Gustave MIGNEN (1848-1921)
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Gustave Mignen est né le vendredi 8 décembre 18481 à Montaigu, où son père, Martin (1817-1865), était depuis 1844 le directeur de l’école-pensionnat de garçons2.
C’était en cette année 1848 à Montaigu, une période d’opposition quasi unanime au régime politique précédemment en place : les nombreux monarchistes légitimistes du secteur se félicitaient de la chute du régime abhorré de Louis-Philippe, "roi usurpateur"3, tandis que Martin Mignen annonçait à ses amis "la naissance d’un bon petit républicain"4. Mais quatre ans plus tard, la Seconde République sera remplacée par le Second Empire de Napoléon III auquel Armand Trastour, le très républicain maire du Montaigu d’alors, se ralliera avec empressement. Plus tard, sous la IIIe République5, Gustave Mignen marquera sa solidarité avec les municipalités républicaines successives de Montaigu, mais il ne semble pas avoir nourri beaucoup d’illusions quant au au décalage entre les grands principes proclamés par ces républicains locaux, et leurs comportements au quotidien de notables installés.
Après le lycée de la Roche-sur-Yon, il avait poursuivi des études de médecine à Nantes et il soutint sa thèse de doctorat le 23 décembre 1873 à Paris : Essai sur les vertiges au point de vue du diagnostic. En 1875, il revint à Montaigu où il s’installa comme médecin, rue de Tiffauges.
En 1881, à une époque où la France vivait encore sur des principes sociaux issus de la Révolution et de la loi Le Chapelier aboutissant à une limitation drastique des libertés syndicales, Gustave Mignen fut à l'origine de la création de l'Union des Syndicats médicaux de France. Après lui, ses fils, petit-fils, arrière-petit-fils, arrière-arrière-petit-fils… se sont eux aussi orientés vers la médecine4.
Président de l’Union des Syndicats médicaux de France,
Président du Syndicat des Médecins de la Vendée,
Président de la Société d’Émulation de la Vendée,
le Docteur Gustave Mignen vers 1910, et sa thèse de doctorat.
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Les centres d’intérêt de Gustave Mignen ne s’arrêtaient cependant pas à son domaine professionnel. Très tôt, il se pencha sur l’archéologie et l’histoire locales, alors domaines réservés de "l’érudit" et "homme de lettres" montacutain, Charles Dugast-Matifeux (1812-1894). En 1882, Gustave Mignen devint membre de la Société d’émulation de la Vendée, et il en sera élu président en 1909. Il le restera jusqu’à sa mort, le dimanche 13 novembre 1921. Trois jours plus tard, la cérémonie de son inhumation dans le cimetière de Montaigu sera accompagnée par de nombreux discours de ses pairs.
En 1900, il publia en tiré à part du Bulletin de la Société d’Emulation de la Vendée : Paroisses, églises et cures de Montaigu (Bas-Poitou) (200 p.), qu’il envisageait comme un élément d’un travail beaucoup plus ambitieux : une "Histoire de la baronnie de Montaigu". Son projet n’aboutira pas. Cependant dans les années suivantes et toujours dans la même revue, il fera paraître plusieurs articles sur ce thème : en 1902, Les Religieuses Fontevristes de Notre-Dame de Saint-Sauveur à Montaigu (220 p.) ; en 1904, Chartes de Fondations pour l’Aumônerie-Hôpital de Montaigu (38 p.) ; en 1907, Les Maîtresses et Maîtres d’école de Montaigu avant et après 1789 (80 p.).
En 1910, les inondations qui avaient eu lieu en février dans la région parisienne, entraînèrent un mouvement de solidarité nationale qui se traduisit à Montaigu, le dimanche 13 mars, par une "Fête de Bienfaisance" au profit des sinistrés. A cette occasion Gustave Mignen donna une conférence sur "L’Ancien Montaigu" dont le manuscrit, inédit à ce jour, a été conservé et constitue pour l’histoire de Montaigu à la fois une base et un bilan. Ce sera là sa dernière œuvre historique. Après sa mort, le "Fonds Gustave Mignen", contenant les brouillons de ses recherches passées et en cours, fut légué aux Archives départementales de la Vendée6.
L’affichette annonçant la Fête de bienfaisance du 13 mars 1910 ;
et la conférence du Docteur Gustave Mignen
sur "l’Ancien Montaigu".
