Pont-de-Vie
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p a g e e n c o u r s d e r é a l i s a t i o n
(sans date d'échéance prévue)
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"Pont-de-Vie"1 est essentiellement constitué des restes d’un château en contrebas duquel coule "la Vie". En dépit de son nom, il n’y a pas eu là de pont sur cette rivière avant le milieu du XIXe siècle. Jusqu’alors celle-ci se franchissait par un gué qui était bordé par "une planche" c’est-à-dire une passerelle pour les piétons que par extension on appelait parfois "pont". Quant à l’étymologie de ce nom on évoquera, avec les plus grandes réserves, certains philologues2 qui proposent de voir dans ce type de toponyme une subsistance de la préposition latine "pone" signifiant "derrière"3, que l’on retrouve au Moyen Age dans d’autres noms de lieux commençant par "pont" ou par "point", avec le sens de "borne, limite, frontière"4... Ainsi pourrait-on voir ici un souvenir de la limite entre la "principauté" féodale des Lucs au nord et celle de la Roche-sur-Yon au sud.
"Pont-de-Vie" et ses abords sur le plan cadastral de 1836,
et sur des vues aériennes du 16 mars 2005 (environ 770 x 565 m) et du 3 septembre 2014.
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Le logis de "Pont-de-Vie" à la fin du XVIIIe siècle
Avant la fin du XVIIIe siècle, ce que l’on connaît du logis de "Pont-de-Vie" se limite à ce que peuvent suggérer les éléments archéologiques et architecturaux qui en reste. Cependant, ayant été séquestré comme bien national sous la Révolution, en novembre 1798 il a été l’objet d’une estimation qui en a fait la description suivante...
"La maison principale consistant en une salle, salon plusieurs chambres basses et hautes, office, caves, boulangeries, deux pavillons, plusieurs greniers, écuries, latrine, toit à volailles, le tout se joignant (une cour au milieu des dits bâtiments) de longueur cent soixante-six pieds, de largeur cent dix-huit pieds, et de hauteur quarante pieds au principal corps de la maison, et environ vingt-cinq pieds ailleurs, tenant de toute part aux terres de la maison et à une basse-cour.
- Plus une basse-cour, de longueur cent vingt pieds, de largeur cent soixante pieds, avec une fuye dans la dite basse-cour.
- Plus les toiteries à bestiaux, la grange, une chapelle, un pressoir et plusieurs toits à cochons, les dits toits et chapelle se joignant à l’exception des toits à cochon, de hauteur quinze pieds, de longueur cent vingt pieds et de largeur vingt pieds, tenant de toute de toute part aux terres et à la basse-cour de la maison.
- Plus un chenil avec une petite cour et quatre chambres, le tout se joignant, de longueur quarante-cinq pieds, de largeur quarante pieds, et de hauteur dix pieds, tenant de toute part aux terres et jardin de la maison, tous les dits bâtiments en partie brûlés, et le reste en assez mauvais état.
- Plus le jardin médiocrement planté avec un affiage au bout, enfermée de murailles en assez bon état, contenant environ dix boisselées, tenant du levant au chemin du Poiré au Luc, des autres parts aux terres de la maison.
- Plus un parc entouré de murailles en mauvais état contenant vingt boisselées, tenant du levant au chemin du Poiré au Luc, du midi au chemin du Poiré à Beaufou, du couchant idem et du nord aux terres de la maison.
- Plus un étang au bas du parc d’environ soixante pieds de longueur sur quarante-cinq de largeur.
- Plus les deux pièces des glacières contenant quinze boisselées, tenant de toute part aux terres de la maison."
...suivent l’énumération des terres dépendant directement du logis de "Pont-de-Vie" et de sa borderie, puis celle des métairies constituant son amenage et de leurs terres : "la Nillière", "le Moulin", "la Maison Neuve", auxquelles s’ajoutaient "le Puy Chabot" et "la Faucherie"5. Pour mémoire, un pied valait 0,325 m, et une boisselée 0,114 ha au Poiré soit 1 ha pour 8,77 boisselées.
"Pont-de-Vie" au début du XXIe siècle selon la carte dite classique de l’I.G.N.
et les éléments disparus du château à la fin du XVIIIe siècle.
(environ 270 x 125 m)
Ces bâtiments et les parcelles voisines s’identifient plus ou moins facilement sur le plan cadastral levé en 1835-1836 et sur lequel sont distingués ceux étant en ruine et ceux restés en bon état ou ayant été relevés, certains ayant pu disparaître. On y voit qu’en 1798 les dimensions des terres semblent avoir été estimées approximativement, étant sous-évaluées en moyenne de 40 à 50 %, tandis que celles des bâtiments subsistants sont conformes à la réalité de 2025.
