentent des ailes, les arbres du buisson voisin deviennent leur perchoir et, par une nuit claire, les passants peuvent voir les branches chargées de ces intéressants volatiles. Lorsque le moment de la vente est arrivé, on les met en mue pendant deux ou trois semaines et on les conduit à pleines cages aux marchés des environs. Le produit qu'on tire de ce commerce, joint à celui de la vente du beurre et des œufs suffit amplement à payer les dépenses courantes de la maison. Mais il y a souvent plus d'un mécompte, car les maladies si fréquentes parmi les oiseaux de basse-cour, les maraudeurs et les animaux malfaisants occasionnent parfois des pertes sérieuses.
Un commerce qui se fait sur une large échelle, c'est celui des grains. Le blé est du reste la plus grande richesse du pays ; on le cultive avec beaucoup de soin et il est intéressant de voir ces champs magnifiques qui ressemblent à de beaux jardins où la mauvaise herbe est impitoyablement détruite, pour ne laisser de place qu'à une riche moisson d'épis.
L'industrie des poteries vernissées a laissé des traces à Belleville comme en beaucoup d'autres localités du Bas-Poitou.
D'après M. Fillon, ce fut sous Philippe-Auguste ou sous Louis VII, que le vernis vert commença à faire son apparition en Poitou. Bientôt l'emploi de la vaisselle de terre commença à se répandre et on se mit à fabriquer des pièces d'une certaine dimension et couvertes d'ornements en creux.
Ce sont des échantillons de cette industrie que l'on a découverts à Belleville, lors de réparations exécutées à la vieille église, sous la monarchie de juillet. Ces échantillons consistent dans un très beau vase et dans les débris d'un plat que M. Fillon estime être de la seconde moitié du XIIIe siècle, tandis que d'autres leur attribuent une date moins ancienne. Quoi qu'il en soit, voici la description de ces poteries, d'après le savant auteur :
"Le vase, haut de 0,37, est revêtu d'un vernis vert foncé, d'inégale épaisseur sur ses diverses parties. Les courants, les fleurs de lis et les quadrillés dont il est décoré ont été tracés à la pointe avant la cuisson et ont été remplis par le vernis, ce qui les fait presque trancher en noir sur le fond. La plupart des ornements du plat ont, au contraire, été imprimés en creux avec un moule ou poinçon, et reliés entre eux par des linéaments faits à la pointe. Les armes, autant qu'on en peut juger par les fragments qui subsistent, sont celles de la maison de Lusignan : burelé d'argent et d'azur".
Un fait qui autorise cette assertion, c'est que les seigneurs de Belleville, propriétaires de l'église où fut faite la découverte, s'étaient alliés aux Lusignan, dans le courant du XIIIe tiède, par le mariage de l'un d'eux avec Isabelle, fille d’Hugues XI, comte de la Marche et d'Angoulême.
"Dans son entier, dit encore M. Fillon, ce plat avait 0,42 de diamètre. Il est pareillement enduit d'un vernis vert assez foncé. La terre des deux pièces est rouge et très bien cuite"[1].
Parmi les villages, on signale le Bossé et la Flotterie comme ayant appartenu à des gens de haut lignage. Dans le premier on trouve encore les vestiges d'une maison noble. Quant au second qui ne relève de Belleville qu'au point de vue spirituel, la chronique du Poiré donne de longs détails sur les familles qui l'ont possédé. Le 7 septembre 1776, Messire Emmanuel-Henry-Eugène Ferron de la Ferronnays, second lieutenant de gendarmerie, fit l'acquisition de la Flotterie, en vertu d'un arrentement viager de mil quatre cent trente-quatre livres six sols quatre deniers. Celui qui cédait cette propriété était M. le chevalier de la Bretesche qui mourut à Luçon, le 7 octobre 1780. M. de la Ferronnays acquit en même temps de M. Louis-Marie de La Roche Saint-André les fiefs Bouet et de la Prévisière. Le 30 janvier 1784, il paya les droits de lods et ventes pour ces deux terres à Mme de la Maronnière, douairière, et, en cette qualité, dame usufruitière de la baronnie de Belleville. La métairie de la Flotterie, ainsi que les autres propriétés de M. de la Ferronnays, la Bouchère, la Porte, la Noue et la Loge, furent vendues nationalement, comme biens d'émigrés, pendant la Révolution. Un certain M. Raison les acheta, le 1er thermidor an VII. Mais il paraît que cet acquéreur s'était trompé dans ses calculs. N'ayant pu se libérer dans les délais voulus, il vit ses nouvelles propriétés confisquées par l'Etat qui les restitua purement et simplement à leurs anciens maîtres quand ils revinrent de l'émigration.
Les parties les plus remarquables du bourg étaient autrefois le château, appelé baronnie, l'église et la cure. On y voyait des douves qui les entouraient et qui passaient derrière la gendarmerie, à côté du cimetière, et se rattachaient ensuite au petit ruisseau qui traverse la route de Nantes à la Roche, et qu'on appelle le Godineau. Le pré des Caves qui se trouve actuellement derrière le château était jadis une douve.
Voici quelques noms des quartiers du bourg : la Jarriette, c'est la maison occupée par les Religieuses ; − la Bordinière, on y voit encore quelques vestiges d'un arc surmonté d'une fleur de lys ; − la Bordinière, c'est aujourd'hui une métairie à l'entrée du bourg, sur la route du Poiré ; c'était autrefois une maison bourgeoise. Non loin de là se trouvait le quartier-général de Charette qui habitait, dit-on, une petite chambre auprès de la maison actuelle de M. Duplessis. Il y a encore : le Parquet, le Bout-de-Ville, la Barque-à-Charron, le Four appelé jadis la Bourbe. Toutefois les constructions modernes qui se multiplient de plus en plus dans le bourg tendent à faire disparaître toutes ces anciennes dénominations.
Belleville, à cause sans doute de son château et de ses seigneurs, a dû jadis être habité par un certain nombre de familles importantes, car, en plus des quartiers du bourg, on trouve encore dans les villages, notamment au Petit Beaulieu, au Petit Logis, à la Sauvagère à Beaupré, au Bossé, au Deffend, à la Flotterie, des vestiges encore considérables et curieux à visiter d'anciennes maisons seigneuriales.
A ces lieux de quelque importance il faut encore ajouter Lande Blanche ou Blanchelande. C'était autrefois une commanderie qui avait appartenu à l'ordre des Templiers. Lorsque cet ordre eut été détruit par Philippe-le-Bel, Lande-Blanche devint la propriété des chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem et réunie à la commanderie des Habites. D'après M. Fillon, il y aurait à Poitiers, dans les archives du grand Prieuré d'Aquitaine, un dossier de pièces originales sur cette commanderie[2].
Lande-Blanche se composait d'un logis, d'une métairie et de deux moulins, et elle percevait quelques devoirs cens et rentes, à la Roche-sur-Yon et dans le voisinage. Il y a quelques années, on a trouvé en cet endroit un souterrain qui se dirige vers le Petit Bourbon et correspond au Petit Beaulieu, au Petit Logis et sans doute aussi a la Sauvagère.
Lande-Blanche eut pour maîtres quelques personnes de certaine noblesse. Au commencement du XVIIe siècle nous y trouvons le chevalier Julien Budes qui s'intitule seigneur de Blanche lande et de Launay-Couvray. Il était le sixième enfant de Jacques Budes, chevalier, seigneur du Hérel et autres lieux, baron de Sacé et procureur général au Parlement de Bretagne, et de Béatrix de Romillé, héritière de la baronnie de Sacé, de Montanet d'Ergouges et du Plessis-Budes.
Julien Budes se maria deux fois, d'abord avec Anne Arrel, dame de Kaermarker, puis avec Françoise Kosmar L'un de ses enfants, François, devint à son tour seigneur de Blanche lande et de Launay-Couvray ; il épousa Anne de Cornavalet qui lui donna plusieurs enfants dont l'un, Armand, fut tué au siège de la Petite-Pierre, en Allemagne. Un autre, Jean-Baptiste, succéda à son père dans la seigneurie de Blanche lande ; il prit pour femme, le 22 novembre 1695, Jeanne-Thérèse de Kerousy, sa cousine germaine.
Cette famille des de Budes descendait, par les femmes des Du Guesclin, seigneurs de Broon. Le premier d'entre eux, dont la mémoire se soit conservée, Guillaume Budes, seigneur d'Uzel, et qui vivait en 1300, était marié à Jeanne du Guesclin, fille de Guillaume du Guesclin.
L'histoire généalogique de dom Anselme (tome 7 p. 526), dont nous tirons tous ces détails, nous apprend encore (tome 8, p. 364, E) que Saintes Budes, fille de Julien Budes et de Anne Arrel, se maria le 10 octobre 1639, avec Claude du Chastel, qualifié marquis du Chastel, de la Garnache, de Goulaines et de Mesle, comte de Beauvoir-sur-Mer et de Saint-Nazaire, baron de Grouxlot, seigneur de Rosguigrean, de Landrevesech, etc. Devenue veuve en 1646, elle se remaria en 1647 à Charles Anzeré, seigneur de Courvaudon, conseiller au Parlement de Rouen.
Enfin voici quelques notes sur un autre lieu célèbre : la Motte-de-Belleville. Nous les devons à l'obligeance de M. Théophile de Tinguy, de la Viollière.
Cette terre et seigneurie de la Motte, située au sud-ouest du bourg de Belleville, était tenue par la famille Marin, dont le nom se retrouve parmi les plus anciens seigneurs de Melay-la-Court, dans la paroisse de la Guyonnière. Les Marin assistèrent aux bans et arrière-bans du Poitou, entre autres à ceux convoqués en 1467.
Pendant que la branche aînée des Marin de Melay changeait de nom par le mariage de Catherine Marin avec un seigneur de la Preuille, la branche cadette perpétuait sa lignée et c'est elle que nous trouvons à la Motte-de-Belleville, vers la fin du XVIIe siècle. Le maître de la seigneurie s'appelait alors Louis Marin, écuyer, et il était marié avec demoiselle Claudine Galichon.
Leur fils, Isaac Marin, écuyer, seigneur de la Motte-de-Belleville, épousa demoiselle Renée Feuillet. Le 28 août 1603, il transigea avec René Louer, écuyer, seigneur de la Guessière : dans l'acte (Mercier et Pineau, notaires de la châtellenie de Beaulieu) il est dit que Isaac Marin, portant les armes pour le service du Roy en la garnison de Saint-Florent-le-Vieux, "fut prins prisonnier de guerre par ceux tenant le party du feu duc de Mercœur, en l'année 1591" (Archives de la Viollière).
Après lui Antoine Marin, écuyer, seigneur de la Motte-de-Belleville, se maria à demoiselle Jeanne de la Fontenelle, puis à demoiselle Jacquette Jaunet.
Pierre Marin, écuyer, seigneur de la Motte-de-Belleville, époux de demoiselle Marie de la Boucherie, fut maintenu noble, le 9 septembre 1667, avec Claude Marin, écuyer, seigneur de la Caducière ; Jean Marin, écuyer, seigneur de la Fételière ; Jacquette Jaunet, veuve d'Antoine Marin ; autre Antoine Marin, écuyer, seigneur de la Hubardière, et Parménas Marin, écuyer, seigneur de la Chasselaudière.
Louis II Marin, écuyer ; seigneur de la Motte-de-Belleville, prit alliance avec sa cousine, demoiselle Renée Marin du Tréhan, fille d'Antoine Marin, écuyer, seigneur du Tréhan, et de dame Catherine-Charlotte Jousselin.
Pierre Marin, écuyer, seigneur de la Motte-de-Belleville et du Tréhan, assista avec dame Gabrielle Bideé, son épouse, au contrat de mariage de leur sœur et belle-sœur demoiselle Renée Marin du Tréhan, dame de la Boucherie, avec Gilles Durcot, chevalier, seigneur de Puitesson, le 25 septembre 1709 (Arch. du château de Puitesson). Leur fils unique, Gabriel Marin, écuyer, seigneur de la Motte-de-Belleville et du Tréhan, était en procès, en 1717, avec René-Isaac Sagot, écuyer, seigneur du Plessis, et dame Judith Sagot, veuve de Charles de Goué, chevalier, seigneur du Marchais (Id.).
Les Marin, dit des Houillères, rameau aîné de la branche de la Caducière, auraient encore des représentants.
Dans le premier numéro des Echos du Bocage vendéen, 5e année, M. Dugast-Matifeux a fait paraître l'article suivant :
Précis historique de Belleville-sur- Vie
"L'ancienne église de Belleville, dont on n'a pu sauver que les parties les plus intéressantes, consistant dans le portail extérieur et la première travée de sa nef, de l'imminente destruction dont elle était totalement menacée présente, pour ce qui en reste debout, tous les caractères de l'architecture de la fin du XIIe siècle ou du commencement du XIIIe. On y voit encore l'un des plus curieux et rares monuments de l'époque transitoire du roman au gothique qu'on ait eu en Vendée. C'était primitivement la chapelle d'un prieuré de chanoines réguliers de l'ordre de Saint-Augustin, dépendant de l'abbaye de Saint-Vincent-de-Nieul, sur l'Autise, à deux petites lieues de Fontenay, appartenant au même ordre. Elle desservait le château, dans l'enceinte duquel elle est située et pour l'usage duquel elle avait été principalement construite. Plus tard, elle devint l'église d'un prieuré-cure de paroisse.
L'église fut bâtie par les soins et libéralités, soit de Maurice II de Belleville, seigneur de Montaigu, la Garnache, Commequiers, soit par ceux de Brient, son successeur, époux d'Agnès, descendants de Maurice Girard et de Girard de Montaigu, son père, qui figurent parmi les premiers bienfaiteurs de cette église au XIe siècle, concourant aux présentes dispositions et allongeant à l'envi le parchemin pour suspendre leurs sceaux à ses bannières, dit-on dans la charte confirmative de la fondation, rapportée par Besly aux preuves de son Histoire des comtes de Poitou et Guyenne, p. 373. C'était alors le bon temps des constructions et donations monastiques : la religion était tout dans l'Etat.
Cette première famille de Belleville tomba en quenouille, après plusieurs générations, et finit en la personne d'une héroïne, Jeanne de Belleville, dont l'ancien conservateur de la bibliothèque publique de Nantes, Emile Péhant, a chanté les malheurs domestiques et les exploits guerriers dans un poème dit Chansons de gestes, qui est une des meilleures œuvres poétiques qu'ait produites la Bretagne de notre temps (Nantes, Forest et Grimaud, 1868, 2 vol. in-12).
Cette héroïne, déjà veuve d'un Geoffroi de Chateaubriant, avait épousé, en deuxièmes noces, Olivier, sire de Clisson, dont elle eut plusieurs enfants, entr'autres le connétable. Son mari s'étant, avec quelques gentilshommes bretons, secrètement allié au roi d'Angleterre, Edouard III, contre le roi de France, Philippe VI, dit le Valois − ce qui avait été découvert par ce dernier − fut cauteleusement, sous couleur d'un tournoi, attiré à Paris comme dans un guet-apens, puis saisi, conduit en prison, condamné à mort par sentence du roi, juge et partie dans cette affaire, et décapité sur une estrade. Nous consignons en note le procès-verbal de son exécution, pour la détailler davantage et donner à la fois une idée du langage français à l'époque[3].
"Sa femme qui estoit appelée dame de Belleville ajoutent les Chroniques de Saint-Denis, tant comme coupable des devant dites trahisons, fut semoncée en Parlement, laquelle n'osa comparoir. Pour ce fut-elle condamnée et bannie". De plus, tous ses biens meubles et immeubles furent confisqués[4] ; ce qui la porta dans sa fureur (nolum sit ne furens quid fæmina possit !) à se remarier en troisièmes noces, vers 1349, avec l'anglais Gaultier Bentley, afin de courir la mer avec lui et d'exercer la piraterie sur les côtes pour se venger. Il paraît, du reste, qu'elle était une des belles femmes de son temps, instruite et fort attrayante par ses charmes et son esprit, qu'avaient orné les conférences de la cour d'amour que tenait sa mère. C'était encore une riche héritière, qui, par la succession du dernier Maurice de Belleville, son frère unique, mais d'un autre lit, avait réuni sur sa tête tous les biens propres de son antique et opulente famille."
Aussi voyait-on à la section spéciale des curiosités de la Bibliothèque Nationale, lors de l'Exposition universelle de Paris en 1878, une couple de manuscrits d'heures sur vélin, dits de Belleville, provenant de cette confiscation. Ils avaient ensuite fait partie de l'ancienne Bibliothèque du Louvre, et se trouvaient même portés sur l'inventaire ou catalogue, qui en fut dressé par le garde Gilles Mallet, et qui a été publié de notre temps, par Van Praet, conservateur en chef de la Bibliothèque Nationale. Voici comment ils y sont mentionnés :
"N° 1199. Premièrement, un très beau bréviaire, très parfait, bien escript, très noblement enluminé et très richement historié, lequel est en deux volumes, et est à l'usage des Frères Prescheurs, et est appelé le Bréviaire de Belleville, et se commence le second feuillet du premier volume et scitote, et du second volume justice, et en sont les feuillez par dehors historiez à images, et sont les fermouers d'argent doré, esmaillez des armes de Belleville, et sont en deux estuiz de cuir bouilly ferrez.
N° 1205. Item. Un très bel messel[5], bien escript et richement enluminé, aux armes de Belleville, et est à l'usage de Sainct-Dominique et est nommé le Messel de Belleville, et se commence le second fueillet per" (Inventaire ou catalogue des livres de l'ancienne bibliothèque du Louvre sous Charles V, fait, en 1374, par Gilles Mallet, annoté et publié par Van Praet, p. 203-204 ; Paris, Debure, 1836, gr. in-8).
Le fils aîné du supplicié Olivier de Clisson, qui s'était rallié au roi Jean, fils de Philippe de Valois, malgré ses griefs personnels contre celui-ci, devint connétable de France en 1380, après la mort et sur la recommandation de Bertrand du Guesclin, son ami et compagnon d'armes. Il avait déjà obtenu la restitution des biens confisqués de ses parents, et, par suite, les terres de Belleville, Montaigu, etc., échurent dans le partage de leur succession à sa sœur Jeanne de Clisson qui, suivant l'exemple maternel, épousa un gentilhomme anglais, nommé Jean de Harpedenne, et servit ainsi de trait d'union entre les deux familles.
Leurs descendants, ayant peu à peu abandonné le nom patronymique étranger pour l'ancien nom français de Belleville, continuèrent à en posséder la seigneurie pendant plusieurs siècles. Il y a même peu d'exemples d'une aussi longue hérédité de part et d'autre.
Elle fut enfin aliénée, dans le cours du XVIIe siècle, à la famille Aymon de la Petitière, sur la paroisse d'Aizenay, qui s'en qualifia quelque temps baronne à son tour. D'elle, Belleville passa enfin, par alliance, aux Jaillard de la Marronnière, sise en la même paroisse, qui l'a possédée jusqu'à la Révolution. C'est ce que constate la légende ainsi conçue de la vieille cloche de l'église de Belleville, placées l'une et l'autre sous l'invocation de Sainte Anne :
"B. sta (Beata sancta) Anna, ora pro nobis. − Pierre-Jacques Jaillard, escuyer, chevalier, seigneur de Belleville, parrain ; Mil Jaillard me (marraine) ; Mre Mathurin Giboteau, prêtre (docteur en) théologie, prieur ; André Gouin noter (notaire), fabriqueur, l'an 1728. Salabré m'a faite".
Le prieuré cure de Belleville était desservi, à la Révolution, par un prêtre nommé Servant, frère du supérieur de la maison de l'Oratoire de Saumur qui, après avoir accepté le siège épiscopal de la Vendée auquel il avait été le premier nommé par les électeurs du département, en 1791 se démit, sans déduire ses motifs, comme un être faible qu'il était. On ignore ce que devinrent ensuite les deux frères"[6].
Le bourg de Belleville fut le quartier général de Charette pendant la grande insurrection vendéenne. On y montrait encore, il y a vingt-cinq / trente ans, la chambre qu'il occupait, mais elle a été démolie depuis. Son manifeste, pour justifier la reprise d'armes qui suivit la paix trompeuse de la Jaunaie, est daté et signé : "En notre camp de Belleville, ce 26 Juin 1795, Charette". C'est encore de là qu'il adressait, quelques jours avant, à ses lieutenants, la circulaire suivante, qui n'est pas précisément un modèle de style ni même d'orthographe, pour recommencer la guerre...
"Monsieur,
D'après l'enlèvement de M. Allard, chef de division des Sables, ceux des commandants de plusieurs paroisses, d'autres hostilités sans nombre, de la part des républicains, d'après leurs vues bien prononcées et que trop mises à découvert d'enlever tous les honnêtes gens, il vous est ordonné de vous mettre sur le champ en état de guerre et d'agir contre les républiquains, comme avec des ennemis irréconciliables.
Vive Louis 18, jusqu'au dernier soupire.
Le Chr Charette".
"En diligence à Monsieur le chevallier de Bruc, commandant-général de la division de Clisson".
(Original communiqué par le feu baron de Wismes, actuellement entre les mains de ses héritiers, descendants du chevalier de Bruc par leur mère.)
...Charette tint parole envers son roi, car il ne tarda guère à être définitivement pris, non loin de Belleville, et fusillé pour lui à Nantes, le 29 mars 1796 − 9 germinal an IVe.
L’Ancienne église
Le même numéro des Echos du Bocage Vendéen reproduit aussi un intéressant rapport de M. Loquet, architecte départemental, à la commission artistique du Conseil général de la Vendée. Ce rapport décrit la vieille église de Belleville. On le lira donc avec plaisir.
"Ayant été chargé, dit M. Loquet, de visiter la vieille église de Belleville, dont la destruction est projetée par la fabrique pour la construction du presbytère, je me suis transporté, samedi 7 juin 1880, au chef-lieu de cette commune pour examiner ce petit édifice et rechercher par quels moyens on pourrait en conserver les parties intéressantes.
Ce petit bâtiment était autrefois la chapelle du château de Belleville : il dut être bâti vers la fin du XIIe siècle, à l'époque de transition, au moment où les premières ogives viennent se mélanger aux arcades romanes ; les arcs ogivaux de la porte d'entrée et les deux arcs doubleaux encore debout de la voûte intérieure annoncent les premières tendances des constructeurs à la recherche d'une forme plus durable, et surtout plus légère que celles des voûtes plein-cintre. Cette chapelle se compose actuellement d'une seule petite nef de dix-neuf mètres de longueur sur six mètres quatre-vingts centimètres de largeur à l'intérieur.
Le portail donnant accès à cette nef est d'un beau style : composé de quatre arcades ogivales concentriques, moulurées et reposant sur colonnettes à chapiteaux ornés, il se trouve flanqué sur les côtés par deux colonnes au tiers engagées et terminées par de très jolis chapiteaux de la belle époque romane. Ces colonnes sont elles-mêmes surmontées d'un petit contrefort carré qui va mourir sur le cordon supérieur. Au-dessus de la porte, est percée une fenêtre plein cintre avec colonnettes et arc orné de dents de scie ; elle est séparée de celle-ci par un cordon horizontal et six corbelets sculptés avec têtes plus ou moins grotesques. Deux énormes contreforts viennent terminer la façade à droite et à gauche, et un clocher beaucoup plus moderne en charpente et recouvert d'ardoises couronne le fronton qui, primitivement, devait probablement supporter un petit abri pour les cloches, comme on en rencontre encore souvent dans nos églises de campagne du Poitou,
La nef se compose de trois travées, dont les deux premières ont pu conserver leurs piliers avec leurs chapiteaux et leurs bases presque intacts, tandis que la dernière est agrémentée de ce style rococo que l'on regrette de voir s'étaler si souvent, dans nos églises modernisées, auprès des plus belles sculptures du moyen-âge. Cinq fenêtres en plein-cintre, très étroites, mais très hautes, éclairent dans l'intérieur. La voûte de ces trois travées est complètement détruite et remplacée par un tillis en bois formant près le cintre. Le départ seul des arcs formerets et doubleaux a pu résister : ces parties sont d'ailleurs ce qu'il reste de plus intéressant avec le portail extérieur.
Aux angles, en effet, des travées, au départ de chaque arc arêtier, les fondateurs de cette chapelle ont fait placer des images de saints et de saintes qui produisent un très bel effet. Ces statues, debout ou assises, accompagnées de leurs attributs, viennent compléter l'ornementation déjà caractéristique des chapiteaux des piliers. Ceux-ci, adossés au mur, renferment dans leurs angles rentrants quatre colonnettes dégagées, recevant les nervures de la voûte et une colonne beaucoup plus forte, au tiers engagée, qui vient supporter la retombée de l'arc doubleau.
Des murs de 1 m. 60 d'épaisseur, quoique soutenus par des contreforts au droit des piliers, n'ont pu résister à la poussée des voûtes ; il est facile de remarquer leur manque d'aplomb, cause certaine de la ruine des anciennes voûtes. Malgré cette inclinaison vers l'extérieur, ces murs sont encore très bons et sans aucune lézarde ; ils peuvent durer encore bien des siècles si on les charge médiocrement.
Le dallage en pierres de taille contient une douzaine de pierres tombales avec armoiries et inscriptions. Le sol, du reste, a été exhaussé ; peut-être en existe-t-il une autre au-dessous, car les bases des colonnes et des piliers sont presque aujourd'hui entièrement enfouies, et il est probable que si des fouilles intelligentes sont pratiquées, on pourra découvrir des choses intéressantes, car je ne pense pas, d'après ce que j'ai pu constater, que le vieux sol ait été bouleversé pendant les guerres civiles ou les guerres de religion qui ont ravagé le pays.
Je crois qu'il serait intéressant de préserver de la destruction ce petit édifice roman, dont les spécimens deviennent de plus en plus rares dans nos contrées. Je serais donc d'avis de conserver la façade d'entrée et la première travée, y compris les piliers et de fermer la chapelle par une abside. On aurait ainsi un petit oratoire pour la commune. La fabrique, du reste, consent à faire l'abandon de ce que l'on voudra conserver, mais sa situation financière ne lui permet pas de faire des sacrifices en faveur de cette chapelle ; elle est fortement endettée pour la construction de la nouvelle église et du presbytère, dont elle a, presque seule, supporté toutes les charges. En tous cas, quand on détruira les travées que je propose d'abandonner, il sera bon d'en conserver les chapiteaux, les corbelets de la corniche, les pierres tombales, enfin tout ce qui offre quelque intérêt, et de réunir ces objets dans la travée conservée, pour en faire l'usage que vous jugerez le plus convenable. Cela nécessitera, messieurs, la présence fréquente sur les lieux d'un de vos membres, que je vous propose de déléguer à cet effet" (Conseil général de la Vendée, session d'août 1880, p. 339 41, en note. La Roche-sur-Yon, Gasté, in-8).
Au sujet des statues de cette ancienne église, voici un extrait d'un autre rapport rédigé par M. Fillon pour le compte de M. le curé de Belleville :
"Les statues adossées à la base des arêtes des voûtes quoique décapitées, sont encore très intéressantes. En les étudiant avec soin, on déterminerait aisément les saints personnages qu'elles représentent. Ce devraient être les patrons de l'édifice de l'abbaye-mère, de l'ordre religieux auquel elle appartenait, des fondateurs. Aussi puis-je par avance dire que Ste Agnès ou Ste Anne (elles ont souvent été prises l'une pour l'autre, le nom d'Agnès ayant été d'abord prononcé Agne, puis Anne), S. Vincent, S. Augustin, S. Maurice (le guerrier de gauche) s'y trouvent".
La seigneurie de Belleville
La seigneurie de Belleville, près la Roche-sur-Yon, a été possédée successivement par trois familles qui en ont porté le nom.
"Au XIIe siècle, dit M. Beauchet-Filleau dans son Dictionnaire des familles du Poitou, Agnès, dlle de Belleville, héritière de sa famille, épousa d'abord Bernard Châles (ou fils de Chalon) de la Roche-sur-Yon, qui, vers 1170, donna avec ses trois fils une rente en blé, sur sa cour de Belleville, à Aimery, prieur de la Roche-sur-Yon, pour lui, les siens et les âmes des Guarat. Ce don fut confirmé en 1212 par Brient de Montaigu, deuxième mari d'Agnès, qui fut à cause d'elle seigneur de Belleville. Leurs enfants héritèrent de ce fief dont ils prirent le nom.
Cette dernière famille de Belleville s'éteignit au XIVe siècle, et la seigneurie passa par alliance à la famille anglaise des Harpedane qui, depuis le XVe siècle, a porté de préférence le nom de Belleville".
Le blason des seigneurs de Belleville était : gironnée de gueules et de vair de douze pièces.
Voici les diverses notes que nous avons recueillies sur les membres de ces familles :
La première fois que l'histoire fait mention des seigneurs de Belleville, c'est en 935, à propos d'une création de chanoines honoraires, à Saint-Hilaire de Poitiers, A cette époque, des incursions normandes et des violentes attaques de certains seigneurs contre les monastères, l'illustre abbaye avait cherché le moyen de se défendre contre ses ennemis, et elle avait cru le trouver en donnant le titre canonical à quelques seigneurs du plus haut rang. Ceux-ci, sans être obligés à aucun des devoirs de l'état religieux, avaient droit néanmoins de prendre rang au chœur après les chanoines titulaires, dont ils juraient de défendre les privilèges contre quiconque entreprendrait de se les attribuer[7]. Les quatre premiers seigneurs ainsi choisis furent ceux de Châtellerault, de Parthenay, de Lusignan et de Belleville. Ce dernier fut remplacé plus tard par celui de Couhé. Ces puissants défenseurs furent appelés les quatre barons de l'évêché de Poitiers[8].
En 1150, naquit Brient de Montaigu et de Belleville, chevalier et seigneur de Commequiers et de Belleville. Il était le fils puîné de Maurice de Montaigu, seigneur dudit lieu, et d'Héloïse de la Garnache (Beauchet-Filleau)[9].
Dans un grand nombre de chartes du Bas-Poitou, il est simplement appelé Brient de Montaigu. "Cependant, dit Beauchet-Filleau, dans une charte du prieuré de Machecoul, dépendant de Marmoutiers, datée de l'an 1214 (Morice, Histoire de Bretagne, preuves, p. 826), et dans une charte de Sainte-Croix de Talmont de l'an 1216, il est appelée Brient de Belleville. On le trouve qualifié de seigneur de la Garnache dans un titre de l'abbaye des Fontenelles, daté de l'an 1216. Mais cette seigneurie appartenait à sa nièce, fille de son frère aîné, Maurice de Montaigu, et s'il la posséda, ce fut seulement en partie ou provisoirement, après le décès de son frère, en attendant le règlement de l'héritage maternel. On trouve un sceau de Brient de Montaigu dans une charte du prieuré de Fontaines, dépendant de Marmoutiers, de l'an 1225 ; il porte un écu gironné de douze pièces, dont six de vair, au revers une main. S. B. Domim de Monte Acuto. "(Cart. Marm. II, p. 353)".
