l'église Saint-Sauveur de Rocheservière : restauration et mise en valeur
rappel : avant toute utilisation d'extraits ou d'illustrations de ces pages, vous devez en demander l'autorisation à leur auteur.
L'église Saint-Sauveur de Rocheservière fut la moins endommagée des églises de Rocheservière et des paroisses voisines durant la période révolutionnaire. Ce qu'il en reste aujourd'hui correspond à peu près au chœur primitif, qui était précédé par une nef unique terminée par un clocher. Trois grands vitraux éclairaient cette nef, deux à gauche et un à droite. Le chœur avait des ouvertures plus étroites, et une vieille tour carrée, ancien clocher, était adossée à son côté Est.
La façade de l'église Saint-Sauveur en cours de restauration, début mars 2010
avec, en arrière plan, l'église Notre-Dame de l'Assomption.
Un nouveau clocher fut construit vers 1840. Il était composé d'une tour carrée surmontée d'une flèche à huit pans, couverte d'ardoises. A la base s'ouvrait un vestibule où pendaient les cordes des cloches. Il fut détruit après 1850 et les matériaux utilisés pour la construction de l'église paroissiale actuelle. La plus grande partie de la nef fut abattue vers 1860 et le reste utilisé comme chapelle par la communauté de sœurs de Mormaison qui tenait l'école contiguë. Par la suite, complètement sécularisé, le bâtiment fut abandonné ou utilisé pour des usages divers, ainsi pendant quelques années comme foyer de jeunes.
En 1837 : l'église Saint-Sauveur avec son cimetière et son calvaire
sur le premier plan cadastral (extrait de la section B2) ;
superposé en vert, ce qu'il en restait au début du XXIe siècle.
L'année 2010 a été celle du lancement de l'aménagement et de la mise en valeur de cette "chapelle" Saint-Sauveur de Rocheservière. Cette ancienne église abrite désormais l'œuvre unique de Nicole Renard : "l'Évangile selon Saint-Jean", une broderie de 140 mètres de long en sept rouleaux de vingt mètres, qui retranscrit et illustre tous les textes du Nouveau Testament attribués à Saint Jean.
Quatre vues de l'environnement de l'église Saint-Sauveur au début de l'année 2010.
le Retable de la Transfiguration de l'église Saint-Sauveur
Au travers de toutes ces vicissitudes, l'église Saint-Sauveur avait conservé un retable en pierre, qui avait été inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques. Daté du XVII ou du XVIIIe siècle, il est composé de trois parties : à gauche une statue de Marie avec Jésus enfant, à droite une statue de Joseph, et au centre, une scène en bas relief relatant la Transfiguration1, épisode bien connu de la vie du Christ :
"Accompagné de Pierre, Jésus s'éloigna sur une haute montagne. Il y avait aussi Jacques et son frère Jean. Sous leurs yeux il se transforma. Son visage devint aussi radieux que le soleil, et ses vêtements étaient d'une blancheur éblouissante. Moïse leur apparut, Elie à ses côtés. Tous deux conversaient avec Jésus. Pierre lui dit: "Seigneur, il est bien que nous soyons ici. Laisse-moi dresser trois tentes: l'une pour toi, l'une pour Moïse et l'autre pour Élie". Il n'avait pas fini de parler qu'une ombre lumineuse les couvrit. Une voix sortit de la nuée: "Celui-ci est mon Fils et je l'aime. C'est en lui que j'ai trouvé toute ma joie. Écoutez-le..." (Matthieu XVII, 1-7)
La partie centrale du retable en reproduit la scène : au milieu le Christ auréolé de gloire, les bras tendus vers le ciel, est entouré de Moïse (tenant les tables de la Loi) et d'Élie (la tablette de ses prophéties sur la hanche). Au sommet de la scène, dans les nuées, tout près du Christ, Dieu le père proclame la divinité de son fils. Sur la montagne, les trois apôtres : Pierre (au centre), Jacques (à gauche) et Jean (à droite), sont saisis de frayeur. Le tabernacle s'inscrit dans le bas de la montagne. Des tentures partent d'une couronne, constituant ainsi l'exposition qui surmonte le tabernacle. La Transfiguration, manifestation de la divinité du Christ, se trouve liée avec l'Eucharistie : c'est le même Christ que les apôtres adoraient hier sur la montagne et que les Chrétiens adorent aujourd'hui dans l'Eucharistie.2
Partie centrale du retable de l'église Saint-Sauveur
(photo Claude Arrignon).
La restauration du retable, a été faite sur la base de son état présumé au XVIIIe siècle. Mais, une forte détérioration ne permettant pas de retrouver exactement les couleurs chatoyantes originelles des personnages, ceux-ci ont été laissés en blanc, contrairement à ce qui a été fait dans d’autres cas similaires en Vendée (le Poiré-sur-Vie, Landeronde…).
le Projet de "Mise en valeur d'un écrin patrimonial : la chapelle Saint-Sauveur"
En 2010, le projet d'aménagement pour la mise en valeur de la chapelle Saint-Sauveur de Rocheservière avait un double objectif : sauver un bâtiment en grand danger, et accueillir "l'Évangile selon Saint Jean", œuvre monumentale de Nicole Renard, constituée de sept rouleaux de vingt mètres chacun. La maîtrise d'ouvrage a été de la responsabilité de la Communauté de Communes de Rocheservière, et le financement a été pris en charge à 80 % par le Conseil Général de la Vendée et à 20 % par la Communauté de Communes. La restauration du retable, pièce majeure de l'ancienne église étant pris en charge par le Fond Local d'Action Culturelle du Puy du Fou.