Ainsi la cour du château, avec les constructions l’entourant, mesure bien 52 x 38 m (130 x 118 pieds). Et le corps de logis actuel, dont une pierre porte la date de 1732, a bien une hauteur de l’ordre de 8,12 m (25 pieds), celui-ci ayant une pierre portant la date de 1732. Mais le bâtiment au nord de la cour, bordé par une terrasse (50 x 20 m) surplombant "la Vie", ne fut pas reconstruit, et c’est lui qui devait avoir la hauteur de 13 m (40 pieds) donnée dans l’estimation. Vu son orientation et sa localisation, il constituait la l’élément principal et le plus ancien du château, et en 2025, il en restait encore des soubassements. Enfin, de l’autre côté de la cour le pavillon d’entrée et les dépendances lui faisant suite sont à dater du XVIe siècle, comme le montrent les blasons sculptés du pavillon et les ouvertures géminées ou de forme ovale voisines qui ont leurs pendants au "Fief" ou à "la Millière".
Le nom des "pièces des glacières" bordant à l’ouest le château, se rencontre aussi près d’autres logis, tel celui de "Rochequairie" à Saint-Etienne-du-Bois. Des constructions enterrées destinées à conserver pour l’été la glace qu’on y stockait l’hiver, et qui n’apparaissent pas avant la seconde moitié du XVIIe siècle. Aucune trace n’a été trouvée de restes de ce type d’édifice, mais une rumeur ancienne prétend qu’un souterrain existerait en cet endroit6.
La présence de l’étang voisin est similaire à celle des étangs destinés à élever des poissons, que l’on trouve ou que l’on trouvait près d’autres ex-logis au Poiré : au "Fief", à "la Rételière", à "l’Eraudière", à "la Millière"... Leur création pourrait remonter au Moyen Age.
Quant à la chapelle, détruite par la Révolution, il n’en restait au début du XXe siècle "qu’un bénitier et une piscine [...] visibles dans la maison du fermier Gauvrit, dont un des murs semble avoir appartenu jadis à la chapelle même"7.
Cette description de "Pont-de-Vie" faite par ses estimateurs de 1798 et disant que "tous les dits bâtiments [sont] en partie brûlés, et le reste en assez mauvais état", montre combien les passages des troupes révolutionnaires avaient pu mettre à mal la commune du Poiré. Cependant le 13 mai 1797 la municipalité cantonale venant d’être élue avait envisagé d’y déplacer ses réunions, son administration ainsi que la justice de paix, tant l’état des locaux servant de "maison commune" dans le bourg y était encore plus dégradé8.
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Les "seigneurs de Pont-de-Vie" jusqu’à leur disparition
Contrairement à ceux d’autres villages du Poiré, le nom de "Pont-de-Vie" n’apparaît pas dans les Hommages d’Alphonse comte de Poitiers, frère du roi de France Louis IX / saint Louis, dans lequel sont récapitulés en 1260 ses domaines et ses droits. Ce n’est que vers 1345 qu’on rencontre un Pierre de Pont-de-Vie, et que l’on suit au hasard d’actes matrimoniaux ses successeurs jusqu’à ce que leur héritage au Poiré soit séquestré et vendu comme biens nationaux aux plus offrants sous la Révolution.
Cela peut donner comme "seigneurs de Pont-de-Vie", la liste plus ou moins complète et incertaine suivante9...
Pierre de PONT-de-VIE (cité v.1345)
Jean de PONT-de-VIE (cité vers 1400)
Aymery de PONT-de-VIE (cité en 1408)
Jean de PONT-de-VIE (cité vers 1454)
Jacques de PONT-de-VIE (cité en 1489)
Pierre de PONT-de-VIE (cité en 1526)
? d’AULNIS marié avec ? de PONT-de-VIE
Guyon d’AULNIS (cité en 1474)
Louis d’ AULNIS (cité en 1526)
Charles d’AULNIS (se marie vers 1564 avec Renée de Montausier)
Madeleine d’AULNIS (se marie vers 1590 avec François des NOUES)
Françoise des NOUES (se marie en 1603 avec Jean PIERRES)
François PIERRES (se marie en 1630 avec Marie Chappot)
François PIERRES (1636- ? - se marie en 1666 Hélène Foucher)
Louis PIERRES (se marie en 1699 avec Marie Charlotte Cherbonnel)
Louise PIERRES (se marie en 1723 avec Jacques de LA SAYETTE)
Honoré de LA SAYETTE (1729-1814)
Antoine-Marie de LA SAYETTE (v.1759- ? )
Au XVe siècle un seigneur de "Pont-de-Vie", Vincent de Pont-de-Vie (n’apparaissant pas dans la liste ci-dessus), voulut contester au prieur de Saint-Lienne de la Roche-sur-Yon, le droit que celui-ci avait de mettre dans la paroisse du Poiré "un homme clerc et lettré pour tenir les écoles en icelle". Mais une sentence fut rendue, à Paris, en 1448, qui donna main levée des empêchements de Vincent de Pont-de-Vie et maintint le prieur dans tous ses droits, relativement à l'école du Poiré7... Une sentence témoignant aussi de l’existence "d’écoles" au Poiré à cette date, mais sans que l’on sache depuis quand.
Les d’Aulnis, comme toutes les familles nobles du Poiré à l’exception des Marchand, rejoignirent la Réforme protestante dans la seconde moitié du XVIe siècle.