"Brient de Montaigu-Belleville mourut vers 1225-1230. On trouve dans le cartulaire du prieuré de la Roche-sur-Yon deux chartes qui donnent l'état de sa famille, l'une datée du 6 des calendes de mai 1212, où il figure avec sa femme et ses cinq enfants, l'autre de l'an 1225, où il nomme également les membres de sa famille" (Marchegay, Cartulaire du Bas-Poitou).
Brient de Belleville épousa, vers 1180, Agnès, dlle de Belleville, veuve de Bernard Châles, de la Roche-sur-Yon. Il en eut plusieurs enfants dont le premier fut Josselin, chevalier, seigneur de Belleville et de Commequiers. Celui-ci, de concert avec son père, fit plusieurs libéralités au prieuré de la Roche-sur-Yon, en 1212, 1218 et 1225. Nous voyons aussi dans le Cartulaire d'Orbestier (n° 43) qu'il se désista, en 1230, en faveur de cette abbaye, des réclamations qu'il élevait sur la viguerie de certaines terres :
Universis Christi fidelibus presentes licteras inspecturis ego Jocelinus de Bella Villa, dominus ejusdem Ville, salutem in Domino. Noverint universi quod cum quœdam controversia suborta fuisset inter me, ex una parte, et abbatem et monachos Sti Johannis de Osbiterio, ex altera, super vigeriam de Malo Pertuiso et de Boscheria et de Gormanderia et de terra de Bosco et de Tallepe, quam vigeriam dicebam ad me de jure pertinere et muitis aliis coustumiis et redoanciis quas ab eisdem petebam, racione domus eorum monachorum de Malo Pertuiso et eorum hominibus de predictis villis ; tandem audila super hoc veritate ab Briencio de Bella Villa, patre meo, et muitis aliis probis viris, et ipsorum monachorum cartulis et scriptis diligenter inspectas ab antecessoribus meis super hiis et super aliis eisdem monachis concessis, confirmavi et con-cessi, dona et elemosinas et gracias que ab antecessoribus meis facta fuerant eisdem sive concessa. Insuper, pro redempcione anime mee et parentum meorum, dedi, in puram et perpetuam helemosinam et liberaliter concessi eisdem monachis quicquid juris sive dominii hobebam vel habere poteram in terra eorum de Malo Pertuiso et in hominibus suis de Gormanderia et de Boscheria et de Bosco et de Tallepe, et in terris et tenementis eorum hominum, habendum et possidendum in perpetum, pacifice, libere et quiete. In cujus rei testimonium, présentes licteras eisdem monachis dedi sigillo meo sigillatas. Actum in camera predicti abbatis Sti Johannis de Orbisterio, présente domino meo Savarico de Mallo Leone, anno Domini millesimo CC° XXX°. Et dicti abbas et monachi receperunt me in suis benetrictis temporalibus et spiritualibus (Archives Historiques du Poitou, t. 6, p. 46).
En 1235, Josselin de Belleville assista avec son frère Maurice à un jugement rendu en la cour de Challans en faveur du prieuré de Sallertaine ; cet acte fut scellé des sceaux des deux chevaliers (Marchegay). Dans ce jugement, R. Bardin, prieur de Sallertaine, acquitta Jean Tailler que les enfants de Guillaume Fradoneau accusaient du meurtre de leur père (Cartulaire du prieuré de Sallertaine, n° XVIII).
On ne sait au juste si ce Josselin laissa des descendants. Peut-être Maurice II, dont nous parlons plus loin, doit-il passer pour son fils.
Brient de Belleville eut encore pour enfants :
Girard, qui fit don avec son père à la Roche-sur-Yon en 1212 et qui mourut avant 1225 ; Arbert, qui figure dans les Chartes de 1212 et 1225 ; Maurice, dont nous allons parler plus loin ; Helvoïse (!), nommée dans les Chartes de 1212 et 1218 ; Catherine, mentionnée dans une Charte de 1218, où Brient de Belleville nomme ses enfants (Beauchet-Filleau).
Maurice, qui succéda à son père Brient, était chevalier, seigneur de Belleville, Montaigu, Commequiers, la Garnache, etc. Il participa aux libéralités de son père en faveur du prieuré de la Roche-sur-Yon. Avec sa femme, il fit cession de divers droits, en 1239, à l'abbaye des Fontenelles, dans la paroisse de Sainte-Flaive. Le 28 mars 1241, il donna aussi à Geoffroy de la Flocellière une rente de 40 livres, en récompense de ses services.
Ce Maurice de Belleville se maria deux fois : d'abord, vers 1210, avec une dame dont le nom est inconnu, puis, vers 1230, à Guiburge Boscher (ou Boucher), demoiselle de la Boucherie. Elle est nommée dans une charte des Fontenelles de l'an 1241 (Sommier des Fontenelles, p. 228. Notes Marchegay, vol. 17, n° 517). Marchegay pense que cette dame mourut sans postérité parce qu'on trouve au même sommier (p. 176) que Guillaume Le Roux, seigneur de la Boucherie, héritier en partie (proportionaliter hœres), de ladite dame Guiburge, confirma le don d'une rente de 15 livres, qu'elle avait fait à l'abbaye des Fontenelles. Ce don fut aussi confirmé par Guillaume de Sonay (!), autre héritier en partie de cette dame, l'an 1215 (Sommier, p. 195). Il pourrait se faire cependant que ces personnages fussent des gendres de Maurice de Belleville et de ladite Guiburge (Beauchet-Filleau).
Maurice de Belleville, deuxième du nom, issu peut-être du premier mariage du précédent, ou peut-être encore son neveu, était aussi lui chevalier et seigneur de Belleville, Montaigu, la Garnache, Beauvoir-sur-Mer, Commequiers, la Roche-sur-Yon, Luçon. Il paraît être né vers 1210.
"Les documents retrouvés jusqu'à ce jour, dit Beauchet-Filleau, ne donnent que des renseignements incomplets sur les seigneurs de Belleville et nous ne donnons cette filiation que d'une manière fort hypothétique, car il est impossible de distinguer les actes qui concernent spécialement chacun des divers Maurice qui ont possédé Belleville.
Les seigneuries de Montaigu, la Garnache, ancien domaine de Montaigu, passèrent à la branche de Belleville vers 1223, après le décès de Pierre de Dreux dit de Braine, veuf de Marguerite de Montaigu, héritière de la branche aînée de la famille.
D'après l'ordre des temps, il semble que ce Maurice II se maria d'abord, vers 1230, à une dame dont le nom est inconnu.
En 1235, il épousa, en deuxièmes noces, Jeanne de Thouars, veuve d'Hardouin de Maillé et fille unique d'Aimery, vicomte de Thouars, et de Béatrix de Machecoul. Cette dernière, qui était dame de la Roche-sur-Yon, avait transmis le même titre à sa fille Jeanne.
Voici quelques noies recueillies sur ce seigneur de Belleville.
Dans les comptes de la terre d'un certain Guillaume (de Mausiaco) on lit cette juste indemnité imposée à un écuyer du seigneur de Belleville :
1245 anno. De Hugone de Haiis armigero domini Mauricii de Bella Villa LXXV libr. pro prima medietate, pro eo quod idem armiger quamdam puellam violenter extraxit de domo P. Hamonis.
1246. Pro armigero domini Mauricii de Bella Villa LXXV sol.pro ultima medictate, quia ipse violenter traxit a domo Phainensi quamdam domicellam.
Dans un état des revenus du comte de Poitou en 1246-1247, on trouve que Maurice de Belleville devait un droit de rachat de 1000 livres et qu'il était plège (caution) aussi pour 1000 livres, du droit de rachat dû par Raoul de Mauléon.
En 1249, Maurice et sa femme firent hommage au comte Alphonse de Poitou et lui cédèrent le droit de garder le château de la Roche-sur-Yon pendant cinq ans. Le comte avait précédemment échangé avec eux les droits qu'il réclamait sur la Roche-sur-Yon, avec ceux de Jeanne de Thouars sur Tonnay-Boutonne.
En 1256, le prieuré de la Roche-sur-Yon reçut aussi une libéralité des nobles châtelains de Belleville.
Enfin, vers cette même année se termina une longue querelle engagée entre l'abbé de Marmoutiers, Maurice de Belleville et son épouse Jeanne de Thouars.
Voici comment M. l'abbé Rousseau raconte le fait dans son histoire de St-Lienne et de son Prieuré (p. 86 à 91) : Un usage qui paraîtrait remonter au moins à 1092, lorsque les moines Tourangeaux prirent possession de Saint-Lienne, autorisait les seigneurs de la Roche-sur-Yon à s'emparer du palefroi ou cheval que montait l'abbé de la célèbre abbaye de Touraine, lorsque, pour la première fois après son élection, il venait visiter le prieuré de la Roche-sur-Yon, dépendant de «on monastère.
Aucun titre ne nous est resté confirmant cette prétention ; on ne devait pas non plus en posséder à cette époque, sans cela, Geoffroy, abbé de Marmoutiers, arrivant à la Roche, en 1256, pour y voir ses religieux, ne se fût pas refusé à cette redevance d'un nouveau genre, mais motivée par des largesses particulières, tandis qu'il s'opposa formellement à cette revendication.
Maurice de Belleville et Jeanne de Thouars, son épouse, fille de Béatrice, réclamant ce droit, saisirent le palefroi de l'abbé, malgré ses énergiques protestations.
Cependant, voyant la paix sérieusement compromise et désirant la maintenir, les dits seigneurs consentirent à un concordat. Ils rendraient le palefroi, mais les prieurs de Chemillé, au diocèse d'Angers, ceux de la Roche-sur-Yon et de Fontaines devaient minutieusement fouiller les cartulaires de Marmoutiers et de Saint-Lienne. On priait aussi les plus anciens moines de recueillir leurs souvenirs. Si cette exigence était légitime, à la Pentecôte, le cheval serait remis aux seigneurs de la Roche, ou son prix d'estimation, si l'animal avait péri. Les dits prieurs promettaient de faire loyalement ces recherches et d'en faire connaître le résultat à l'Ascension du Seigneur. Acte signé au mois de-janvier 1255. (Cartulaire n° XXXII)
Les perquisitions furent vaines et les contestations continuèrent.
Au mois de novembre 1256, Jeanne de la Roche, épouse de Maurice de Belleville, accepta l'arbitrage de Geoffroy, trésorier du chapitre de Tours. Le nouveau mandataire avait, pour se prononcer, le temps entre l'octave de la Toussaint (on était au lendemain de la fête) et la solennité de la Purification de la bienheureuse vierge Marie. (Cartulaire n° XXXIII)
Maurice de Belleville signa de son côté un écrit, envoyé à Geoffroy, dans lequel il acceptait son intervention et l'époque à laquelle le jugement devait être rendu. Les prieurs de Commequiers et de Sallertaine, étant soumis à cette redevance, avaient les mêmes intérêts à défendre. Les seigneurs de la Roche et les prieurs, moines, des monastères susdits, s'engageaient à se ranger à l'avis du nouvel arbitre sous peine d'une amende de C. marcs. Novembre 1256. (Cartulaire n° XXXIV)
Le trésorier de Tours eut besoin d'une époque plus reculée pour réunir les preuves nécessaires au prononcé du jugement. Ce ne fut qu'à la veille de Saint-Pierre-aux-Liens, juillet 1257, qu'il fit connaître aux parties la sentence d'arbitrage. N'ayant trouvé aucune trace du droit réclamé par les seigneurs de la Roche, il leur enjoignait, ainsi qu'à leurs successeurs, de cesser toute revendication, et de garder sur cette affaire un perpétuel silence. (Cartulaire n° XXXVI)
Le cartulaire suivant rappelle l'origine du procès, l'exposé des prétentions de Maurice de Belleville et de Jeanne de Thouars. On y voit aussi que ces derniers se soumettent complètement à la décision prise. Sans vouloir notification du jugement, renonçant à tout rappel de la chose jugée, ils donnent les présentes lettres aux prieurs de Saint-Lienne, de Commequiers et de Sallertaine, comme preuve unique et solennelle de l'abandon complet de toutes leurs réclamations.
Dix ans s'écoulèrent jusqu'au jour où Jeanne de Thouars, sans enfants, légua son fief et castel de la Roche à Alphonse de France, comte de Poitiers. Pendant ce temps la question du palefroi fut-elle réagitée, malgré les promesses faites par écrit authentique ? Nous serions en droit de le supposer d'après la lettre suivante adressée par Alphonse, fils de Roy de France, comte de Poitiers et de Toulouse, à son cher et fidèle Simon de Coûtes, chevalier, châtelain de la Roche-sur-Yon :
"Le prieur de Saint-Lienne de la Roche-sur-Yon nous fait exposer que le seigneur Maurice de Belleville, chevalier, seigneur de la Garnache, et jadis du dit lieu de la Roche, du chef de sa femme, a imposé audit prieuré, à titre féodal, une redevance qui consiste à faire prendre pour le seigneur le palefroi de l'abbé de Marmoutiers, lorsque la première fois après son élection il vient dans la ville de la Roche ; et, de fait, s'est emparé du palefroi d'un abbé de ce monastère, injustement et sans titre, à ce que prétend le prieur qui, par contre, est obligé de donner à son abbé un autre palefroi. Il en résulte que les prélats, commis au gouvernement de Marmoutiers, à cause de cette exaction indue, ne veulent plus venir visiter les moines de Saint-Lienne et les réformer, et qu'ainsi la règle y est moins strictement observée. Le prieur nous a sollicité d'apporter un remède indispensable à ce mal, et nous vous mandons, en conséquence de vous renseigner avec soin sur ce point et de connaître la validité du droit que nous sommes, dit-on, fondé à exercer. Parlez-en, néanmoins, au prieur après avoir pris l'avis du sénéchal du Poitou, et voyez combien il voudrait nous donner pour l'abolition de cette redevance. Vous nous ferez connaître, par un mémoire que vous nous apporterez ou que vous nous enverrez, au prochain parlement de la Chandeleur, quels sont, et les droits du seigneur de la Roche-sur-Yon et les offres du prieur.
Donné à Long-Pont, le lundi après la fête de Ste Catherine, l'an du Seigneur 1268".
Nous ignorons en quels termes fut conçue la réponse de Simon de Coutes. La chose dut cependant traîner en longueur, puisque ce n'est qu'en 1270 que nous trouvons l'écrit qui clôt définitivement cette interminable querelle. Au mois de mars 1270, Alphonse, fils de Roy de France, comte de Poitiers et de Toulouse, fit l'abandon complet du droit qu'il possédait ou pouvait posséder, et s'engagea pour lui et tous ses héritiers à ne jamais le réclamer.
Maurice de Belleville, de son côté, ayant aussi perdu ses droits sur la seigneurie de la Roche-sur-Yon, qu'il tenait du chef de sa femme, ne se désintéressa pas du monastère de Saint-Lienne. Continuant ses pieuses largesses, il concède en perpétuelle aumône à Dieu, à la bienheureuse Vierge Marie et au prieuré, un setier de seigle à percevoir dans son aire de Belleville, au temps de la moisson. La donation est signée le vendredi d'avant les Rameaux, 1292. (Cartulaire n° XLI)
Le même Maurice de Belleville avait déjà offert une rente de 25 sous pour l'entretien d'une lampe dans le sanctuaire, devant l'autel où repose le corps de St Lienne, en 1257. Dix ans plus tard, il ajoute encore 25 sous pour une autre lampe qui brûlera nuit et jour devant les reliques du bienheureux. (Cartulaires G et H)
Après la mort de son épouse, Jeanne de Thouars, vers 1258, Maurice de Belleville fit don à l'abbaye de Fontenelles des biens que lui avait légués cette dernière (Sommier 175. Marchegay, 17 523). Puis, la même année, il épousa en troisièmes noces Isabelle de Lusignan, dite de la Marche. Celle-ci était veuve de Geoffroy de Rançon seigneur de Taillebourg et de Marcilllac, et fille aînée de Hugues, comte de la Marche et d'Angoulême, et de Yolande de Dreux. Cette dame possédait Marcillac à titre de douaire, et Maurice de Belleville fit hommage à cause d'elle, le 11 juin 1267, au comte d'Angoulême (Société archéologique, Charente, 1860 p. 307 et 526).
Voici quelques faits relatifs à cette époque et recueillis çà et là :
Le 8 mars 1260, Maurice de Belleville accorde le droit de chasse aux hommes qui se trouvaient sur ses seigneuries de la Garnache et de Commequiers : ce fut fait et donné le mardi avant la feste saint Grégoire en l'an de l'Incarnation nostre seignor mille dous cenz e sexante.
(1262) Gérard Chabot II, baron de Retz, s'empara de force de la part qui appartenait à Maurice de Belleville, en l'île de Bouin. Ce dernier fit sans doute des réclamations auprès de plus puissant que lui, car nous voyons qu'Alphonse de France, comte de Poitiers, ordonna la restitution du bien volé, ainsi que nous l'apprend un mandement du comte, en date du mardi après la chaire de Saint-Pierre, 1265 (Don Anselme. Histoire généalogique, tome IV, p. 559).
Après la mort de son mari, en 1277, Isabelle de Lusignan posséda en douaire Commequiers et Beauvoir-sur-Mer. Elle fit plusieurs dons au prieuré de Lande-Beauchêne, dépendant de Fontevrault, en 1303, acte scellé de son sceau, portant l'effigie d'une dame entre deux écussons, l'un mi-partie de Belleville et de Lusignan, l'autre burelé (Lusignan) (Cartulaire de Fontevrault. Fonds Latin 54801, p. 119.)
Chose assez curieuse, Isabelle de Lusignan n'était pas encore morte que déjà ses héritiers affermaient leurs droits à sa succession. Hugues XIII, dernier comte de la Marche et neveu d'Isabelle, en agissait ainsi dans un testament en date de juin 1297, et Yolande, dame de Pons, sa nièce, en faisait autant, au mois de mars 1309, dans un traité qu'elle fit avec Philippe-le-Bel.
D'après M. Filleau, Maurice de Belleville ne paraît pas avoir eu d'enfants de Jeanne de Thouars et d'Isabelle de Lusignan. Peut-être aurait-il eu d'une première femme un fils qui se serait appelé aussi lui Maurice et qui serait celui dont nous allons parler ci-après (On trouve encore dans la généalogie de Marconnay une Marguerite de Belleville qui aurait épousé, vers 1250, Philippe de Marconnay, dont le fils Renaud était seigneur de Luçon, en 1273).
Belleville (Maurice ? de) paraît être décédé jeune, mais avoir épousé, vers 1260, Jeanne ? de Châteaumur qui était probablement fille unique de Geoffroy, seigneur de Châteaumur. De ce mariage, dit M. Filleau, sont nés sans doute :
1. Maurice qui suit ; 2. Guillaume (ou peut-être Geoffroy), chevalier, qui, dans un accord du mois d'août 1396, avec Jeanne de Châteaumur, dlle de la Flocellière, Olive de Châteaumur et Olivier Fonteneux ? est dit avoir promis une dot à Désirée, épouse d'Arbert Frappier. Dans la collection Joursanvault, il y avait le testament d'Anne de Brillouet, veuve de Geoffroy de Belleville, et épouse de Geoffroy de Châteaubriant, daté de l'an 1310. Nous pensons que ce Geoffroy pourrait être le même que le Guillaume de Belleville de Dom Fonteneau (Marchegay, "7. P- 592).
C'est sans doute à ce seigneur de Belleville ou à son fils qu'il faut attribuer le fait suivant :
Dans le Cartulaire de Saint-Jean d'Orbestier, n° 85 (Archives historiques du Poitou, tome VI, p. 100), on y voit un amortissement de 80 aires de marais salants payé à Maurice de Belleville, le 10 février 1285 :
"A toz ceaus qui ces présentes leitres e orront Morice de Bele Ville, segnor de la Ganache e de Mont Agu, saluz. Sachent tuyt quer ge hai eu e receu de l'abbé e dau covent de mon segnor Saint Johan d'Orbester dez livres de la monoye corant, por raison d'amortiment de quatre vinz aires de mareis les quaus feu Johan Boessea lor havet doné en aumône. En tesmoin de vérité ge lor en ai donë ceste leitre saclée de mon seau. Ce fu doné le samedi après les Cendres, l'an de grâce mil e dous cens quatre vinz e quatre".
Belleville ou de Châteaumur (Maurice de). Dans sa jeunesse, ce seigneur de Belleville fut appelé Maurice de Châteaumur. C'est ce que nous apprend un acte de l'an 1277, dans lequel Maurice de Belleville confirme divers dons qu'il avait déjà faits à Maurice de Châteaumur, valet. (Dom. Morice, Preuves, Hist. de Bretagne, 1047.) Il est vrai que dans cet acte rien n'indique un lien de parenté entre le donateur et le donataire, mais il semble bien qu'il devait exister. Peut-être ce Châteaumur était-il le fils ou le petit-fils de Maurice de Belleville.
En 1281, qualifié d'écuyer et de seigneur de Montaigu et de la Garnache, il faisait accord avec Guillaume de Sonay au sujet d'un droit de rachat. En 1292, le jour de Pâques fleuries, il faisait également un autre accord avec l'abbesse de Fontevrault, par acte scellé de son sceau portant un cavalier avec les armes de Belleville et S. Mauritii de Belhvilla Dni de Castro Muri (d'après une note de Marchegay, vol. 17, p. 614).
Ce seigneur de Belleville eut à deux reprises des démêlés avec des chevaliers de Saint-Jean, au sujet du droit de haute justice dans le bourg de l'Hôpital à Montaigu. La première fois, ce fut avec le commandeur de Launay, paroisse de Sainte-Cécile. Le procès se plaida aux assises de la Roche-sur-Yon, et le jugement fut défavorable au seigneur de Belleville (22 septembre 1289). Celui-ci n'abandonna pas sans doute ses prétentions et il dut s'adresser au grand prieur de France lui-même, le frère Ithier de Nanteuil, car, le 16 juin 1294, il conclut avec ce dernier un arrangement à l'amiable sur le différend qui les divisait (Arch. hist. du Poitou, I).
Le 20 mars 1292, il fit don au prieuré de la Roche-sur-Yon[10] et la même année il rendit hommage de Montaigu au vicomte de Thouars. Le 9 août 1297, il fit accord avec Jean Barbastre, de Beauvoir-sur-Mer, au sujet du fief de Lorière, qui appartenait audit Jean, du consentement de Létice de Beauvoir, sa mère. (D. Fonteneau).
Dom Morice, dans son histoire de Bretagne (I, 1116), nous apprend que Maurice de Belleville, en qualité de tuteur de son fils Maurice, né de Sibille de Chasteaubriant, échangea la seigneurie de Candé, en Anjou, avec Geoffroy de Chasteaubriant, contre divers domaines que celui-ci lui céda à Luçon et à Champagné-les-Marais. Cet échange se fit en février 1296.
En 1301, comme exécuteur testamentaire de Girard Chabot, il donna attestation au prieuré de Bademorière, dépendant de Fontevrault, pour des legs faits à ce couvent. En mai 1302, il fit don au prieuré de la Lande de Beauchêne, et céda Boisvert à la Trinité de Mauléon, le 30 janvier 1303 (Dom. Fonteneau).
La même année 1303, le nom de Maurice de Belleville figure sur la liste des barons poitevins qui reçurent des lettres de convocation pour se trouver en armes dans la ville d'Arras, le mardi après la Pentecôte, afin de prendre part aux opérations de la guerre de Flandre.
L'année suivante 1304, au mois de juillet, Maurice de Belleville fit accord avec le prieuré de Lande-Beauchêne, pour des maisons situées à Beauvoir sur-Mer. M. Filleau pense qu'il mourut à cette époque et que les actes postérieurs doivent être attribués à son fils.
D'après le même auteur, il dut se marier au moins deux fois :
1° à Sibille de Chasteaubriant, fille de Geoffroy et de Belleassez de Thouars. Ils étaient cousins au 4e degré et le contrat fut signé le jeudi après Noël 1286 (d'après une note de dom Villevieille, tirée des Archives de Laval) ;
2° à Létice de Parthenay, fille de Guillaume l'Archevêque, sire de Parthenay, et de Jeanne de Montfort, qui, d'après les mémoires produits dans un procès au Parlement de Paris, au milieu du XIVe siècle, a survécu à son mari (Marchegay, 17, 624).
Il eut du premier lit Maurice qui suit ; et du second, Jeanne, dame de Belleville (après la mort de son frère, célèbre héroïne des guerres de Bretagne au XIVe siècle), qui épousa en premier lieu (1312 ?) Geoffroy de Chasteaubriant, décédé en 1328 ; puis, en 1330, Olivier de Clisson, chevalier, sire dudit lieu, décapité à Paris, le 2 août 1343 ; enfin, vers 1345, Gauthier de Bentley, chevalier anglais. Ce fut durant ce dernier mariage que le duc de Bretagne et le roi d'Angleterre firent plusieurs dons aux deux époux, en 1345, 1349 et 1356 (Dom Maurice).
Maurice de Belleville, fils du précédent, chevalier et seigneur de Montaigu, de la Garnache, de Châteaumur, de Fief-1'Evêque et de Cayeu, paraît avoir succédé à son père vers 1306.
D'après une note de dom Fonteneau, il fit accord, le 17 janvier 1306, avec Jeanne de Châteaumur, dlle de la Flocellière, pour assigner une rente en échange d'un bois qu'il avait cédé à la dame de Chantemerle (Titres de la Durbellière). Dans cet acte il porte le titre de valet.
Lorsque l'évêque Arnaud d'Aux vint prendre possession de son siège épiscopal de Poitiers, le 7 mai 1307, Maurice de Belleville, en sa qualité de seigneur du Fief-l'Evêque, fut l'un des quatre barons qui assistèrent le nouvel élu à son trône, dans l'église de Sainte-Marie-la-Grande. En mai 1311 et en 1314, à cause de son titre de chevalier, il reçut divers aveux au nom de sa deuxième femme. Il fut convoqué, en 1320, avec les autres barons de France pour prendre part à la croisade projetée par le roi. Cette même année, il fit un testament, à la Roche-sur-Yon, et légua Champagne-les-Marais, Luçon, la Charrie à Guillaume et Raoul Chabot, ses cousins, suivant un procès jugé au parlement, le 23 juillet 1344 (Villevieille.)
Il épousa d'abord, vers 1300, Eschive de Rochefort, veuve de Savary de Vivonne, chevalier et sire de Thors, et fille d'Ebles, seigneur de Rochefort-sur-Charente, et de Ænor Chabot. Celle-ci mourut sans lui laisser d'enfants. Il épousa ensuite, vers 1305, Béatrix de Cayeu, dame dudit lieu en Picardie. Cette seconde femme ne lui donna pas non plus d'enfants. A sa mort, sa sœur Jeanne devint sa principale héritière, pendant que sa veuve se faisait religieuse dans un monastère de Saint-Louis de Poissy.
Divers procès suivirent la mort d'Eschive de Rochefort et celle de Maurice de Belleville. D'abord, en 1323, Hugues de Vivonne, tuteur des enfants de Savary, plaida contre Geoffroy de Chasteaubriant et Jeanne de Belleville, sa femme, sœur et héritière de Maurice, au sujet de l'usufruit légué par Eschive à son second mari. Puis, lorsque Béatrix de Cayeuse fut faite religieuse, elle eut aussi, au sujet de son douaire, divers procès qui furent plaidés en Parlement, de 1336 à 1340.
Par la mort du dernier Maurice de Belleville, la famille tomba en quenouille dans la personne de Jeanne de Belleville, devenue la principale héritière de la seigneurie. Celle-ci était alors mariée à Olivier de Clisson, dont nous avons raconté la trahison et la mort sur l'échafaud, à Paris, le 2 août 1343. Tous les biens de Jeanne, accusée de complicité, furent confisqués, mais furent rendus plus tard à son fils aîné, Olivier de Clisson, le célèbre connétable de France. Ce dernier, à sa mort, laissa les terres de Montaigu et de Belleville à sa sœur, Jeanne de Clisson, qui, en épousant le gentilhomme anglais Jehan Harpedanne, commença la troisième famille des seigneurs de Belleville[11].
C'est ici le lieu de placer quelques faits relatifs à cette époque, de 1360 à 1369.
Un article de M. Paul Guérin, dans les Archives historiques de l'Ouest, à propos du traité de Brétigny, nous donne de curieux détails sur les agissements du roi d'Angleterre pour s'emparer de la terre de Belleville, après qu'elle avait été confisquée par Jean II.
"Signé le 8 mai 1360, le traité de Brétigny, qui cédait à l'Angleterre le Poitou, l'Aunis et la Saintonge, fut définitivement ratifié par le roi Jean, à Calais, le 24 octobre de la même année.
Le 1er octobre, à Fontenay-le-Comte, Etienne Vergereau remit les clefs de la ville à Jean Chandos qui les lui rendit pour les garder au nom du roi d'Angleterre. Le commandant du château, Perreau-Courrain, chevalier, était absent. Son lieutenant, Guillaume de Mareuil, y introduisit les Anglais, puis la garde en fut confiée à un nouveau venu, Jean de Harpedenne.
Les ducs d'Orléans, d'Anjou, de Berry et de Bourbon, otages du roi Jean, conclurent à Londres, en novembre 1362, un traité par lequel ils promettaient de faire livrer, à la Toussaint suivante, au roi d'Angleterre, "la terre de Belleville avec ses dépendances", par manière que la tenait le roi de France. En échange, ils obtenaient leur mise en liberté et pour gage d'accomplissement de leur promesse, donnaient à Edouard III, avec plusieurs autres lieux et châteaux, le château de la Roche-sur-Yon. Il était stipulé que le roi d'Angleterre n'abandonnait pas toutefois, pour cause de ce gage, le droit qu'il prétendait sur le dit château. − Il est certain, cependant, qu'il ne fut pas livré au roi d'Angleterre, ni comme gage, ni autrement.
Un peu avant la mise à exécution du traité de Brétigny, Olivier de Clisson ayant fait sa soumission au roi Jean, ce prince lui restitua une partie des biens qui avaient été confisqués, près de vingt ans auparavant, sur son père et sa mère. La terre de Belleville proprement dite n'était que la moindre portion du beau domaine qui avait été réuni par suite de la forfaiture des parents d'Olivier.
