Chronique paroissiale de Saint-Etienne-du-Bois
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Le texte qui suit et qui porte sur Saint-Etienne-du-Bois est la transcription d’un manuscrit rédigé par Eugène Aillery, et qui fait partie de ce qui est connu sous le nom de "Chroniques paroissiales du diocèse de Luçon".
Eugène Aillery (1806-1869) était l’un des fils de Louis Aillery qui, venant de Nantes, avait fondé en 1807 à Montaigu un collège-pensionnat succédant à celui qui y existait avant la Révolution. S’étant dirigé vers la prêtrise, il exerça son ministère à Noirmoutier (1829) puis à Corpe (1832). En 1851, il devint "prêtre habitué" à Fontenay-le-Comte (c’est-à-dire "prêtre retraité et résidant à…"). Il s’y consacra à des recherches sur l’histoire religieuse du diocèse de Luçon. A sa mort, il a laissé d’importants manuscrits sur l’histoire des différentes paroisses du diocèse, dont celui-ci sur Saint-Etienne-du-Bois.
Vingt ans plus tard, en 1889, l’évêché de Luçon décida d’actualiser ces écrits et de les faire paraître sous forme de cahiers mensuels d’une vingtaine de pages, distribués aux abonnés de la "Semaine catholique du diocèse de Luçon", sous le titre de "Chroniques paroissiales". Les premières furent celles des cantons (ou "doyennés" dans la terminologie religieuse de l’époque) de la Roche-sur-Yon, Chantonnay, les Essarts, Saint-Fulgent, les Herbiers et Mareuil, chacune des paroisses y étant traitée en quelques pages. A partir de cette date, la prise en main de la publication par Hippolyte Boutin (1851-1901) donna plus d’ampleur à leur contenu, et la part des textes dus à Eugène Aillery y devint marginale. Les "chroniques" des cantons de Montaigu, de Mortagne et le début de celles du Poiré (le Poiré, Aizenay, Beaufou), furent alors publiées. Puis, sous la direction de Julien Huet et jusqu’en 1918, ce seront la fin de celles du canton du Poiré, puis celles des cantons de Maillezais, de Rocheservière (celles-ci rédigées essentiellement par Alain de Goué) et de Fontenay-le-Comte. Après une interruption, la publication sera reprise, dans les années 1930, par Adolphe Poirier (aidés de Julien Rousseau) pour le canton de Beauvoir et, dans les années 1950, par Auguste Billaud pour celui de Pouzauges qui sera le dernier canton à être traité.
Pour les autres "chroniques paroissiales", il n’existe que les manuscrits rédigés sous le nom de "notices et monographies" par Eugène Aillery, dès les années 1850-1860 et peut-être commencés avant. C’est le cas de celle de Saint-Etienne-du-Bois, dont le début semble s’inspirer de J.-B. Ogée, et est suivi par une présentation de son église, puis de l’histoire de la chapelle de la Tullévrière, pour se terminer par un paragraphe sur la géographie locale. Les "Statistiques particulières", venant en complément, reprennent les chiffres du recensement de 1846 (ce qui est peut-être une indication quant à la date de rédaction) et le rapport des quatre grands impôts directs de l’époque : la contribution foncière, la contribution personnelle et mobilière, l’impôt sur les portes et fenêtres et la patente.
Cette paroisse a pour patron Saint-Etienne, diacre et martyr ; où on célèbre la fête le 3 du mois d’août. Pour la distinguer de ses homonymes, on a ajouté un surnom qui, sans doute, indiquait une position très boisée, quoique par suite de nombreux défrichements, cette paroisse ne soit pas aujourd’hui plus riche en bois que ses voisines.
L’origine de Saint-Etienne-du-Bois est des plus anciennes ; elle est antérieure à l’an 400 de J.-C. A cette époque, l’empire des maîtres du monde commençait à crouler. Le faible Honorius pouvait à peine tenir les rênes qui s’échappaient de ses mains. Déjà Conan premier roi des Bretons s’est déclaré indépendant. Guittard, dernier roi des Pictes, s’est réfugié chez les Agésinates, dont la capitale est Aizenay, et il se défend tantôt contre les Romains, tantôt contre les Wisigoths.
Une alliance entre ces deux derniers peuples oblige Honorius à prêter main forte aux Wisigoths pour s’emparer de l’Aquitaine, et par suite une garnison romaine vient occuper les lieux où sont aujourd’hui les bourgs de Clisson, Mallièvre, Mortagne, Gétigné, Cugand, Boussay, Legé, Bois-de-Cené, Saint-Etienne-du-Bois et Tiffauges. Honorius, pour les attacher au sol qu’ils doivent défendre, leur donne dans ces stations des établissements fixes et des franchises telles qu’ils s’y trouvent bientôt colons plus que guerriers hostiles ; et bientôt encore la fusion de ces peuples et des natifs s’opère à la faveur de la religion chrétienne qu’ils combattaient presque tous. C’est de là que date cette contrée nommée les Marches, où, à l’exemption des droits avait attiré une population empressée de jouir des immunités reconnues successivement par nos Rois. Ce pays se fait encore remarquer par sa culture et l’abondance de ses produits.
