le moulin de la Pierre blanche
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Un moulin à vent multiséculaire
Le "moulin de la Pierre blanche", aujourd’hui disparu, s’élevait dans un endroit isolé, à plus d’un kilomètre du village le plus proche. La tradition locale tant sur Beaufou que sur le Poiré, prétendait qu’il devait son nom à une grosse pierre de couleur claire se trouvant en cet endroit et qui fut cassée pour empierrer un chemin voisin. Cependant, assimiler cette pierre à un ancien mégalithe est hasardeux.
Ce moulin existait déjà au milieu du XVIIIe siècle et il était accompagné d’un petit "toit" bâti sur la parcelle contiguë alors en lande1. Comme souvent pour les moulins, il appartenait conjointement à plusieurs propriétaires. Ainsi en 1836, trois meuniers se le partageaient pour un tiers chacun : Etienne Gillaizeau et Louis Gillaizeau de "la Grande Roulière", et Joseph Jauffrit de "la Prévisière"1. Quand il fut démoli en 1909, il appartenait à Victor Bouhier, maçon au "Cerny"2.
Photo du "moulin de la Pierre blanche", prise par Pierre Tenailleau (1871-1938)
très probablement entre 1897 et 19003.
En 1989, En 1989 son ancien emplacement était marqué par un rond de chardons, et on pouvait encore voir de vagues restes de murs de son petit "toit", ainsi que quelques morceaux de meule3. Vingt-cinq ans plus tard, il n’en restait plus rien.
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Le dramatique orage du 29 juillet 1901
On racontait autrefois une histoire curieuse sur ce "moulin de la Pierre blanche". Le lundi 29 juillet 1901 le meunier s’activait avec des compagnons de travail dans un champ voisin, quand sur les midis, un orage éclata les obligea à s’y réfugier. Alors qu’ils pensaient y être à l’abri la foudre tomba sur le moulin tuant sur le coup deux d’entre eux dont Pierre Guillet (né en 1866), de "la Grande Roulière". Il avait sur ses genoux le plus jeune de ses enfants âgé de deux ans, Ed-mond, qui n’eut aucun mal4.
Le passage du temps et la disparition des vestiges du moulin ont fait que cette histoire et son souvenir avait fini par confiner à la légende, mais elle se trouve confirmée et précisée par la presse de l’époque, ainsi dans le Journal des Sables et Courrier de la Vendée réunis du jeudi 1er août 1901 qui fait la relation suivante du drame :
"L’orage de lundi a causé une véritable catastrophe près du Poiré-sur-Vie. La foudre est tombée sur un moulin situé à la Pierre blanche, commune du Poiré-sur-Vie. Treize personnes à la récolte d’un champ de blé, qui avaient été surprises par l’orage s’étaient réfugiées dans ce moulin. Les treize personnes ont été couchées à terre par un coup de tonnerre épouvantable. Au bout de quelques instants huit personnes seulement ont pu se relever saines et sauves. Elles constatèrent immédiatement que la foudre avait tué deux de leurs compagnons dont l’un, nommé Guillet Jean, cultivateur, âgé de 36 ans, laisse une veuve et quatre enfants en bas-âge. Trois autres avaient été grièvement blessées. Ce terrible accident a jeté la consternation dans la région où les victimes étaient très estimées."5
Les articles des autres journaux comportent de sensibles variantes et sont d’une exactitude laissant parfois à désirer, quant au récit de l’événement, et aux lieux et personnes concernées. Ainsi dans l’Étoile de la Vendée du 1er août :
"Lundi, pendant un violent orage, trois hommes ont été foudroyés [au Poiré-sur-Vie]. L’un d’eux prenait son repas dans un moulin, son enfant sur ses genoux. L’enfant n’a rien éprouvé. L’inhumation des victimes a eu lieu mardi soir à quatre heures."6
D’autres encore rapportent les brûlures causées par la foudre et l’état désespéré de M. Rocheteau qui mourra peu après, ou encore qu’un chien y avait aussi été foudroyé7…
Edmond Guillet, l’enfant qui avait miraculeusement échappé à la foudre, fut mobilisé en 1918 mais il survécut aussi à la guerre. Cependant, ayant été envoyé terminer ses obligations militaires au Maroc, il y mourut en septembre 1919 dans l’explosion d’un dépôt de munitions. Plus de 120 ans plus tard à "la Grande Roulière", ses arrière-petits-neveux ou nièces en conservaient le souvenir8.