L'ensemble des biens confisqués en 1343 comprenait, en effet, outre Belleville, les châteaux, forteresses, villes et châtellenies de la Garnache, Beauvoir, Montaigu, Châteaumur, Palluau, Vendrennes, les Deffens, la Chapelle-Thémer, la Lande, la terre de Thouarsais, l'île d'Yeu, etc. Le roi d'Angleterre prétendait que tout ce domaine devait lui être abandonné et que la restitution faite à Olivier de Clisson était sans valeur. Le roi Jean, au contraire, s'en tenait à la lettre du traité et ne voulait céder que la terre de Belleville seule (environ 250 livres de revenu annuel).
Des commissaires furent constitués de part et d'autre pour étudier cette affaire et élucider les points obscurs. Finalement la question n'avait point reçu de solution en 1369, quand la guerre fut reprise, et les Anglais ne prirent jamais possession de l'héritage de Clisson et de Belleville".
Après cette digression, revenons au mari de Jeanne de Clisson.
Jehan Harpedanne, premier du nom, d'abord général de l'armée anglaise en Guyenne et connétable d'Angleterre, s'attacha ensuite au service du roi Charles VI qui le fit son chambellan, puis capitaine général de sa Majesté, en Périgord, et capitaine de ses gens d'armes. Il avait été aussi gouverneur de Fontenay, comme le prouve l'avis suivant, publié le 14 novembre 1365, pour pourvoira la protection de cette ville contre les attaques des troupes françaises :
"Jehan de Harpedanne, chevalier, séneschal de Saintonge, chastelain et capitaine du chastel, ville et chastellenie de Fontenay, pour le prince d'Aquitaine et de Galles... baillons ès manans et habitans de Fontenay, pour faire le guet à ladite ville, les habitans des paroisses de Puisec, Saint-Mars-les Preys, Chaix, Montreuil, Doix, le Gué-de-Velluire, des Nohes, Nostre-Dame de Coussaye, Denans, Bonneuil et Fontaines, pour faire le guet à ladite ville, garde, reparrement de dohes, et aulcuns charroys estre subjects au chastel de ladite ville avecques prouffit des deff..." (Histoire de Fontenay, par B. Fillon). D'après des lettres vidimées de Jean de Berry, la châtellenie de Fontenay avait été donnée à Olivier de Clisson comme garantie d'un emprunt de dix mille francs d'or que celui-ci avait fait en faveur du premier (Extrait de l'inventaire des archives de la maison de Clisson, dressé en 1434. Collection B. Fillon).
Ce fut pendant que Jehan Hardepanne était gouverneur de Fontenay que Duguesclin vint mettre le siège devant la ville. Harpedanne était absent, mais sa femme le remplaça et elle résista avec le plus grand courage au célèbre connétable.
En 1402, alors qu'il était sénéchal de Saintonge, Harpedanne présida, en cette qualité, pour les Français, à la fameuse passe d'armes de Montendre, où Barbazan et ses compagnons terrassèrent en champ clos un nombre égal d'Anglais. Il mourut avant le 14 juin 1406, ne laissant qu'un fils de son mariage avec Jeanne de Clisson.
Harpedanne Jehan II, chevalier, seigneur de Belleville et de Montaigu, naquit à Fontenay, durant que son père y était gouverneur, et fut baptisé en l'église de Notre-Dame de cette ville. Ce fut sans doute en souvenir de ce fait qu'il fonda, en cette église, une messe, le samedi de chaque semaine, avec la condition que cette messe serait célébrée entre le soulail levant et heure de prime. Comme son père, il fut gouverneur de Fontenay et prenait le titre de seigneur de Belleville, Montaigu (du chef de sa mère), de l'hôtel de la Chopine et de la forêt Nizeau. Il testa, le 13 juin 1434, en faveur de son fils, et l'acte fut ratifié par Charles VII. Il se maria deux fois ; en premières noces avec Jehanne de Mucidan dont il eut son fils Jehan, et en secondes noces avec Jehanne de Penthièvre.
Le Chartrier de Thouars fait plusieurs fois mention de ce Harpedanne. Dans le tome I, il est dit :
1° que "Monsieur George (sic) de la Trémoille a baillé en prest au Roy un coursier bay, prins de Messire Jehan de Belleville, donné à Mre de Villars VIIIxx XV écus (cad. 8 x 2° + 15 escuz, cad. = 175 écus). (Pièce originale)".
2° Au sujet de George de la Trémoille on trouve encore : "Une assignacion à cause de 3 mille réaux appréciés à IIII mille Vc francs, imposez ès pays de St Onge et gouvernement de la Rochelle :
Sur la ville de la Roche..................................................................................... IIIc livres.
(Et en marge] : "Sont à Mre de Belleville qui a lettres de prendre sur ses terres 70 mille moutons avant que autre aide se liève quelle qu'elle soit, comme on dit.
Chatellaignon : ........................................................................................... XX sols.
La Jarrue : ................................................................................................. X livres.
Estre (probablement Aytré) : ........................................................................ VIxx V liv. cad. 125 l.
Angoulus : .................................................................................................. LXV livres.
St Regratien : ............................................................................................. XII livres.
Par où l'on estimait quelques-unes des terres qui appartenaient à Monsieur de Belleville. (Chartrier de Thouars, pièce papier).
La date de ce document n'est pas indiquée, mais la pièce étant placée entre deux autres dont l'une est de 1434 et l'autre de 1435, on présume qu'elle est de la même époque.
3° "Autres assignacions baillées pour la dépense de l'argenterie de Mre le Dalphin, commençant le 1er jour de juillet CCCCXL (1440) et finissant le dernier jour de juign CCCCXLII qui sont XXIIII mois entiers :
Sur les terres de M. de Belleville, en Poitou....................................................... 600 liv.
Sur M. de Belleville........................................................................................ 200 liv."
(Chartrier de Thouars, pièce papier).
Dans le tome III, on trouve encore deux passages relatifs à Belleville :
1. A propos des obsèques du duc François de la Trémoille il est dit : "A esté baillé pour les robes de deuil ordonnées, pour le receveur de Thouars, pour M. de Belleville, XII livres".
2. Enfin, à la table des matières, on lit le nom de Pierre Laurens, ecuyer, sieur de Belleville, qui faisait partie du conseil de François de la Trémoille et qui recevait cinquante livres de gages
(Chartrier de Thouars, p. 62).
Dans les Archives du Poitou année 1898, on rapporte aussi un procès intenté par le seigneur de Belleville :
"L'an 1428, Jean Harpedanne, seigneur de Belleville et de Montaigu, poursuivait au Parlement le sire de Rais et sa femme, qui, disait-il, tenaient de lui, à cause de sa ville, chasteau et baronnie de Montaigu, le lieu et châtellenie de Beaurepaire, au devoir de cinquante livres tournois et une obole d'or à mutation du seigneur. Ceux-ci s'étant refusés à lui faire la foi et l'hommage et à lui payer cette redevance, il avait fait saisir leur fief. La cour, par arrêt du 20 mai 1428, ordonna une enquête et fit récréance, pour la durée du procès, de la terre litigieuse au profit des défendeurs".
De Jehanne de Mucidan Jehan Harpedanne eut pour fils:
Harpedanne Jehan III, chevalier, seigneur de Belleville, Cosnac, Montaigu, Mirambeau et autres lieux, qui succéda à son père, en juillet 1434. Il fut conseiller et chambellan du roi Charles VI et il épousa Marguerite de France, dite de Valois, fille naturelle de ce dernier et d'Odette de Champdivers, dite la petite reine[12]. Marguerite fut légitimée par lettres du roi Charles VII, en janvier 1427.
C'est probablement du temps de ce Harpedanne qu'eurent lieu les divers faits suivants :
Avril 1446. Lettres d'absolution en faveur d'Olivier Harpedanne, dit de Belleville, seigneur de Mirambeau, pour tous ses excès de guerre et particulièrement pour sa complicité dans la rébellion de Jean de la Roche, sénéchal de Poitou, contre l'autorité royale.
Août 1446. Lettres d'absolution octroyées à Jean de Longpré, archer de Montaigu, prisonnier au châtelet de Paris, pour violences, détrousses et autres excès par lui commis, lors des hostilités entre les garnisons de Montaigu et de Belleville, d'une part, et les Bretons, maîtres de Palluau, des Essarts, de Châteaumur, d'autre part, dans la guerre qui eut lieu entre le sire de Belleville et le seigneur de Belleville ( ? ), à Tiffauges.
Belleville avait alors beaucoup à souffrir des incursions des Bretons, ainsi qu'on le constate dans ce passage que rapportent les Archives historiques du Poitou année 1898 :
"Et parce que les Bretons faisaient guerre au pays de Montaigu et au dit seigneur de Belleville, et tenaient grosses garnisons à Palluau, les Essarts, etc., et courant, pillaient et rançonnaient les terres de Montaigu et de Belleville, pour ces causes, mit garnison aux dits lieux de Montaigu et de Belleville. Durant ces guerres, le dit de Longpré et autres de la garnison de Belleville, jusqu'au nombre de XVII, partirent un matin pour aller courir sur les dites marches de Bretagne, vinrent à Montebert et y voulurent prendre des vivres... Les Bretons étaient au nombre de quatre-vingts. Un d'entre eux fut fait prisonnier et amené à Belleville, où il fut gardé en récompense d'un cheval qui avait été tué, − tellement qu'il y mourût".
1453. Marguerite de Belleville, fille de Jehan II Harpedanne, et veuve de Joachim de Volvire, seigneur de Rocheservière et de Ruffec, poursuivait alors, avec son fils Jean, une affaire criminelle contre Mandé du Plessis.
Cette Marguerite de Belleville avait apporté à son mari la terre et seigneurie d'Ardenne, située dans la commune de Charzais. Elle en avait hérité de son père qui en avait hommage à Charles VII, par acte daté de Mehun-sur-Yèvre, 1631 décembre 1425 (Arch. hist. du Poitou, 1903).
1454. − Un écuyer de Marguerite de Belleville, François Corgnol, âgé de vingt-quatre ans, obtient des lettres de rémission pour s'être battu avec des vassaux. En accomplissant une commission dont cette dame l'avait chargé, il s'était pris de querelle avec Pierre Pourceau et Pierre Pigon et avait tué ce dernier qui l'avait insulté (Arch. nat. J. 191, p. 112).
L'histoire généalogique du Père Anselme (tomes VII et VIII) relève à cette époque les alliances suivantes :
Olivier de Belleville avec Brunissende de Montberon, dame de Miribel, le 8 décembre 1438 ; une sœur de cette dernière avec un fils de Jacqueline de Montaigu ; Antoine de Belleville avec Antoinette de Clermont, dame de Surgères, en 1470.
Jehan III Harpedanne mourut peu après le 12 juin 1462. Il laissa le premier son nom patronymique pour prendre celui de Belleville, tous lequel on le désigne plus ordinairement.
L'aîné des enfants de Jehan III Harpedanne fut :
Louis Harpedanne, chevalier, seigneur de Belleville, Montaigu, etc., et chambellan du roi, A cette époque, le duc de Bretagne inspirait de vives inquiétudes à la France. Le seigneur de Belleville promit au roi de garder bien et loyalement la place de Montaigu à son service. De son côté, Louis XI, pour se garantir des attaques probables de son vassal indocile, échangea en 1467, à Louis Harpedanne la ville et le château de Montaigu et lui donna en retour le comté de Dreux, les seigneuries de Montmorillon, la Chaize-le-Vicomte et le château, ville et seigneurie de Saintes : la grandeur et l'importance des domaines concédés par ce prince montrent combien il estimait le seigneur de Belleville et sa forteresse de Montaigu.
Louis Harpedanne épousa, le 27 novembre 1455, Marguerite de Culant, dame d'Aisnay-le-Viel, qu'il laissa veuve en 1475. Marguerite de Culant était fille de Charles de Culant, seigneur de la Creste, chambellan du roi, gouverneur de Mantes, de Paris et de Chartres, et de Belle-Assez de Sully. Lorsque, de concert avec son mari elle vendit à Louis XI la baronnie de Montaigu, elle se réserva expressément la paroisse de Chavagnes, où le roi lui permit, au mois de mai 1474 de bâtir une forteresse. Voici le texte de l'acte de vente et de l'autorisation royale :
4 août 1473. Noble et puissante Dame Marguerite de Cullant, femme, espouse de noble et puissant seigneur monseigneur Loys de Belleville, agissant au nom de son mari, "réservant dans la baronnie de Montaigu : les paroisse des Brouzils avecque la forest de Gralac, Chavaignes, la Coupe-Chenière, la Boissière et les enclaves de Saint-Denis et de Saint-Fulgent, et tous ses droits, prouffiis, rentes et devoir deutz esd paroisses a ladite seigneurie de Montaigu. Et en outre les hommages de Beaurepaire que doit le seigneur de Tiffauges, les hommages de la Barretière, de Bazoges, de Saint-Fulgent, que doit le seigneur de la Varrie ; l'hommage du fief des Essarts que soûlaient faire les comte et comtesse de Penthièvre, les hommages de la Tavernière et de la Martlière, que doit le seigneur de Passavant ; l’omage de Rocheservière, ceux de Painfault et de Planteys, que doit le seigneur de la Guyonnière ; l’omage de la Sècherie que doit François Loer, l’omage de Noirlieu, et le guet dudit lieu, avecques les droits, prérogatives et noblesses dépendant des dicts hommages, fors et réservé au Roi notre Sire ceulx qui sont en la ville de Montaigu, et au dedans des fossés du dit lieu..." (Archives nationales, section historique).
Lettres patentes de Louis XI pour autoriser la dame Marguerite de Culant à faire construire une forteresse ou château à Chavaignes :
"Avons donné à nostre chière cousine Marguerite de Cullant veuve de Louis de Belleville, pour sa sûreté et celle de ses enfants mineurs, povoir... et faculté de faire chastel et place forte, à Chavergnes où elle pourra faire bâtir tours, tourelles, murailles, barbecanes, pont-levis, fossés, et tel que bon lui semblera… donné à Senlis au moys de mai 1474..." (Archives nationales. − Section historique. − Trésor des chartes regis. 204.)
C'est à cette dame de Belleville qu'Amauri Acigné, abbé de la Grenetière, rendait hommage, en 1474, pour des droits qu'elle avait sur la terre de la Roche. Elle rendait elle-même un aveu à la vicomté de Thouars, le 21 novembre 1476, pour ses terres de Chavagnes, la Copechagnière, les Brousses, la Boissière et la baronnie de Mouchamps, qu'elle tenait à hommage lige et à un lévrier blanc pour tout devoir. Le 27 avril 1477, elle était mise en possession de la châtellenie de Montmorillon par Jean Le Scellier, archidiacre de Brie, et elle recevait, à ce titre, divers aveux pendant plusieurs années. Mais, en 1486, un incendie ayant détruit les archives et l'église de Notre Dame, le Chapitre de Montmorillon se vit dans l'impossibilité de produire ses titres justificatifs, et Marguerite de Culant, qui avait déjà saisi les biens en litige, ordonna la main-levée de la saisie et transigea avec le Chapitre. (Beauchet-Filleau.)
De son mariage avec Marguerite de Culant, Louis de Belleville eut pour fils :
Gilles Harpedanne. Celui-ci rentra en possession de la terre de Montaigu en 1491. Charles VIII ayant épousé Anne de Bretagne, les craintes que ce puissant feudataire inspirait à nos rois étaient devenues, en effet, sans objet, et il restitua au monarque ses terres de Montmorillon, la Chaize-le-Vicomte et le comté d'Evreux qu'il avait reçus en échange. Il se maria, en 1478, à Guillemette de Luxembourg, fille aînée de Thibaut de Luxembourg.
Il eut pour fils :
Jehan IV Harpedanne, chevalier, seigneur de Belleville, de Montaigu, etc. Celui-ci vendit, le 19 novembre 1517, sa terre et seigneurie de Montaigu, à Louis de la Trémouille, vicomte de Thouars, pour la somme de huit mille livres et pour deux mille livres les terres de Puybelliard et de Chantonnay. Il était déjà par Jacquette de Sainte-Flayve, son épouse, seigneur en partie de Chantonnay.
Dans l'énumération des fiefs de la vicomté de Thouars on voit aussi que ce Jean Harpedanne posséda la baronnie de Sigournay, par son épouse qui en rendit aveu, le 2 mai 1506 et le 5 novembre 1525.
Charles Harpedanne, fils du précédent, est qualifié de chevalier, seigneur de Belleville, Chantonnay, Sigournay, Puybelliard, Beaulieu, Sainte-Flayve, la Roche-sur-Yon, etc., chevalier des Ordres du Roi, capitaine de cinquante hommes d'armes. Il fut marié trois fois. L'une de ses femmes s'appelait Jeanne de Durfort ; elle était dame de Labatut et avait hérité de son père, le 13 septembre 1624, d'une somme de dix mille livres.
Il y eut, à cette époque, diverses alliances entre les familles de Durfort et de Belleville. Nous trouvons, en effet, un Georges de Durfort qui épouse, en 1518, une fille de Marguerite de Belleville. Vers 1560, une Marguerite de Durfort se marie à Philippe de Belleville, comte de Caunac, son cousin, et fils de Charles Harpedanne et de Jeanne de Durfort.
La troisième femme de Charles Harpedanne fut Marie-Claude de Rochechouart. Elle était veuve avant le 20 avril 1584, comme nous l'apprend un acte des Archives de la Viollière. A cette date, en effet, elle était tutrice de Marguerite, sa fille unique, née de son mariage avec Charles Harpedanne.
Cette Marguerite épousa le marquis de Villars et elle mourut avant le 2 octobre 1599, date d'un acte de vente par le marquis de Villars "de tous et chascuns les pieds d'arbres boys de haulte fustaye... qui sont de pnt sur pieds plantés en ung certain Boys terres et ténement de... et Nouhes vulgayrement appelé Le Boys... situé et assis en la paroisse de Beaulieu soulz la Roche-sur-ion..." Le dit acte fait et passé au bourg du dit Beaulieu, au chastel dudit lieu, le 2 octobre 1599, devant les notaires de la chastellenie de Beaulieu-soulz-la Roche-Surion (Arch. de la Viollière.)
A partir de cette époque, le nom des Harpedanne disparaît de Belleville par l'extinction sans doute de la famille.
Dans la seconde moitié du XVIIe siècle, la seigneurie de Belleville, érigée en baronnie, est possédée par une noble famille qui jouit déjà des terres de la Petitière et de Beaulieu[13]. Le premier de ces seigneurs que nous trouvons à Belleville s'appelait Louis Aymon de Brachechien. Le 8 septembre 1670, il épousa Marie Gazeau de Lausonnière. De ce mariage naquit Louis II Aymon, écuyer, baron de Belleville, Beaulieu, Forges. Celui-ci se maria, le 20 mai 1688, à dlle Jacquette Massé, fille d'André, sieur des Longeais, secrétaire du roi. Il mourut, vers 1700, laissant une fille, Marie-Louise Aymon, qui, par son mariage, porta la baronnie de Belleville à Louis Jaillard, chevalier, seigneur de la Grange-Marronnière, qui eut pour fils :
Louis-François Jaillard, chevalier, seigneur de la Marronnière et baron de Belleville. Celui-ci épousa dlle Françoise-Jeanne-Antoinette-Roberte Ferron de la Ferronays. De ce mariage naquit :
Louis-Pierre-François Jaillard, chevalier, seigneur de la Marronnière, baron de Belleville et marquis du Bois-de-la-Muce, par son mariage avec dlle Thérèse Blanchard du Bois de la Muce, en 1772.
Louis-Paul-Jean-Baptiste Jaillard, marquis de la Marronnière, dernier maître de la seigneurie de Belleville, épousa, en 1798, une demoiselle de Posson.
Pendant la Révolution, le château de Belleville et les terres en dépendant furent vendus comme biens nationaux. On en trouve l'acte de vente aux Archives départementales de la Vendée.
--------------------
Terminons cette étude sur les seigneurs de Belleville en racontant un trait de générosité de l'un d'entre eux. Il est narré par la Vendée Historique (4e année, p. 550).
"Parmi les nombreux droits féodaux dont jouissaient autrefois les seigneurs du Bas-Poitou, il y en avait un, appelé droit de fressenge (frecengia) qui obligeait à une certaine redevance les propriétaires de porcs, et qui devait être évidemment prélevé sur ce que nous appelons encore aujourd'hui la fressure.
En vertu de ce droit, le seigneur de Montaigu levait tous les ans un impôt sur les paroisses dont il était suzerain, notamment sur celles des Brouzils et de Chavagnes. M. Paul Marchegay a découvert à ce propos une très curieuse charte du XIIe siècle, dans laquelle Maurice de Montaigu assure une rente annuelle de 20 sous à de pauvres religieuses de Fontevrault qui habitaient le couvent du Val-de-Morière, dépendant aujourd'hui de la paroisse de Touvois, et situé presque sur les limites du Poitou et de la Bretagne.
Passant un jour au Val-de-Morière, Maurice remarqua que les religieuses marchaient nu-pieds. Comme il s'en étonnait, on lui dit que les pauvres filles agissaient ainsi par économie, car elles étaient dans la plus extrême misère. Le seigneur de Montaigu avait bon cœur ; un pareil dénuement l'émut de pitié, et il demanda aux pauvres religieuses combien il leur faudrait pour s'acheter des souliers. La matière première et la main-d'œuvre n'étaient pas chères à l'époque, et l'argent, par contre, avait une valeur bien supérieure à celle d'aujourd'hui ; les saintes filles répondirent qu'avec vingt sous par an elles pourraient se tirer d'affaires. Maurice promit cette somme, et ce fut pour remplir sa promesse qu'il fit rédiger un acte de donation dont voici la traduction :
Qu'il soit connu de tous, soit présents, soit à venir, que Maurice de Montaigu, avec l'assentiment de sa femme et de ses fils, Maurice l'aîné, Briend clerc et Girard, pour la rédemption de son âme, et de celle de ses amis, principalement pour l'âme de son fils Arbert, a donné aux religieuses du Val-de-Morière (Bademoriera), 20 sous de rente annuelle : 10 à prendre sur la fressenge (frecengia) des Brouzils (Brossilis), et 10 sur la fressenge de Chavagnes (Chavenie). Ces deux sommes doivent être payées par les sergents desdits lieux, quels qu'ils soient, le jour de la fête de saint Georges, sans aucun délai ; et elles seront annuellement employées en achat de souliers pour les religieuses (ad emendum sotulares pro dictis monialibus annuatim).
Il y avait encore des religieuses au Val-de-Morière à l'époque des guerres de Vendée ; ce fut à leur couvent que Charette, au commencement de l'année 1794, vint faire soigner la blessure qu'il avait reçue au combat des Brouzils.
A son tour, M. Bittard des Portes raconte[14] que ce couvent renfermait alors sept vieilles religieuses qui avaient refusé de quitter leur maison et surtout leur chapelle où des prêtres réfractaires venaient parfois célébrer la messe en secret. Les religieuses se crurent en sûreté lorsqu'elles virent arriver le général vendéen avec une nombreuse escorte. Mais cette visite causa bientôt leur perte. Le général Haxo ayant appris où se cachait Charette, envoya aussitôt une colonne de quatre cents hommes pour le surprendre. Mais celui-ci, averti à temps, s'échappa en pleine nuit. Peu après arrivait l'avant-garde républicaine. Le couvent était vide, la chapelle avait recueilli les religieuses, quelques pauvres paysannes et leurs enfants. Des misérables appartenant au bataillon des Vosges, furieux de voir leur proie leur échapper, se vengèrent sur ces infortunées et les massacrèrent à coups de sabre ou à coups de baïonnette. Les vieilles religieuses moururent en pardonnant à leurs bourreaux.
Ainsi finit le couvent qui avait reçu les générosités des seigneurs de Belleville."
Le Protestantisme à Belleville
On sait quels troubles furent occasionnés dans le Bas-Poitou par l'apparition du Protestantisme, nous ne retracerons pas les scènes d'horreur qui se passèrent alors en maints endroits. Nons ne nous occuperons des événements de cette triste époque que pour signaler l'ordre de démolition d'un temple protestant à Belleville, en vertu d'un arrêt royal du 6 août 1665. En même temps que ce temple, dix-sept autres érigés en différents lieux du Bas-Poitou furent condamnés de la même façon.
Voici le texte de l'arrêt royal emprunté aux Décisions catholiques de Jean Filleau :
"Le Roy estant en son Conseil...
A interdit et défendu, interdit et défend, tout exercice de la dite religion dans les lieux de Saint-Benoist, Puybelliard, Luçon, la Chaume, Belleville et Poiré[15], Sainte-Hermine, le Boupère, Chantaunay, Saint-Gille-sur-Vie, Talmont, Mareuil, la Jaudoünière, Mouilleront, Saint-Fulgent, le Giure (Lande blanche[16], la Chapelle-Thémer). Ordonne sadite Majesté, que lesdits de ladite R. P. R.[17] feront abattre et démolir à leurs frais les temples qu'ils ont ès dits lieux interdits, dans deux mois à compter du jour de la signification qui sera faite du présent arrest auxdits Mauclerc et Gilbert[18], députez généraux, ou à l'un d'eux ; et à faute de ce faire dans le dit temps, et iceluy passé, seront en vertu du présent arrest abatus à la diligence desdits syndics du clergé, aux frais et dépens desdits de la R. P. R. Et à cette fin permis ausdits syndics de prester et avancer les deniers à ce nécessaires, lesquels leurs seront rendus par les dits de la R. P. R. ainsi qu'il sera audit cas arresté par Sa Majesté en son Conseil. Cependant ordonne sadite Majesté que les dits temples seront clos et fermés.
A sadite Majesté interdit et défendu, interdit et défend tout exercice aux sieurs de... Landeblanche... la Chapelle-Thémer... sous prétexte de haute justice comme aussi à tous ceux qui cy après pourroient prétendre droit d'exercice, autres que ceux cy-dessus maintenus.
[……………………………………………………………………………………………………..]
Ordonne que le présent arrest sera exécuté nonobstant oppositions, empêchemens ou appellations quelconques. Et sera à cette fin leu, publié et affiché en tous les lieux et endroits accoustumez de ladite province et généralité de Poictou, et à ce qu'aucun n'en prétende cause d'ignorance, enjoint aux gouverneur de la province, lieutenans du roy, seneschaux et leurs lieutenants, prévost général et provincial, leurs lieutenants, exempts et archers de prester main forte à l'exécution dudit arrest, à peine d'en répondre en leur privé nom.
Fait au Conseil d'Estat du Roy, Sa Majesté y estant, tenu à Saint-Germain-en-Laye, le six jour d'aoust mil six cent soixante-cinq.
signé : Phelippeaux"
Cet arrêt fut confirmé par le roi dans l'acte suivant que l'on trouve aux Décisions catholiques de Filleau :
"Le roy mande au présidial de Poitiers, et à tous les officiers et justiciers qu'il appartiendra, de faire lire, publier et registrer le dit arrest en le dit siège et parlant où besoin sera.
Enjoint aux gouverneurs, lieutenants généraux, baillis et sénéchaux, etc., de tenir à la main à l'exécution du dit arrest, qui sera signifié par huissier tant aux sieurs Mauclerc et Gilbert, députés des dits de la R. P. R. de la province de Poitou, qu'à tous autres qu'il appartiendra d'avoir à y satisfaire et obéir. Et en outre de faire tous exploictz et actes de justice requis et nécessaires sans demander autre permission.
Donné à Saint-Germain-en-Laye, le six d'août mil six cent soixante-cinq et de notre règne le vingt-troisième. Louis. Et plus bas : par le roy, Phelippeaux, et scellé du grand sceau de cire jaune et contrescellé".
En conséquence de l'ordonnance royale, l'arrêt fut aussitôt signifié à qui de droit. Voici le procès-verbal de la signification faite à Mauclerc de la Muzanchère, en son domicile de Paris :
"L'an mil six cent soixante-cinq, le mercredi douzième jour d'aoust, à la requête de messire Hubert Debret, prestre, chanoine en l'église de Sainte-Radegonde de Poitiers, et syndic du diocèse audit lieu ; maistre Antoine Froment prestre, doyen en l'église cathédrale, et syndic du diocèse de Luçon, et messire Jacques Micheau, aussi prestre, prieur de Saint-Sulpice, syndic du diocèse de la Rochelle au détroit de Maillezais, l'arrest du conseil d'état du roy, Sa Majesté y séant, donné à Saint-Germain-en-Laye le sixième jour du présent mois et an, et commission y attachée en datte du même jour, ledit arrest signé : Phelippeaux, et la dite Commission : par le roy, Phelippeaux, et scellé du grand sceau de cire jaune sur simple queue avec contre-scel y attachez, ont esté par moy, Pierre Fournier, huissier-sergent à cheval au Chastelet de Paris soussigné, monstrez, signifiez et d'iceux baillé et laissé copies à Guy Mauclerc, escuyer, sieur de la Mezanchère (sic), l'un des députez généraux de ceux de la R. P. R."
Les protestants montrèrent peu d'empressement à se conformer aux ordonnances royales. Un article de MM. C. et Fi. Puichaud publié par la Revue du Bas-Poitou (1re livraison), en 1894, nous donne à ce sujet les détails suivants :
"En dépit des édits, de la publicité qui leur fut donnée et de la signification faite à Guy de Mauclerc de la Muzanchère, l'un des députés généraux de la R. P. R. qui conseilla au Consistoire de Poitiers d'interdire l'exercice du culte dans les églises condamnées pour montrer au roi que les réformés se conformaient à ses ordres les édits restèrent pour ainsi dire lettres closes. On abattit tout ou partie des temples ; pour la forme on changea leur destination, mais les ministres y continuèrent en secret l'exercice de leur culte.
Le délai de deux mois fixé par l'arrêt du 6 août 1665 pour la démolition des temples courait à partir de la signification faite à Mauclerc le 12 août ; il expirait donc le 12 octobre ; mais le délai devait s'allonger puisque plus de vingt jours après seulement on s'occupait de l'exécution intégrale des ordres du roi. Le 3 novembre suivant, Mre Jacques Micheau, prêtre-prieur de Saint-Sulpice, syndic du diocèse de la Rochelle au détroit de Maillezais, au nom et ayant charge du docteur en Sorbonne, Me Antoine Froment, aussi prêtre doyen et syndic de Luçon, comparut devant Pierre de Maurienne, conseiller du roi et vice-sénéchal de Fontenay-le-Comte, et Julien Collardeau[19], et leur présenta l'arrêt du 6 août, portant, entre autres choses, que les temples de ceux de la R. P. R. (suit la liste ci-dessus donnée) seraient abattus et démolis dans deux mois à partir de la signification faite à Mauclerc et Gilbert, ou à l'un des deux. Jacques Micheau fit observer que les gens de la R. P. R. auraient dû satisfaire à l'arrêt du 6 août dès le 12 octobre, et en conséquence avoir abattu et démoli lesdits temples, ce qu'ils n'avaient pas fait. Vu l'inobservation de l'arrêt, il requit Maurienne et Collardeau de se transporter avec lui Micheau, Froment, le greffier et tel nombre d'archers qu'il était nécessaire, dans les divers lieux où étaient situés les temples, pour dresser procès-verbal de l'état où étaient ces derniers et procéder à l'entière démolition d'iceux aux frais et dépens de la R. P. R., ainsi qu'il est porté par ledit arrêt, et pour n'avoir pas satisfait à icelui dans le temps y porté.