Malgré l’ancienneté du bourg de Saint-Etienne, aucun titre ne vient prouver la date certaine de la construction de l’église ; car le caractère de son architecture ne peut la faire remonter au-delà du XIe ou XIIe siècle. C’est un monument de style lombard connu sous le nom de basilique ; trois portes latérales donnent entrée dans trois nefs séparées les unes des autres par trois piliers massifs. Ces piliers ont une autre destination que celle de soutenir l’édifice ; on y remarque divers tableaux représentant la conversion de saint Paul, une descente de croix et saint Roch. Il est à regretter que deux autels aient été accolés aux deux piliers qui avoisinent le chœur : ils sont placés contre toutes les règles de l’architecture qui veut que tout pilier soit isolé ; tout autre place eût été plus convenable, ou du moins un tableau de sainte Anne et l’autre de saint Sébastien, auxquels ont été dédiés ces autels, eussent été suffisants, et il y aurait eu dans ce monument plus de sévérité et d’harmonie1.
Le sanctuaire est riche ; on y voit les statues des quatre évangélistes de grandeur naturelle ; l’autel est en marbre ainsi que les quatre colonnes qui soutiennent le baldaquin. Un tableau représente en grand le martyr de saint Etienne. Dans l’intérieur du sanctuaire, à gauche en entrant, se trouve l’autel de la Sainte Vierge avec un tableau du Rosaire et une statue de saint Joseph ; du côté opposé est l’autel consacré aux saint apôtres saint Jacques et saint Philippe.
La fabrique possède une parcelle de la vraie Croix et une relique de son saint patron. La tour du clocher s’élève en maçonnerie à une hauteur de 14 mètres, elle est surmontée d’une flèche d’environ 21 mètres. Cet édifice devint en 1793 la proie des flammes, il n’en resta que les murs. A une petite distance du bourg une petite chapelle qui ne s’est pas relevée de ses ruines, eut le même sort. La maison curiale est un vieux manoir qui tombe en ruine ; il sert d’habitation au curé et à son vicaire ; le premier reçoit comme supplément à son traitement une collecte de blé.
En 1794, Mr [Ténèbre] alors curé de Croix-de-Vie, et qui depuis la Révolution est mort curé de Vairé, vint se réfugier dans le village de la Tullévrière où il fut recueilli avec empressement ; il s’inspira aux habitants l’idée de construire une petite chapelle qui lui permît de célébrer décemment le sacrifice de la messe. A l’instant tous mettent la main à l’œuvre et la chapelle est achevée à la lueur des flammes qui réduisaient en cendres l’église de Saint-Etienne et celle de Legé. Mr de Beauregard qui devint plus tard évêque d’Orléans et qui était caché dans la paroisse de Beaufou, vint la bénir et la placer sous l’invocation de Marie protectrice des martyrs du Bas-Poitou.
Dieu récompensa le courage et la piété des bons habitants de ce village en les préservant du pillage et de l’incendie dont furent victimes tous les autres villages de la paroisse. Cette chapelle bâtie à la hâte allait s’écrouler quand les habitants en construisirent une autre, plus grande et plus convenable, qui fut bénite le 19 mai 1836 par Mgr Soyer, évêque de Luçon. Ce prélat, pour récompenser la piété généreuse de ces bonnes âmes, leur accorda de conserver le Saint Sacrement dans leur chapelle.
Nous avons fait remarquer que les terres de cette contrée étaient très bien ciltivées et nous en avons donné la raison. La population toujours croissante et le nombre de pauvres ne permettent pas de rien laisser inculte. Les bois du vieux château de Rochequaire dont on voit encore les ruines sont défrichés peu à peu et font place à la culture du froment. La ressource principale consiste rn blé et en bestiaux ; on récolte du vin pour la consommation, on regrette cependant que le plan en soit meilleur ; situé sur des coteaux favorables à la culture on pourrait espérer de meilleurs produits.
Une petite rivière connue sous le no de Boulogne, parce qu’elle passe dans un village de ce no, traverse la commune dans sa plus grande étendue et va se jeter dans la Vie. Elle borde de riantes prairies qui fournissent le foin nécessaire à la localité.
1 Le Pouillé de l’Eglise de France dressé pour l’année 1648 annonce que la cure de Saint-Etienne-du-Bois était à la nomination de Luçon.
L'église de Saint-Etienne-du-Bois à l'époque ou Eugène Aillery écrivait sa "Chronique",
quelque 50 ans avant la construction de l'église actuelle, en 1900-1904.
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