.Plan l'aménagement de l'église Saint-Sauveur et de ses abords
(architecte : Florence Limousin).
Un scénario en trois pôles :
- la mise en valeur du retable de la Transfiguration,
- un centre d'interprétation sur les retables de Vendée constitué dans l'avant-nef par "une proposition de parcours audio-visuel didactique des retables majeurs du département", tels ceux de Bouin, Saint-Hilaire-de-Riez, le Poiré-sur-Vie, Sainte-Ursule...
- l'exposition de l'œuvre de Nicole Renard transcrivant et illustrant les textes du Nouveau Testament attribués à Saint Jean, et connue sous le nom de broderies de "l'Évangile selon Saint Jean".
La première proposition pour la mise en place de l'exposition permanente de la broderie "l'Évangile selon Saint Jean".
Le travail de muséographie a été pris en charge par les services du Patrimoine du Conseil Général de la Vendée, sous la responsabilité de M. Jean-François Bessonnet, Mme Florence Limousin en étant l'architecte3.
Nicole Renard et "l'Évangile selon Saint Jean"
il y a ceux qui ont vu l'oeuvre de Nicole Renard, et qui la trouve extraordinaire... et il y en a d'autres qui, avant de l'avoir vu, ont a priori sur elle un avis condescendant du simple fait de son sujet. Néanmoins, les commentaires lus dans la presse sont plutôt : "nous sommes émus et impressionnés...", "une œuvre époustouflante...", "une merveille de plus...", "une œuvre bouleversante et unique...", "ce chef d'œuvre [qui] rappelle [...] les fresques des églises romanes ou les vitraux narratifs et sublimes des cathédrales...", "l'œuvre de tous les superlatifs...".
Nicole Renard à "la Ronde" de Saint-André-Treize-Voies
(photo Ouest-France, 2010).
Effectivement, la réalisation de cette broderie qui mesure 140 mètres de long (soit 7 rouleaux de 20 mètres) a pris 24 ans, de 1974 à 1998, soit 48 000 heures de travail, et a nécessité 80 km de fil. 131 588 lettres ont été brodées, un simple "i" demandant 60 points, pour un seul visage du Christ : 28 teintes et 350 heures, avec 1 mois d'écritures pour 4 mois de broderies... et l'utilisation du "point de bourdon", du "point passé empiétant", du "point de satin"... un autre monde pour l'admirateur étranger à cet univers artisanal et artistique.
Le détail de la broderie des lettres
Nicole Renard est née en 1930 dans une famille de fourreurs de Paris. Dès son jeune âge, elle est initiée à la couture, au tricot et à la broderie. Puis elle est devenue hôtelière à Eygalières en Provence, dans les Alpilles. Elle eut l'occasion d'y rencontrer les Bobin, qui étaient à la tête d'un atelier d'art spécialisé dans la restauration et le nettoyage de tapis et tapisseries anciens à Montrouge, et qui travaillaient pour le Louvre et les plus grands musées patrimoniaux. Au vu de ses talents en broderie, ils créèrent autour d'elle un nouvel atelier à Eygalières. C'est là qu'elle participa plus tard à la restauration de tapisseries comme l'Apocalypse d'Angers.
De 1974 à 1998, elle poursuivit parallèlement une œuvre personnelle, la mise broderie de les textes de Saint Jean (son évangile, en quatre rouleaux de vingt mètres, ses trois épitres en un demi rouleau, l'Apocalypse, en deux rouleaux et demi).
Achevé, ce travail a été l'objet de plusieurs expositions, en particulier à Angers aux côtés de sa célèbre tapisserie, ou à Paris, en février 2009, à la Grande Halle de la Villette.
Donné au Conseil Général de la Vendée, il est l'objet d'une exposition permanente dans la chapelle Saint-Sauveur de Rocheservière, depuis sa restauration.
La Multiplication des pains - la Résurrection de Lazare
Le Tombeau vide - Saint Jean
"Je n'ai rien créé, le texte est celui de la Bible de Jérusalem, et les images sont inspirées d'icônes, de peintures, d'émaux ou de mosaïques".
"Cette œuvre, je l'ai faite dans le cadre d'une démarche spirituelle. Et si après l'avoir finie on m'avait demandé de la brûler, je l'aurais fait. C'est cependant pour moi une grande joie de savoir qu'elle ornera les murs de la chapelle Saint-Sauveur de Rocheservière".
"Je rêve que mon œuvre brodée soit découverte et que chacun y trouve plaisir, réconfort et joie".
Nicole Renard - 2009.
Saint Jean dictant l'Apocalypse à son disciple Prochore.
En octobre 2012, Nicole Renard a fait paraître sur son engagement et sa passion, le livre "Jean – Patience et prière" (éditions singulières, 160 p. 150 illustrations).
--------------------
1 Cf. Matthieu XVII, 1-13 - Marc IX, 2-12 - Luc IX, 28-36.
2 Lorvoire (Jean-Claude), Retables baroques de Vendée - XVIIe-XVIIIe siècles, 1981, p. 136.
3 Pour la visite, l'art des retables, la broderie de Nicole Renard, les activités et expositions temporaires, de Saint-Sauveur... consulter le site de Saint-Sauveur. .
Et plus particulièrement sur les retables de Vendée, voir le guide réalisé par Isabelle Sachot et Julien Boureau : Fééries baroques, expression d’une foi, objets de tous les soins, les retables de Vendée se révèlent comme des murs d’images propres à susciter l’émotion, la contemplation voire la stupeur, 2013, 32 p.
--------------------
retour à
Rocheservière
◄ page précédente : les 4 anciennes églises de Rocheservière Haut ▲ page suivante : l'église Notre-Dame de l'Assomption de Rocheservière ►