Le procureur du roi prit des conclusions conformes et le transport de la commission sus-indiquée fut décidé avec assistance de Roc Jourdain, archer, remplaçant comme greffier le greffier ordinaire Pierre Beuleu, appartenant à la R. P. R., d'un exempt et de quatre archers.
La commission exerça ses fonctions du 4 au 25 novembre".
Un procès-verbal, mentionnant la démolition des dix-sept temples protestants, fut rédigé par Julien Collardeau et on en a retrouvé le manuscrit original chez M. Georges Treuttel, ancien maire de Sérigné (Vendée). Nous allons reproduire seulement le passage qui concerne Belleville :
"Et le lendemain dix-neufiesme dudit moi (novembre), partasme dudit Sindenis[20] sur les huict heures. Sommes arrivés au bourg de Belleville où il y a aussi un temple qui doict estre desmolis par ledit arrest, où nous sommes arrivez sur les dix heure dudit jour, où estant nous sommes anquis de Mre René Robin prieur curé dudit lieu où estoit ledit tample et s'il auroit été desmollis, lequel nous a fet voir ledit temple situez au milieu du bourg de Belleville et proche joignant la halle et avons opservé que ledit temple estoit en forme de maison à deux estages et que le bas servoit de temple public, et que audessus il y avoit quelques chambres et que la couverture en avoit estez ostéez et les murailles commencée de desmolir depuis le planché d'en hault jusques à la couverture, et qu'il y avoit encore un des pignons tout antier, d'autant que ladite desmolition n'estoit environ que la 4e partie dudit temple, nous avons fet achever en nos présence et octroyé acte audits sieurs procureur du Roy et syndic, ce requérant, de ce que lesdits sieurs Robin prieur curé dudit lieu a dit que ceux de ladite R. de ce lieu n'avoient commencé ladite desmolition telle que nous l'avons treuvez, que le treze octobre dernier, et de ce que ledit sieur sindic a employé quatre ouvriers auquel avons fet taxié comme les présédans. Et ce fet, les jours et an que dessus, et ce faict sommes partis dudit lieu de Belleville et nous sommes rendu au bourg des Essarts distant de trois lieues sur les quatres à cincq heure du soir".
On remarquera dans ce procès-verbal que le temple protestant se trouvait au milieu du bourg de Belleville, ce qui laisserait croire que celui qu'on avait élevé au Poiré avait peut-être fait place à celui de Belleville.
D'après M. Lièvre, deux ans auparavant, c'était le même pasteur, appelé Théodore Tireau, qui desservait à la fois les temples du Poiré, de Belleville et d'Aizenay.
Voici un passage qui nous donne ce renseignement dans le procès-verbal suivant :
"Synode de Châtellerault, 27 juin au 5 juillet 1663
(Archives du château de la Fontaine-Dangé)
Au nom de Dieu,
Actes du synode de la province de Poitou, assemblé par permission du Roy, à Châtellerault, le vingt septiesme jeung mil six cens soixante trois et jours suivants,
auquel sont comparus :
Pour l'église réformée de Belleville et Aizenay, Mre Théodore Tireau, pasteur....., avecq lettres, ladicte Eglise censurée....."
La période révolutionnaire à Belleville
Belleville fut surtout célèbre pendant les guerres vendéennnes par le séjour du général Charette qui y avait établi son camp. M. Bittard des Portes a fait à ce sujet une étude très intéressante dont nous sommes heureux de reproduire un extrait. Les événements qu'on y rapporte se passent à la fin de 1794 :
"Charette s'était de nouveau installé au centre de ses divisions à Belleville même, dans la partie ouest du bourg, sur le chemin du Poiré, à peu de distance du vieux château de la famille Jaillard de la Maronnière. Il habitait un gai pavillon, au milieu d'une prairie ; les chasseurs qui lui servaient de garde personnelle, logeaient dans une maison plus vaste à l'extrémité de la prairie, en bordure sur le chemin. On l’appelait la caserne. Des écuries assez spacieuses pour abriter ses chevaux, ceux de ses aides-de-camp et de son escorte, s'élevaient entre la caserne et le pavillon[21].
La plupart des maisons du bourg étaient occupées par des officiers ou des soldats de son armée. A l'embranchement des trois chemins des Lucs, de Saligny et de Saint-Denis, des retranchements avec palissades avaient été creusés, protégeant ainsi l'entrée de Belleville, surtout du côté du nord ouest et du nord, où il y avait même des épaulements de batterie. De vastes prairies marécageuses d'un accès difficile s'étendaient autour du bourg, sauf à l'ouest que bornaient des landes incultes, d'où la vue portait fort loin. Au sud, à l'est et au nord, une ceinture de bois se dressait à l'horizon, depuis Lande-Blanche jusqu'au Recredit. Il y avait là, entre Saligny et Belleville, à une demi lieue du dernier bourg, un château entouré de bois où Charette se rendait assez souvent et qu'il considérait comme une annexe de son quartier général".
M. Bittard des Portes raconte ensuite de quelle manière les héros vendéens cherchaient à charmer en ce lieu les courts loisirs dont ils jouissaient entre deux batailles. Charette avait formé comme une sorte de cour : la reine en était Mme de Montsorbier dont l'esprit primesautier et l'intelligence cultivée captivaient tous les officiers. Auprès d'elle, Mmes du Fief[22] et Bulkeley brillaient autant par leurs faits de guerre que par leur beauté. Bientôt, on vit sortir de maintes cachettes des jeunes femmes et des jeunes filles qui semblaient n'avoir échappé aux colonnes infernales que par miracle. Elles rentraient dans leurs châteaux ou dans leurs maisons, d'abord en réfugiées mystérieuses et craintives, puis bientôt en véritables propriétaires. Elles allaient saluer Charette qu'elles considéraient comme leur sauveur. Puis comme on oublie bien vite le danger, on ne tardait pas à organiser des fêtes[23], si les repas étaient simplement servis et les toilettes pauvrement ajustées, il n'en régnait pas moins dans ces réunions la joie la plus franche, la joie de vivre après avoir été traqué comme des bêtes fauves. La véritable égalité régnait entre tous : les femmes de gentilhommes et de paysans se trataient en sœurs et se demandaient avec inquiétude des nouvelles de tous leurs êtres bien-aimés. Quant aux hommes, ils s'étaient connus au feu ; parmi eux les plus braves étaient les plus honorés.
Mais il n'y a guère de fêtes sans musique. A Belleville aussi on chantait une chanson, celle qu'on attribue à Le Moelle, le capitaine des chasseurs à poils de bouc, surnommé le poète des Vendéens. Dans cette pièce fort incorrecte, chaque divisionnaire est salué d'un couplet. Voici comme elle se termine :
Quand nous sommes à Belleville, remparts et bastions,
Les commandants civils de chaque division
Vont rendre leur hommage, deux à genoux,
A ce grand personnage du Bas-Poitou.
En toute notre armée, chose bien entrepris !
Il y a garde montée tant le jour que la nuit,
Et tambours et baguettes et tambouriniers
Qui battent la retraite après souper.
Ainsi Charette tâchait de relever le courage de ses soldats toujours prêts à se laisser abattre par le malheur, et il faisait tout afin de leur inspirer confiance dans l'avenir.
Ce fut au quartier général de Charette, à Belleville, puis à la Bésillère[24], qu’eurent lieu l'entrevue et les négociations des trois généraux vendéens, Charette, Sapinaud et Stofflet, avec le chevalier de Tinténiac, gentilhomme breton, envoyé par le gouvernement anglais et par les Princes. Celui-ci avait débarqué à Saint-Malo, puis, se dirigeant sur Nantes il avait traversé la Loire à la nage avec ses dépêches attachées à son cou, et enfin il s'était mis en devoir de s'aboucher avec les généraux vendéens. Les lettres qu'il apportait étaient signées du comte d'Artois et du ministre, anglais, Henri Dundas. A cette dernière était jointe une déclaration du roi d'Angleterre. Les généraux vendéens ouvrirent alors ces messages.
"On commença, dit M. Deniau (t. IV, p. 467), par la dépêche du comte d'Artois. Lorsqu'on en eut fait la lecture, un cri spontané de : Vive le roi ! éclata dans tout le conseil. C'était la première pièce officielle qu'on leur remettait depuis le commencement de la guerre, de la part des princes. Les princes ne s'étaient pas trop hâtés ; depuis quinze mois qu'on combattait pour les remettre sur leur trône, ils n'avaient pas cherché à communiquer avec leurs défenseurs, ni à les encourager dans leurs efforts. Ces derniers voyaient enfin qu'ils s'occupaient d'eux, ils étaient au comble de la joie."
Charette, vivement ému, s'écria : "Monsieur de Tinténiac, dites au Prince que sa présence ici était nécessaire il y a huit mois, mais qu'elle est indispensable aujourd'hui. Dites lui bien que toute la Vendée le remercie par ma voix, et que c'est le salut de la France qu'il apporte en venant se placer à notre tête".
On fit ensuite la lecture de la lettre du roi d'Angleterre et des notes de son ministre. Le Roi promettait des secours et le ministre demandait des renseignements sur les forces actuelles des Vendéens.
Un rapport du secrétaire de Stofflet nous apprend quelles réponses furent faites aux dépêches de Tinténiac :
"Les trois chefs, Stofflet, Sapinaud et Charette, répondirent à M. le comte d'Artois, pour lui témoigner la joie que leur causait l'annonce de son arrivée prochaine et l'assurance de tout leur zèle et dévouement à la cause du Roi. Ils écrivirent la même chose à Monsieur, alors régent du royaume. Ils donnèrent au ministère d'Angleterre les éclaircissements qu'il demandait sur leur position, et lui demandèrent un corps de dix mille hommes de troupes réglées et entretenues par l'Angleterre ; (on demandait plus pour avoir moins ; on se serait contenté de cinq à six mille hommes qui auraient pu, dans l'occasion, protéger les redoutes et donner le temps de rallier les paysans débandés) ; trente bouches à feu de tous calibres, même de position, des bombes, des mortiers, avec des artilleurs pour leur service, deux cent milliers de poudre, des vivres et des habillements pour la troupe, qui commençait à être mal entretenue, parce que le pays était épuisé. Ils lui indiquaient pour le débarquement la rade de l'Aiguillon, en Poitou, dans laquelle il s'en était opéré un autrefois, leur étant absolument impossible d'attaquer aucun port, n'ayant aucune pièce de siège ni de campagne. Ils envoyèrent les signaux à faire pour avertir de l'arrivée des secours ; (M. de Tinténiac les emporta dans un de ses pistolets), ajoutant que, dans les vingt-quatre heures, ils s'y transporteraient, avec quarante mille hommes, pour protéger le débarquement". (Gibert, Précis historique, 1. c. p. 43).
Ce fut pendant ces négociations, à Belleville, que les trois généraux vendéens décidèrent qu'ils iraient ensemble attaquer Challans où commandait Dutruy. L'entreprise réussit au plus mal, par la mauvaise entente des chefs ; les royalistes laissèrent six cents hommes sur le terrain, sans compter les blessés.
Charette revint exaspéré à Belleville et il y commit un acte vraiment regrettable. Le vieux Jean-Baptiste Joly, l'un des chefs les plus ardents de l'insurrection dans la Basse-Vendée, et qui lui avait sauvé plusieurs fois la vie aux Clouzeaux et à Legé, n'ayant pas réussi dans une reconnaissance qu'il avait faite sans prévenir personne, Charette lui manda de venir rendre compte de sa conduite devant le conseil de guerre, et, sur son refus, donna l'ordre de l'arrêter. Outré de cette détermination, souffrant des blessures qu'il avait reçues dans les combats précédents, et redoutant peut-être encore plus la terrible colère du général en chef, qui l'avait condamné, Joly prit aussitôt la fuite et alla se cacher dans la forêt d'Aizenay, pour se diriger plus tard vers l'Anjou.
Les auteurs ne s'entendent pas sur les circonstances de sa mort. D'après une tradition, il aurait été tué à Saint Laurent-sur-Sèvre. Il arriva dans ce bourg, un dimanche, pendant les Vêpres, et s'arrêta dans un cabaret. Pris pour un espion, il refuse de répondre aux questions qu'on lui pose, sort précipitamment de l'auberge et prend le chemin du cimetière. Des jeunes gens le suivent de près et l'un d'eux, Deval, ménétrier de profession, tente de l'arrêter. Joly saisit un de ses pistolets, lui brûle la cervelle et se sauve. Mais on l'atteint bientôt près de l'étang de la Barbinière. Joly s'adosse alors au tronc d'un vieux chêne et menace de ses pistolets le premier qui osera s'approcher de lui. Sa fière contenance arrête un moment les assaillants. Mais un domestique de la Mourière, ayant tourné le chêne, lui fait tomber ses deux pistolets des mains d'un violent coup de bâton. Les jeunes gens se précipitent alors sur lui et le font expirer sous leurs coups multipliés. Son cadavre fut porté à Saint-Laurent, où un soldat de l'armée d'Anjou le reconnut. Tous alors déplorèrent leur erreur[25].
Le 19 juillet 1794, Belleville fut occupée par une colonne de l'armée du commandant Huché. Cette colonne venait de fouiller le grand et le petit Luc et elle était sous les ordres du général Ferrand. Le bourg de Belleville était sans défenseurs ; les Républicains y entrèrent sans combat. "La colonne, dit Ferrand dans son rapport au général Vimeux[26], s'empara d'une des maisons de plaisance de Charette, où tout nous prouva qu'une demi-heure avant notre arrivée les brigands y étaient en assez grand nombre. On y trouva eau-de-vie, pain, vin, viande, une pharmacie complète et beaucoup de linge".
Les habitants de Belleville s'étaient sans doute enfuis pour échapper aux massacres qu'opérait partout le hideux et sanguinaire Huché, au grand mécontentement du général Ferrand, ainsi qu'on peut le voir dans la note suivante :
"Rien ne fut épargné. Vieillards, femmes et enfants, les hommes sans armes, occupés à travailler, dans les champs ou dans les maisons, furent immolés impitoyablement. Le général Ferrand voulant par ses observations, empêcher de semblables atrocités, le général Huché répondit : ‘Je le veux, moi !’ Partout où passa cette colonne du général Huché, depuis Montaigu jusqu'à Palluau, tout a été pillé d'une manière horrible, et le bétail totalement enlevé"[27].
Ce fut encore à Belleville que Charette convoqua toutes ses divisions, après la mort de Louis XVII, pour leur annoncer ce funeste événement et pour proclamer, en leur présence, le Régent, comte de Provence, roi de de France et de Navarre, sous le nom de Louis XVIII. Après cette déclaration, il exposa à ses officiers les motifs qui devaient leur faire recommencer la guerre et il leur adressa une harangue que Beauchamp rapporte en ces termes :
"Les Républicains ont juré notre perte et nous ne pourrons l'éviter qu'en reprenant les armes. L'opinion générale est pour nous ; j'ai d'ailleurs la certitude que l'Angleterre est dans les meilleures dispositions, et que les Princes débarqueront à la tête d'une armée. Tandis qu'ils relèveront le trône, nous garderons en dépôt la Vendée, pour y recevoir le prix de nos glorieux travaux[28]".
Une autre nouvelle qui exaspéra encore bien plus Charette que celle de la mort de Louis XVII, ce fut l'exécution des émigrés de Quiberon, qu'on apprit à Belleville, au commencement d'août 1795 Cette nouvelle fit commettre à ce héros un acte qui forme comme une tache sanglante dans sa glorieuse histoire. Voici le fait tel qu'il est raconté par M. Bittard des Portes :
"Il n'y eut malheureusement pas d'influence féminine assez forte pour prévenir les terribles représailles qu'ordonna Charette, en apprenant les exécutions des émigrés pris à Quiberon.
Jusqu'alors les prisonniers, au nombre de trois cents environ, qui avaient refusé de passer aux Vendéens, étaient internés dans le bourg. La surveillance s'exerçait rigoureusement mais sans cruauté. Charette avait fait offrir aux représentants des Sables de les échanger contre Allard et les huit ou dix royalistes qui étaient prisonniers dans cette ville. Cette proposition avait été rejetée avec hauteur[29].
On apprit à Belleville, un dimanche, par une feuille publique de Nantes, que Mgr de Hercé, évêque de Dol, le général de Sombreuil et un grand nombre d'émigrés prisonniers avaient été mis à mort, Charette allait se rendre à la messe dans la petite église de Belleville, à peu de distance du château. Lorsqu'on lui remit la fatale gazette, sa colère devint effrayante. Il donne l'ordre de rassembler sur le champ les prisonniers. Ceux-ci arrivent, espérant leur échange. L'illusion ne dure pas. Des paysans armés, groupés par un capitaine de paroisse, les entourent. Alors Charette pénètre au milieu d'eux, et d'une voix sifflante, entrecoupée, raconte en quelques mots le drame de Quiberon, la promesse de capitulation à laquelle ont cru les émigrés et les exécutions qu'annonce la feuille publique.
Les malheureux républicains comprennent le terrible sort qui les attend. Le capitaine de paroisse et les paysans agitent leurs armes et injurient les prisonniers. Charette les fait taire. Puis il ordonne au capitaine de fusiller tous les républicains sauf six que l'officier désignera à son gré.
Un grand silence s'étend sur la place, interrompu seulement par la clochette qui annonce l'office religieux. Le général et son état-major entrent dans l'église dont les portes se referment. L'abbé Remaud qui ne se doutait de rien célèbre la messe.
Au milieu des chants sacrés éclate le crépitement d'un feu de salve, puis des cris déchirants, puis plus rien. Quand l'assistance sort de l'office, la grande place est déserte sous le lourd soleil du mois d'août. Charette regagne le pavillon qui lui servait de quartier-général ; l'officier chargé de l'exécution vient lui raconter qu'il avait fait deux lots des prisonniers : les uns avaient été fusillés dans la cour de la prison, c'était, d'après lui, de la poudre perdue ; les autres (et il s'en vantait) avaient été emmenés dans le petit bois et assommés à coups de bâton ou éventrés à coups de sabre. Charette le repousse et, d'une voix indignée : "Retirez-vous de ma présence, vous êtes indigne d'occuper une place d'officier !"[30]
Le général se fait amener les six prisonniers qui ont échappé à la boucherie ; les malheureux croient que leur supplice n'a été que différé. Charette les rassure, ils vont partir avec un laissez-passer signé de lui, pour les trois camps de Palluau, des Essarts et du château de l'Oie. Il leur remit une lettre pour chacun des commandants des trois camps : "C'est avec la plus vive douleur, disait-il, que je me suis vu forcé d'user des représailles, afin d'éviter, s'il est possible, de pareilles barbaries. Mais je vous déclare que j'en userai ainsi à l'avenir toutes les fois qu'on égorgera des prisonniers royalistes"[31]. − (Voir encore à ce sujet : Eclaircissements historiques attribués à Auvynet, p. 504 ; − Lucas-Championniere Mémoires inédits).
Au mois de juillet 1795, Charette ramenait à son quartier-général de Belleville soixante-quinze voitures chargées d'effets et de munitions que lui avaient procurés les Anglais. Voici comment Charette apprend cette nouvelle à Louis XVIII dans une lettre en date du 18 juillet :
"Je puis vous instruire, Sire, que Sa Majesté Britannique a fait débarquer sur la côte de Saint-Jean-de-Monts et Saint-Gilles, le 10 de ce mois, 40 milliers de poudre, 1200 fusils, 300 sabres, 2500 habits complets, 2 pièces de campagne et quelques autres engins de guerre"[32].
Ces secours ne profitèrent guère aux royalistes, car, une nuit, des traîtres y mirent le feu, et si le vent eût porté de ce côté, le bourg de Belleville et tous ceux qui s'y trouvaient auraient péri dans l'explosion provoquée par les milliers de poudre (Le Bouvier-Desmortiers, Vie de Charette, p. 403).
Quelques semaines après le débarquement de Saint-Jean-de-Monts, le jour de l'Assomption, après la grand'messe, Charette faisait chanter dans l'église de Belleville un Te Deum d'actions de grâces, à la nouvelle que Louis XVIII proclamait ses droits à la couronne ; des salves de coups de canons se mêlaient au chant de triomphe, et l'assemblée acclamait le manifeste du nouveau roi dont la lecture terminait la cérémonie.
Au mois de novembre de la même année, Belleville fut le théâtre d'un désastre pour Charette. Le représentant, Cochon de Lapparent, le raconte ainsi dans une lettre à ses collègues :
"L'armée républicaine marchait à Belleville sur trois colonnes de 3000 hommes environ ; l'une, commandée par le général en chef (Hoche) et partie de Machecoul, est passée par Legé ; la deuxième, commandée par le général de division Bonnaud, est partie de Nantes ; la troisième, commandée par le général de brigade Gratien, est partie de Challans. Ces trois colonnes arrivèrent, le 7 vendémiaire, à Belleville, quartier-général de Charette. Partout les brigands ont été dispersés et mis en fuite ; nulle part ils ne tinrent pied. Ils attaquèrent cependant, le 7 au matin, l'arrière-garde de la colonne Bonnaud. Le bataillon de la Gironde se mit en bataille et marcha dessus au pas de charge, et lui seul suffit pour les mettre en déroute et les disperser dans le bois ; on en tua plusieurs et on leur prit deux voitures de pains.
Charette était parti de Belleville quatre ou cinq heures avant notre arrivée, il n'avait que 4 ou 500 hommes avec lui. Nous n'avons trouvé à Belleville que quelques fusils et des sabres et quelques provisions de bouche. Charette a fait enterrer deux pièces de canon qu'il a eues du premier débarquement (des Anglais) ; nous n'avons pu les retrouver.
Le lendemain, les trois colonnes reprirent le chemin de leur cantonnement".
Dans ce récit, le représentant oublie quelques points qui ont cependant bien leur importance. D'abord, le bataillon de la Gironde eut, il est vrai, le dessus sur les soldats vendéens, mais ceux-ci étaient inférieurs en nombre et ne formaient qu'une partie des troupes de Charette. Celui qui les commandait était le divisionnaire Cailleau, et le combat eut lieu dans les landes de Saint-Sulpice Enfin, Charette en abandonnant son quartier de Belleville, remporta cependant une victoire Dans sa marche sur Saint-Denis-la-Chevasse, avec les six cents hommes qu'il commandait, il tombe à l'improviste sur une colonne ennemie, se fraie un passage dans ses rangs et se réfugie dans le bois des Gâts, prés de Dompierre. Le lendemain, même succès, il tombe sur l'arrière-garde du général Bonneau et la défait complètement[33].
Mais ces avantages n'empêchèrent pas le général Hoche d’entrer à Belleville et celui-ci, après s'être emparé du quartier de Charette, crut qu'il avait anéanti pour toujours la puissance de son adversaire et le lendemain, un certain Chalbos en informait l'Administration du district des Sables par ce billet laconique :
Citoys,
Les armes de la République ont triomphé ; j'en ai reçu la nouvelle cette nuit et je me hâte de vous la transmettre à votre lever.
Salut et fraternité.
Chalbos.
Mais Charette n'était pas encore aux mains de ceux qui allaient le traquer sans relâche, et avant de devenir leur proie, il allait infliger plus d'une perte à l'armée républicaine. Celle-ci, un mois seulement après la prise de Belleville, comptait déjà quatre mille hommes blessés ou malades. Ses cantonnements se remplissaient à chaque instant de moribonds. C'est alors que, désespérant de réduire son adversaire, le général Hoche recourut à un infâme moyen. "Charette a 6000 louis en or, écrivit-il au général Delaage, promettez-les à quiconque l'amènera mort ou vif ; ne l'abandonnez qu'au tombeau. Cette action est digne de vous et de votre camarade Travot".
Hoche s'était mal adressé. Delaage répondit par la lettre suivante qui renfermait une verte leçon : "Général, j'ai montré votre lettre à Travot. Lui et moi nous sommes fiers de combattre sous vos ordres ; nous ne laisserons pas respirer les ennemis de la République. Nous prendrons Charette ; mais si nous trouvons ses louis d'or, nous les partagerons de concert, si vous voulez bien, entre les hôpitaux d'Angers, de Nantes, des Sables. L'or anglais payera le sang français ; l'or anglais payera les drogues pour guérir les blessures de nos soldats. J'entends une fusillade. Adieu ; en avant !"
On sait comment Charette fut pris, quelques semaines plus tard, et fusillé à Nantes, sur la place Viarme, le 29 mars 1796.
Le souvenir de Charette se perpétue encore à Belleville par une statue de sainte Anne. Cette statue en plâtre doré, appelée la statue des Vendéens, était placée autrefois au château du général Charette, à Fonteclose. En 1845, elle fut donnée à l'église paroissiale de Belleville par Mme de Charette, née de Sapinaud, parce que la dite paroisse, la seule du diocèse dédiée à sainte Anne, était le quartier général du chef vendéen dans la tourmente révolutionnaire.
Cette statue fut amenée à Belleville par Jean Oliveau. Placée sur un socle provisoire, elle va bientôt recevoir une autre destination dans l'église.
Pendant la période révolutionnaire, Belleville eut le triste honneur de compter parmi les officiers de l'administration républicaine un prêtre apostat, du nom de Voisin. Voici à son sujet quelques notes publiées par M. Bourloton, dans la Revue du Bas-Poitou (année 1900, p. 29).
M. Voisin était né à Luçon, le 12 juin 1754, et avait été ordonné prêtre, le 13 juin 1778, à Mouchamps, par Mgr de Mercy, dans une de ses tournées pastorales.
Curé de Mouilleron-le-Captif, au moment de la Révolution, il prêta le serment en 1791, abjura deux ans plus tard, et se maria. C'était plus qu'il n'en fallait pour lui attirer les faveurs de la République, un civisme aussi pur lui valut les fonctions de commissaire du Directoire exécutif près le canton de Belleville[34]. A ce titre, il adressait une lettre de dénonciation, en brumaire an V, à l'administration départementale. Cette lettre était conçue dans ces termes :
"Il se trouve des prêtres et des émigrés dans ce canton. Les débarquements qui ont eu lieu les ont vomis sur nos côtes. Les premiers exercent leur ministère, le peuple continue d'avoir confiance en eux ; il serait dangereux de le priver en ce moment de ces êtres".
Voisin était encore en fonctions le 5 brumaire an VIII (27 octobre 1799), ainsi que le témoigne la pièce suivante. On y verra que l'apostat ne négligeait pas le soin de conserver sa place :
"Aujourd'hui 5 brumaire an VIII de la République Française,
Devant nous administrateurs municipaux du canton de Belleville, Vendée, est comparu le citoyen Jean-René François Voisin, ex-curé constitutionnel de la commune de Mouilleron-le Captif, lequel après avoir dit qu'il a le plus grand intérêt de constater que dans le temps il se conforma à la loi du 14 août 1792 qui exigeait le serment des ecclésiastiques, a présenté les citoyens Charles-Henry, Marie Chappot. Jacques Renélaud, René Lomicau et Victor-Damase Gouin, les seuls officiers municipaux existant dans ladite commune, lesquels ont affirmé qu'étant en exercice lors de la prestation du serment exigé des ecclésiastiques par la loi précitée, le citoyen Voisin, qui était alors curé de ladite commune, le prêta dans toute sa plénitude, et qu'ils n'ont aucune connaissance qu'il l'ait rétracté depuis.
De laquelle déposition ayant été requis de rédiger acte, nous l'avons fait et nous sommes avec les témoins soussignés". (Suivent les signatures).
Une autre figure plus intéressante que nous trouvons à Belleville, au temps de la Révolution, est celle d'une humble fille, appelée Marie Lourdais. Elle était née à Domalain, dans l'Ille-et-Vilaine et était venue se fixer à la Gaubretière. Elle y tenait une boutique d'épicerie lorsque la Révolution éclata. Voyant les prêtres poursuivis et traqués de toutes parts, elle résolut de se dévouer pour leur servir de guide et pour les sauver. Feignant un commerce d'épicière ambulante, et les épaules chargées d'un lourd ballot de marchandises, elle se mit à parcourir tout le pays insurgé. Ses pérégrinations l'amenèrent plusieurs fois jusqu'à Belleville. Un jour, elle y vint, en compagnie de Mme de la Godardière, à qui elle avait servi de guide, depuis Ancenis jusqu'au camp de Charette. Grâce à son prétendu métier d'épicière, elle avait pu traverser sans encombre bien des postes républicains Ce fut sans doute dans cette circonstance que son dévouement fut mis à une bien rude épreuve. Laissons-la parler elle-même :
"Mme de ***, dit-elle, avait ses cinq sœurs, Mlles de Lézardière, religieuses Ursulines de Luçon ; elles avaient été tuées ; leurs corps étaient entassés, depuis trois mois, dans un fossé. Je me fis aider de M. Brodu, de la Gaubretière, que je retrouvai à Belleville, et nous les sortimes de ce fossé. L'une était encore fraîche et vermeille ; une autre avait toutes les chairs mangées par les chiens, excepté les jambes que recouvraient encore des bas ; les corps des trois autres étaient couverts de boue et commençaient à se décomposer. Nous les lavâmes bien, les mîmes dans des draps blancs qui nous furent donnés par Mme ***, et nous les enterrâmes tous les cinq dans le cimetière de Belleville, auprès de la croix. Les cinq tombes ont été recouvertes de pierres, après la Révolution, par les soins de leurs parents encore existants.
J'eus bien de la peine à les sortir de ce fossé, Brodu répugnait à m'aider ; je le priais si bien, je lui dis que Dieu était avec nous, que ces bonnes religieuses étaient des saintes qui prieraient pour notre conservation, si nous leur rendions ce dernier service. Il se décida, mais nous eûmes beaucoup de mal. Il les prit aux épaules et moi aux pieds, et nous les tirâmes. Ce qui nous fatigua le plus, ce sont les mouches : il y en avait des essaims voltigeant autour comme des abeilles".
A Belleville, Marie Lourdais entra en relation avec Charette et elle devint comme sa messagère. Elle portait des vivres de médicaments aux blessés ; elle les relevait sur les champs de bataille et elle rendait compte au général de tout ce qu'elle apprenait. En même temps, elle faisait les commissions des prêtres cachés dans les paroisses de Chauché, la Rabatelière, de Beaufou, des Lucs. Elle prévenait les royalistes des jours où il y avait messe.
