Saint-Joseph
rappel : avant toute utilisation d'extraits ou d'illustrations de ces pages, vous devez en demander l'autorisation à leur auteur.
1900-2000 : mise en place et fin d’une nouvelle métairie
Quand il fut créé, autour de 19001, le village de "Saint-Joseph" n’était constitué que d’une petite métairie. Son fondateur lui donna son prénom, porté traditionnellement de père en fils dans sa famille. En 2020, la population du Poiré ayant été multipliée par 2,5 en 50 ans, "Saint-Joseph" se trouvait englobé dans la croissance du bourg.
Entourés de tiretés jaunes, les emplacements des terres dépendant en 1950 de "Saint-Joseph",
sur une vue aérienne vers 2010 (environ : 1800 x 1720 m) ;
et, vers cette même date, ses bâtiments d’origine
avec la niche abritant une statue de son saint patron.
Les bâtiments de "Saint-Joseph" avaient été édifiés près de l’emplacement de ceux d’une ancienne métairie ruinée par les troupes républicaines un siècle plus tôt et qui avaient ensuite disparu : la métairie de "la Brachetière". Ce nom fut redonné vers 1845 à des maisons nouvelles, qui s’édifiaient un peu plus loin le long de la route sortant du Poiré pour aller à Mouilleron.
Quant aux terres de "Saint-Joseph", elles ne recouvraient que partiellement les 230,5 boisselées (26,3 ha) qui composaient l’ancienne métairie en 17902. En 1950, ses environ 15 hectares étaient formés par 19 champs (12,25 ha), 5 prés (2,35 ha) et 1 vigne (0,4 ha), certaines de ces parcelles étant situées à 1,5 km du siège de l’exploitation3. Elles portaient, entre autres, les noms de "la tonnelle", "le beignon d’homme", "le bézier", "la mazure"4…
A cette date, Fernand Pelé (né en 1904) était l’exploitant de la ferme de "Saint-Joseph", et il se lança, sur 15 ares, dans la culture très contrôlée du tabac, qui jusqu’alors avait été réservée par l’État aux agriculteurs du sud-ouest de la France. A cette époque d’intense exode rural, cette culture constitua un apport de revenus essentiels pour les exploitations de petites taille mais disposant d’une main d’œuvre familiale abondante, ainsi que pour bien des artisans5.
En 1970, Yves Pelé (né en 1932) avait succédé à son père, et cultivait désormais 19 ha, dont 18 ha en métayage.
Puis l’urbanisation grignota la plupart des terres de "Saint-Joseph", et son activité agricole dut être déplacée sur "la Gendronnière" voisine. En 2019 Dany Pelé (né en 1960), qui avait succédé à ses père et grand-père, cessa la culture du tabac. Il fut le dernier à l’avoir pratiquée sur la commune du Poiré qui, en 1959, avait compté jusqu’à 163 "planteurs de tabac".
"Saint-Joseph" et les terres en dépendant en 1950, sur une vue aérienne du 1er juillet 1945
montrant un parcellaire n’ayant guère bougé depuis au moins un siècle et demi
(environ : 1800 x 1720 m)
En 2023, les anciens bâtiments de "Saint-Joseph" étaient noyés dans les constructions nouvelles, et avaient été intégrés au Foyer d'Accueil Médicalisé (F.A.M.) créé là en 2009. Celui-ci était un des 18 mis en place depuis 1988 en Vendée. Une trentaine d’adultes autistes y résidaient en 20196. Le nom de l’ancien village est rappelé maintenant par celui de la "rue Saint-Joseph".
------------------------------
Les battages, moment fort du calendrier agricole d’autrefois
Le mois de juillet était et est le mois des moissons (des "métives", en parler local). C’était un moment majeur dans l’activité agricole, l’aboutissement de près d’une année d’efforts. Avant la généralisation des moissonneuses-batteuses vers 1970, elles se clôturaient par "les battages". Le blé coupé et mis en gerbes dans les champs, ayant été rapporté et rassemblé en un gerbier dans la cour de la ferme, et il fallait une vingtaine d’hommes venus des villages voisins pour alimenter la machine à battre7, former le pailler et monter les sacs de blé dans le grenier.
C’était un moment d’intense travail en commun. En 1961, le souvenir de cette journée à "Saint-Joseph" a été rapporté par Armand Mignet, qui faisait de la photo à cette époque.
Les battages à "Saint-Joseph" durant l’été 1961.