Le drame du "moulin de la Pierre blanche",
relaté dans l’Etoile de la Vendée du dimanche 4 août 19017.
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Du moulin aux éoliennes
C’est son site venté car légèrement prééminent, qui avait justifié l’implantation du "moulin de la Pierre blanche" dans un endroit loin de toute zone habitée. Cet isolement, a été un argument déterminant lorsqu’il a été question autour de l’année 2000 de créer un "parc éolien" dans la commune voisine de Beaufou. Et alors qu’il ne reste du moulin que son souvenir - et encore ! - son emplacement se trouve être dans l’alignement des six éoliennes qui ont été dressées entre 2003 et 2007 et dont la présence occupe désormais le paysage local.
En haut, les éoliennes de Beaufou vues le 16 septembre 2016 de l’emplacement du "moulin de la Pierre blanche" ;
en bas vues le 25 décembre 2022 de "Pont-Charette"9 (photos : Dominique Mignet),
et leur localisation sur un extrait de carte de l’IGN (environ 4,5 x 1,6 km).
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Notes, sources et références…
(sauf mentions contraires, illustrations et texte sont dus à M. Mignet)
1 Minutes notariales d’A.-Ph. Danyau (Arch. dép. de la Vendée : 3 E 24 36-1), et plans et registres du cadastre de 1836 du Poiré (Arch. dép. de la Vendée : 3 P 178). A la fin du XVIIe siècle on trouve des Gillaizeau "fariniers" à "la Grande Roulière", ainsi qu’en 2023 et onze générations plus tard, de leurs descendants, mais depuis plus d’un siècle ceux-ci ont abandonné l'activité de meunier.
2 Voir l’étude exhaustive et inédite de Vincent (Eugène-Marie) : les Moulins du Poiré-sur-Vie, 2012, 42 p.
3 Photo sur plaque de verre, 13 x 18 cm, prise vers 1900 par Pierre Tenailleau (collection particulière). En 2016-2017, des enquêtes et repérages sur le terrain ont permis de préciser leurs localisations et leurs datations.
4 Entretiens durant les années 1970 avec Mme Marie-Antoinette Remaud (1908-2001), cafetière dans le bourg du Poiré-sur-Vie et de qui provient la photo prise autour de 1900 de ce moulin. Une enquête généalogique a permis de rétablir les souvenirs devenus incertains d’Edmond Morinière (1926-2019) de "la Grande Roulière", et petit-fils par sa mère, de Pierre Guillet (dit "Jean" Guillet à l’état civil), une des victimes de cet orage du 29 juillet 1901..
5 Dans le Journal des Sables et Courrier de la Vendée réunis, du jeudi 1er août 1901 (Arch. dép. de la Vendée : 4 Num 41/49). L’état civil du Poiré, donne le nom de l’autre mort qui était Pierre Loué, âgé de 62 ans, veuf et vivant seul à "la Grande Roulière".
6 Cf. l’Avenir et l’Indicateur de la Vendée, du jeudi 1er août 1901, et le même entrefilet dans l’Étoile de la Vendée du même jour (Arch. dép. de la Vendée : 4 Num 366/17 et 4 Num 365/17), qui précise le nom de M. Rocheteau qui décédera quelques jours plus tard de ses blessures.
7 Cf. Le Patriote de la Vendée ainsi que l’Étoile de la Vendée du dimanche 4 août 1901 (Arch. dép. de la Vendée : 4 Num 376/5 et 4 Num 365/17).
8 Parmi Parmi ses petits-neveux : Edmond Morinière (1926-2019), qui avait hérité de son prénom et de son souvenir. Entretiens de 2016 à 2022 avec Jean-Luc Perrin de "la Métairie" et de "la Prunelle", et les familles Gillaizeau et Morinière de "la Grande Roulière"…
9 Ce nom, "Pont-Charette", est écrit au singulier, sans article et avec un seul "r" sur les états de sections cadastraux de 1836 ; il a été depuis modifié en "les Ponts Charrette" au pluriel, avec un article et avec deux "r" sur les cartes de l’IGN.
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