Dans ses Mémoires, Marie Lourdais raconte qu'elle alla plusieurs fois à l'Airaudière de Belleville, où elle rencontra Mme de Buor qui la chargea de porter des vivres et de l'argent à M. l'abbé de la Colinière. Mais Mme de Buor était souvent obligée de se cacher et de fuir, et comme elle se trouvait alors dans la détresse, Marie Lourdais s'ingéniait à lui procurer des secours. M. l'abbé de la Colinière n'avait pas non plus de servante plus fidèle lorsqu'il venait se réfugier à l'Airaudière. Elle lui portait tout ce dont il avait besoin, et elle lui servait même la messe, lorsque les hommes qui le faisaient habituellement étaient absents.
Il faudrait encore suivre cette héroïne sur les champs de bataille, où elle soignait les blessés, comme une vraie sœur de chanté, mais le lecteur désireux de connaître tous ces détails pourra les lire avec beaucoup d'intérêt dans la Vendée Historique (nos 88, 89, 90 et 91).
Après la mort de Charette, Marie Lourdais vécut pendant plusieurs années à l'Airaudière avec Mme de Buor ; elle la suivit ensuite à la Gaubretière, où celle-ci mourut en 1829. M. de Rangot, neveu de Mme de Buor, recueillit à son tour la fidèle compagne de sa tante et la garda jusqu'à la fin. Marie Lourdais, qui était devenue aveugle, mourut sous ce toit hospitalier le 30 octobre 1856, à l'âge de quatre-vingt-quinze ans.
--------------------
L'ÉGLISE PAROISSIALE DE BELLEVILLE
L'étranger qui visite quelqu'une des récentes églises qui se sont élevées sur le sol vendéen ne se doute guère au prix de quels sacrifices on a pu réussir à édifier de semblables monuments. Il faut bien être dévoré du zèle de la maison de Dieu pour s'imposer une somme aussi prodigieuse de fatigues, de déboire et d'ennuis. La plupart des prêtres qui ont entrepris de telles œuvres ont abrégé leurs jours.
Le vaillant curé qui a mené à bonne fin la belle église de Belleville fut l'un de ces hommes. Ce n'est pas sans émotion qu'on lira le récit de sa glorieuse entreprise.
Lorsque M. Mathurin Baudry arriva comme curé de Belleville, le 24 octobre 1844, il ne trouva que misère et pauvreté dans son église et sa sacristie. Point d'autel dans son église, un assemblage de quelque planches supportées par des tréteaux en tenait lieu ; point de chaire, à la place il y avait une espèce de plate-forme en bois blanc élevée d'un mètre environ au-dessus du sol ; enfin pour mobilier quelques chaises, la plupart en mauvais état.
M. Baudry fit aussitôt l'acquisition d'un autel de 1000 francs et d'une chaire de 14 000 francs (c'est cette dernière qui a été placée dans la nouvelle église). En même temps, il faisait installer des bancs, le chœur était réparé et une tribune élevée au fond de l'église donnait des places plus nombreuses aux fidèles pour l'assistance aux offices.
Mais toutes ces dépenses ne faisaient pas perdre de vue au zélé curé le projet d'une autre église plus digne de Dieu et de sa paroisse. Il voulait, disait-il, bâtir une belle église. Une fois cette idée définitivement arrêtée, il se mit à économiser scrupuleusement tous ses revenus personnels et ceux de la fabrique. En 1867, avec la souscription, un secours de l'Etat, un emprunt et les économies accumulées, il pouvait disposer presque de 100 000 francs. Il charge M. Clair, architecte du département, de lui dresser des plans et devis. Celui-ci se met à l'œuvre et apporte bientôt un plan. Le devis des travaux, y compris les honoraires de l'architecte, s'élevait à la somme de 90 000 francs.
M. le curé de Belleville crut le moment favorable de bâtir, mais une question restait à trancher, question qui devait lui causer les plus grands ennuis, je veux parler du transfert de l'église.
L'ancienne église était située près d'un étang qui baignait en hiver les murs du chœur jusqu'à la petite porte latérale. Elle était ainsi d'un accès fort difficile du côté du sanctuaire. On ne pouvait rien laisser de précieux dans l'église, l'humidité détériorant bien vite tout ce qu'on voulait y conserver. Cet état de choses décida les autorités ecclésiastiques et préfectorales à s'opposer à l'édification du nouvel édifice dans cet emplacement.
On fut donc obligé de chercher un terrain ailleurs. Au dire de bien des gens, la nouvelle église ne devait être nulle part mieux placée que dans la parcelle de terre appelée les Chaumes, appartenant à la commune.
On en fit la demande au Conseil municipal. Celui-ci aurait dû, ce semble, adopter aussitôt un projet qui favorisait le bien général ; mais l'étroitesse de vues est souvent le partage de ces assemblées de campagne. Les édiles municipaux de Belleville, ne s'inspirant que de certains intérêts particuliers, opposèrent presque tous un refus formel à la demande de leur curé. Deux autres propriétaires qui possédaient des terrains fort convenables près du cimetière et qu'ils auraient pu céder avec facilité, donnèrent aussi eux l'un après l'autre un refus non moins désagréable.
Personne ne voulant recevoir la maison du bon Dieu, M. Baudry fut contraint d'acheter deux parcelles de terre à l'endroit où s'élève l'église actuelle. Mais l'un des vendeurs étant mineur, l'acquisition ne put être faite qu'après un jugement de tribunal, ce qui occasionna un surcroit de frais pour la fabrique. Le terrain acheté, d'une contenance de trente-huit ares environ, revenait à plus de 6000 francs. Le prix était énorme, mais M. Baudry allait enfin pouvoir commencer son œuvre.
Le 21 novembre 1872, la construction de la nouvelle église fut adjugée à M. Arthur Tilleau, entrepreneur à Mortagne et le 19 mars 1873 on en traça les fondations. Dès lors les travaux furent menés avec la plus grande diligence.
Le 8 juin de la même année, une grande consolation était donnée au vénérable M. Baudry. Ce jonr-là, Sa Grandeur Mgr Colet, voulant lui donner une marque de sa sympathie la plus profonde, venait bénir elle-même la première pierre du temple qu'on allait élever à la gloire de Dieu. Si cette fête fut un vrai triomphe pour le zélé curé et pour ceux qui l'avaient secondé dans sa généreuse entreprise, elle fut aussi une cuisante défaite pour ceux qui n'écoutant que leurs mesquins intérêts n'avaient pas craint de lui susciter la plus ridicule opposition. Les autorités civiles et religieuses rehaussaient par leur présence l'éclat de la cérémonie. Aux côtés de Mgr Colet on remarquait :
M. Gauja, préfet de la Vendée ; M. Baudry, aumônier des Religieuses des Brouzils et frère de M. le Curé ; M. l'abbé Giraud, secrétaire de l'Evêché ; M. Marin d'Yvonnière, conseiller général du canton du Poiré ; M. de Beauregard des Gâts ; M. de la Maronnière, d'Aizenay, conseiller d'arrondissement ; M. Legrip, chef de division à la Préfecture ; M. Millasseau, curé-doyen du Poiré ; M. Graize, aumônier de l'école normale ; le R. P. Hugonet, missionnaire de Chavagnes ; M. Hervouet, ancien curé de Boulogne ; M. l'abbé Guériteau, de la Roche-sur-Yon ; M. Beziau, curé de Dompierre ; M. Seguin, aumônier au château des Gâts ; M. Legast, vicaire de Mouilleron-le-Captif ; M. Rabiller, vicaire de la Roche-sur-Yon ; M. Clair, architecte ; M. Tilleau, entrepreneur, etc., etc.
De tous les environs, on était venu en foules nombreuses, et malgré cette affluence, le silence et la piété ne cessèrent de régner pendant toute la cérémonie. Les rues du bourg avaient été décorées pour la circonstance et l'ornementation était du meilleur goût. M. le curé adressa un discours plein de tact à Sa Grandeur, Mgr Colet. Après l'avoir remerciée de son puissant concours qui avait permis d'entreprendre la construction de l'église, il n'oublia pas non plus l'honorable Préfet dont l'autorité avait contribué à lever les derniers obstacles. La pièce suivante, renfermée dans un étui en cuivre, fut déposée dans la pierre marquée de trois croix et engagée dans une pile de l'entrée du chœur :
ANNO REPARATÆ SALUTÆ M.DCCC.LXX.ID,
JUNII MENSIS OCTAVO DIE,
SANCTISSIMÆ TRINITATIS FESTO ;
SUB GLORIOSO PONTIFICATU PII IX,
QUEM ULTRO FIDELISSIMI CHRISTIANI,
PROPTER INDEFLEXAS VIRTUTES, REGEM
ADHUC SALUTANT,
ETSI CONDITIONS HUMANÆ INCERTUM
ET REGNI TERRESTRIS EXSORTEM ;
EPISCOPO LUCIONENSI
REVERENDISSIMO COLET,
VENDEÆ PRÆFECTO CLARISSIMO GAUJA,
CONCORDIBUS ANIMIS AC STUDIIS
ALLABORANTE UTROQUE FELICITER ADMINISTRANDÆ
PROVINCIÆ SUÆ ;
A GUBERNANTIBUS
IMPETRATA PRIUS PER BENEVOLENTISSIMUM
PUGLIESI CONTI, EXSOLUTA DEMUM PER SUCCESSOREM
EXIMIUM GAUJA
EXSTRUENDÆ ECCLESIÆ GRANDI PECUNIA ;
M. BAUDRV BELLÆ VILLÆ PARŒCLÆ
RECTORE
P. BEDOIS FABRICÆ CŒTUS PRÆSIDE
J. POTIER EJUSDEM PROCURATORE ;
LABORDE HUJUS VICI MAJORE ;
ADSTANTIBUS, ELECTA PRIMORUM
ET CLERORUM CONCIONE SIMUL AC TURBA
PIE EXSULTANTE ;
AB ILLUSTRISSIMO ET REVERENDISSIMO
LUCIONENSI EPISCOPO
INNUMERIS IMPEDIMENTIS SUPERATIS
POSITUS EST TANDEM ATQUE BENEDICTUS
IN HONOREM SANCTÆ ANNÆ, IMMACULATÆ
VJRGINIS MARIÆ MATRIS BEATISSIMÆ,
ANGULARIS HIC LAPIS ECCLESIÆ
AD QUAM ÆDIFICANDAM SUBVENERE
AMPLA INCOLARUM DONA
ET MAGNIFICENTIORA SUPRA DICTI
PAROCHIS DOMUS DOMINI ZEI.O ACCENSI
QUIBUS IN DEO ÆTERNA SIT MERCES !
OPERI ARTEM ET INGENIUM V. CLAIR
ARCHITECTUS
MANUM ET OPERAM ADHUIBUIT A. TILLAUD
Le lendemain de cette fête, M. Baudry écrivait à un ami du Grand Séminaire : "Monseigneur était hier à Belleville et il a béni les travaux commencés. Puissè-je les conduire à bonne fin ! Je sens mes forces diminuer ; je n'ai qu'un désir, celui de pouvoir un jour offrir la divine Victime dans cette église que je construis et qui a été le rêve de toute ma vie".
Ce désir, Dieu devait l'exaucer, mais auparavant le bon curé devait passer par toute une série de tribulations dont la plus grande fut de voir les frais de construction augmenter dans des proportions tout à fait inattendues. Ce fut un chiffre de près de 40 000 fr. qu'il fallut ajouter à la somme fixée d'abord. On devine les angoisses du pauvre pasteur. Atteint d'une maladie de cœur, il ne lui aurait fallu aucune émotion, et durant toutes ces années, il avait des peines de tous genres qui ne faisaient qu'accroître sa maladie.
Enfin, le lundi de la Semaine Sainte, 22 mars 1875, fut pour lui le jour qu'il attendait depuis si longtemps. Ce jour-là eut lieu la bénédiction de l'église. Son ancien directeur au Grand Séminaire, M. Gabriel Gourraud, vicaire général, avait été chargé de cette cérémonie. La bénédiction terminée, le Clergé et les fidèles allèrent processionnellement chercher le Saint-Sacrement à la vieille église pour le transporter dans le nouveau sanctuaire. Puis, M. le curé de Belleville célébra le premier la messe dans ce temple qu'il venait d'édifier à la gloire de Dieu. Il était arrivé à réaliser le projet qu'il avait tant à cœur, depuis trente-et-un ans qu'il gouvernait la paroisse de Belleville.
Mais son œuvre ne lui semblait pas complète. Dans cette église si belle et si imposante, il voulait un autel digne du monument qu'il venait d’élever. Déjà il avait réuni une partie des ressources nécessaires peur exécuter ce nouveau projet, lorsque la mort vint l’empêcher de réaliser son désir. Après avoir traîné pendant plusieurs mois, il dut dire adieu à son église, le 5 novembre, jour de sa fête patronale. A l'issue de la messe qu'il célébra pour la dernière fois, il tomba si épuisé qu'il fallut le ramener en voiture au presbytère.
Dans la maladie il fut admirable de résignation, et lorsque la pensée l’éternité l’épouvantait trop fort, il se rassurait en disant : "Sans doute, il est terrible de tomber entre les mains de Dieu, mais j'aime à croire que mon église criera miséricorde et qu'elle intercédera pour moi".
Cet homme, qui s'était si bien dépensé pour la gloire de Dieu, mourut le 20 décembre 1877, et, deux jours après sa dépouille mortelle, apportée dans cette église qui lui avait coûté tant de soucis, était conduite au cimetière de la paroisse, où elle repose encore aujourd'hui.
Il nous reste maintenant à donner la description du monument élevé par M. Mathurin Baudry. Nous la trouvons dans cet extrait du procès-verbal de la consécration de l'église.
La cérémonie de la consécration de l'église eut lieu le 22 août 1880, en la fête de saint Joachim, par Mgr Catteau, évêque de Luçon.
"L'église, de style ogival XIIIe siècle, couverte en ardoises, se compose d'un sanctuaire à trois travées autour duquel est construite une sacristie, d'absidioles pour les chapelles latérales, d'un bras de croix, de trois nefs de cinq travées chacune, y compris celle où s'élève sur le milieu de la façade la tour du clocher flanquée de deux tourelles, laquelle est construite jusqu'à la naissance de la flèche en pierre qui devra la surmonter plus tard, s'élève à l'extrémité du bourg sur un terrain appartenant à la fabrique, à l'est de la route de Nantes à la Roche-sur-Yon, à dix-sept mètres de l'axe de la route et est orientée selon les règles liturgiques.
Elle confronte au nord et à l'est au jardin du presbytère, au midi au chemin de ronde, et à l'ouest à la place de l'église, présentant un gracieux fer à cheval de trente-huit mètres d’étendue. Construite toute entière pour la pour la maçonnerie en moellons de l'Aubonnière, sur le territoire de la paroisse, elle est bâtie pour toute la taille tant intérieure qu'extérieure, comprenant contreforts, ouvertures, corniches, colonnes, chapiteaux, etc., presque toutes les nervures, en granit des Lucs.
Longue dans sa plus grande étendue de trente-six mètres cinquante, dont dix pour le sanctuaire, cinq pour la travée des bras de croix et vingt-et-un mètres cinquante pour le reste, elle mesure en largeur dans le sanctuaire sept mètres vingt, dans les bras de la croix dix-neuf mètres trente et dans la nef quinze mètres soixante et donne une superficie de cinq cent neuf mètres trente.
En déduisant de ce chiffre l'étendue prise par les bases des colonnes et de la tour du clocher, trente-sept mètres trente, elle conserve encore une superficie de quatre cent soixante-douze mètres carrés, étendue bien suffisante pour une population de quinze cents âmes.
Voûtée en briques avec doubleaux en granit et briques imitant le granit, elle mesure sous clefs de voûtes dans le sanctuaire quatorze mètres d'élévation, quinze mètres dans les bras de croix et la grande nef et huit seulement dans les nefs des côtés.
Cinq clefs de voûtes sont ornées des armoiries de Notre Saint-Père le Pape IX, de Mgr Charles-Théodore Colet, évêque de Luçon, de MM. Morin d'Vvonnière, de Châtaignier et de Guerry de Beauregard.
Les enduits intérieurs des voûtes et des murs sont ornés de filets blancs formant coupe de pierre sur fond gris. Le dallage du sanctuaire et de l'église est en ciment avec bordure de granit dans les allées des nefs.
On y arrive par quatre portes dont une intérieure au bras de croix, côté de l'épître, conduisant à la sacristie, et les trois autres extérieures donnant sur la façade et mesurant, la principale, trois mètres de hauteur sur deux mètres de largeur et les deux autres deux mètres quatre-vingts de haut sur un mètre cinquante-cinq de large.
Elle est éclairée par trente-six fenêtres, dont sept dans le sanctuaire, mesurant quatre mètres cinquante de hauteur sur un mètre de largeur, huit dans les bras de croix dont deux géminées et surmontées de rosaces aux extrémités des bras de croix, de six mètres vingt de hauteur et de deux mètres de largeur, deux dans les absidioles de un mètre cinquante de hauteur et soixante centimètres de largeur, et quatre dans le haut des murs du bras de croix à l'est et à l'ouest, huit dans la grande nef et dix dans la petite nef, ayant toutes ces dix-huit fenêtres trois mètres de hauteur sur quatre-vingt centimètres de largeur.
Une géminée avec rosace sur la façade et mesurant cinq mètres de hauteur sur un mètre soixante-cinq de largeur et deux rosaces de un mètre de diamètre au-dessus des portes donnant entrée dans la nef des côtés.
Sur la façade et au-dessus de la porte principale s'élève la tour du clocher ayant à sa base cinq mètres soixante-dix formant tribune intérieure au-dessus de la porte d'entrée et s'arrêtant à la naissance de la flèche. Elle mesure depuis le sol jusqu'à la naissance de la flèche vingt-six mètres soixante-six d'élévation et est construite en granit et dans son extérieur en moellons avec coupe de pierre imitant le granit. La partie destinée au beffroi est percée de quatre baies géminées de cinq mètres de hauteur sur un mètre soixante-cinq de largeur. La dite tour est flanquée au nord et au midi de deux tourelles bâties comme la tour elle-même et abritant deux chapelles latérales dans l'une desquelles se trouvent les fonts baptismaux.
Les verrières dont on a parlé plus haut représentent, dans le sanctuaire, sainte Anne, saint Joachim, saint Joseph ; dans les bras de croix, saint Augustin, sainte Geneviève, saint Jean et sainte Germaine.
Les croisées géminées des extrémités du bras de croix représentent, celle du côté de l'Evangile, l'apparition du Sacré-Cœur de Jésus à la Bienheureuse Marguerite-Marie et celle du côté de l’épitre, l’apparition de Notre-Dame de Lourdes.
Les croisées des bas-côtés ornées de verrière représentent les saints personnages suivants : du côté de l'Evangile, saint Edmond, saint Mathurin, sainte Thérèse, saint Louis ; − du côté de l'épître, Notre-Dame de la Salette, saint Arsène, saint Isidore, sainte Radegonde, saint Henri. Dans l'intérieur de la tour, éclairant la tribune, une splendide croisée géminée avec saint Pierre au milieu".
Au mois de juin 1880, grâce à une âme généreuse, on installa dans le chœur un autel monumental dû au ciseau de M. Chapeau, sculpteur à Angers. Une plume d'artiste en fit une description très intéressante dans un numéro du Publicateur, en date du 19 septembre 1880. Voici de larges extraits de cet article :
"Tout en belle pierre de Lavoux, cet autel mesure neuf mètres de hauteur et quatre de largeur, mais seulement à sa base et au tombeau, car il s'élève en se rétrécissant jusqu'au sommet, sauf un instant de repos à la naissance du dais d'honneur, et présente ainsi une délicieuse silhouette ; il n'a coûté que 11 300 francs, il en vaut bien davantage.
Trois parties distinctes divisent le tombeau d'autel ; deux égales et moindres, celles des côtés ; une autre principale, celle du milieu.
Chaque partie de côté se compose d'un bas-relief fortement fouillé et placé pour qu'elles le protègent entre deux légères colonnes surmontées d'une gracieuse arcade à trois lobes.
Au milieu, la partie principale consiste en une crypte profonde accompagnée elle aussi des mêmes colonnes, ais au-dessus desquelles se dessine seulement un commencement d'arcade suivi d'une ligne droite verticale aboutissant à une terminaison droite (sens horizontal), et qu'agrémentent, comme ornementation, de jolies rosaces. L’espace vide que laisse la crypte est rempli par une belle chasse en pierre à trois arcades, dont l'une plus haute que les deux autres.
Enfin quatre anges debout, demi-grandeur, le premier et le dernier aux angles, le deuxième et le troisième entre les bas-reliefs et la crypte, tous quatre au plan le plus en vue, complètent admirablement ce tombeau d'autel.
Dans le médaillon bas-relief de gauche, c'est la scène joyeuse de la naissance de Notre-Seigneur ; au-dessous se lit cette inscription : "Se nascens dedit socium". Le médaillon de droite représente le crucifiement et la mort du Christ, avec ce texte : "Se moriens in pretium".
Les quatre anges, ailes déployées, portent la table d'autel, conformément à ces paroles de l'Ecriture : "Dieu asseoit son trône sur l'aile des chérubins, qui sedes super Cherubim". Il faut qu'un trône soit digne de Celui qui l'occupe. Rayonnante est donc la beauté de ces quatre têtes d'anges, différent le type de cette beauté ; dans une ornementation, la variété apporte avec elle une beauté de plus. Et qu'elle est gracieuse la draperie de leurs robes aux plis ondoyants ! Combien sveltes et légères sont leurs formes ! On sent que, s'il le fallait, ces anges s'envoleraient pour porter Dieu dans les immensités de l'espace.
Deux de ces anges encadrent en même temps le bas-relief de la nativité de Notre-Seigneur. N'y avait-il pas des anges à chanter près du berceau du Christ ? Les deux autres servent aussi d'encadrement au bas-relief de la mort de Notre-Seigneur. Qui ne se souvient des deux anges au tombeau du divin Crucifié ?
La châsse, avec ses huit colonnes, la sculpture de ses chapiteaux, ses trois arcatures, son ogive du milieu, avec la frise qui court, légère, sur les frontons, la minutieuse ornementation de sa toiture, l'autre frise, sobrement gracieuse, qui la couronne, cette chasse, disons-nous, est Miniature en pierre. Là, le Seigneur lui-même gardera les os de ses saints : Dominus custodit ossa eorum ; les saintes reliques des disciples demeurent près du corps adorable de leur Maître ; mais, au gré de sa bonté, la pierre ne serait pas un sépulcre assez glorieux pour ces saints ossements, voici donc, sous la châsse en pierre, trois reliquaires plus précieux en bronze doré avec un lit de velours rouge. Et vidi subtus altare animas interfectorum propter verbum Dei et propter testimomum quod habebant.
Sur la table d'autel dont la saillie débordante protège les anges du tombeau, apparaît un groupe délicieux formé de quatre autres anges, presque grandeur naturelle, et qui entourent l'admirable tabernacle qu'il s'agit ici de décrire. A lui seul il est la plus gracieuse, la plus élégante chapelle : partout la pierre se cache sous la dentelle de l'ornementation, soit à sa partie inférieure qui est carrée, soit à sa partie supérieure composée d'un trilobé et d'un gable très riche. Lignes harmonieuses, colonnes de face au nombre de quatre, et où contourne une imitation de festons, fleurons jetés à profusion, légers clochetons, frise délicate qui monte le long du fronton et va mourir sous le pied de la croix finale, porte dont l'or étincelle, trilobé dentelle où brille un ravissant monogramme du Christ, vous formez au Dieu de l'Eucharistie une charmante demeure, un véritable palais : "Non est hic aliud nisi domus Dei et porta cœli".
La porte du tabernacle de ce ciel d'ici-bas garde la gloire de Dieu, la paix des hommes, l'humanité et la Divinité de Notre-Seigneur, les trésors de la terre et des deux. On ne saurait donc trouver pour sa composition et son ornementation des dispositions assez heureuses, assez réussies. L'or le plus précieux, la splendide variété de ses nuances, l'art le plus ingénieux y seront employés. Figurez-vous un rectangle qui de toutes parts jette les feux de l'or : des lignes multiples lui forment un cadre très riche ; la partie de fond s'embellit de quatre roses, d'un premier ovale plus délicat, d'un second beaucoup plus large, de rayons de gloire au centre et de cette inscription en forme de guirlande : Ecce tabernaculum Dei cum hominibus ; voilà au milieu des hommes le tabernacle de Dieu. La simplicité de cette inscription ne fait qu’en relever les charmes. Pour qui croit, comment la lire sans émotion ? A elle seule elle est tout un poème : quelque chose d'indéfini s’en échappe. Couchés entre les deux filets de l'ovale plus délicat, les lettres d'inscription se détachent nettement en guirlande dans la partie supérieure de l'ovale qu'elles suivent ; le grand nom de Dieu, "Dei", sépare transversalement les deux premiers mots de l'inscription des deux derniers : "Cum hominiens" qui remplissent la partie inférieure du même ovale, il fallait que le mot Dei, Dieu, donnât tonte l'ornementation, rappelant que Dieu est roi des rois, seigneur des seigneurs.
C'est ce qui a lieu. Au centre, dans le second ovale plus large, au milieu d'une gloire de rayons, il se détache splendide en grandes lettres majuscules sur les rayons qui éclatent, il annonce avec puissance : "Dieu". A quoi le monogramme d'au-dessus de la porte répond doucement que le nom de ce Dieu c'est Jésus-Christ. "J.-C. Jésus Christus". Comme accompagnement des deux ovales, il y a quatre roses charmantes, une à chaque angle du rectangle, elles symbolisent l'amour. Dans les feuilles de l'une de ces roses se cache quelque peu la serrure, partie moins gracieuse d'une porte de tabernacle. Enfin s'étend pour renfermer le tout un large cadre or vierge éblouissant. Les autres parties de cette porte, bijou d'orfèvrerie, sont également en or ; mais si les fonds ont été établis or jaune mat, contrastant avec l'or jaune brillant du cadre, les filets des deux ovales se dessinent or rosé, les lettres de l'inscription se lisent or vert, les rayons sont projetés or rouge, et ces diverses nuances, s'alliant ou se faisant opposition, présentent à l'œil agréablement flatté une radieuse féerie. Ici-bas, on isole les trésors de la science et de l'architecture, les riches bibliothèques, les superbes monuments, afin de les mieux garder ou pour que toutes leurs merveilles ressortent plus d'avantages. Infiniment plus précieux sont les saints tabernacles qui renferment le Bien suprême, la divine Eucharistie. Donc, le tabernacle, tout en restant très accessible, et, sans être isolé, peut se trouver légèrement séparé de tout ce qui l’environne. Certes, Dieu doit avoir aussi une place à part. L'Arche d'alliance ne possédait pas, comme les tabernacles de la Loi nouvelle, le Dieu trois fois saint ; toutefois, elle devait être placée et reposer sous le propitiatoire qui la couvrait soigneusement et lui prêtait les richesses de sa propre parure. Au-dessus du tabernacle qu'elle recouvre entièrement, mais d'assez loin, s'élève une archivolte à cinq lobes fleuris, grande parure aussi précieuse que le tabernacle est beau et qui ajoute encore à sa beauté.
Est-ce assez de splendeurs pour le palais du Dieu d'amour ? Non. Par-dessus l'archivolte, un magnifique gable s'élance vers l'exposition et ne s'arrête qu'après l'avoir dépassée. Embelli, dessous, de feuilles qui s'inclinent vers le tabernacle comme on voit des fleurs chercher le soleil, il est enrichi sur le dessus d'une frise admirablement sculptée, large dentelle dont la richesse séduit l'œil, mais qui ne s'étale, elle aussi, que pour couvrir le divin tabernacle.
Aux princes de ce monde, il faut des serviteurs qui se tiennent près d'eux, sans cesse à leur disposition, une maison d'honneur, une cour assidue. Autour du Dieu de l'Eucharistie, dans son tabernacle, qu'est-ce que trouvait saint Chrysostome lorsqu'il entrait à l'église ? Un ciel d'anges, une multitude de ces esprits célestes, les uns anéantis dans l'adoration, les autres suppliants tout ravis d'amour. Un groupe de quatre statues d’anges, quasi grandeur naturelle, trouvera donc sa place auprès du tabernacle. Presque à le toucher et tournés vers lui, deux de ces anges, l'un à gauche, l'autre à droite, prosternés à deux genoux, la tête pieusement inclinée, les mains jointes, prient, aiment, adorent. Une de leurs ailes, tendue vers le tabernacle, donne à entendre que s'ils osaient, ils rapprocheraient encore du Dieu d'amour. Comment dire la grâce, l’élégance de la draperie de leur vêtement ? Elle est vue de profil, les plis ondulent et descendent sur les plis ; l’effet du dessin qu'ils forment ne peut guère se rendre, il faut le voir. Au treizième siècle, et l'autel appartient à cette époque, la draperie se faisait plus soignée que le visage. Il n'eut pas été, non plus, dans la vérité de créer autour du tabernacle, où Notre-Seigneur n'est que le Dieu caché, des types d'une beauté de tête aussi parfaite que celle qu'on trouvera, tout à l'heure, aux deux anges de l'exposition, où Jésus-Christ se montre dans sa gloire eucharistique. Auprès du tabernacle, les anges symbolisent l'humanité, nouvelle Madeleine, qui n'est qu'aux pieds de son Sauveur ; bientôt près de l'exposition, l'humanité, sous la figure de deux anges, nous apparaîtra transfigurée, dans l'extase de la vision béatifique, belle comme on ne peut l'être qu'en réfléchissant Dieu.
A gauche du tabernacle, près de l'ange à genoux, mais sur plan antérieur, un autre ange debout, gracieux dans sa robe élégante, et tourné vers les fidèles, déroule cette pieuse devise qu'il présente en lettres rouges très artistiques : "Venite adoremus".
La prière, l'adoration, voilà le premier devoir à rendre au Dieu des saints autels ; il est naturel que le second soit la sainte communion.
A droite du tabernacle, auprès de l'ange agenouillé, l'ange de la sainte communion fait le pendant de l'ange de la visite au Saint-Sacrement. Lui aussi se tient debout, au même plan antérieur : semblable est le charme de sa robe ; il convie la foule vers laquelle il est tourné, mais le tabernacle captive aussi son regard. L'ange cherche le cœur de Dieu ; il l'écoute, il l'aime, il l'entend lui dicter le tendre précepte de son amour : "Accipite et manducate". L'invitation eucharistique a été écrite. L'ange en tient le texte déroulé entre ses mains, il l'offre à la foule, il la convie à la sainte communion.
La beauté de l'ange de la visite du Saint-Sacrement le cède à la beauté de l'ange de la communion. Telle est expression de ses traits et de sa tête, telle est la perfection de ses formes, de son vêtement, de toute sa personne qu'il n’est pas un seul connaisseur qui ne s'arrête à contempler cet ange. Tous le disent supérieurement traité.