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A Montaigu et en Vendée, parmi les férus d'histoire locale, Gustave Mignen a fait partie de la génération succédant à celle des "amateurs distingués" du XIXe siècle, tels Benjamin Fillon (1819-1881) ou Charles Dugast-Matifeux (1812-1894) dont le sérieux, sinon l’honnêteté, des travaux est aujourd’hui fortement mis en doute7. En 1900, dans l’introduction de sa première publication, Gustave Mignen rendit cependant un hom-mage convenu à ce dernier, tout en soulignant et déplorant qu’il n’avait pas été possible de "[…] retirer des travaux de M. Dugast-Matifeux tout le bénéfice que nous en espérions. Bien des notes, consignées sur de petits carrés de papier, sur des bandes de journaux, et même sur du papier déjà imprimé, qui étaient, pour leur auteur, autant d'indications précieuses, autant de points de repère importants, n'ont plus eu pour nous la précision désirable".
Dans le domaine de la recherche historique, ce changement de génération se traduisit par l’adoption de démarches intellectuelles plus rigoureuses : élimination des partis pris, en particulier partisans, vérification des sources, recours systématique aux documents originaux et non aux écrits et témoignages de seconde main ou plus, capacité à comprendre les individus et les évènements... Ses méthodes scientifiques de travail ont donné des résultats plus fiables que ceux de ses prédécesseurs, et ont fait de Gustave Mignen le premier véritable historien de Montaigu7.
En 2003, son souvenir a été réactivé par une exposition organisée en son hommage du 2 au 11 mai, au château des Rochettes de Montaigu, sous le titre : "l’Archéologie du XIXe siècle à nos jours à travers l’œuvre du docteur Mignen".
Extrait du journal Ouest-France du lundi 5 mai 2003
(article et photographie de Jean Roche)
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Notes, sources et références…
(sauf mentions contraires, illustrations et texte sont dus à M. Mignet)
1 Arch. dép. de la Vendée, état civil de Montaigu : AD 2 E 146/9 (vue 38).
2 Cf. dans Les maîtresses et maîtres d'école de Montaigu avant et depuis 1789, de Gustave Mignen, 1907, les pages 70-72.
3 Ainsi pour la majorité des habitants de la commune de Saint-Hilaire-de-Loulay dont le maire de l'époque, D. Nacquard, avait accueilli à la Preuille la duchesse de Berry lors de son équipée de 1832, ou pour la majorité des habitants des communes des Brouzils, de la Boissière-de-Montaigu, de Saint-Georges-de-Montaigu, etc. qui abritèrent jusqu'en 1833 les "Bons enfants" de la "Bande à Depienne", des rebelles légitimistes.
4 Témoignage familial, rapporté en 2011 par le docteur Jean-Claude Mignen, petit-fils de Gustave Mignen, et à qui l’on doit la photo de son aïeul.
5 Lors de la proclamtion du Second Empire, Armand Trastour (1802-1875) se rallia à Napoléon III cce qui lui permit de rester maire de Montaigu à une époque où cette charge y était conférée par le préfet du département. La défaite de Sedan le 2 septembre 1870 fit qu’il fut contraint de démissionner de cette fonction tout en restant conseiller municipal, tandis que son cousin Olivier Fayau (1829-1900) le remplaçait à la tête de la commune (cf. les Délibérations du conseil municipal de Montaigu du 7 septembre 1870 - Arch. dép. de la Vendée : 146 D2). Parmi ceux qui l’avaient toujours soutenu et qui le lâchèrent alors se trouvait Charles Dugast-Matifeux qui se souvint opportunément qu’autrefois il s’était dit républicain. Celui-ci étant connu comme ayant été un "érudit local" et surtout pour avoir été un collectionneur de documents historiques, désormais consultables à la Bibliothèque municipale de Nantes.
6 Fonds Gustave Mignen (Arch. dép. de la Vendée : 36 J).
7 Sur les façons de "fabriquer l’histoire" de certains "érudits locaux" ayant précédés Gustave Mignen, et leurs contestations actuelles, voir les les Bulletins de la Société préhistorique française, t. 71, 1974, p. 229, et t. 77, 1980, p. 43 ; la Revue de l'Art, n°78, 1987, p. 84-85 ; ou encore La Vendée préhistorique, de Bertrand Poissonnier, 1997, p. 132. Parmi ces "érudits locaux" aujourd’hui controversés on compte en particulier Charles Dugast-Matifeux (1812-1894) de Montaigu, Benjamin Fillon (1819-1881) de Fontenay-le-Comte, ou leur émule Marcel Baudoin (1860-1941) de Croix-de-Vie...
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