(batteuse de l’entreprise Piveteau du bourg du Poiré, photos de la collection Jean Mignet8)
--------------------
Le rappel d’une précédente métairie disparue
La métairie de "la Brachetière", sur l’emplacement des bâtiments de laquelle furent édifiés ceux de "Saint-Joseph", était l’une des dix-sept métairies que la famille des Guinebaud de la Millière possédaient sur le Poiré avant la Révolution. Ceux-ci ayant émigré, leurs biens furent mis sous séquestre et, comme le seront les trente et une autres métairies devenues aussi biens nationaux sur la commune, ils furent mis en vente par blocs après inventaires et estimations.
Mais celles des Guinebaud ne quittèrent pas la famille, car un de ceux-ci resté en France, réussit à les racheter7. Cependant, entre 1808 et 1811, Isaac-Florent Guinebaud, de retour d’émigration, fut amené à vendre l’essentiel de la métairie de "la Brachetière" partagé en dix-huit lots. Puis, en octobre 1825, il vendit les quatre dernières parcelles de terres ainsi que l’emplacement des bâtiments, mis en si mauvais état par la Révolution qu’en 1836 ils avaient disparu4. Les divers acheteurs furent, pour la plupart, des habitants du bourg du Poiré tout proche9.
------------------------
Notes, sources et références...
(sauf mentions contraires, illustrations et texte sont dus à M. Mignet)
1 Listes nominatives des recensements de 1851 à 1911 (Arch. dép. de la Vendée : 6 M 280).
2 Estimations des biens nationaux du canton du Poiré (Arch. dép. de la Vendée : 1 Q 212).
3 Acte notarié du 25 octobre 1951 (étude de Jacques Dugast, le Poiré-sur-Vie). La constitution de cette métairie fut le résultat d’achats génération après génération et parcelle après parcelle. D’où la dispersion de celles-ci.
4 Plan cadastral de 1836 du Poiré (Arch. dép. de la Vendée : 3P 178). Les noms de parcelles apportent des renseignements pouvant présenter un certain intérêt, même si la signification de "bézier" ou de "beignon d’homme" est au mieux hypothétique. Ainsi une parcelle appelée "mazure" correspondait à un champ séchant, sableux et peu profond. Le nom de "tonnelle" pouvait rappeler l’ancienne présence d’un moulin à vent, au temps où ceux-ci étaient constitués d’une sorte de cage en bois tournant autour d’un pivot enserré dans petite tour en pierre (dite "tonnelle") et qui étaient nommés en d’autres lieux "moulins turquois". En 1836, tout proche de la terre appelée ici "la tonnelle", existait le "moulin de la Chapelle" ou "moulin Ardente", qui sera démoli en 1866 (cf. E.-M. Vincent, les Moulins du Poiré-sur-Vie, 2012, inédit, 42 p.).
5 Cf. Mignet (M.), Culture et planteurs de tabac au Poiré-sur-Vie, mémoire inédit, IGARUN, 1971, 45 p. En 1959, le Poiré avait compté 163 "planteurs de tabac", un record pour une commune en France. Avec des surfaces allant de 10 ares à 66 ares, ces "planteurs" cultivaient au total 33,07 ha de tabac. Curieusement, les exigences culturales imposées à ceux de Vendée étaient nettement plus contraignantes que celles demandées à ceux du Bassin aquitain, berceau de cette culture en France, nécessitant beaucoup plus de temps, et mobilisant enfants et personnes âgées de la famille en tant que main d’œuvre bénévole…
6 Par rapport à son nombre d’habitants, la Vendée était en 2020 un des trois départements ayant le plus de "Foyers d'Accueil Médicalisé" pour adultes handicapés (F.A.M.). Leurs créations se sont faites à partir de 1988, dans le cadre de la politique sociale du Conseil général de la Vendée de l’époque.
7 Les machines à battre apparaissent en Vendée dès la fin des années 1840 : sur les cent premières batteuses (à vapeur) vendues par l’entreprise Renaud et Lotz de Nantes avant 1853, 31 l'ont été en Vendée. Au Poiré, Ferdinand Arnaud, qui était cabaretier, se lança dans cette activité, mais vers 1860 la presse annonce que, suite à sa faillite, ses machines vont être vendues aux enchères sur la place Napoléon à la Roche.
8 Sur divers aspects de la vie agricole au Poiré-sur-Vie entre 1871 et 1961, dont à "Saint-Joseph", voir de Jean Mignet : Le Poiré-sur-Vie, 1871-2021, 2021, p. 172 à 181.
9 Adjudications des biens nationaux du canton du Poiré (Arch. dép. de la Vendée : 1 Q 250 et 270) et minutes des notaires du Poiré du début du XIXe siècle (Arch. dép. de la Vendée : 3 E 24 / 43 à 3 E 24 / 60).
avant toute utilisation d'extraits ou d'illustrations de ces pages, vous devez en demander l'autorisation à leur auteur
◄ page précédente : Saint-Georges Haut ▲ page suivante : Saint-Louis ►