En formant avec ces quatre anges un groupe vivant et animé autour du tabernacle, on voulait rompre avec le froid, la solitude, le silence des autels ordinaires. L'effet obtenu fait plaisir à voir. Pour qui prend le temps d'interroger la pierre de ce groupe d'anges, elle s'anime, elle parle, elle est souriante.
Trois gradins ornés d'épis de blé et de grappes de raisins font suite, de chaque côté, aux anges d'auprès du tabernacle. Ces gradins, superposés, montent par étage, avec chandeliers et cierges, vers l'exposition, arrangement qui permet de produire un heureux effet de gradation. C'est successivement la lumière de chaque cierge, puis c'est la tête de chaque ange de l'exposition et enfin la croix où le Saint-Sacrement exposé ; de la sorte tout rend hommage à Notre-Seigneur Jésus-Christ : il domine.
L'exposition pour l'ostensoir ou pour la croix compte quatre colonnes formées chacune de quatre colonnettes accouplées. Un socle couvert de précieuses sculptures, et la partie qui termine la magnifique frise déjà citée forment à l'exposition une base imposante.
Des deux côtés de l'exposition et à la toucher, deux anges, grandeur naturelle, viennent prendre place : l'un sur des lys, l'autre auprès des roses. Leurs grandes ailes sont au repos, leur robe gracieuse se serre élégamment à la taille, le manteau de leurs épaules est comme transparent, et leur physionomie est, délicieuse de beauté. On sent que le sculpteur a réservé toute sa tendresse pour ces deux anges qui verront face à face la divine Eucharistie. Ils sont agenouillés, mais sans rien perdre de leur grandeur ; ils élèvent leur mains, ils penchent leur tête vers la gloire de leur Dieu.
En quel lieu le Saint-Sacrement reposerait-il mieux que sur l'autel et sous un dais d'honneur ? C'est ce couronnement naturel, un dais d'honneur, qui a été placé au-dessus de l'autel, du tabernacle et de l’exposition ; il est à huit pans coupés dont chacun forme un riche galbe. Aux angles s'élèvent de grands fleurons. L'un de ces gables s'avance sur l'autel, il y couvrira soigneusement le corps et le sang du Sauveur pendant le saint sacrifice de la messe. Cette forme octogonale et les huit voûtes intérieures dont les nervures se dessinent légères donnent au dais plus de légèreté et plus d'aspect ; ces voûtes qui se suivent et tournent avec les puissants gables et les fleurons élégants dont elles sont parées, et du milieu desquels s'échappe, octogonale aussi, une pyramide toute à jour où append un riche diadème et que termine une croix, toutes ces heureuses dispositions et les autres déjà décrites produisent un effet grandiose qui n'exclut ni la grâce ni le symbolisme. Contemplez plutôt ces élégants étages, ces fines arêtes, ces crochets si légers de la pyramide toute travaillée en découpure, et la lumière qui se joue dans toutes ces gracieuses ouvertures, où elle apporte les mille nuances diverses des vitraux du chœur.
Puis, presque à toucher la croix finale, mais dominant tout le reste, s'est délicatement posé autour du sommet de la pyramide un magnifique diadème, celui de N.-S. J.-C., il est la traduction fidèle de ce texte sacré : Oportet ilium regnare, le Christ a régné, il règne, il régnera. Ce doit être aussi une allusion filiale aux mêmes paroles d'une devise aimée dans le diocèse de Luçon, celle de Monseigneur Clovis, sous l'administration duquel l'autel s'est élevé et par qui il a été consacré. Enfin, tout le monument se tient au pied de la croix qui le termine.
Tel est le magnifique trophée élevé à la gloire de la divine Eucharistie dans l'église de Belleville. Une femme, modeste sous le voile de l'anonyme, pouvait-elle offrir à sa paroisse un cadeau plus royal ? Que son nom brille au livre de vie, inscrit des mains mêmes du Dieu des saints autels".
Terminons en citant deux textes qui résument tout le dessin de l'artiste qui a exécuté cette œuvre splendide. L'un est gravé en grandes lettres sur la pierre du socle de l'autel : "Landais et superexaltate eum omnes angeli ejus". L'autre se lit sur quatre écussons que soutiennent de leurs mains les anges du tombeau de l'autel : "Altaria tua, Domine virtutum".
Par tous ces longs détails on peut juger que la paroisse de Belleville doit être justement fière de l'œuvre de ses pasteurs. Il est vrai que ceux-ci trouvèrent parmi leurs paroissiens le concours le plus empressé. Ainsi que le fait remarquer le procès-verbal de la consécration de l'église, toutes les ressources nécessaires pour la construction et l'embellissement de ce temple sont venues de la générosité des fidèles. Il ne fut rien alloué sur la caisse des impôts par l'administration municipale.
Le jour de la consécration de l'église fut donc un grand jour de fête pour tous ceux qui avaient contribué à son édification. Aucun ne manquait à cette cérémonie, rehaussée par la présence d'un nombreux clergé et de toutes les notabilités des environs.
Autour de Sa Grandeur se rangeaient : M. Jeannet et M. Simon, vicaires généraux ; M. Guérineau, chanoine honoraire et directeur au Grand Séminaire ; M. Graize, aumônier de l'école normale de la Roche ; M. Gelot, supérieur de l'Institution Sainte-Marie ; M. Milliasseau, curé doyen du Poiré ; M. Grelier, curé de Cugand ; M. Goillandeau, curé de Gétigné, au diocèse de Nantes ; M. Collonier, curé d'Aizenay ; M. Mouillé, curé de la Bernardière ; M. Naulin, curé des Brouzils ; M. Rousseau, curé de Saint-Denis-la-Chevasse ; M. Bézieau, curé de Dompierre ; M. Coutanceau, curé de Saligny ; M. Sébastien Girard, prêtre habitué à la Bruffière ; M. Auguste Guibert, curé de la Chapelle-Palluau ; MM. Aimé Ménard, Davin, Boutin et Plessis, professeurs à l’Institution Richelieu, les RR. PP. R. Michaud et C. Pafin, de Chavagnes ; MM. Goulpeau, Raffin, Gaillard, Mauvillain et Bonnin, vicaires des paroisses voisines.
Après le cortège sacerdotal on distinguait clans l'assistance :
M. Morin d'Yvonnière, conseiller général ; M. de la Maronnière, conseiller d'arrondissement ; Samuel Buet, ancien notaire à la Roche-sur-Yon ; M. Clair, architecte ; tous les membres du conseil municipal ayant à leur tête M. Duplessis, maire ; et M. André, adjoint ; enfin tout le conseil de fabrique.
A la fin de la cérémonie, Monseigneur remercia tous les bienfaiteurs de l'église, et en particulier le vénérable prêtre défunt qui avait consacré tant d'années à la réussite de cette grande œuvre.
Pour clore ce chapitre de l'église donnons quelques renseignements sur les trois cloches qui sont aujourd'hui dans la tour. Elles sont sorties des fonderies de M. Ernest Bollée, du Mans. Ce fut en 1858 que M. le curé de Belleville en fit la commande. Elles remplacèrent alors dans l'ancienne église une petite cloche fêlée qui ne pesait que cent soixante-dix kilos. Elles donnent les notes do, mi, sol.
Inscription de la première : Mathurin Baudry, curé, et tous les paroissiens réunis m’ont donnée à l'église de Belleville, l'an du Seigneur 1858. − y ai été bénite et nommée Anne par Monsieur Jacques Gendreau du Petit-Logis et Mlle Marie Remaud de l'Aubonnière. Poids : 375 kilos.
Inscription de la deuxième : Monsieur Louis Guériteau décédé à Beaupré le 12 août 1857 m'a donné à l’église de Belleville, Monsieur Mathurin Baudry étant curé. J'ai été bénite et nommée Jean-Baptiste l’an du Seigneur 1858 par Monsieur Jacques Guériteau et dame Marie-Anne Violleau, frère et belle-sœur du donateur. Poids 229 kilos.
Inscription de la troisième : Monsieur Jacques Gendreau, du Petit-Logis, m'a donnée à l'église de Belleville, M. Mathurin Baudry étant curé. J'ai été bénite l’an du Seigneur 1859 et nommée Marie par M. Fernand Gendreau du bourg et Mademoiselle Xavière Gendreau de la Sauvagère, neveu et nièce du donateur. Poids 150 kilos.
Le Presbytère
La nouvelle église ayant été construite loin de l'ancienne, il devenait urgent d'en rapprocher l'habitation curiale pour la commodité du prêtre et des fidèles. L'état de vétusté de l'ancien presbytère et des réparations qu'il fallait y exécuter à bref délai hâtèrent la solution de cette question. En 1878, le Conseil de fabrique adopta le projet de construction d'un nouveau presbytère sur le terrain lui appartenant auprès de l'église. Pour subvenir aux frais, on vendit l'ancien immeuble et on fit une demande au gouvernement qui accorda un secours de 5000 francs. La construction fut adjugée, le 9 septembre 1879, à M. Gautier, entrepreneur à Clisson. La dépense s'éleva à une vingtaine de mille francs.
Le Couvent
Le couvent qui existe à Belleville est dû à la générosité de M. l'abbé Mathurin Baudry qui acheta le terrain à son prédécesseur, M. l'abbé Meunier, pour la somme de 1700 francs. Il fit faire le plan de construction par M. Lévêque, architecte de la Roche.
C'était en 1848 à l'époque où la question de l'enseignement religieux était violemment attaquée, mais fortement défendue. La résolution bien connue de M. Baudry de mettre des religieuses à la tête de son école ne pouvait manquer de lui attirer des ennuis. Quelques personnes influentes de l'endroit s'opposèrent de toutes leurs forces et elles lui tendirent même un piège dont il faillit être la victime.
Un jour, le maire de Belleville fit placarder sur l'église une affiche contre l'enseignement catholique. Aussitôt que M. le Curé eut pris connaissance de cet injurieux écrit, il ne put maîtriser son indignation, il le saisit et le mit en pièces. Mais dès le jour même une plainte était déposée contre lui au Parquet ; la semaine suivante, on le faisait comparaître devant le juge d'instruction et un mois après, on le citait au Tribunal.
Mgr Baillés, informé des tracasseries suscitées au zélé curé lui écrivit alors cette lettre vraiment digne d'un évêque :
"Mon cher Curé,
Si vos ennemis réussissent dans leurs iniques projets, si vous êtes condamné à la prison, le jour où vous en sortirez, je serai à la porte de la prison à vous attendre ; je vous conduirai moi-même à Belleville et il y aura salut du Saint-Sacrement".
M. l'abbé Baudry s'entendit condamner non pas à la prison, mais à 25 francs d'amende et aux frais. Loin d'abattre son zèle, cette condamnation ne fit que l'exciter davantage. Ayant fait faire un plan d'école, il le mit aussitôt à exécution et au mois d'octobre 1852 il installait dans le nouvel établissement trois religieuses de Mormaison. Jusqu'à ces dernières années, l'école fut toujours dirigée par les institutrices si dévouées de cette congrégation. L'une d'elles, la sœur Saint-Firmin, a passé trente-trois ans de sa vie comme supérieure de cet établissement et quand elle mourut, le 19 mars 1892, le deuil fut universel à Belleville. Aujourd'hui l'école fonctionne comme par le passé, mais la sécularisation a dépouillé les bonnes institutrices de leur habit religieux.
Visites épiscopales
Le 23 octobre 1847, visite de Mgr Baillés qui vient ériger lui-même un chemin de croix dans l'église de Belleville. Il est assisté de M. Lussagnet, archiprêtre de Bourbon, et de M. Gallot, secrétaire particulier, ainsi que de seize prêtres des environs.
Autres visites de Mgr Baillés : le 22 mars 1850 ; le 31 mai 1855.
4 mai 1864, visite de Mgr Colet.
8 juin 1873. Visite de Mgr Colet et bénédiction de la première pierre de la nouvelle église.
3 juin 1878. Visite de Mgr Catteau, confirmation de deux cent deux enfants des paroisses de Belleville et de Saligny.
22 août 1880. Visite de Mgr Catteau, consécration de l'église et de l'autel.
27 mai 1881. Visite de Mgr Catteau, confirmation de soixante-sept enfants.
28 avril 1883. Visite de Mgr Catteau, confirmation de cinquante-quatre enfants.
12 mai 1887. Confirmation de deux cents enfants des paroisses de Belleville et de Saligny.
29 avril 1891. Confirmation de quatre-vingt-dix-neuf enfants.
24 avril 1895. Confirmation de cent trente-trois enfants.
9 mai 1899. Confirmation de cent vingt-quatre enfants.
28 mars 1903. Neuvième visite de Mgr Catteau.
Missions
La première mission dont le souvenir soit resté à Belleville depuis la révolution est celle de 1854. Les détails n'en ont pas été consignés par écrit.
Une seconde mission fut donnée au mois de janvier 1883 par les RR. PP. Dexmier et Rochereau, missionnaires de Chavagnes. Près de mille personnes s'approchèrent de la sainte table à la fin des exercices. Le jour de la clôture, on inaugura un calvaire en face du chemin du Petit-Logis. Le bois de la croix fut offert gracieusement par M. Auguste Gendreau, ancien président du conseil de fabrique, et le Christ fut payé par sa sœur, Mlle Célestine Gendreau. La croix et le christ furent portés triomphalement depuis l'église jusqu'au lieu de l'érection.
Une autre mission fut encore prêchée, pendant l'Avent de 1893, par les RR. PP. Roger et Rochereau, missionnaires de Chavagnes. La clôture se fit le jour de Noël et le lendemain, au milieu d'une foule nombreuse, le directeur de la mission bénit dans l'église un beau chemin de croix donné par des âmes généreuses. Dans cette cérémonie, chaque station était portée par les donateurs et par les membres du conseil de fabrique.
Croix
Les principales croix érigées sur le territoire de Belleville sont :
1. Celle de la famille Bedois-Mallard, non loin de l'église.
2. Celle de la Gendronnière, élevée à la mémoire de Mlle Célestine Gendreau par ses neveux et nièces. Depuis de longues années, il y avait toujours eu en ce lieu des croix de bois. Les ravages du temps ou les tempêtes avaient fini par les renverser. La dernière était celle de la mission de 1883. En 1899, on jugea bon de la remplacer par un calvaire en pierre. Le monument fut bénit par M. l'abbé Gendreau, curé de Château-Guibert, et membre de la famille des donateurs. La cérémonie eut lieu le dimanche 9 septembre.
3. Celle de la Rouchère, élevée par M. et Mme Charrieau-Laurenceau.
4. Celle de Beaupré, élevée à la mémoire des familles Guériteau-Violeau.
5. Celle de la Grande-Croix, élevée par la famille Barreau.
On trouve encore, auprès du village de la Flavie, les débris d'une vieille croix de bois. Enfin, il y en avait aussi une autre, à l'entrée du bourg, au lieu-dit : les Chaumes,
--------------------
ÉTAT NOMINATIF
DES CURÉS ET VICAIRES DE BELLEVILLE
Le cahier des procès-verbaux de visites de l'archidiacre Marchand, à la bibliothèque communale de Luçon, nous donne divers noms de prêtres de Belleville, en 1534. Voici le procès-verbal de Belleville dont nous devons la transcription à l'obligeance de M. le docteur Mignen, de Montaigu :
De Bella Villa
Apud præfatum locum de Cavacia (Saint-Denis-la-Chevasse) die et anno prædictis (secunda mensis junii 1534) accessit Petius Jahenyere, presbyter, vicarius ecclesie parochialis de Bella Villa, pro visitatione dicte ecclesie faciendâ ; qui exhibuit exhibenda,
Nomina presbyterorum :
Assertus prior M (agister) Mathurinus Godes
dictus Jahenyere ;
Dominus Franciscus Violeau, vagabundus.
Præsens administrâtes Renatus Joyau qui exhibuit inventarium mobilium dicte fabrice, cui injunctum fuit repari (pour reparari) facere unum calicem argenteum infra proximam visitationem.
Præcedens administrator Johannes Gouyn, cui injunctum fuit, in personnâ dicti vicarii pro dicto comparentis, reddere sua compota, et docere de quictancia in crastina Nativitatis sancti Johannis.
Ce procès-verbal se trouve à la page 128vo du dit registre.
Le premier nom qu'on retrouve ensuite est celui de René Robin, cité plus haut dans le procès-verbal de démolition du temple protestant, en 1665.
Dans le premier registre des Insinuations ecclésiastiques commencé le 4 août 1692 et terminé le 11 juillet 1699, n° 209 on lit :
"Signature visa et prise de possession de la cure de Belleville pour M. Lamy".
Dans le troisième registre du 13 juin 1704 au 5 septembre 1709 on lit également, n° 189 :
"Prise de possession du prieuré-cure de Belleville pour M. Barbier, moine en Jard".
Dans les collations de titres faites par Mgr de Lescure le titulaire nommé au prieuré-cure de Belleville, à la date du 11 octobre 1713 est M. J. B. Pojel. Le collateur est Gabriel Desnouhes de Beaumont.
Dans le cinquième registre des Insinuations ecclésiastiques du 10 septembre 1714 au 26 mars 1719, n° 82, on voit un visa de la cure de Belleville pour M. Gibotteau. C'est sans doute le même prêtre que l'on retrouve sur le plus ancien registre conservé au greffe de la Roche-sur-Yon et qui indique comme curé en 1738 Mathurin Gibotteau, prieur de Belleville et du Bois-du-Luc. Ce prêtre aurait gouverné Belleville pendant près de cinquante ans. Il mourut à l'âge de soixante-dix-huit ans et fut inhumé dans l'église le 5 janvier 1764.
En 1747, le registre du greffe de la Roche-sur-Yon mentionne la sépulture dans l'église de Messire Pierre Baritaud, prêtre, vicaire, soixante-six ans. Ce prêtre avait sans doute un ministère dans la paroisse de Belleville, car, au cours des années précédentes, on trouve plusieurs actes signés par lui.
En 1747, on trouve également la signature d'un autre prêtre, Etienne Vrignaud, peut-être un vicaire aidant M. Gibotteau.
Sur la fin de sa vie, M. Gibotteau eut sans doute le dessein de se démettre de sa cure, car les Insinuations ecclésiastiques (de 1753 à 1761) nous apprennent qu'il résigna son bénéfice en cour de Rome, en faveur de Jean Suzeneau, puis un peu plus loin qu'il révoqua sa résignation.
A M. Gibotteau succéda :
M. Servant, dont le premier acte est daté du 26 novembre 1764. Ce dernier fut curé de Belleville jusqu'à la Révolution. Il avait pour frère Jean Servant, supérieur de l'Oratoire à Saumur, qui fut élu évêque constitutionnel de la Vendée, dans une assemblée tenue à Fontenay-le-Comte le 27 février 1791[35]. Par l'entremise du curé de Belleville le nouvel élu voulait consulter Mgr de Mercy avant de donner son acceptation ; il tergiversa, et finalement il comprit la faute qu'il allait commettre et recula devant une intrusion sacrilège. Les instances de son frère, prêtre pieux et fidèle, l'arrêtèrent sans doute sur le bord de l'abîme. L'assemblée électorale nomma alors à sa place Rodrigue, curé de Fougeré, qui n'eut pas les mêmes scrupules.
Quelques mois plus tard, M. Servant, curé de Belleville, qui n'avait pas prêté le serment constitutionnel[36], reçut l'ordre de quitter sa paroisse, comme nous l'apprend l'acte suivant :
"Le 9 du mois d'août 1792, pour me conformer à l'ordre qui m'a été intimé de la part du département de la Vendée, je, soussigné, prêtre, curé de cette paroisse, je cesse mes fonctions pour me rendre à Fontenay. Je les reprendray avec plaisir lorsqu'il plaira à la divine Providence de m'y rappeler, me regardant toujours comme le seul véritable et légitime pasteur de ce lieu.
Servant, curé de Belleville".
Pour expliquer l'ordre ci-dessus, il faut se rappeler qu'à cette époque on manda à Fontenay tous les prêtres sexagénaires qui n'avaient pas prêté le serment. Comme leur âge les dispensait de la déportation, ils devaient rester internés dans ce lieu, tant qu'ils persisteraient dans leur refus.
M. Servant, étant sexagénaire, reçut l'ordre qu'on a vu. Cependant, on ne sait s'il y obéit réellement, car on ne retrouve pas son nom dans la liste des prisonniers. Au moment de partir, ses paroissiens réussirent peut-être à lui faire changer son dessein, ou, s'il fut interné à Fontenay, il fut peut-être du nombre de ces prêtres fidèles qui demandèrent à échanger leur prison pour l'exil et à qui on permit de retourner momentanément dans leurs paroisses pour y faire leurs préparatifs de départ.
Quoi qu'il en soit, une tradition conservée dans la famille Audé[37] et qui est conforme à un souvenir local, nous apprend qu'il était encore au milieu de son troupeau pendant les mauvais jours de la Révolution et qu'il fut victime de sinistres bandits qui le traquaient. Un M. Audé, conseiller de préfecture, raconte quelque part que M. Servant "fut massacre par les Bleus devant la porte de son église de Belleville". De son côté, la tradition locale nous assure qu'il fut découvert caché dans des broussailles près du cimetière et qu'il fut conduit par les patriotes à l'extrémité du bourg, sur la route du Poiré, dans une prairie qu'on montre encore près de la maison de la Motte. Là, ces monstres pires que des bêtes féroces l'égorgèrent et le coupèrent en morceaux. Quand ils furent partis, quatre hommes accoururent sur le lieu du massacre, ils recueillirent pieusement les membres épars et sanglants de leur saint curé et les transportèrent dans le cimetière.
Cela se passait sous les yeux d'un jeune paroissien de Belleville, Jean Laborde, qui raconta plus tard l'horrible fait dont il avait été témoin[38].
Après M. Servant, on remarque à Belleville le passage d'un prêtre jureur, Jacque-Marie Hilairet, curé de la Merlatière, qui signe un acte à la date du 11 septembre 1791. Cet intrus était à la recherche d'un poste à la hauteur de ses convictions républicaines. Déjà une assemblée électorale des Sables l'avait nommé, le 24 mai 1791, curé constitutionnel de l'Aiguillon-sur-Vie. Mais la situation était trop modeste, il n'avait pas voulu s'en contenter. Sur ces entrefaites, M. Servant ayant cessé l'exercice public de son ministère à Belleville, M. Hilairet crut peut-être qu'il pourrait le remplacer. Quoi qu'il en soit de cette hypothèse vraie ou fausse, M. Hilairet ne fit que passera Belleville ; peut-être même n'y séjourna-t-il point. Quelques mois plus tard, les électeurs du district de Challans donnaient satisfaction à ses désirs en le nommant curé constitutionnel à Saint-Gilles-sur-Vie.
Après la Révolution, il rétracta formellement ses erreurs. Nommé par Mgr Paillou, curé de Bretignolles, sa paroisse natale, il y mourut prêtre habitué le 21 mars 1821. (Voir M. Bourloton, Revue du Bas-Poitou, 1903).
Pendant la Révolution, la paroisse de Belleville et celle de Saligny furent desservies par un vertueux prêtre, nommé M. Audureau. Le premier registre de catholicité qu'il a laissé à Belleville date du 1er janvier 1804 et il le commence ainsi :
"Je soussigné certifie qu'à ma connaissance les années précédentes depuis 1793 inclusivement jusqu'à l'an 1803 aussi inclusivement, temps où l'on n'a pu tenir de registres, à cause des malheureuses circonstances de la guerre de la Vendée, il n'y a pas dans la paroisse de Belleville d'enfants aujourd'hui vivants, nés dans les susdits temps malheureux, qui n'aient été baptisés solennellement par un prêtre approuvé, ni de mariages qui n'aient reçu la bénédiction nuptiale aussi d'un prêtre approuvé.
En foi de quoi j'ai signé à Belleville le 1er janvier 1804.
Audureau, prêtre, desservant de Belleville".
M. Audureau qui desservait Belleville résidait à Saligny. En cette dernière paroisse on trouve un registre contenant les actes de baptêmes, mariages et sépultures faits par lui, à partir du 25 juillet 1796, jusqu'au 12 novembre 1797. Ce registre est pour les deux paroisses.
En même temps que M. Audureau, nous trouvons un autre prêtre qui s'était réfugié à Belleville pendant la Révolution, c'était un M. Goguay, vicaire de Rouans, au pays de Retz, diocèse de Nantes. Il habitait au Recrédy et nous le voyons faire dans la chapelle de cette maison le baptême d'un enfant Maquais, le 24 septembre 1795. A M. Audureau succéda M. Favrou, vers la fin de 1835. Il fut aussi lui desservant de Belleville et de Saligny, et il résida dans cette dernière paroisse.
Le 13 octobre 1842, M. Meunier vint prendre possession de la cure de Belleville à laquelle l'avait nommé Mgr Soyer. Il y habita le premier depuis la Révolution, mais il n'y séjourna pas longtemps, car deux ans plus tard il était remplacé par M. Mathurin Baudry, le prêtre zélé dont nous avons raconté l'histoire, au sujet de la belle église qui lui coûta tant de soucis.
M. Mathurin Baudry fut curé de Belleville pendant trente-trois ans et mourut le 20 décembre 1877. Les grandes œuvres qu'il avait entreprises étaient loin d'être liquidées, et elles devaient encore, pendant longtemps, rester une lourde charge pour ses successeurs. Monseigneur l'évêque ne crut donc mieux faire que d'offrir le poste vacant au frère du vénéré défunt, l'abbé Pierre Baudry.
Celui-ci était alors aumônier des religieuses, aux Brouzils. Il sacrifia par dévouement et par soumission à l'autorité une place de son choix, pour se consacrer, à l'âge de soixante-six ans, au ministère paroissial qu'il n'exerçait plus depuis une dizaine d'années. Les religieuses qui le vénéraient et les habitants des Brouzils, au milieu desquels il vivait depuis quarante ans, le virent partir avec peine ; mais il fit taire la voix des plus chères affections et il vint prendre un poste de labeurs et de fatigues, à l'heure où la plupart auraient demandé à se reposer. Dieu sembla se contenter de sa bonne volonté, car son séjour à Belleville ne fut que d'une année. Cependant, le peu de temps qu'il administra cette paroisse suffit pour lui gagner tous les cœurs. On conservera longtemps à Belleville, comme aux Brouzils, le souvenir des vertus d'amabilité, de douceur de ce prêtre qu'on appelait et qu'on nomme encore "le saint homme".
Il prit possession de la cure de Belleville, le 6 janvier 1878. De temps en temps, il aimait à retourner aux Brouzils. "Il tenait, disait-il, à revoir ses anciens amis". Son cœur leur était si attaché qu'il voulait encore reposer au milieu d'eux, après sa mort. Son désir fut bientôt réalisé. Le 13 janvier 1879, il était allé porter ses vœux à ceux qu'il avait quittés avec tant de regrets. Le lendemain, il était frappé de paralysie, et une quinzaine de jours après, il rendait son âme à Dieu, le 4 février. Son corps repose aujourd'hui dans le cimetière des Brouzils, à côté de celui du R. P. Monnereau, fondateur des religieuses de Mormaison, dont il fut le vicaire et l'ami.
Le 6 février 1879, M. l'abbé Isidore Fillaudeau, vicaire de Belleville, depuis 1874, succéda à ses deux oncles comme curé de la paroisse. Il se dévoua comme ses vénérables prédécesseurs au bien du troupeau qui lui était confié. Tout en construisant un nouveau presbytère, il sut cependant diminuer considérablement les charges qui pesaient sur la fabrique depuis la construction de l'église. C'est lui qui fit placer le maître-autel et ceux de la Sainte Vierge et de Sainte Anne.
Après vingt-cinq ans de ministère et de labeurs dans la paroisse de Belleville, M. l'abbé Fillaudeau a été récompensé de son zèle par sa nomination de curé dans l'excellente paroisse de la Chapelle-Palluau ; c'est là qu'il est encore aujourd'hui.
Le curé actuel de Belleville est M. l'abbé Auguste Morain, précédemment vicaire de Noirmoutier. Il administre la paroisse depuis le mois de novembre 1899.
Prêtres originaires de Belleville
Parmi les familles anciennes qui ont donné des prêtres à l'Eglise dans la paroisse de Belleville, nous n'en avons trouvé que deux, celle des Buor et celle des Gouin, encore la première était-elle autant de Saligny que de Belleville, depuis qu'elle avait acquis la vieille gentilhommière du Recrédy, ce qui expliquerait comment les enfants de cette famille sont indiqués tantôt de Saligny et tantôt de Belleville.
Donnons quelques notes d'abord sur les MM. Buor. Plus loin, nous y ajouterons quelques détails sur cette famille qui a compté et qui compte encore plusieurs branches dans notre pays vendéen.
Auguste-Hyacinthe Buor.
Il naquit en 1749 du mariage de messire Louis Buor, chevalier, seigneur de l'Eraudière, de la Ménardière et du Recrédy. Voici ce que dit à son sujet M. Lallié dans son livre le Diocèse de Nantes pendant la Révolution :
"M. Buor avait été membre du district de Machecoul, curé de Saint-Etienne-de-Corcoué. Le serment restrictif qu'il avait prêté fut déclaré nul et inconstitutionnel (5 mars 1791) ; fut enfermé à Saint-Clément, le 6 juin, et autorisé, le 4 juillet, à en sortir pour aller à l'étranger ; s'embarqua sur le navire May Flower, le 17 juillet 1792 ; résida à Black-Burn, dans le comté de Lancastre, jusqu'au 19 mars 1801".
II revint alors en France et fut nommé curé du Poiré-sur-Vie, où il exerça son ministère de 1803 à 1820. Sa première signature sur les registres de cette paroisse est du 15 janvier 1804 et sa dernière du 10 mai 1820.
Le curé du Poiré avait un frère plus jeune que lui et qui fut aussi prêtre. Il s'appelait :
Pierre-Charles Buor, il était né le30 juin 1752. Comme son frère, il se livra au ministère paroissial et fut curé de la paroisse de Boufféré depuis le 1er janvier 1788 jusqu’au 22 juillet 1792.
"Il ne vit pas, dit M. Baraud[39], approcher sans crainte pour la foi de ses paroissiens les événements révolutionnaires. Par sa naissance et par sa foi, il était oppose aux erreurs nouvelles et refusa de les accepter. Il resta dans sa paroisse jusqu'au 22 juillet 1792, mais comme tant d'autres de ses confrères, il dut se cacher ou fuir."