Les Pierres qui sont devenus "seigneurs de Pont-de-Vie" au début du XVIIe siècle, venaient du Plessis-Baudouin en Anjou, prétendant à une ancienneté suivie depuis les années 900, et ayant ses racines dans le nord de l’Angleterre.
Les La Sayette furent les derniers "seigneurs de Pont-de-Vie", qu’ils ne possédèrent que le temps de deux générations.
I L L U S T R A T I O N à V E N I R
Les blasons illustrant le pavillon de l’entrée de "Pont-de-Vie",
.provenant des familles y ayant vécu, et faisant dater ce pavillon du XVIe siècle.
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La fin du domaine de "Pont-de-Vie"
Les La Sayette ne semblent pas avoir beaucoup vécu à "Pont-de-Vie". Honoré de La Sayette (1729-1814) et son fils Antoine-Marie (né vers 1759) émigrèrent au début de la Révolution et combattirent en 1792 dans l’armée de Condé. Ils ont eu une descendance par les filles qui, par les de Clervaux puis les de Sanzac existe toujours au XXIe siècle sur Bordeaux et dans le Périgord.
En tant que possession d’émigrés leurs biens furent séquestrés puis mis en vente comme biens nationaux. Cependant lorsqu’en 1802 une loi d’amnistie permit à Antoine-Marie de La Sayette de rentrer en France, il put récupérer les métairies du "Puy-Chabot" et de "la Faucherie" pas encore vendues, mais pas le reste du domaine qui avait été adjugé trois ans plus tôt.
En effet, le 7 juin 1799 (9 pluviôse VII) le château de "Pont-de-Vie", ses bois et sa borderie, avaient été adjugés à Joseph Philippe Tireau qui avait acheté le même jour la métairie de "la Maison Neuve". Joseph Gibotteau, autre bourgeois nanti du Poiré, avait acheté celle du "Moulin" tandis que celle de "la Nilière" était achetée par les frères Louis, Mathurin et Antoine Crucy, architectes à Nantes. Ces derniers s’étaient lancés dans des opérations spéculatives à grande échelle d’achats de biens nationaux destinés à être revendus avec bénéfice seulement quelques années plus tard. Ce fut le cas pour "la Nilière" qu’ils revendirent peu après aux Tireau10.
"Pont-de-Vie" et ses métairies au moment de leur dispersion en tant que biens nationaux,
sur la carte dite "de l’état major", vers 1840, les routes vers Palluau et vers Aizenay venant d’être tracées,
celle vers les Lucs s’arrêtant à "Pont-de-Vie", pour se poursuivre ensuite en chemin.
(environ : 3,500 x 2,250 km)
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"Pont-de-Vie" de la résistance à l’occupation
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Le synode diocésain du 4 août 1795
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Les mythiques trésors et légendes de "Pont-de-Vie"
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Notes, sources et références...
(sauf mentions contraires, illustrations et texte sont dus à M. Mignet)
1 On dit "Pont-de-Vie", sans article, et non "le Pont de Vie", comme non loin de là on dit "Pont-Martin" et non "le Pont-Martin", ou ailleurs "Pont-l’Évêque" ou "Pont-Saint-Esprit"...
2 Pons (Jacques), "Promenade philologique…", Mémoires de l’académie d’Orléans, 1998, p. 149-153.
3 Tacite, Historiarum, Lib. III, LXXXV / Histoires, livre 3, chapitre 85 : "Ce fut un hideux spectacle de le voir (Vitellius) ‘vinctæ pone tergum manus’ (mains liées derrière le dos) […]".
4 Godefroy (Frédéric), Dictionnaire de l'ancien français, t. 6, p. 253.
5 Procès-verbaux d’estimations et d’adjudication des biens nationaux, sur la commune du Poiré (Arch. dép. de la Vendée : 1 Q 212, etc.). Voir aussi le contenu des actes notariés des années suivantes.
6 Entretiens en 1970-1980 d’E.-M. Vincent avec Armand Friconneau (1921-1998), celui-ci rapportant aussi que dans les années 1950 à proximité immédiate de "Pont-de-Vie", un effondrement s’était produit dans un champ de l’autre côté de la route du Poiré aux Lucs. Ce qui ne pouvait avoir été causé que par la présence d’un souterrain en cet endroit. Dans les années 1810, Frédéric Lemot fit construire une "glacière" toujours existante, près de son château de la Garenne de Gétigné, près de Clisson.
7 Boutin (Hippolyte), Chronique paroissiale du doyenné du Poiré, 1900-1901, p. 62-64. On sait qu’en 1375 il existait déjà "des écoles" au Poiré, mais sans qu’on sache depuis quand.
8 Délibérations de la municipalité cantonale du Poiré du 24 floréal an 5e / 13 mai 1797 (Arch. dép. de la Vendée : L-1238). Voir aussi le contenu des actes notariés de la même époque et des années suivantes.
9 Raigniac (Guy de), De châteaux en logis itinéraires des familles de la Vendée, t. 4, 1992, p. 88-91.
10 Sur le Poiré, les biens nationaux...
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