"Nous ignorons le lieu de sa retraite, mais nous sommes porté à croire qu'il alla rejoindre son frère, embarqué pour l'Angleterre, le 17 juillet 1792. Il dut revenir avec lui en 1801 et fut nommé curé de Montaigu, paroisse de Saint-Jean-Baptiste. Il n'en continua pas moins écrit le docteur Mignen[40], à être le titulaire desservant la paroisse de Boufféré, ce qui entraînait pour lui un surcroît de dépenses dont il demanda au conseil municipal de Montaigu de le dédommager".
Le Conseil prit sa demande en considération et adopta la résolution suivante :
"Le Conseil a été d'avis que M. le Préfet serait supplié d'employer son intervention pour faire ranger au nombre des dépenses de l'Etat le supplément de traitement réclamé par M. le Curé de Montaigu ; que dans la négative le supplément devait être supporté par la commune de Boufféré, et que si les ressources de celle-ci étaient insuffisantes pour y pourvoir, la commune de Montaigu pourrait forcément y contribuer pour la somme de deux cents francs qu'elle ne payerait qu'à titre de secours, et autant que durerait l'union spirituelle des deux communes.
(Délibération du conseil municipal de Montaigu du 3 janvier 1806.)
"Comme suite à cette déclaration, écrit encore M. le docteur Mignen (loc. cit.), le conseil municipal de Montaigu demanda, le 2 mai 1806, la réunion civile de la commune du Montaigu à celle de Boufféré, et inscrivit au budget de 1807 une somme de deux cent cinquante francs pour supplément au traitement de curé.
Ce même jour M. le curé Buor présentait au conseil municipal, dont il était membre, un mémoire des réparations faites dans l'intérieur de la maison curiale, et indispensable pour en rendre l'habitation décente", qui s'élevait à la somme de cent quatre-vingt francs.
M, le Curé, dit la délibération prenant en considération la détresse actuelle de la commune, a déclaré vouloir se restreindre dans sa juste répétition à la somme de cent francs, dont il eût fait un abandon généreux si sa fortune le lui eût permis. Le Conseil, qui reçoit avec sensibilité le sacrifice fait par M. le Curé, lui en témoigne sa reconnaissance".
L'autorité civile et l'autorité religieuse s'entendaient donc merveilleusement à Montaigu. Au reste M. le curé Buor avait toutes les qualités voulues pour s'attirer la sympathie ; c'était un homme de grande tolérance, d'aimable piété, et il a laissé à Montaigu le meilleur souvenir.
A l'occasion il savait aussi faire preuve d'esprit, comme le témoigne le fait suivant.
Lorsque Napoléon Ier traversa la Vendée, il s'arrêta à Montaigu. Les autorités locales durent venir rendre les hommages au souverain. Quand arriva son tour, M. Buor s'excusa de n'avoir point fait sonner les cloches en l'honneur de Sa Majesté : "C'est, dit-il malicieusement, que nous n'en avons point". Napoléon comprit sans peine que le bon curé implorait sa générosité pour le don d'une cloche, il s'exécuta de bonne grâce et en fit la promesse, mais la promesse fut oubliée. Cependant tout ne fut pas perdu, car, le 14 mars 1810, le conseil municipal de Montaigu, ayant rappelé l'engagement impérial, obtint la cloche tant désirée. C'est l'une de celles qui sonnent encore aujourd'hui.
Au mois d'avril 1814, des insurgés royalistes ayant pris la ville de Montaigu, des troubles graves auraient pu s’ensuivre. L'influence de M. Buor arrêta des actes regrettables et rétablit la paix.
M. Buor mourut curé de Montaigu, le 26 mars 1818, à l'âge de soixante-cinq ans.
Dans l'Extrait manuscrit du clergé de la Rochelle, dressé après le Concordat de 1801, il est indiqué comme jouissant d'une pension de deux cent soixante-sept francs. Il avait été titulaire de la chapelle de la Cantinière, dont dépendait la métairie du même nom, en la paroisse de Chauché, qu'il afferma pour trois cents livres, le 20 février 1790. (Docteur Mignen).
M. Jean-Baptiste Gouin vicaire de Saint-André-Goule-d'Oie, en 1750, et curé de Dompierre en 1764. Son nom revient plusieurs fois dans des actes de mariages ou de sépultures. Tout porte à croire qu'il était natif de Belleville.
M. Louis-Henri Gouin.
Ce prêtre était issu d'une des plus notables familles de Belleville, qui comptait parmi ses membres des hommes d'une certaine situation, comme des greffiers, des procureurs, des notaires, des médecins, des avocats et même des licenciés ès-arts. L'état de tanneur qu'exerçait son père n'était pas moins relevé ; un acte de mariage de 1776 range un Jean Gouin, tanneur (peut-être son père ou son grand-père) parmi les notables de l'endroit.
M. Louis-Henri Gouin naquit au Recrédy en 1797 ; il fut ordonné prêtre, le 12 juin 1824, dans l'église des Herbiers, en même temps que le R. P. Baizé, qui devait plus tard laisser une sainte réputation parmi les missionnaires de Chavagnes.
Après son ordination, le jeune prêtre exerça le ministère, comme vicaire, dans la paroisse des Essarts. Au bout de deux ans, il fut nommé curé de Saint-Martin-l'Ars-en-Tiffauges. Mais la prise de possession du nouveau curé ne se fit pas sans difficulté. Le presbytère était alors occupé par un M. Benéteau, qui avait refusé d'accepter le Concordat et qui était dans la contrée le chef des dissidents de la Petite-Eglise. Ce dernier refusait de quitter le presbytère et il était hautement appuyé par le maire et son conseil municipal. Il fallut recourir à la force armée. Le réfractaire se décida enfin à quitter la cure. Il abandonna également l'église, mais après l'avoir dépouillée auparavant de tous les objets nécessaires au culte.
M. Gouin n'était qu'au début de ses épreuves. Il était, il est vrai, curé de Saint-Martin, mais son troupeau ne se composait que de vingt-sept catholiques fidèles ; tout le reste, sur une population de huit cents habitants, était adonné au schisme de la Petite Eglise et lui témoignait l'hostilité la plus ardente. Dès qu'il paraissait en public, on l'insultait et on allait même jusqu'à lui jeter des pierres. On lui causait mille dommages et son jardin était dévasté. Son presbytère était dans un état si lamentable que pendant toute une année il dut, chaque soir, aller demander l'hospitalité à son confrère de Saint-Aubin-des-Ormeaux.
Cependant, au milieu de toutes ces difficultés. M. Gouin ne négligeait pas la conversion des âmes hostiles qui l'entouraient. A toutes les avanies il ne répondait que par le silence et par la bonté, il priait, il se mortifiait (il jeûnait par dévotion tous les vendredis de l'année), il prêchait, exhortait et se montrait charitable pour tous.
En même temps il commença la construction d'une nouvelle église pour remplacer l'ancienne qui était complètement délabrée. La Providence dut bien lui venir en aide, car il débuta dans son entreprise, n'ayant que 80 francs dans sa bourse.
Par son zèle et son dévouement, M. Gouin gagna peu à peu l'estime et l'affection de ses paroissiens. Bientôt, on le vénéra comme un saint ; sa tenue à l'église était un sujet d'édification profonde ; on ne le voyait jamais lever les yeux que par nécessité.
M. Gouin fut curé de Saint-Martin pendant quarante-et-un ans. Sur son lit de mort, il eut la consolation de voir presque tout son troupeau converti et rentré dans le bercail de la véritable Église.
Il mourut en l’année 1868, à l'âge de soixante-et-onze ans. Voici le bel acte de décès que lui rédigea M. Cesbron, curé de Saint-Aubin-des-Ormeaux :
"L'an de Notre-Seigneur mil huit cent soixante-huit, le samedi vingt-et-un novembre, jour de la Présentation de la Sainte Vierge Marie, ont eu lieu dans l'église de Saint-Martin-l'Ars, au milieu d'un concours nombreux de prêtres et de fidèles, les obsèques religieuses du vénéré curé de la dite église, M. Louis-Henri Gouin, décédé, après avoir reçu les sacrements de la sainte Eglise, le jeudi précédent, dix-huit du même mois, âgé de soixante-et-onze ans, à la suite d'une attaque d'apoplexie qui l'avait frappé dans l'exercice même des fonctions du saint Ministère.
Depuis quarante-et-un-ans curé de la paroisse de Saint-Martin, ce vénérable prêtre a pu dire à Dieu, comme autrefois saint Grégoire : "Je laisse tout au plus en mourant autant d'âmes, en cette paroisse, encore égarées par le schisme de la petite-église, que j'y ai trouvé d'âmes fidèles et catholiques, quand mon Evêque m'y a envoyé".
Il y a quarante-et-un ans, en effet, le pasteur, jeune encore alors, se trouvait placé dans une paroisse sans église, et à la tête d'un troupeau qui comptait à peine trente et quelques catholiques sur une population de cinq à six cents âmes. Aujourd'hui, en quittant ce monde pour un autre meilleur, il laisse à Saint-Martin une (église) édifiée à neuf et à peine trente et quelques dissidents qui aient résisté à la mansuétude de son zèle. Telles sont les œuvres qui l'accompagnent devant Dieu, "opera illorum sequuntur illos".
Prêtre pieux et vraiment exemplaire, pasteur zélé, mais toujours doux et bon, il laisse aux prêtres, ses confrères, qui, en grand nombre, précédaient son cercueil, l'exemple de ses douces vertus, et à son troupeau, qui, lui aussi, le suivait dans les larmes, une mémoire vénérée et le souvenir d'une vie sans tache consacrée tout entière à la gloire de Dieu et au salut des âmes".
Parmi les legs faits par M. Gouin dans son testament, nous en trouvons un en faveur de sa paroisse natale. Il charge les héritiers de sa métairie de la Vignochère de lui faire dire "chaque année et à perpétuité deux messes annoncées et chantées dans l'église de Belleville".
Autre prêtre originaire de Belleville : M. l'abbé François Blay, ordonné prêtre en 1891 et actuellement curé de Saint-Michel-en-l'Herm.
Extraits des registres du greffe de la Roche-sur-Yon
Le plus ancien registre remonte à 1738 et donne comme curé de Belleville le nom de :
Mathurin Gibotteau, bachelier en théologie, prieur de Belleville et du Bois-du-Luc.
Voici quelques noms de familles importantes relevés dans les actes :
1738. Baptême d'une fille de Joachim Voyneau, sieur de la Couperie.
Baptême de René Mercier, sieur de la Boinatière. Sépulture d'une dame Reillet, ancêtre sans doute d'un futur maire de Belleville.
1739. Baptême d'une fille de Jean Gouin, sieur de la Bizière.
Baptême d’André Gouin, sieur de la Maumerenière, procureur et notaire en ce lieu.
Sépulture dans l'église de dlle Louise Mercier, épouse de Jean Poizeau.
Mariage de Le François La Touche, avocat au parlement et sénéchal d'Aubigny. Parmi les témoins on remarque Marc-Antoine Chobelet, avocat en la cour et sénéchal de Saint-Gervais.
1741. Mariage de Jacques-André Perotteau, marchand, fils de Mre Jacques Perottean, procureur fiscal de cette baronnie.
Mariage de Jacques Guyard, praticien, et de Marie Faveroul, fille de Pierre Faveroul, greffier de cette baronnie.
1743. Ce même Guyard, au baptême de l'un de ses enfants, est qualifié de sieur de la Sauvagère.
1744. Sépulture de Jean Gouin, sieur de la Biziére.
1745. Mariage de Pierre Heuvelin, sieur de la Grange, huissier royal.
Le 26 mars, dans un baptême, le parrain est Julien Marion, sénéchal du marquisat du Brossay, et la marraine, Ursule-Honorée Morin, dame marquise du Brossay.
1747. Sépulture en l'église de Messire Pierre Baritaud, prêtre, vicaire, soixante-six ans.
Au baptême d'une fille Guyard, sieur de la Sauvagère, le parrain est Mathurin Faveroul, sieur de la Roustière, avocat et procureur de la Roche-sur-Yon.
Baptême de Louis-Alexandre, fils de Messire Louis Buor, chevalier, seigneur de l'Eraudière, et de dame Louise Buor. Parrain, Messire Alexandre Buor, chevalier, seigneur de la Jousselinière. Marraine, Marie-Louise Buor, dame de la Métairie.
1748. Baptême d'une fille de Pierre Arnaud, sieur du Bosset.
1749. Baptême d'une fille de Jacques-René Mercier, me en chirurgie. Parrain, René Mercier, sieur de la Boinatière, également me en chirurgie.
1750. Dans un mariage de Me André Gouin, greffier de la baronnie, avec une demoiselle Faveroul, on remarque comme témoin Jean Gouin qui est qualifié de sous-diacre.
Plusieurs actes de cette année sont signés : J -B. Gouin, prêtre.
1752. Dans un baptême on donne comme parrain Gabriel-Jacques Gouin, sieur de l'Ardouinière.
1753. Sépulture en l'église de Mathurin Esnard, prêtre, âgé de soixante-huit ans, en présence de : Gibotteau, prieur de Belleville, Proust de la Barre, vicaire du Poiré, et Deputiers de la Treille, curé de Saligné.
1756. Sépulture en l'église de dlle Louise Mercier, épouse de Jacques Mercier, chirurgien-juré.
Parrain, Pierre-Aimé Gouin, chirurgien.
1757. Baptême de Jacques-André, fils de Jacques Mercier, chirurgien-juré, et de Marie Deputiers. Parrain, Messire André Duputiers de la Treille, curé de Saligné.
1758. Mariage de Pierre Gouin, sieur de la Roullière, me en chirurgie, et de dlle Marie-Anne Voyneau, fille de Joachim Voyneau, sieur de la Couperie.
1761. Mariage de Me Pierre Basty et de dlle Marie-Anne Gouin. Y assiste comme témoin Messire Jean Gouin, curé de Dompierre.
1763. Mariage de Louis Gouin, greffier de la châtellenie de Saint-Denis, et de Louise Voyneau.
1764. Le 5 janvier, sépulture en l'église de Messire Mathurin Gibotteau, prêtre, prieur de Belleville, soixante-dix-huit ans. Ont signé au registre : Moreau, curé du Poiré ; Blanchard, curé de la Copechagnière ; B. Gouin, curé de Dompierre ; Bouet, curé de la Merlatière ; Deputiers de la Treille, curé de Salligné, desservant Belleville ; L. Malteste, curé de Notre-Dame du Luc ; Chevalier, curé de Beaufou ; Vinet, vicaire de Saint-Denis ; de la Barre, vicaire du Poiré ; Rambert, vicaire du Luc.
Pendant l'intérim, le service est fait par M. Deputiers de la Treille.
Le 26 novembre, première signature de M. Servant, prieur-curé de Belleville.
1768. Mariage de Messire Claude-Joseph Frappier, notaire royal et procureur de la paroisse de Saint-Fulgent, et de Marie-Anne Guyard.
Mariage de Me Philippe-Nicolas Tardy, notaire et procureur au comté de Palluau, et dlle Hélène Rose-Jacquette Esnard, fille de feu Me Henri Esnard, vivant notaire de la chastellenie de Lieu-Dieu, et de dlle Jeanne de Boicourbeau, originaire de Mouilleron-le-Captif.
A un baptême d'un fils de Pierre Gouin de la Roullière, chirurgien de l'amirauté de Nantes, on trouve comme parrain Gabriel-Jacques Gouin, de l’Ardouinière, bachelier ès-arts, licencié de la Faculté de Poitiers, et docteur en médecine de l'Université de Montpellier.
1769. Au baptême d'un autre de ses enfants, le même Pierre Gouin est qualifié de notable bourgeois.
1771. Sépulture en l'église de Me Jacques-René Mercier, chirurgien en ce bourg.
1772. Sépulture de Me Pierre-Clément Fayau, avocat en parlement, de la principauté de la Roche-sur-Yon.
1773. Mariage de Me Jacques Gabriel Arnaud, chirurgien de ce bourg, et de Marie-Louise-Jeanne Mercier. Cette dernière a pour curateur Joseph-Esprit-Aimé Gouin, avocat en parlement, docteur en droit civil et canonique.
1774. Sépulture en l'église de dlle Hélène-Rose-Jaquette Esnard.
Mariage de noble maître Gabriel-Jacques Gouin, de l'Ardouinière licencié ès-arts de la Faculté de Poitiers et docteur en médecine de l'Université de Montpellier, et de dlle Louise Guyard de la Jauffrionière, fille de feu Jacques Guyard de la Sauvagère, vivant notaire et greffier de Saint-Denis-la-Chevasse. A ce mariage assiste Messire Joseph Guyard, vicaire aux Sables-d'Olonne.
1775. Mariage de Me Noël-Marc Trastour, tanneur, et de dlle Marie-Anne Gouin, fille de Me Jean Gouin, tanneur. Parmi les témoins on remarque Jacques-Charles Trastour, notaire et greffier du marquisat de la Guerche, à Paimbœuf, et M. Joseph Trastour, chirurgien, aux Essarts.
1776. Mariage de noble homme Joseph-Esprit-Aimé Gouin, avocat en parlement, docteur en droit civil et canonique, sénéchal de la baronnie de Poiroux, et de dlle Marie-Louise-Sophie Faveroul de l'Ambouinière, fille de Pierre Faveroul, sieur de la Maumerenière, notaire royal de la principauté-pairie de la Roche-sur-Yon.
1779. Messire Louis-Pierre-François Jaillard de la Marronnière est parrain au baptême d'un fils de Philippe Tardy, procureur fiscal. La marraine est Mlle Françoise Ferron de la Ferronnaye, veuve douairière de la Marronnière.
1781. Mariage de Me Jacques André Mercier, notaire et greffier de la baronnie de ce lieu, et de Marie-Anne Peltier, de la paroisse du Poiré.
1782. Mariage de noble homme Philippe Tireau de l'Emarière, avocat et de dlle Anne-Louise Faveroul.
1786 Mariage de Me Charles-Joseph Brethomeau, chirurgien-juré, et de Anne-Rose Gouin. Assistent comme témoins : Jean-Sébastien Brethomeau, licencié ès-lois, et Jean-Charles Brethomeau, bourgeois.
1788. Mariage de Me Pierre Thoumazeau, notaire, et dlle Marie Gouin. Mariage de Me Pierre-Louis Gouin, sieur de la Godière, et dlle Marie-Anne Frappier, fille de Claude-Joseph Frappier, sieur de la Rigournière, notaire apostolique et procureur fiscal de Saint-Fulgent. Le mariage est célébré par Me J. Guyard, prêtre, aumônier des Religieuses des Sables-d'Olonne.
1791. Pierre Thoumazeau est greffier de la municipalité de Belleville.
--------------------
ANNEXES
Notes supplémentaires sur la seigneurie de Belleville
Acquisition de la Baronnie de Belleville (18 mars 1648).
La pièce originale de cette vente se trouve à la Bibliothèque de Nantes, collection Dugast-Matifeux carton : minutes de notaires. Comme elle est fort longue, nous ne donnerons que quelques extraits. La copie de cette pièce nous a été procurée par M. le docteur Mignen, de Montaigu.
"Sachent tous qu'en la cour du Scel royal aux contracz à Fontenay-le-Comte a esté présente et personnellement establie en droict haulte et puissante Dame Louise de la Marck, femme, espouze et procuratrice généralle et spécialle de Messire Maximilian Eschailart, chevalier, seigneur, marquis de la Boullaye, conseiller du Roy en ses conseils, Gouverneur pour sa Majesté des villes et chasteau de Fontenay-le-Comte, baron des baronnies de Mareuil et la Vieille-Tour, Chandolant, Bors, Arcingeay et autres lieux, sellon qu'elle a faict a paroir par sa procuration du vingt-sept novembre mil six cent quarante-sept, signé Maximillian Eschallart seigneur de la Boulaye, Morel et Ogier notaires au Chastellet de Paris, demeurée attachée à ces présentes pour y avoir recours quand besoin sera et paraffée des parties, laquelle Dame de la Marck bien et deuement authorizée dud. seigneur Marquis de la Boulaye son espoux par lad. procuration tant en son nom que comme procuratrice généralle et spécialle d'icelluy seigneur Marquis de la Boulaye, et en chascun d'iceux noms solidaires chascun d'eulx seul et un pour le tout soubz les renonciations aux bénéfices de division d'ordre et discution qui lui ont esté donnez à entendre estre tels que plusieurs obligés ensemble ne sont tenus que pour leurs parts et portions s'ils n'ont par exprès renoncé ausdits bénéfices qu'icelle dame a dit bien entendre et sçavoir, a vendu, ceddé, délaissé et transporté, et par ces présentes vend, cedde, délaisse et transporte à Messire Jullien Aymon, chevalier seigneur des forges Petittières, chastelin de Beaulieu et autres lieux, présent stipulant et acceptant pour lui et les siens à perpétuité, c'est assavoir l'hostel, chasteau, bourg, baronnie, terre et seigneurie de Belleville, dommaine, prez, terres et autres choses en dépendans avec touttes et chascunes les apartenances et dépendances quelconques, de bois taillis, garennes, moullins, terrages, cens, rentes, biaus, courvées rachaptz, soulz rachaptz, droicz et façons d'hommages et générallement tout ce qui en peut despendre et apartenir, sans aucune chose en réserver ny retenir, sittués es parroisses de Belleville, le Poiré, Beaufou, le Luc et autres paroisses cîrconvoisines, lad. baronnie tenue et mouvante de la principauté de la Roche-sur-Yon, à hommage lige sans ligence et à devoir de rachaptz quand le cas eschoit, et d'autres seigneurs sy aucun sont pour par led, seigneur des forges Petittières jouir, uzer et disposer de lad. terre et baronnie de Belleville, ainsy qu'en a cy devant jouy et jouist encore de présent led. seigneur marquis de la Boulaye ses fermiers receveurs et agens...
Faites lesdictes ventes cessions et transports pour et moiennant la somme de soixante-trois mil cinq cenz livres tournois de laquelle ledit seigneur des forges a promis, s'est obligé et sera tenu de bailler et paier dans le jour et feste de sainct Jean Baptiste prochaine en la ville de Paris.
[…………………………………………………………………………………………………….]
Faict et passé aud. Fontenay en l'hostel de lad. dame de la Marck le dix-huitiesme de mars après midy mil six cent quarante-huict."
La pièce ci-dessus est signée : Louise de la Mark ; Julien Aymon : Péraut et Bonnet, notaires.
Notes des Archives historiques du Poitou
Au tome XVII, p. 334, on donne comme tenanciers des terres de Belleville et autres lieux, pour l'année 1344, Catherine et Robert Gaudin.
Dans le même volume on cite comme capitaines des terres de Belleville :
1354. Miles de Thouard, seigneur de Pouzauges.
De 1345 à 1349. Galois de la Hense, "capitaine au vicomte de Thouars et gouverneur de Belleville". On trouve aussi vers la même époque : Monseigneur Foulques de Laval, seigneur de Retz et mari de Jeanne Chabot, dite de Retz, et fille de Gérard III Chabot et de Marie de Parthenay.
Id. loc. cit. p. 179. Il est dit au sujet des revenus de la Châtellenie : "Jehan de la Mastaerie compta finallement avec ledit Gilier des revenus de la chastellenie de Belleville, qu'il avait reçeu une année, et paia au dit Gilier douze escus d'or pour avoir lettre de son scel sur le dit compte, ne autrement ne li vouloit la dite lettre sceller ne bailler".
Assignation sur la recette générale du Poitou d'une rente annuelle de quatre cents livres tournois, précédemment octroyés à Savary de Vivonne, seigneur de Thors, et assignée d'abord sur les revenus de la châtellenie de Chàteaumur et la terre de Belleville, puis sur ceux de Saint-Maixent, par Jean, roi de France (Paris, 6 juin 1356). − (Recueil de documents concernant le Poitou, contenus dans les registres de la chancellerie de France J. J. 84, n° 594, fol. 304). Publié dans les Archives du Poitou, XVII, p. 233.
Vers 1344, Robert James, procureur du Roi, substitut de Jehan le Breton, est cité comme "procureur du roy en la terre de Belleville".
Note. Ce Robert James figure aussi parmi les tenanciers de la chapellenie de Vendrennes, dans le registre des aveux rendus au duc de Normandie, en février 1344 (Archives du Poitou, t. XVII, p. 183).
1344. Maurice Raclet est cité comme possédant diverses maisons, terres, cens et rentes aux environs de Chaillé et plus encore à la Joannière et à la Billotière, dans la châtellenie de Belleville (aveux de mars 1344. Arch. nat. p. 594, fol. 6vo et 61) − Indiqué dans les Arch. du Poitou, t. XVII, p. 83, note.
Extraits de l'Histoire généalogique de dom Anselme
T. I, 115. − Fille naturelle du roy Charles VI, Marguerite de Valois, damoiselle de Belleville, née d'Odette de Champdivers, légitimée par lettres du roy Charles VII, données à Montrichard au mois de janvier 1427, et mariée à Jean de Harpedene III, seigneur de Belleville, en Poitou et de Montagu, par don du roy... Vingt mille moutons d'or, en 1458... Les seigneurs de Belleville, descendus de ce mariage sont tués à la quatrième génération en la personne de Claude, seigneur de Belleville, tué à la bataille de Coutras le 20 octobre 1587, sans laisser de postérité. Voyez MM. de Sainte-Marthe.
T. 1, 150. − Enfants naturels d'Henry IV, roy... III [enfant) Henry, nommé premièrement Gaston, duc de Verneuil, pair de France... né en octobre 1601, de Catherine, Henriette de Balsac marquise de Verneuil, fille de Fr. de Balsac, seigneur d’Entragues et de sa 2e femme, Marie Touchet, dame de Belleville, ancienne maîtresse de Charles IX.
T. 1, 202 Charles, bâtard de Valois, duc d’Angoulème, fils naturel de Charles IX et de Marie Touchet, dame de Belleville.
T. II, p. 439. − François de Balsac..., 2e femme, Marie Touchet, dame de Belleville.
T. III, p. 80. − Hugues XI de Lezignem, le Brun, comte de la Marche et d'Angoulème... 3° (enfants) Isabeau de Lezignem, dite de la Marche, dame de Belleville et de Beauvoir-sur-Mer. Elle donna, le mardi après le dimanche où l'on chante Jubilate de l'an 1303, à Isabeau de la Marche, sa nièce, religieuse à Fontevrault, le moulin de la Leyte (?) pour en jouir sa vie durant, excepté toute justice haute et basse ; et fit une autre donation, le vendredi après la Nativité de la Vierge 1304, à la prieure de la Lande de Beauchesne, du même ordre.
T. III, p. 735. − Thibaud de Luxembourg, seigneur de Fiesmes... femme, Philippe de Melun... 6° (enfants) Guillemette de Luxembourg, mariée, 1° en 1463, à Amé de Sarrebruche, comte de Roucy, et 2° à Gilles, seigneur de Belleville et de Montaigu.
T. VI, p. 201. − Olivier IV, sire de Clisson, comte de Porhoet, seigneur de Belleville, de la Garnache, de Blain, d'Yerrick, et de Beauvoir-sur-Mer, connétable.
T. VI, p. 510. − Jacques Hurault, seigneur du Marais... femme, Marie Herbelot... 6e (enfants) Jacqueline, épouse Anne de l'Hôpital, seigneur de Saint-Mesme et de Belleville, vicomte de Vaux, bailly de Dourdan.
T. VI, p. 731. − Louis de Forest, seigneur de Beaujeu et de Dombes, fit hommage à Robert II, duc de Bourgogne de la seigneurie de Belleville et des châteaux de Lay et de Chezay, au mois de juillet 1277.
Extraicts des tiltres originaux de l'abbaye de Fontevrault... 1699,
par Gaignières (B. N. Latin 5480)
1°. − Sachent tous que nous Morice de Beleville, seigneur de Monteigu et de la Gasnaiche... avons doné à le prieur et le couvent de la lande de Biouchaigne de l'ordre de font Evrauld... les mesons... assises en la ville de Biavoir… avons doné ces présentes scellées de notre gran scya... le jour dau iudi enprès loyteve des apostres S. Père et S. Pou 1304. − Scellé un cavalier à cheval aux armes de Belleville (p. 32). Gaignières annonce qu'il donne un dessin de ces armes ; mais la place est vide...
2°. − Le même donne "d'autres mesons... en la Ville de Beauvoyer... le samedi avent l'annoncn de N. D. Vierge de Mars 1302 (p. 33).
3°. − Mauricius de Bellavilla dnus de Gasnapia et de Quemiquers salutem (C'est une transaction avec le prieur de Brandello de Maresio de Piru)... die sabb. post festu Petri et Pauli 1259 (p. 33).
4°. − A tozceaux... Maurice de Belleville, sire de la Garnaiche et de Quemiquers (accorde) à tote la gent (de ces deux terres) qu'ils pouchent prendre cers, biches, etc. (p. 33).
5°. − Mauricius de Bellevilla dus Gasnapée et Quemiquerii (fait une transaction avec) Agnetem priorissam de Landa monialium Pulcre quercus et Petrum de Muntazais priorem ejusdem loci... die merc. post jestinii Peritecostes m. junii anno Dni 1253 (p. 33 et 34).
6°. − A tous... Olivier sgnour de Clicon et de Belleville, chr. et Johanne dame de Belleville, sa fame, caifenons avoir fait eschange o relig. persones sœur Aliz Barbe priouresse de la Lande de Beau Chaigne... Ce fut fait... à ceux presens, frère Aymeri Fauques, abbé de l'Isle-Dieu, frère Pierre Fauques, nepveu dud. Abbé, Guiheneux de Fahi, samedi feste S. Ciprian 1341 (p. 37).
Extrait des Archives historiques de la Saintonge et de l'Aunis
(t. XXII, p. 267)
La pièce suivante a été établie pour le seigneur de Belleville, comme on le verra plus loin :
1587. André de Léonard, prieur d'Olonne, donne à bail tout ce que son prieuré possédait à Mon. (Copie vidimée en 1390 sur parchemin scellé d’un sceau en cire jaune).
"Sachent touz que, ge, Estienne Saynet, prestre juré passeur et notaire en la court du scel estably auz contrais en la châtellenie du chastea d'Olonne, pour très noble et puissant seigneur monseigneur le vicomte de Thouars, conte de Benaon et seigneur de Tallemond, ay veheu et regardé et lehu de mot à mot unes lettres non viciées, non maumyssez, non concellez, ne en aucune partie d'icellez corrompues, desquelles la teneur s'ensuit :
A tous ceux qui ces présentes lettres verront et orront, frère André de Léonart, prieur et en nom des prieurs du prieuré de Vendosme d'Olonne, salut en Dieu Notre Seigneur.
Sachent tous, présents et avenir, que ledit prieur, tant pour moy que pour mes successeurs audit prieuré, avent toute œuvre, regardent et considèrent le grand profit dudit prieuré, etc.... cognoit et confesse avoir baillé et afermé... à Katerine Audoarde de Guerpin, femme feu Perrot Gabin et Nicolas Gabin, fils dudit deffunt, une maison rousechin ob son fons, cayreux, cortil, jart, ruages et appartenances quelconques, assise ladite maison par devant ledit cayreux. Item et tous et chacuns les héritages et domaines appartenant à ladite maison et cayrue, soient prés, terres arables et non arables…, sise dans le fief de Salertayne, en la paroisse de Saint-Jehean (Saint-Jean-de-Monts), payés à moi prieur ou à qui cause aura, on chacune foire de Saint-Michel archange, en cymetère de l’église de Notre-Dame de Rié, heure de tierce...
Ces présentes lettres scellées à ma requeste, du scel eslabli auz contraiz à la Garnache, pour très noble et puissant seigneur monseigneur de Clisson et de Belleville. Ce fut fait et donné, jugé, passé soubz le juge de la court dudit lieu. Furent présens à ce appeliez : Monsieur Nicolas Grillon, prestre, frère Janvier Grillon, Estienne Arnaud, clert, et Jehan Grondin, le dimanche avant feste de l'Annonciation, Notre Dame Vierge, l'an mil trois cent quatre-vingt et sept, ainsi signé : G. Proust. Donné pour copie ou vidisse soulz ledit scel establi en ladite chastellenie, le premier jour de juin, l'an mil trois cent quatre-vingt et dix.
Est. Saynet".
Faits divers recueillis passim depuis le XVIe siècle jusqu'à la Révolution
En 1562, une amnistie avait été accordée aux protestants, dans le but de les amener à déposer les armes. Un certain nombre s'empressèrent d'en profiter. Mais leurs coreligionnaires, mécontents de cette soumission qu'ils considéraient comme une lâcheté, leur donnèrent alors le nom de Quillebedouins. Parmi ceux à qui on appliquait ce sobriquet se trouvait le poitevin François de Belleville qui, après avoir suivi le prince de Condé, se retira dans ses foyers. Comme il avait une réputation d'homme savant et habile, la culture des lettres devait lui sourire plus que la gloire militaire. (Voir Lièvre : Hist. des Protestants, t. 1, p. 129).
Ce savant avait un frère qui, au contraire, prisait bien davantage les champs de bataille, il devint même fameux parmi les chefs protestants sous le nom de Languillier. Voici la notice que lui consacre le pasteur Lièvre dans l'ouvrage précité (t. III, p. 121) :
"Harpedane (Jules), seigneur de Languillier, d'une famille anglaise établie dans l'Ouest depuis le XIVe siècle, embrassa chaudement le parti du prince de Condé, auquel il rendit plus d'un service dans les premières guerres. Il tomba entre les mains des catholiques à Jarnac ; mais rendu bientôt à la liberté, il continua à servir sous La Noue. Au mois de juillet 1570, le Conseil de la reine de Navarre lui confia le gouvernement de Fontenay et des autres parties du Poitou soumises aux princes. Deux ans après, la Saint Barthélémy l'obligea à chercher un asile derrière les murailles de la Rochelle. Charles IX lui ayant ordonné d'en sortir sous peine d'être traité comme criminel de lèse-majesté, Languillier lui répondit par une lettre pleine de noblesse et de fermeté, où il ne cachait ni son attachement à la religion réformée ni la défiance que lui inspirait la parole du roi. Les Rochelais lui témoignèrent leur confiance en lui donnant une place au conseil, et il fut un de ceux que le corps de ville désigna pour écouter les propositions que le baron du Vigean, son cousin, vint bientôt apporter de la part du gouvernement. Il réclama énergiquement contre l'attentat commis sur la personne du négociateur de la cour par des gens qui, moins sincèrement attachés à leur parti, ne craignaient pas de le souiller, devant l'abandonner ensuite. L'année suivante, les Rochelais l'envoyèrent en Angleterre pour hâter le départ des secours promis par Elisabeth ; mais la reine, circonvenue par l'ambassadeur de Charles IX, se montra sourde à toutes leurs instances. Une mauvaise flotte, commandée par Montgommery, et équipée avec les seules ressources des protestants réfugiés en Angleterre, partit cependant avec quelques vivres, mais ne réussit point à forcer la ligne ennemie. Rebuté par un premier échec, Montgommery s'éloigna sans écouter Languillier qui, malgré tous les obstacles, s'engageait à faire entrer un convoi dans le port. Renvové en Angleterre, notre Poitevin y fut encore plus mal accueilli. En 1577, il fut un des signataires du traité de Bergerac. On ignore l'époque de sa mort".
1621. A cette époque, le sénéchal de Belleville se nommait Eusèbe Remaud. Il assiste comme parrain au baptême d'un fils de Jean Remaud, notaire du comté des Olonnes.
1682. Naissance à la Flotterie, le 1er juillet, de Louis-René Barbarin, chevalier, seigneur du Grand-Plessis. Son fils Alexandre se maria, le 26 juin 1648, à dlle Gabrielle Pierres, fille de François Pierres, chevalier, seigneur de Pont-de-Vie, suivant contrat passé au Recrédy et reçu par Gouin et Danyau, notaires de la baronnie de Belleville.
1688. Le 10 juin, mariage de haut et puissant Louis Aymon, baron de Belleville, seigneur de Beaulieu, des Forges et du Pin-Massé, avec dame Jacquette Massé, fille de noble homme André Massé, sieur des Longeais, conseiller du roi et contrôleur ordinaire des guerres.
1710. Louis Jaillard, chevalier, seigneur de la Grange-Marronnière, épouse Marie-Louise Aymon, fille de Louis Aymon, écuyer, baron de Belleville.
1745. Mariage de Louis-François Jaillard, chevalier, seigneur de la Marronnière et de Belleville avec Françoise-Jeanne-Antoinette-Roberte Ferron de la Feronnavs. Cette dernière appartenait à une vieille famille illustre dans l'histoire ; un de ses ancêtres, prenait part à la 7e croisade, en 1249 ; deux autres étaient évêques, l'un de Léon en 1471, l'autre de Saint-Brieuc, en 1769. Pour ce qui est des Jaillard de la Marronnière, voir les notes très complètes données plus haut dans la chronique d'Aizenay.
1747. Nous trouvons à l'Eraudière une famille célèbre en Bas-Poitou et qui habite en cet endroit depuis quelques années au moins : c'est la famille Buor. Voici quelques notes données à son sujet par MM. Beauchet-Filleau :
Buor (Alexandre-Louis), chevalier, seigneur de la Jousselinière, l'Eraudière, épousa le 23 février 1705, Madeleine-Louise Gazeau de la Boissière. De mariage naquirent plusieurs enfants dont l'un fut le suivant :
Buor (Louis), chevalier, seigneur de l'Eraudière, de la Ménardière et du Recrédy. Il épousa Marie-Louise Buor, sa cousine, fille de François-André, chevalier, seigneur de la Chanollière et de Marie-Françoise Marchand. Le 13 février 1748, les deux époux acquirent de Marie-Louise Fayau, veuve de François-Aymé Pierres, écuyer, seigneur de Pont-de-Vie, la maison du Recrédy et celle de Ménardière en la paroisse de Saligny. Ils eurent pour enfants : 1° Louis, qui suit ; 2° Pierre-Charles, curé de Montaigu, décède le 26 mars 1818, âgé de soixante-cinq ans ; 3° Auguste-Hyacinthe, curé du Poiré-sur-Vie de 1803 à 1820.
(Louis-Alexandre) seigneur de la Ménardière et du Recrédy, fut baptisé en 1747 par M. Gibotteau, curé de Belleville. Il épousa le 8 juin 1779, Armande de Suzannet, fille de N…, chevalier, seigneur de la Chardière, capitaine de vaisseau, chevalier de St-Louis, dont il eut : 1° Auguste-Armand, qui suit ; 2° Marie-Stéphanie, née en 1780, mariée : 1° à Augustin Buor, écuyer, seigneur du Rozay, son cousin ; 2° en 1804, à Benjamin de Tinguy du Pouet de la Clavelière.
Buor de Puissec (Auguste-Armand) né le 27 mars 1784, servit dans les gardes d'honneur sous le premier Empire. Il épousa, le 22 novembre 1824, Aimée de Sapinaud, fille du comte de Sapinaud, lieutenant-général, dont il eut deux fils : Charles et Louis.
1786. Extrait d'une déclaration roturière faite le 28 mai au commandeur de Lande-Blanche :
"Devant le notaire de la baronnie de Palluau, soussigné, commissaire nommé pour la réformation du terrier de la Châtellenie et Commanderie de Lande-Blanche, a comparu le sieur Jean-Charles-Philippe Ordonneau, bourgeois, demeurant au bourg du Poiré-sous-la-Roche-sur-Yon, faisant tant pour lui que pour ses frères et sœurs mineurs avec lesquels il possède par indivis, lequel, pour satisfaire à ce qui est prescrit, a reconnu et déclare posséder roturièrement de Messire René-Anne-Hippolyte de Brilhac, chevalier de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, commandeur des commanderies de Coudrie, les Habites, Lande-Blanche, Bourgneuf et les Biais-en-Retz, à cause de ladite commanderie de Lande-Blanche, au dit bourg du Poiré, savoir est : une maison [...]
Sur laquelle dite maison, le comparant a reconnu devoir au seigneur commandeur deux sols de cens et devoir noble féodal emportant fief et juridiction payables et redevables à la recette dudit lieu de Lande-Blanche, chaque année, au terme de la Toussaint, lequel est tenu, en outre, d'avoir sur sa maison une croix de fer pour marquer la directe seigneurie de la dite commanderie".
Notes supplémentaires sur Charette à Belleville
Dans plusieurs endroits de son beau livre de la Vendée Militaire, M. le Chanoine Prunier raconte divers événements arrivés à Charette dans son camp de Belleville. Comme ces faits ont leur place marquée dans cette chronique nous allons en donner un résumé succinct.
On sait avec quelle ardeur les chefs républicains désiraient la disparition de Charette qu'ils ne pouvaient jamais réduire à l'impuissance. Tous les moyens leur semblaient bons. Ils essayèrent d'abord de corrompre ses soldats. Le 3 septembre 1794 ils font passer dans l'armée vendéenne des proclamations où l'on promettait la paix aux soldats s'ils voulaient livrer leurs chefs. A cette nouvelle Charette déclare à ses compagnons d'armes qu'il est prêt à livrer sa vie si le bonheur de la Vendée en dépend. Mais les vaillants soldats ne l'entendent pas ainsi ; une immense rumeur d'indignation éclate et dans tout le quartier général de Belleville retentit ce cri de protestation : "Vive M. de Charette ! Qu'il nous conduise aux Bleus : ils verront bien si nous sommes des Judas et des traîtres !"
Charette profite de leur généreux élan pour les conduire au combat et pour leur faire remporter deux magnifiques victoires, l'une à la Roulière près de Nantes, où il détruit un camp qui était l'arsenal des forces républicaines dans la région et leur grenier d'abondance, et l'autre à Fréligné, dans la paroisse de Falleron, où les Bleus se défendirent avec tant d'acharnement que sur deux mille qu'ils étaient, douze cents d'entre eux restèrent sur le terrain.
Ces deux victoires épouvantèrent la Convention et peu après, dans son camp de Belleville, Charette vit arriver les messagers que lui envovait la République humiliée et vaincue et qui lui apportaient de sérieuses propositions de paix.
Les négociations furent entamées à diverses reprises. Un jour, c'était le 6 janvier 1795, deux parlementaires républicains arrivèrent au quartier général de Belleville pour présenter les stipulations consenties par la Convention. Il y avait au camp, ce jour-là, une joyeuse effervescence, et un repas de gala réunissait les Vendéens autour du gâteau des Rois. Les messagers patriotes demandèrent à s'associer à la fête et de part et d'autre on fit assaut de galanterie.
Les ambassadeurs de la République prirent place à table à côté des Vendéens et pendant tout le repas unirent leurs vœux et leurs voix aux acclamations bruyantes et aux chansons maraîchines des Paydretz. Bientôt à mesure que les rasades devinrent plus abondantes, l'enthousiasme grandit et devint général. A la fin du repas, Bleus et Blancs buvaient à la santé de Louis XVIII et répétaient d'un même cri : Vive le Roi !
Ces pourparlers aboutirent quelques, jours après au traité de la Jaunaie qui ne fut qu'une duperie pour la Vendée. Quelques mois plus tard on cherchait à arrêter tous les chefs royalistes. Ayant réussi sur la personne d'Allard, on fit la même tentative sur celle de Charette.
"Le 24 juin, dit M. Prunier, un escadron républicain, sous les ordre- du capitaine Marion, et guidé par un traître, sortait du camp des Essarts se présentait devant Charette à Belleville, et lui signifiait au nom de la République de rendre les armes et de déposer sa cocarde.
Le chef poitevin, informé du complot, était sur ses gardes.
"C'est vous, capitaine, répondit-il, qui allez déposer votre cocarde et déposer vos armes".
Et au même instant, il fait cerner et désarmer les Bleus et déclare prisonniers de guerre.
L’escadron était presqu’uniquement composé d’officiers de tout grade. Ils avaient endossé l’uniforme de simples soldats pour partager la gloire de cet audacieux coup de main, qui allait, croyaient-ils, trancher le nœud gordien de la guerre vendéenne, en enlevant le chef terrible et indompté du Bas-Poitou.
Devant ces lâches patriotes, Charette fut superbe de dignité et de grandeur d'âme. Jetant un regard de pitié sur ces officiers républicains qui n'avaient pas rougi de déshonorer leurs épaulettes par un pareil guet-apens :
"Vous vouliez m'assassiner, leur dit-il, eh bien, vous le voyez, c'est votre vie qui est entre mes mains".
Quinze cavaliers se détachent alors de l'escadron pour conjurer la vengeance du général vendéen et lui révèlent tous les détails du complot, en affirmant qu'ils n'y avaient pas trempé. Charette leur fit grâce et leur permit d'entrer dans son armée. Se tournant ensuite vers le capitaine Marion :
"Vous êtes libre, Monsieur, lui dit-il ; retournez vers vos chefs, qui savent si mal employer la bravoure des soldats français. Je retiens votre escadron en otage ; je ne ferai fusiller que le traître qui vous a servi de guide. Allez".
Quelques jours après ce dramatique incident d'autres personnages arrivaient à Belleville. Ils venaient de Londres pour confirmer à Charette que le comte d'Artois allait enfin venir sur la terre vendéenne Ces envoyés étaient : M. Jean Brumauld de Beauregard, grand vicaire de Mgr de Mercy, l'abbé de Gruchy, Kersabiec, Bascher et Prudent de la Bassetière.
Voici comment M. de Beauregard raconte dans ses Mémoires son entrevue avec le chef de la Vendée :
"Nous arrivâmes à Belleville, dit-il, le 11 juillet, à sept heures du matin. Nous nous rendîmes dans une cour immense, à une extrémité de laquelle se trouvait une maisonnette toute neuve, mais fort modeste : c’était l'humble logement du chef vendéen. Mais personne ne se présentait pour nous introduire.
Nous nous plaçâmes sur une éminence, et déposant nos havresacs à terre, à nos pieds, nous attendîmes environ un quart d’heure, pendant lequel nous fûmes l'objet de la curiosité de tous ceux qui venaient à passer.
Enfin vint à moi un jeune homme d'une jolie figure, vêtu en paysan, qui me demande qui nous étions. Je me nommai et je lui dis que j'avais des dépêches à remettre au général ; que je le priais de faire cesser la situation pénible dans laquelle nous nous trouvions, étant ainsi exposés aux regards de cette petite armée.
Il me promit de se hâter, et revint en effet pour nous conduire à son chef, car il était aide de camp et très estimé de Charette.
Celui-ci était occupé à se faire la barbe.
Je fus très ému en l'approchant. Je l'embrassai et je lui dis : "Général, le sentiment que j'éprouve en ce moment est au-dessus de ce que je puis vous dire et j'aurais peine à l'exprimer".
Il fut ému lui-même, embrassa aussi mes compagnons, reconnut Kersabiec, son ancien camarade, et je lui nommai les autres. Je lui remis mes dépêches. Il me demanda si j'en avais pour Stofflet et l'abbé Bernier ; à quoi je répondis que oui".
Cette réponse de M. de Beauregard inquiéta Charette, car il y avait entre lui et Stofflet une division profonde. M. de Beauregard nous apprend que le chef de la Basse-Vendée, faisant taire alors son ressentiment personnel, fit tout ce qu’il put pour amener une réconciliation entre lui et le général de l'armée angevine ; mais ce dernier demeura intraitable, et cette division causa peu après la perte de l'un et de l'autre.
"Je causai longtemps avec le général, continue M. de Beauregard. Il me proposa de me placer à son quartier général avec son aumônier.
Je refusai. Je veux maintenant prêcher l'Evangile, lui répondis-je, sans prendre part aux affaires publiques. J'ai des ordonnances de mon évêque, je les ferai connaitre au clergé et j’administrerai le diocèse avec l'abbé de Charette de la Colinière, votre cousin. Il est à deux lieux, d'ici. J'ai de bonnes jambes, je vais aller le voir.
S'il ne peut me recevoir chez lui, je chercherai pour m'y établir la paroisse où je serai le plus utile, et je viendrai quelquefois prendre vos ordres.
Tout cela fut agréé. Charette sortit avec moi, me prit sous le bras et nous fîmes les cent pas devant l'armée.
Enfin, après avoir mangé un peu de pain, je pris un homme pour me conduire chez l'abbé de la Colinière qui habitait alors au château de l'Eraudière, chez Mme de Buor".
M. de Beauregard revint voir le général à Belleville, quelque temps après, et, à cette occasion, il nous raconte de quelle manière vivait cet homme qui faisait trembler la République. Il était loin du luxe et du confortable.
"En revenant de Saint-Laurent, je passai chez le général Charette et je dînai avec lui. Nous étions assis sur des bancs de bois. Le repas, très pauvrement servi, se composait de deux plats. Seulement, le chef vendéen avait reçu une bouteille de vin de Bordeaux que nous bûmes dans de petits pots de terre à la santé du roi. Nous étions dix personnes à ce festin".
A ce moment, ce général, réduit presque à la misère, avait une réputation qui avait pénétré jusqu'au fond de la Pologne, et l'un des plus grands hommes de guerre de son siècle, Sowarow, lui écrivait cette lettre par laquelle nous terminerons cette chronique :
"Héros de la Vendée, illustre défenseur de la foi de tes pères et du tronc de tes rois, salut.
Que le Dieu des armées veille à jamais sur toi ; qu'il guide ton bras à travers les bataillons de tes nombreux ennemis qui, marqués du doigt de ce Dieu vengeur, tomberont dispersés comme la feuille qu’un vent du Nord a frappée.
Et vous, immortels Vendéens, fidèles conservateurs de l’honneur des Français, dignes compagnons d’armes d’un héros, guidés par lui, relevez le temple du Seigneur et le trône de vos rois.
Bravo, Charette, honneur des chevaliers français, l'univers est plein de ton nom, l'Europe étonnée te contemple, et moi je t'admire et te félicite. Dieu te choisit, comme autrefois David, pour punir le Philistin.
Adore ses secrets ; vole, attaque, frappe, et la victoire suivra tes pas.
Tels sont les vœux d'un soldat qui, blanchi au champ d'honneur, vit constamment la victoire couronner la confiance qu'il avait placée dans le Dieu des combats.
Gloire à lui, car il est la source de toute gloire.
Gloire à toi, car il te chérit.
Ce 1er octobre 1795, à Varsovie. Sowarow"
--------------------
Notes et références
[1] L'art de terre chez les Poitevins, page 47.
[2] Aux Archives de la Vienne (H3, liasse 398) on trouve le document suivant, dans lequel Guy de Tulle, précepteur des Templiers d'Aquitaine reçoit Guillaume Asselin comme homme du Temple de Lande-Blanche :
"Universis Christi fidelibus presentibus et futuris presentes litteras inspecturis frater Guido de Tullo, domoram milicie Templi in Aquitania preceptor humilis, salutem in Domino.
Noveritis quod nos, de assensu et concilio fratrum nostrorum fratris Stephani preceptoris de Codria, fratris Hamelini preceptoris de Landa Alba, et plurium aliorum, recepimus in custodia et defensione domus nostre Guillelmum Acelini cum omnibus rebus ad ipsum pertinentibus, ab omni servicio et costuma liberum et inimunem, ita tamen quod domni nostræ de Lauda Alba annuatim tenetur reddere quatuor solidos censuales monete currentis, apud Lesessars ad lestum sanctorurn omnium persolvendos...
Actum apud Laudam Album, anno Dni m°cc° xxii mens maii".
[3] "L'an de grâce 1343, le samedi second jour d'aoust, messire Olivier, sire de Clisson, chevalier, prisonnier ès-Chastelet de Paris, pour plusieurs trahisons et autres crimes perpétrés par lui contre le roi et la couronne de France, et alliances qu'il avait faites au roi d'Angleterre, ennemi du roi et du royaume de France, si comme ledit messire Olivier le reconnut et confessa, fut, par jugement du roi donné à Orléans, traîné du Chastelet de Paris aux halles en Champeaux, et là eut, sur un échaffaud, la tête coupée. Et puis de là fut le corps traîné au gibet de Paris et pendu au plus haut estage. Et la tête fust envoyée à Nantes, en Bretaigne, pour estre mise en une hante (manche, bâton, perche) sur la porte de Sauvetout, comme de traistre et cuidant de trahir la cité de Nantes, à perpétuelle mémoire".
On trouve, en outre, dans les manuscrits de la Bibliothèque nationale, à Paris, une miniature qui représente cette exécution avec toute sa couleur locale ; voir le n° 2643, fol. 126.
[4] Lettres de Philippe de Valois, du 26 novembre 1343, par lesquelles il nomme Pierre Dulac, sénéchal de Belleville et de Clisson. (Archives du château de Nantes, armoire O, cassette E, n° 16).
[5] Messe et messel sont consonnants et logiques, tandis que messe et messel sont présentent une anomalie. Pour être conséquent, il faudrait dire soit messe et messel, comme dans l'ancien langage français, soit misse et missel.
[6] On verra plus loin l'horrible mort du curé de Belleville (note du chroniqueur).
[7] Chanoine Aubert : Histoire du Poitou, tome VI, p. 192 et 193.
[8] Nous n'avons pu vérifier s'il s'agit bien du seigneur de Belleville, près Montaigu.
[9] Son frère aîné s’appelait Maurice. Il eut encore un autre frère du nom de Girard.
Voir à la fin de cet article un acte de donation de son père.
[10] Cartulaire n° XLI. Maurice de Belleville, avant perdu ses droits sur la Seigneurie de la Roche-sur-Yon, concède cependant en pure et perpétuelle aumône à Dieu, à la bienheureuse Marie et au prieuré un setier de seigle, à la mesure de Belleville, à percevoir dans son aire de Belleville, au temps de la moisson.
Fait et signé le vendredi d'avant les Rameaux 1292.
[11] Pour l’histoire de la famille Harpedane, l’auteur de la Chronique paroissiale de Belleville a, semble-t-il, utilisé pour partie des dictionnaires de la noblesse et des ouvrages généalogiques qui font souvent confusion, pour les années de la fin du XIVe siècle, entre Jean II Harpedane et son père Jean Ier. Du 1er mars 1365 au 25 juin 1389, ce dernier, fut sénéchal d’Aquitaine au service de Richard II d’Angleterre, petit-fils d’Edouard III pour lequel il avait commencé à servir ; et c’est vers cette date qu’il dut mourir, sa seconde femme, Catherine Sénéchal de Mortemer, s’étant remariée avant le 30 juin 1390 avec Etienne d’Aventois. Ce n’est qu’avec Jean II d’Harpedane, son fils, que les seigneurs de Belleville, de Montaigu et autres lieux, prèteront hommage Charles VI. A une époque où, dans la Bretagne voisine, les Penthièvre et les Montfort se disputaient la succession ducale, le va et vient des allégeances montre combien la guerre appelée plus tard Guerre de Cent ans fut au moins autant une querelle féodale et dynastique entre Valois et Plantagenêt pour le trône de France, qu’une opposition nationale entre Français et Anglais. (M.M.)
[12] Voici une note très curieuse communiquée par M. Casimir Puichaud sur Marguerite de Valois :
"Isabeau de Bavière, femme de Charles VI, avait acheté l'hôtel Barbotte ; c'était son petit séjour (nom que l'on donnait aux petits hôtels qu'avaient les princes aux portes de Paris). Elle s'y retirait ordinairement pendant les accès de la maladie de ce prince. L'abbé de Choisy rapporte, d'après un ancien manuscrit, que comme il était parfois furieux et qu'il frappait à droite et à gauche, sans destination, et qu'il y avait à craindre que la nuit il ne blessât la Reine, on lui amenait tous les soirs la fille d’un marchand de chevaux qui était fort belle, qui fut bien récompensée, qu’on appelait communément et publiquement la "Petite Reine" et dont il eut une fille (Marguerite de Valois) à qui l'on donna en dot, en la mariant a sire de Harpedanne, la terre de Belleville en Poitou (V. Sainte-Foix, Essais Historiques sur Paris, t. I, p. 52 et 53).
[13] Cette famille avait acheté la seigneurie de Belleville. Voir plus haut l'article de M. Dugast-Matifeux.
[14] "Charette et la Guerre de Vendée", Revue du Bas-Poitou, 1901, p. 361 et suiv.
[15] Il semblerait qu'il n'y avait qu'un seul temple servant pour les Protestants des deux endroits. Cependant, s'il n'y en avait un à Belleville, comme nous le verrons plus loin, il y en avait eu aussi un autre au Poiré, ainsi que nous l'apprend M. Aillery, et il y avait été construit, à la suite des guerres de religion.
[16] Ce Lande blanche était un fief et château joignant le bourg de Fougeré. Ce n'était donc pas celui de Belleville.
[17] Religion prétendue reformée.
[18] François Mauclerc, seigneur de la Muzanchère et baron de Baussais, ancien de l'église de la Jaudonnière, député du Poitou au Synode d'Alençon, en 1637, et chargé des affaires des églises de la province lors de la vérification de leurs titres, en 1665.
Gilbert, d'abord pasteur à Melle, puis à Paris. Après la Révocation, il se retira en Suisse (Lièvre, Histoire des protestants).
[19] Julien Collardeau (Ve de nom), sieur de Villepréau, procureur du roi au siège de Fontenay, vers 1662, élu conseiller du corps de ville, le 22 février 1670 (Dreux-Duradier : Histoire littéraire du Poitou).
[20] Saint-Denis-la Chevasse. La commission, venant de Saint-Fulgent, y était arrivée la veille au soir et avait logé au logis des Trois pilliers.
[21] Je dois remercier tout spécialement M. l’abbé Fillaudeau, curé de Belleville, et M. le docteur Duplessis, qui m’ont fait visiter l’ancien quartier général de Charette, aujourd’hui pavillon de débarras, et l'ancienne caserne de ses gardes, aujourd'hui l'habitation de M. le docteur Duplessis. Les écuries ont été détruites, la prairie qui s'étendait entre le pavillon et la caserne est maintenant un joli jardin, les prés qui l'avoisinent n'ont plus de marécages et les bois coupés ont été transformés en terres à céréales. Le souvenir de Charette reste bien vivace, car la propriété de M. Duplessis est encore parfois désignée sous le nom de "Maison de Charette", et, chose plus singulière, les maisons qui l'entourent portent encore le nom de "Palais royal".
[22] "Au combat de Challans, une femme en amazone, raconte Boussard, vêtue de nankin, s'est fait remarquer (Mme du Fief) ; elle caracolait a la tête des Brigands". (Savary, t. III, p. 547).
Depuis la bataille de Torfou, elle combattait ordinairement sous les ordres de Charette. Plus tard, elle reçut la croix de Saint-Louis, en récompense de ses services militaires.
[23] Charette menait joyeuse vie, cherchant toute sorte de plaisirs. Au milieu de jeunes dames légères, que la passion de la gloire et des combats avait attirées près de lui, il passait ses journées en courses d'agrément, en parties bruyantes, en festins, en bals magnifiques. Ce n'était plus un chef terrible, mais un gentilhomme, subjugué par des charmes puissants et victime d'un luxe aussi frivole qu'effréné (Deniau, t. 4, p. 479).
[24] Chassin, Vendée patriote, t. IV, p. 508.
[25] Témoignage du P. Deval, missionnaire de Saint-Laurent, parent du ménétrier, et rapporté par M. Deniau (t. 4, p. 478).
[26] Savary, t. IV, p. 38-40.
[27] Note anonyme, aux Archives nationales, A F, 269*.
[28] Cité par M. Deniau, t. 5, p. 259-260.
[29] Le bon général de Couëtus l'avait personnellement présentée à Gaudin, en lui écrivant, Charette, de son côté, avait fait afficher son offre d'échange de prisonniers.
[30] Cet officier fut même destitué. Le Bouvier-Desmortiers, t. II, p. 401.
[31] Le Bouvier-Desmortiers, loc. cit. − Voir aussi Beauchamps, t, III, p. 259 : "Les barbaries exercées à Vannes m'ont porté d'en user ainsi pour en prévenir le retour, s'il est possible. Je déclare au reste que je sacrifierai homme pour homme, toutes les fois qu'on égorgera un émigré devenu prisonnier".
[32] Documents inédits concernant la Vendée militaire, par Dom Chamard, p. 40-41.
[33] Voir Deniau, t. V, p. 423.
[34] Le district de la Roche-sur-Yon comprenait neuf cantons, lesquels avaient pour chefs-lieux : la Roche-sur-Yon, Aizenay, le Poiré-sur-Vie, Belleville, les Essarts, Bournezeau, Mareuil, le Tablier et la Chaize-le-Vicomte.
[35] Chassin, Préparation à la guerre de Vendée, tome I, p. 179.
[36] Un autre prêtre, titulaire de la chapelle de Saint-Nicolas-en-Belleville, refusa aussi lui, en cette qualité, le serment constitutionnel : c'était M. François-Pierre de Rieussec, chanoine et vicaire général de Luçon (Clergé Vendéen victime de la Révolution, par M. Baraud, tome I, p. 353).
[37] Cette famille était alliée à la famille de M. Servant.
[38] Dans la notice sur la chapelle de Notre-Dame des Lucs, par M. l'abbé Bart, on cite encore comme victime de la Révolution :
Agathe Arnaud, âgée de quatre ans, née à Belleville, et massacrée aux Lucs, avec quatre-vingt-douze autres personnes, le 28 février 1794.
[39] Le Clergé vendéen victime la Révolution, t.2, p. 116.
[40] Paroisses, églises et cures de Montaigu, p. 122.
◄ page précédente : Belleville Haut ▲ page suivante : la vieille église romane de Belleville ►